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Ballet Royal du Cambodge, sous la direction de la Princesse Bopha Devi et Nouth Narang. Mission de terrain. Photos
Mission de terrain effectuée en janvier 1994 pour le spectacle du 23 mars au 8 avril 1994 au Théâtre du Rond Point.
Ballet Royal du Cambodge, sous la direction de la Princesse Bopha Devi et Nouth Narang. Mission de terrain. Photos
Mission de terrain effectuée en janvier 1994 pour le spectacle du 23 mars au 8 avril 1994 au Théâtre du Rond Point.
Ballet Royal du Cambodge, sous la direction de la Princesse Bopha Devi et Nouth Narang. Mission de terrain. Photos
Mission de terrain effectuée en janvier 1994 pour le spectacle du 23 mars au 8 avril 1994 au Théâtre du Rond Point.
Cambodge. Ballet Royal. Affiche
23 mars - 08 avril 1994
Cambodge. Ballet Royal. Spectacle
23 mars au 8 avril 1994.
La danse du Naga, par Nouth Narang, Ministre de la culture.
Situé au coeur de l'Asie des moussons, le Cambodge est l'un des rares pays où la civilisation austro-asiatique survive encore avec un certain dynamisme. Depuis les premiers siècles de l'ère chrétienne, diverses pratiques rituelles et matérielles se sont développées au cours de l'histoire, mêlées à d'autres apports notamment indiens, formant la sève toujours renouvelée d'une civilisation qui caractérise toute l'Asie du sud-est péninsulaire et dont le Cambodge d'aujourd'hui est l'émanation : la civilisation môn-kher.
En effet, cette civilisation, conditionnée par le rythme binaire des saisons, s'articule autour d'un principe qu'inspire le dualisme cosmologique, pierre angulaire des mythes fondateurs de ces sociétés. C'est ainsi que s'est constituée la société khmère, reposant sur la complémentarité entre les éléments femelles et les éléments mâles, respectivement assimilés à l'eau et à la terre, et dont l'union se retrouve immortalisée en la personne du reptile totémique qu'est le naga.
Comme l'expression artistique n'est autre que la projection intime de la conscience collective de chacun, on comprend aisément l'omniprésence du naga dans le monde mythologique et artistique khmer. Ainsi, dans la danse, le mouvement ondulatoire ou spiraliforme constitue la trame fondamentale et essentielle de la khmérité, sans laquelle l'immortalité ne saurait être garantie à la société.
A partir de ce principe on distingue deux catégories de danse : la danse sacrée ou classique et la danse populaire.
La danse classique
L'appellation "danse sacrée" est plus appropriée car elle a pour fonction essentielle l'affirmation du pouvoir royal. Or les rois khmers sont les dieux sur terre, leur demeure n'est autre que la réplique exacte du palais céleste : danseurs et danseuses évoluent donc dans un monde céleste qui se caractérise par leur démarche, l'envol, et par les costumes et les coiffes réservés aux divinités. Les thèmes interprétés peuvent appartenir au théâtre épique (Râmâyana, Mahâbhârata') ou être simplement la transposition chorégraphique de gestes rituels, sociaux ou quotidiens.
La danse populaire
C'est l'expression d'un peuple en symbiose avec son monde du travail, ses croyances, ses relations quotidiennes au bien et au mal, ses jouissances et ses malheurs. On peut en distinguer deux types : les danses rituelles centrées sur le thème de la fécondité, de la fertilité et de la mort (Danse des b'ufs sauvages, Danse du Trott, Danse des Paons de Pursat, Danse du sacrifice du buffle') et les danses de divertissement remplissant une importante fonction sociale : travail, vie rurale, Nouvel An (en avril). Elles s'expriment sous la forme de cours d'amour, un peu comme les bals villageois d'Europe.
Nous espérons que ces danses aideront le public à mieux apprécier l'âme du peuple khmer, ce peuple qui a tant souffert et qui trouvera le chemin de la délivrance dans la compréhension et l'amitié des autres peuples.
La danse Khmère par Solange Thierry, anthropologue
Rares dans le monde sont les pays qui évoquent par leur seul nom l'image d'une danseuse. Et s'il est vrai, hélas, que d'autres images, cruelles et destructrices sont venues s'imposer dans des années de guerre et de malheur, il n'en est pas moins évident que l'art de la danse au Cambodge survit à toutes les tourmentes.
L'histoire l'atteste avec éclat : les monuments d'Angkor en effet font apparaître dès le neuvième siècle, à fleur de grès rose ou gris, des silhouettes féminines d'un charme singulier. Mi-femmes mi-êtres divins, elles avaient leurs répliques humaines à la Cour des rois bâtisseurs de la dynastie angkorienne. Une inscription épigraphique du temple de Lolei dit que le roi Indravarman offrit au dieu Shiva "des danseuses, chanteuses, musiciennes, affectées au service des prêtres, nommées au nombre de quarante-deux ; et au nombre de sept, des danseuses, chanteuses, musiciennes de deuxième ordre, affectées au service du public". Ce qui suppose une hiérarchie dans les rôles et donne à penser que les premières "étoiles" étaient plus proches du sacré que les derniers "sujets".
Nombreuses sont les évocations de la danse à travers la sculpture, la légende, l'épigraphie. La chorégraphie est inséparable de la vie du temple, c'est-à-dire aussi bien la tradition religieuse et rituelle que celle de la Cour et de celle du peuple qui peut assister aux fêtes. "Un grand nombre de belles danseuses, chanteuses, récitantes, musiciennes, joueuses de vina et d'autres instruments, habiles à frapper des cliquettes'" animaient les fastes angkoriens, et ne nous dit-on pas que le roi Yaçovarman lui-même, à la fin du neuvième siècle, "apprenait à danser aux princesses en leur donnant la mesure" et que "les filles des grands dansaient en sa présence" ? Le recensement du personnel nous donne le chiffre de six cent quinze danseuses'
Coiffées de tiares à triples pointes, chargées de bijoux ouvragés, les seins bombés et lisses, le sourire équivoque, en même temps êtres mythiques du Paradis d'Indra et ballerines de la Cour, elles sont souvent représentées les jambes doucement arquées et ployées, un pied reposant sur une fleur de lotus' Evolutions incontrôlables de l'autre monde ? Non pas : chorégraphie raffinée où la moindre inclinaison de la taille, le moindre repli des doigts ou tremblement du cou a son sens irréfutable.
Quant à l'origine de la danse cambodgienne, on peut l'envisager selon deux sources. L'une appartient au tréfonds autochtone, si l'on considère les danses populaires, celles des groupes ethniques de la forêt et des villages, connues d'ailleurs de tous les Cambodgiens. Elles consistent essentiellement en pantomimes de chasse et de pêche, de semailles et de moissons, en exorcismes ou "danses des esprits", en chant alternés ou "cours d'amour" auxquelles les villageois participent. Les plus célèbres de ce type de danses issues de la tradition "austro-asiatique" ou "môn-khère" sont la "danse des b'ufs sauvages" et surtout celle du Leng Trott dansée à l'occasion du Nouvel An khmer dans la région d'Angkor.
L'autre source, celle de la danse royale et classique illustrée par le Ballet Royal, se situe d'une manière lointaine dans la tradition indienne du langage par les gestes et les positions du corps, les mudra.
Les comparaisons entre ces techniques s'urs ont révélé des divergences d'interprétation, des modifications dans la pose pour une attitude désignée par un même terme. Le point précis où se dégage l'originalité cambodgienne, où se situe-t-il dans l'espace ? Est-ce le doigt retroussé en arrière, là où la danseuse indienne le maintient droit ? Le regard khmer immobile et comme visant l'au-delà, là où les yeux indiens roulent et se révulsent ? Ce qui demeure clair, c'est l'identité de la conception fondamentale de la danse, née d'une révélation divine, d'une "connaissance" surnaturelle. Pour les Cambodgiens, le Maître ou Génie de la Danse, Tep Robam, est encore honoré par un culte spécifique. Mais si l'Inde a transmis cet art par des traités techniques écrits, le Cambodge a connu une longue transmission orale et pratique, faite d'une continuité de répertoire et d'enseignement, prérogative des danseuses âgées qui apprennent aux plus jeunes tous les aspects de leurs rôles, ne se référant à aucune notation écrite.
Enfin, les emprunts et les échanges entre le Cambodge, l'Indonésie, le Laos, la Thaïlande, la Birmanie, ont créé une sorte d'aire culturelle de la danse en Asie du Sud-Est, où chaque pays met en valeur ses propres colorations, la brillance de ses parures et le rythme de ses pas. C'est du Cambodge que le Siam du quinzième siècle (qui ne s'appelait pas encore Thaïlande) a recueilli l'héritage du spectacle dansé, le façonnant par la suite selon son style, modifiant ses costumes, selon une évolution devenue commune aux deux pays. Toutefois, la « marque » khmère reste intensément sensible dans sa souplesse alanguie ou hiératique, comme teintée de la nostalgie d'un passé grandiose, de même que dans sa verve acrobatique, où la violence est, lorsqu'il s'agit des combats entre démons et singes, comme une forme de l'humour'
Ceux qui ont eu le privilège de contempler dans la salle de danse du Palais de Phnom-Penh ou devant le temple d'Angkor-Vat l'apparition des danseuses cambodgiennes, presque immobiles en début de ballet, dans leurs gangues de miroitements, de scintillements, expressives en leurs gestes savants hautement codifiés, doigts retroussés prolongés d'ongles immenses, genoux ployés, taille et cou doucement infléchis, ont à jamais inscrit dans leurs yeux et dans leur mémoire l'image de ballerines raffinées, comme surgies d'un autre monde.
Ces ballerines racontent une histoire par leurs gestes, mais elles font beaucoup plus que de mettre en scène un livret. Leurs rôles, qui ne sont pas interchangeables d'une danseuse à l'autre, les font représenter, au sens plein de "rendre présents", les héros de la légende et de l'épopée. Le spectacle est global, il implique la chorégraphie, la récitation chantée scandée par les cliquettes, la musique orchestrale. Et pendant le temps d'une représentation ' autrefois sept nuits lorsqu'il s'agissait du Râmâyana ' se trouvent actualisés les épisodes, incarnés les personnages, "évoqué" au sens magique le monde surnaturel. Comme l'écrivait Makhali-Phal dans son Chant de paix, "toutes les danseuses, celles qui miment les dieux, celles qui miment les rois, celles qui miment les ogres, celles qui miment les singes, celles qui miment les oiseaux" attirent sur la scène les êtres mythiques. Elles réalisent pour un temps la rencontre momentanée mais combien vivifiante du monde terrestre et du monde qui le dépasse.
La danse-pantomime "classique" est scandée par les chanteuses batteuses de cliquettes qui en récitent l'épisode dansé. Elle est accompagnée par les xylophones, les hautbois, les vièles, les tambours et les gongs. Le répertoire a toujours privilégié la version cambodgienne du Râmâyana, le Ream-Ker (en sanskrit Râmakîrti) c'est-à-dire "La gloire de Râma" dont le texte littéraire est découpé pour la scène. Mais il comporte aussi, rarement, un passage du Mahâbhârata et des légendes tirées du folklore local comme celle du Prince Ngos ou de la féerique Manohara, ou encore quelques exemples de pure chorégraphie comme la danse des Apsaras. Ces "livrets" paraissent appartenir à l'histoire littéraire orale et écrite, plus qu'à celle de l'art du spectacle ou de l'art sacré. Mais ici tout est lié, selon une conception globale, celle du spectacle total. Il suffit de contempler les gestes de l'offrande initiale, la salutation de louange et d'hommage au Maître de la Danse, pour comprendre qu'il y a là autre chose qu'un divertissement. Il suffit d'aborder les phases de l'apprentissage pour s'apercevoir qu'au-delà de la technique, la danse cambodgienne est une initiation. Le lien avec le sacré est évident : le rôle est une incarnation, le vêtement, cousu sur le corps, est une métamorphose.
Autrefois présentées toutes jeunes aux monitrices du Palais, les petites filles poudrées et fardées étaient soumises à l'approbation du souverain. Le jeudi est toujours le jour faste où commence l'apprentissage, car ce jour est placé sous la protection des Maîtres. Au Génie de la Danse sont offertes les bougies en cire d'abeille, les baguettes de parfum, les feuilles de bétel. Dans le bol d'eau sacralisée nagent les herbes et les fleurs d'aubergine destinées à faire obtenir le succès, à conserver la beauté, et un peu de cette eau est versée sur chaque tête. Le long entraînement scandé par la baguette de rotin comportera des années ' au moins dix ' d'exercices d'hyper-extension des bras, des doigts, des jambes, non seulement en vue d'un assouplissement toujours plus accompli, mais afin d'obtenir des gestes plus qu'humains.
Les coudes en dehors, les mains retournées, les jambes dans la position de « l'envol » ne relèvent pas de l'acrobatie gratuite mais de l'imitation des êtres de la légende. Au bout de son apprentissage, la danseuse sera experte aux combats qui se passent dans les nues, et la cadence des « fuites aériennes » l'aura transfigurée. Les rôles de singes et de démons, géants ou ogres, les yaks, auront transformé les agiles danseurs, les uns en bondissants et comiques petits habitants de la forêt, les autres en grands balourds manieurs de gourdins, dont le seul masque révèle qu'ils sont le parti des méchants.
La tradition classique n'accordait que des rôles féminins au Lokhon Boran ou théâtre ancien, et des rôles masculins au théâtre masqué, le Lokhon Khol. Aujourd'hui, singes et yaks sont des rôles masqués masculins dans la représentation du Ream-Ker.
Enfin l'apprentissage se termine par une cérémonie de clôture célébrée un jeudi, au cours de laquelle récitations, offrandes, musique, exercices de danse se succèdent, et où sont remis les coiffures, masques et attributs de chaque personnage. Etonnante célébration, où l'on peut admirer à travers l'encens et la lueur des bougies les tiares étincelantes des princes, les faces grimaçantes des ogres, les mufles guillerets des singes posés sur une estrade recouverte d'étoffe blanche, dominés par le masque-aux-dix-visages du roi des démons et la face étrange de l'Anachorète'
C'est merveille que de nos jours, dans un pays si meurtri, où beaucoup de jeunes n'ont plus accès à leur patrimoine culturel et où bien des maîtres et artistes ont disparu, la transmission ait survécu intacte, portée par quelques-uns, dans l'isolement et le dénuement : et voici les instruments de musique traditionnels reconstituant l'orchestre, les costumes brodés, pailletés, les masques façonnés, les diadèmes incrustés de pierres aux feux multicolores. Surtout, voici ressuscitée cette chorégraphie raffinée, sophistiquée, unique dans son langage du silence, dans son symbolisme des gestes et des poses. C'est la pantomime de l'irréel, où rien n'est exprimé selon des normes uniquement terrestres, c'est le jeu des équilibres difficiles où statique et dynamique s'opposent et se rejoignent, où mesures, soupirs et points d'orgue naissent du corps lui-même. Art savant, codifié, délicieusement concerté' Quintessence de la Danse.
Hommage à tous ceux qui gardent vivante cette fleur de l'art universel.
Les instruments de l'orchestre.
La danse classique khmère est accompagnée par un ensemble instrumental, le pinpeat, (prononcer « pinpît ») que l'on retrouve à quelques variantes près au Laos et en Thaïlande. L'ancienneté des instruments qui le composent est attestée par les représentations qui en sont données sur les bas-reliefs des temples d'Angkor datant du douzième siècle.
De même que le gamelan javanais et le gong balinais, le pinpeat témoigne de la prédilection particulière des civilisations de l'Asie du Sud-Est pour les percussions mélodiques, qu'il s'agisse de xylophones, de métallophones ou de carillons de gongs.
L'orchestre est conduit par le sampho, un tambour horizontal à deux peaux, qui indique les départs et les temps de repos et donne le rythme. Le sampho est secondé par deux gros tambours obliques, les skor thom, et des cymbales au son très aigu, les chhing.
Les instruments à percussion mélodiques sont de trois sortes :
-Les jeux de gongs kong thom et le kong touch, comprenant l'un dix-sept et l'autre seize petits gongs bulbés disposés horizontalement sur un cadre circulaire au milieu duquel s'assied l'instrumentiste. Le premier joue les sons graves et le second les sons aigus. Ces deux instruments jouent la mélodie principale qui est ornementée et variée par les xylophones.
-Les xylophones roneat ek et roneat thung, accordés à l'octave, comportent respectivement vingt-et-une et dix-sept lames de bambou ou de teck disposées selon un plan incurvé sur une caisse de résonance en forme de barque. La caisse est posée sur un pied.
-Le métallophone roneat dek comprend vingt-et-une lames de bronze. Son jeu suit fidèlement celui des jeux de gongs.
-Le hautbois pey âr apporte à l'ensemble sa sonorité lumineuse et deux chanteuses interprètent le livret.
De tradition plus tardive, l'ensemble mohori est spécialisé dans les musiques de divertissement, notamment les chants alternés aye-aye utilisés dans les « cours d'amour ». Il se compose généralement de vièles à deux cordes de tailles diverses, tro-ou, tro-chhê, tro-khmer, d'un luth chapey, d'une cithare takkhê, de flûtes, de xylophones roneat, de deux tambours et de cymbales.
Une renaissance, par Françoise Gründ, Directrice artistique, Maison des Cultures du Monde.
Le petit escalier raide débouche sur une terrasse dallée, entourée d'une balustrade. Les têtes touffues des manguiers et des frangipaniers cherchent à pénétrer dans la véranda couverte d'un toit pentu. Une vingtaine de gamines maquillées, lourds chignons sombres sur la nuque, graciles dans les soies drapées de leur costume d'entraînement, ne quittent pas des yeux une dame qui remue un doigt, puis l'autre, retourne ses phalanges, et étirant le bras dans un angle anormal place sa main en position de hameçon retourné. Les jeunes filles ' âgées environ de six à vingt ans ' reproduisent le mouvement tandis que tinte le son aigrelet d'un gong circulaire qui ne bat maintenant que pour rythmer l'exercice.
"Elles accrochent le ciel!" me souffle ma voisine, une chorégraphe d'une cinquantaine d'années, autrefois danseuse au palais royal. Il est vrai que le mouvement de mains retroussées vers l'arrière, d'orteils à angle droit par rapport au sol, de toits des pagodes en forme d'arcs ouverts, d'épaulettes de soldats divins sur les bas-reliefs des temples de pierre, reste une constante dans l'esthétique khmère. Des centaines d'autres signes codés existent et se manifestent particulièrement dans la danse royale.
Le destin de cette danse, à la fois sacrée et de cour, colle comme une seconde peau à l'histoire du Cambodge.
Depuis des millénaires, de délicates beautés dansent pour le souverain et ses hôtes, aussi bien que dans les pagodes au moment des fêtes religieuses. Le roi représentant Dieu sur la terre, elles se mettent au service du divin. D'autre part, du fait du répertoire, elles deviennent elles-mêmes des créatures célestes puisqu'elles interprètent des rôles de déesses, de fées et de magiciennes. Au Cambodge, le Bouddhisme du Petit Véhicule n'a jamais cessé de faire des emprunts à l'Hindouisme polythéiste. Les capitaines des singes, les dragons-princes, les créatures divines des eaux et des airs ne cessent de se côtoyer dans les pièces de danse. Celles-ci, toutefois, reposent sur une ossature unique : l'éveil du Naga ou les mouvements générateurs de vie du grand serpent primordial, coeur du mythe fondateur du Cambodge. C'est cette origine qui donne à la danse son caractère hiératique et ondulatoire qui se poursuit au-delà des siècles.
Une rupture mortelle se creuse après les années soixante, dès que commence le génocide. Et sans pitié, les Khmers rouges exécutent les danseurs et les maîtres de musique. Rien ne doit subsister des splendeurs de la culture khmère.
En 1990, lorsque je peux enfin pénétrer au Cambodge, je n'aperçois que des survivants, qui sous les grands arbres de ce qu'est devenu aujourd'hui le Conservatoire du Cambodge, tentent, malgré leur épuisement, de transmettre la science des sons et la précision des mouvements de la danse à des jeunes gens avides d'avoir accès à leurs connaissances. Un sentiment intense gagne tous ceux qui se tiennent à proximité : les étudiants anxieux, les professeurs épuisés et les observateurs au comble de la stupéfaction.
Aujourd'hui, en 1994, les artistes sont de nouveau debout. Le Théâtre National du Cambodge, ayant réussi à maintenir une équipe réduite de danseuses et de musiciens de l'ancienne génération, fusionne avec les jeunes filles de l'Ecole de Danse du Conservatoire.
Une triple impulsion contribue à la création d'une entité nouvelle : le Ballet Royal du Cambodge. Les Khmers peuvent se réapproprier le nom de leur danse sacrée, leur répertoire, leurs gestes codés engendrant tout une symbolique. Ils ont aussi la possibilité de pratiquer un enseignement intensif jumelé à une reconstitution des instruments de musique et des costumes.
La première impulsion émane de la princesse Bopha Devi, fille du prince Sihanouk, ancienne danseuse royale, âgée aujourd'hui d'une cinquantaine d'années, qui prend à coeur son nouveau rôle de directrice du Ballet Royal. Elle tient à sauvegarder ce qui subsiste ainsi qu'à exhumer ce qui a été enfoui ou abandonné pendant de si nombreuses années. Inspiratrice autant que femme de terrain, elle dispense elle-même un enseignement raffiné et attentif.
La seconde impulsion vient du Ministre de la Culture, Monsieur Nouth Narang. Celui-ci souhaite promouvoir la danse sacrée (ou royale, ou encore classique) et faire de sa jeune vie, une priorité. Pour cela, il mêle les danseuses du Théâtre National aux jeunes filles de l'Ecole de Danse. Créant l'idée de pépinière, il met en place une assurance pour le futur en même temps que de nouvelles structures d'apprentissage, basées à la fois sur la transmission traditionnelle et un système d'osmose artistique.
La troisième impulsion, celle de Chérif Khaznadar, directeur de la Maison des Cultures du Monde et du Rond-Point / Théâtre Renaud-Barrault, correspond à la continuité logique d'une action de collaboration artistique établie entre la France et le Cambodge depuis le dix-huitième siècle.
Voici comment ce courant est né puis s'est développé : les danseuses, jouant aussi bien des rôles féminins que des rôles masculins ont besoin d'une préparation de quatre heures avant chaque spectacle parce que toutes les parties de leur costume de danse sont cousues sur leur corps.
C'est à la fin du dix-septième siècle qu'apparaît au Cambodge le goût pour les velours en ce qui concerne les costumes et les accessoires royaux. Les danseuses du Ballet Royal, devenant les favorites du souverain et faisant désormais partie de la famille royale, commencent à porter du velours, même pendant le déroulement de la danse. Et cette matière fait désormais partie du vêtement quasi rituel, surtout en ce qui concerne le justaucorps moulé sur la poitrine ainsi que la large écharpe portée en bandoulière. Or, le Cambodge ne fabrique pas de velours ! Grâce à ses bonnes relations avec la France, le pays reçoit chaque année pour les besoins du Ballet Royal, un don de pièces de velours français. Ainsi la France participe à la vie du Ballet.
Bien entendu, avec la guerre, les relations culturelles sont interrompues, jusqu'à ce que Chérif Khaznadar décide de renouer avec la tradition. Il ajoute au don de textiles plusieurs dizaines de kilos de cabochons métalliques et de fins fils torsadés dorés, dont la France possède l'exclusivité de la fabrication et qui vont servir à confectionner ces broderies-sculptures qui orneront les écharpes-bandeaux, les collerettes-pectoraux, les épaules à pointes retournées ainsi que les tiares pointues à trois étages, et établir ainsi un nouveau vestiaire de la danse royale.
Aujourd'hui, la renaissance du Ballet Royal du Cambodge est due à la fois à l'inébranlable volonté des Khmers de garder leur identité par la défense de leur culture ainsi qu'à un réseau de collaborations et d'attentions pleines de chaleur et d'émotion.
PROGRAMME
1.Démonstration
des gestes codés par une danseuse de l'ancien Ballet Royal à une toute jeune fille
2.La princesse et la fleur
Poème lyrique sur la recherche des unions célestes. Rencontre d'une créature divine avec une fleur, puis un prince.
3.Tchung po (Danse des souhaits)
Dans cette danse agrémentée de jets de pétales parfumés, les ballerines expriment à leur souverain et à ses hôtes leurs voeux de bonheur et de paix.
4.Bung sung
Une femme vêtue d'un costume masculin blanc brodé d'or représente le dieu androgyne Bhrama. Cette danse que l'on dit originaire de Birmanie participait autrefois à la sacralisation du pouvoir royal. Présentée devant le souverain dans la plus stricte intimité, elle étaitcensée appeler sur lui la protection divine.
5.Ream Lak, Chup Lak (Le fils de Rama et le fils de Lakshmana)
Extrait du Ream ker (version khmère du Râmâyana). Les deux jeunes garçons, dont les rôles sont ici interprétés par de petites filles de dix ans, partent chasser dans la forêt. Ils y rencontrent Hanuman, le capitaine des singes, avec lequel ils combattent avant de conclure une alliance.
6.Les éventails
Danse pure. Le souverain offrait ainsi à ses hôtes la vision de la sérénité.
7.Apsaras (Les créatures célestes)
Cette danse sacrée participait aux cérémonies d'offrandes lors des sacrifices saisonniers ainsi qu'aux grandes fêtes palatines.
8.Mekala (La jeune femme et le géant)
Cette danse symbolise la victoire du bien sur le mal. Une créature divine triomphe d'un génie grâce à son intelligence et sa balle magique.
9.Musique de cour par l'ensemble pinpeat
10.Tep monorom (Le bonheur céleste)
Des créatures célestes, hommes et femmes dansent la joie de se retrouver dans la pureté des élans et des sentiments.
Voir 6 pages de notes de F. Gründ dans programme papier.
Cambodge. Kong Nay, le barde cambodgien du chapey. Photos
13, 17 mars 2003
PROGRAMME
1. Improvisation et salutations en duo alterné par Kong Nay et Sinn Sory.
2. Prawat poaun Kong Lene (À la recherche de Kong Lene) par Kong Nay.
Kong Nay évoque son jeune frère Kong Lene qui l�aidait à survivre pendant sa captivité sous les Khmers rouges, prenant soin de lui, et qui disparut un beau jour. Lorsque ce chant fut composé, Kong Nay ignorait encore que son frère avait été enlevé, torturé et exécuté par les Khmers rouges.
3. Bankoung kaek (La branche du corbeau) par Kong Nay.
Inspiré d�une chanson enfantine très populaire au Cambodge, ce chant est une complainte dans laquelle Kong Nay regrette l�absence de son jeune frère.
4. Kroeun satreil (épigramme sur la femme) par Kong Nay.
Critique de la femme cambodgienne qui ne travaille pas suffisamment au goût de Kong Nay.
5. Lam liv (Prélude à un au revoir) par Kong Nay.
Chanson sarcastique sur la déception amoureuse.
Oh chérie, toi qui en as un nouveau, dis-le-moi sincèrement, que je ne te soupçonne plus. Nous nous aimions depuis l�enfance mais tu as changé et nous voilà devenus comme l�huile et l�eau. Oh toi, avec tes hanches fuyantes, tes cheveux crêpés, ton esprit borné, ta figure en fer à repas - ser, tes fesses grosses comme une jarre et tes yeux de cobra� Celui qui te prend pour femme court à sa ruine !
6. Bandam satreil (conseils à la femme) par Sinn Sory.
7. Thkol loan nauv khet Svay Rieng (Tonnerre sur Svay Rieng) par Kong Nay.
Chronique des saisons, de la culture du riz, rêves d�évasion, de voyages, évocation du temps qui passe.
8. Khmeng chamnoan doeum khmeng ay leuv (Jeunes d�hier et d�aujourd�hui) par Kong Nay.
Les jeunes d�hier étaient plutôt bêtes, mais quand ils croisaient leurs aînés ils se prosternaient jusqu�à terre. Ceux d�aujourd�hui sont plus intelligents mais ils croisent des anciens, ils les culbutent jusqu�à la forêt. (�) Les jeunes d�hier avaient de la moralité. À la nouvelle mousson filles et garçons jouaient ensemble sans embarras. De nos jours, ils vont ensemble et ça fait toujours des histoires. (�) C�est comme pour le costume. Les jeunes d�hier n�avaient qu�un bouton à leur vêtement. Ceux d�aujourd�hui en ont trois : le premier droit devant, le deuxième qui serre les côtes à étouffer, et le troisième dans le dos. Et à la mère qui s�écrit : �Ma fille, ces vêtements avec un bouton derrière, ce sont des habits de fantômes�, celle-ci répond : �A ton époque tu vivais au ras du sol, pour moi s�ouvre un horizon de fêtes�. C�est comme le chapey : cette musique qui enivrait les jeunes d�hier n�intéresse plus personne.
9. Roap phum srok (Inventaire des provinces khmères) par Kong Nay.
10. Improvisation et salutations en duo alterné par Kong Nay et Sinn Sory.
Cambodge. Kong Nay, le barde cambodgien du chapey. Spectacle
13-17 mars 2003
Les Khmers représentent 80 % des 9 millions d'habitants du Cambodge. Les 20 % restant se composent de communautés vietnamiennes, chinoises, de Khmers Islam, musulmans originaires essentiellement de Malaisie et du Centre-Vietnam, et des montagnards Khmers Loeu. Les origines de la musique cambodgienne remontent à l'ancien empire khmer qui domina la partie continentale de l'Asie du sud-est du VIIe au XIVe siècles. Sur les basreliefs des temples de la région d'Angkor (Xe-XIIIe siècles) on trouve des représentations de danses et d'instruments très proches de ceux qui sont encore utilisés aujourd'hui, tels le jeu de gongs kong ou le hautbois sralay. Mais la musique khmère est aussi le fruit d'un lent métissage marqué notamment par l'emprunt d'instruments et de mélodies d'origine indienne, chinoise, malaise, siamoise' La musique la mieux connue à l'extérieur du Cambodge est celle de l'orchestre classique pinpeat qui accompagne les cérémonies du palais royal, la danse classique, le théâtre d'ombres, le théâtre masqué. Autre genre musical, plus léger, le mohori est une musique de divertissement chantée par un soliste accompagné par des vièles, une cithare, un tambour et des cymbales. Le phleng khmer (littér. 'musique khmère') est considéré comme le genre le plus traditionnel car il accompagne depuis des siècles les diverses circonstances de la vie. C'est une musique de danses populaires, de fêtes familiales, notamment les mariages mais aussi les funérailles ; elle accompagne également les conteurs.
Mais en définitive, si l'on cherche aujourd'hui une musique traditionnelle vivante, à la fois créative et fidèle aux canons traditionnels, il faut aller la chercher dans les petits groupes qui interprètent des chants populaires au ton grave ou ironique comme les ayay, dialogues improvisés entre un homme et une femme, émaillés de blagues et autres effets comiques. Au centre de ces groupes se trouve le joueur de chapey. Le chapey est l'instrument des bardes. Parfois accompagnés d'un ou deux musiciens, mais le plus souvent solitaires, ceux-ci sillonnent les campagnes cambodgiennes en chantant des chroniques douces-amères, critiques, voire satiriques, de la vie quotidienne et de la situation politique du pays. Entre 1975 et 1979, les Khmers rouges ont tenté de rayer de la surface de la terre ce 'blues' du Mékong dont Kong Nay est aujourd'hui l'un des trois plus illustres représentants. Les anciens comparaient le chapey au Naga, le serpent mythologique à sept têtes qui était figuré par le corps et le long manche de l'instrument. Il s'agit d'un luth à manche long et à deux cordes constitué d'une caisse ovale ou rectangulaire en bois de krasaing ou de jacquier et d'un manche en teck. Ces deux pièces sont fixées l'une à l'autre par une cheville en os d'éléphant. Sur le manche sont fixées de larges touches en bois qui font office de frettes et permettent d'ornementer la mélodie en faisant varier la pression du doigt sur les cordes. La mélodie est généralement jouée sur la corde supérieure, la corde grave servant à la ponctuation et à l'accompagnement rythmique.
Kong Nay est né en 1946 dans la province de Kampot. Il perd la vue à l'âge de quatre ans à la suite d'une variole que la pauvreté n'a pas permis de soigner. Il lui faut donc apprendre à survivre. À l'âge de treize ans, son grand-oncle lui enseigne l'art du chapey et le répertoire de chants de mariage et de récits épiques tirés du Reamker, la version khmère du Râmâyana qui constitue la geste et l'âme du Cambodge. Kong Nay apprend vite à maîtriser l'instrument et révèle bientôt un réel talent de poète improvisateur. Dès l'âge de seize ans, il commence à se produire un peu partout dans sa province natale de Kampot Lorsque les Khmers rouges prennent le pouvoir, ils lui imposent tout d'abord de chanter la gloire du régime auprès des déportés sur les chantiers et dans les rizières. Avec un art consommé du verbe et au péril de sa vie, il sait détourner les paroles de ces chants patriotiques pour faire passer auprès de ses camarades d'infortune un message de soutien et de réconfort. Les autorités s'en aperçoivent et l'envoient alors travailler dans une manufacture de cordages. Il ne se remettra à jouer qu'après la défaite des Khmers rouges. En 1991, il remporte un prix à Phnom Penh et peut enfin vivre de son art. Kong Nay est accompagné par Sinn Sory, chanteuse et joueuse de chapey âgée de 40 ans, qui s'est formée auprès de son mari A Pey, un autre maître du chapey, et de Kong Nay.
La musique de Kong Nay présente deux styles musicaux bien distincts. Le pre m i e r s'inscrit de la manière la plus pure dans la tradition des bardes. La voix et l'instru m e n t se répondent en une alternance rigoureuse. Le chant est exécuté dans un style récitatif et syllabique avec, ici et là, de belles vocalises. La partie instrumentale est construite sur un ou deux motifs mélodico-rythmiques qui n'appartiennent pas en pro p re à telle ou telle pièce mais sont puisés dans un corpus général (c'est aussi un trait pro p re à la musique classique khmère). Le traitement mélodique et rythmique de ces motifs obéit à un principe que l'on appelle 'centonisation' : chaque motif est composé de cellules plus petites que le musicien peut à loisir interchanger, répéter, modifier rythmiquement. Ce procédé de composition et de variation (qui ressemble à une sorte de Lego musical) est bien connu dans les musiques populaires, et part i c u l i è rement dans les musiques de b a rdes. Le même principe s'applique au chant, conditionné en partie par le texte qui impose sa stru c t u re métrique et syllabique ainsi que les tons pro p res à la langue khmère . Le second style est plus lyrique. Pour enrichir sa matière première musicale, Kong Nay emprunte volontiers des thèmes musicaux aux genres classiques khmers. Ici aussi, la voix et le chapey se répondent, mais l'instrument ne s'interrompt plus, s'effaçant juste assez pour que la voix puisse s'exprimer librement. Le chant, nettement plus orné, s'appuie sur des figures mélodiques plus longues, plus linéaires et moins marquées rythmiquement, créant ainsi un climat nostalgique, voire dramatique. Des auditeurs occidentaux ont perçu une similitude entre la musique de Kong Nay et le blues. Cette analogie ne manque pas de pertinence. Dans les deux cas en effet, on retrouve un véritable dialogue musical entre la voix et le luth, le principe de composition par clichés (la "grille" dans le blues), l'usage de l'échelle pentatonique, évidente dans la musique de Kong Nay et réminiscente dans le blues, des modifications de certains degrés qui rappellent la blue note, et enfin ce fameux blue feeling qui transparaît dans la thématique littéraire de Kong Nay.
DUNNARA MEAS & PIERRE BOIS.
Discographie : KONG NAY Un barde cambodgien. Chant et luth chapey 1 CD INEDIT W 260112
PROGRAMME
1. Improvisation et salutations en duo alterné par Kong Nay et Sinn Sory.
2. Prawat poaun Kong Lene (À la recherche de Kong Lene) par Kong Nay.
Kong Nay évoque son jeune frère Kong Lene qui l'aidait à survivre pendant sa captivité sous les Khmers rouges, prenant soin de lui, et qui disparut un beau jour. Lorsque ce chant fut composé, Kong Nay ignorait encore que son frère avait été enlevé, torturé et exécuté par les Khmers rouges.
3. Bankoung kaek (La branche du corbeau) par Kong Nay.
Inspiré d'une chanson enfantine très populaire au Cambodge, ce chant est une complainte dans laquelle Kong Nay regrette l'absence de son jeune frère.
4. Kroeun satreil (épigramme sur la femme) par Kong Nay.
Critique de la femme cambodgienne qui ne travaille pas suffisamment au goût de Kong Nay.
5. Lam liv (Prélude à un au revoir) par Kong Nay.
Chanson sarcastique sur la déception amoureuse.
Oh chérie, toi qui en as un nouveau, dis-le-moi sincèrement, que je ne te soupçonne plus. Nous nous aimions depuis l'enfance mais tu as changé et nous voilà devenus comme l'huile et l'eau. Oh toi, avec tes hanches fuyantes, tes cheveux crêpés, ton esprit borné, ta figure en fer à repas - ser, tes fesses grosses comme une jarre et tes yeux de cobra' Celui qui te prend pour femme court à sa ruine !
6. Bandam satreil (conseils à la femme) par Sinn Sory.
7. Thkol loan nauv khet Svay Rieng (Tonnerre sur Svay Rieng) par Kong Nay.
Chronique des saisons, de la culture du riz, rêves d'évasion, de voyages, évocation du temps qui passe.
8. Khmeng chamnoan doeum khmeng ay leuv (Jeunes d'hier et d'aujourd'hui) par Kong Nay.
Les jeunes d'hier étaient plutôt bêtes, mais quand ils croisaient leurs aînés ils se prosternaient jusqu'à terre. Ceux d'aujourd'hui sont plus intelligents mais ils croisent des anciens, ils les culbutent jusqu'à la forêt. (') Les jeunes d'hier avaient de la moralité. À la nouvelle mousson filles et garçons jouaient ensemble sans embarras. De nos jours, ils vont ensemble et ça fait toujours des histoires. (') C'est comme pour le costume. Les jeunes d'hier n'avaient qu'un bouton à leur vêtement. Ceux d'aujourd'hui en ont trois : le premier droit devant, le deuxième qui serre les côtes à étouffer, et le troisième dans le dos. Et à la mère qui s'écrit : 'Ma fille, ces vêtements avec un bouton derrière, ce sont des habits de fantômes', celle-ci répond : 'A ton époque tu vivais au ras du sol, pour moi s'ouvre un horizon de fêtes'. C'est comme le chapey : cette musique qui enivrait les jeunes d'hier n'intéresse plus personne.
9. Roap phum srok (Inventaire des provinces khmères) par Kong Nay.
10. Improvisation et salutations en duo alterné par Kong Nay et Sinn Sory.
Remerciements à Messieurs Dunnara Meas, Sinn Nady, James Burnet et Pich Tum Kravel.
Cambodge. Le Sbek tom. Conférence
Communication de Françoise Gründ donnée à la Maison de L'Indochine, 16 février 2000.
Sbek tom qui signifie : "grands cuirs" est le nom d'une forme spectaculaire khmère qui fait intervenir en tout premier lieu un théâtre d'ombres, un ensemble musical, une narrativité traditionnelle et sacrée et une chorégraphie codifiée. Le sbek tom pourrait donc faire partie des processus ethnologiques.
Il semblerait que les ombres de cuir du sbek tom auraient servi de modèle aux sculptures des temples d'Angkor Vat, ce qui mènerait leur existence avant le XIIe siècle. Il est toutefois difficile de dater précisément la naissance du sbek tom.
Le théâtre d'ombres serait venu de l'Inde tout comme la partie fondamentale du répertoire. Le sbek tom aurait pris sa forme dans la province de Simrib et aurait constitué, en fait, un rituel dramatisé destiné à faire tomber la pluie. Plus tard, les religions dogmatiques (hindouisme, bouddhisme) s'emparent de l'expression comme support d'éducation et d'édification du peuple.
L'hindouisme arrive au Cambodge au cours du Ier siècle. Le bouddhisme qui pénètre plus tardivement s'épanouit largement au IXe siècle. Les deux courants religieux se juxtaposent, donnant parfois de curieuses interprétations spirituelles. C'est ainsi qu'une des épopées de l'hindouisme, le Ramayana devenu le Reamker en version khmère fait intervenir les mêmes personnages ainsi que des mythes parallèles qui ne paraissent pas toujours équivalents. A cause de la transmission orale, les noms des protagonistes changent souvent.
Malgré son contenu hindouiste, le sbek tom est représenté à l'occasion de cérémonies bouddhistes mais agit aussi et encore comme exhortation magique pour éloigner une épidémie ou pour faire tomber la pluie.
Jusqu'à l'arrivée de la guerre et du génocide par les Khmers rouges, le sbek tom se maintient comme une forme populaire très vivante à côté d'autres formes de théâtres d'ombres, telles que le sbek touch ou ayang ou "petits cuirs" qui reste une expression plus raffinée et réservée aux temples ou aux demeures riches. Aujourd'hui, si le sbek tom vit encore grâce à un détour de l'histoire, le ayang a lui, totalement disparu.
Les ombres
Les ombres ou figurines, taillées dans du cuir de buffle présentent une certaine rigidité renforcée par une ou deux tiges de bambou qui les traversent. Elles peuvent mesurer jusqu'à 1,70 m de hauteur et 1,20 m de largeur. Finement découpées et évidées, elles se présentent comme des ornements bidimensionnels où les motifs imbriqués les uns dans les autres deviennent prétextes à des décorations : volutes, entrelacs, allongements des éléments végétaux, arrondis des membres, traitements des dents et des yeux comme des ornements répétitifs non signifiants etc. Les motifs décoratifs représentent des fleurs, des feuilles, des bourgeons, des vignes grimpantes, des massifs et des phgni (flammes) et des trabak chhouk (pétales de fleurs de lotus). Les personnages mythiques sont insérés dans leur décor plat de feuillages, d'animaux et des lignes sinueuses des architectures cambodgiennes qui les englobent et les immobilisent car, contrairement à certaines ombres de l'Inde, de Malaisie et d'Indonésie, les figurines du sbek tom ne présentent aucune articulation. Elles dessinent dans l'espace des graphismes de cuir enduits d'un vernis végétal brillant qui les rend lisse et les protège. La peau de buffle peut être colorée sous le vernis ou bien être laissée brute. De toute façon, élevée devant la lumière des torches ou des flammes d'un bûcher, la peau devient translucide et laisse apparaître un camaïeu délicat allant du beige au noir en passant par toutes les nuances de bruns, de rouge et d'ocre.
De nombreuses techniques font partie de la préparation et de la réalisation des figurines : le choix des peaux de buffle, le traçage du dessin, le découpage à l'aide de lames et de poinçons, la teinture, la coloration éventuelle, la danse, le mine, la musique, la narration et la manipulation. Jusqu'au début du siècle, une trentaine de troupe existaient dans le pays effectuant de petits déplacements. Chaque troupe disposait de cent cinquante quatre figurines.
La danse
Les manipulateurs-danseurs empoignent les extrémités des tiges de bambou qui dépassent de la base des figurines et brandissent celles-ci au-dessus de leur tête en leur imprimant des mouvements individuels ou des mouvements d'ensemble. Les manipulateurs-danseurs dont le nombre peut aller de 7 à 12, se déplacent en tournant autour d'un écran qui peut mesurer 12 mètres de long. Cet écran de coton blanc ne dépasse pas une largeur de 1,2 à 1,4 mètre. Il sert de centre à une sorte de défilé, qui en général se déplace dans le sens des aiguilles d'une montre mais à une allure irrégulière où alternent les courses-poursuites, les allures lantes et balancées et les arrêts dramatiques. Les spectateurs s'installent de chaque côté de l'écran. S'ils se trouvent du côté où le bûcher est allumé, ils découvrent le spectacle en démystifiant les ombres et assistent à un "portage d'icônes". S'ils sont assis ou debout du côté opposé, ils aperçoivent les transparences, bien plus intéressantes car les mouvements des manipulateurs-danseurs font que la distance entre la source de lumière et l'ombre projetée se modifie constamment. les flous et les effets d'effacement ou de précision des graphismes lorsque le cuir de la figurine est pressé contre le coton de l'écran contribuent à créer un mouvement et une vie propres à chaque figurine.
Les manipulateurs-danseurs opérent torse nu. Les cuisses sont envoloppées dans une étoffe drapée qui prend la forme d'une culotte ample le sampot, laissant beaucoup d'aisance à l'entrejambe. les genoux, les mollets et les pieds sont nus, si bien que dans la demi-obscurité de la nuit éclairée par des flammes vives, le corps humain semble prolonger le graphisme des figurines. Il donne une vie autonome à l'icône de cuir. C'est pourquoi, cette danse particulière reste indissociable de la présentation des figurines.
La gestuelle et le costume des danseurs ressemble à ceux de la danse classique khmère, le lakon khoul.
Les manipulateurs-danseurs connaissent chaque vers et chaque phrase mélodique du Reamker et leur danse pré-structurée obéit à la signification du texte. Autrefois ils bénéficiaient d'un statut spécial comparable à celui des musiciens et seuls les hommes pouvaient devenir des manipulateurs-danseurs ; ce qui supposait encore une excellente connaissance de la religion bouddhique et une bonne connaissance de l'hindouisme. En plus de la manipulation, de la danse et du chant, ils devaient maîtriser parfaitement la narration. Le Reamker est considéré comme un texte religieux. Ils étaient ainsi chargés d'une sorte de pouvoir qui assimilait leur rôle à celui de ritualistes. Il n'en est plus de même aujourd'hui car des femmes sont entrées dans cette nouvelle "profession" avec la qualité d'actrices. Les hommes et les femmes sont devenus des fonctionnaires du Théâtre National. Et le seul groupe qui présente du sbek tom est celui de Phnom Penh.
La musique
Le sbek tom est accompagné par un ensemble musical appelé pinpit. Ce même orchestre accompagne la danse classique. Il se trouve représenté sur les bas-reliefs des temples d'Angkor Vat. A l'exception d'un hautbois, il se caractérise par l'emploi presque exclusif d'instruments à percussion.
Samphor : tambour horizontal à deux peaux pour marquer les cadences. Cet instrument est souvent considéré comme le conducteur de l'ensemble.
Skor thom : souvent au nombre de 2 dans l'ensemble musical, ces gros tambours obliques et cintrés, à une peau, frappés par deux bâtons, émettent des sons graves et puissants.
Chhing : deux paires de petites cymbales très aiguës (employées pour certaines mélodies seulement)
Kong tom : jeu de 17 petits gongs bulbés, circulaires et horizontaux disposés en demi-cercle (le musicien se place à l'intérieur de l'instrument) et produisant des sons graves. Cet ensemble de gongs se rencontre aussi dans les gamelan indonésiens.
Kong touch : jeu de 16 petits gongs produisant des sons aigus et disposés en demi-cercle. Le jeu des deux kong se développe sur trois octaves.
Roneat ek : petit xylophone à caisse de résonance en forme de barquette montée sur pied (21 lames de bambou ou en teck). Instrument conducteur mélodique.
Roneat thong : xylophone grave (17 lames accordées à l'octave inférieur de celles du Roneat ek)
Sralay : hautbois à anche double et à six trous produisant une sonorité lumineuse.
Le sbek tom possède de nombreuses mélodies spécifiques et le pinpit joue à cette occasion très rarement des musiques empruntées aux autres répertoires.
Des ambiances très diverses sont ainsi créées grâce à la musique (tragique, dramatique, lyrique, satirique, comique, grotesque etc.). Le public se situe immédiatement dans une action qu'il identifie au préalable grâce à la couleur de la musique. Les mélodies qui constituent des sortes de modes portent le nom de bat. Il en existe une vingtaine. Chaque bat caractérise une action : l'allure d'une princesse, la marche d'un roi, le déplacement d'un homme du peuple. Les sentiments sont également identifiés par les bat : amour, tristesse, chagrin, colère, révolte, paix, gaîté, peur ...
Les bat fonctionnent avec les poèmes spécifiques, par exemple, les dialogues de la colère se nomment bat pummul (Alternance de vers de six pieds et de vers de quatre pieds). Les bhrumakiti ou poèmes pour la maladie et les larmes emploient des vers de cinq pieds et des vers de six pieds. Le bat phnom nhol est employé pour les sentiments de séparation, de douleur et de solitude.
Le répertoire
Le répertoire est consacré à des thèmes tirés d'une version du Reamker (Gloire de Rama). Il pouvait durer plusieurs jours et même plusieurs semaines. Le paysan qui venait du village pour assister à un spectacle de sbek tom savait que l'histoire qui lui était proposée mettait en jeu des forces surnaturelles et que le spectacle tout entier était intégré à un système qui gouverne l'univers. Certains épisodes du Reamker n'étaient jamais représentés de peur qu'ils ne provoquent une influence indésirable. D'autres en revanche étaient bénéfiques. de nombreux spectacles au Cambodge possédaient ces vertus et aussi ces fonctions.
Les récits joués sont la plupart du temps des fragments racontant les combats entre Rama et Ravana ou plutôt entre Preah Ream et Reap. Les batailles appelées "les guerres d'Intrachit" (Intrajit, le fils de Reap) restent particulièrement appréciées. Elles sont appelées sar neak bas et font référence à la flèche magique d'Intrachit qui se transforme en mille serpents.
"Avant le début du spectacle, les manipulateurs, les musiciens et les chanteurs célèbrent le rite du hom rong par lequel ils sacralisent l'aire de jeu du spectacle. La cérémonie du hom rong renforce l'efficacité du spectacle et fixe l'attention des spectateurs avant le début. Le manipulateur se concentre par la méditation sur le rôle du personnage représenté par l'ombre ou les ombres qu'il va manipuler. Le guru des sbek reçoit l'invocation à trois reprises. Après quoi, l'homme responsable des torches fait trois fois le tour de la table avant de les allumer. Le narrateur ou nak bhol commence alors le chant de Yakor et le répète trois fois jusqu'à ce que tous les manipulateurs-danseurs se soient placés derrière l'écran et répondent par le même mot. Pour prononcer ce mot, ils utilisent un ton de voix tout à fait particulier, dont on dit qu'il est la voix des morts dans la forêt.
Après la cérémonie d'ouverture mais avant le début de la narration, manipulateurs-danseurs exécutent une danse spéciale figurant la bataille de deux singes : Swar Sau, le singe blanc et Swar Kmau, le singe noir. Cette danse appelée Sva prachap est un combat entre le bien et le mal s'achevant par le triomphe du bien. A la fin, le singe blanc vainqueur traîne le singe noir aux pieds de Preah Moni Eisey, le juge suprême.
Lorsque ces cérémonies sont terminées, alors le spectacle peut commencer.
Le narrateur, généralement le guru ou le chef du groupe de sbek tom entame le dialogue. Celui-ci consiste soit en prose fixe, soit en poèmes. le commentaire de l'histoire contée utilise de nombreux poèmes. A la fin de chaque récit, la narrateur donne le nom du morceau de musique qui va être joué. Pendant la musique, les manipulateurs dansent. Quelquefois, au cours de l'histoire, lorsque se déroule une bataille entre les démons et les singes, les manipulateurs posent leurs ombres à terre et simulent le combat en direct.
Généralement, chaque troupe de sbek tom emploie deux narrateurs qui ont pour fonction de dire le récit l'un après l'autre, qu'il s'agisse de vers ou de prose. A la fin de chaque strophe, ou de chaque vers mesuré, deux tambours de taille différente, le samphor ou le skoor tom battent deux fois pour souligner l'emphase ou la cadence du drame. Lorsque les narrateurs parlent en prose, ils ne sont pas accompagnés par la musique. Chacun des narrateurs conserve les mêmes personnages tout du long du récit". (M. Lohgan)
Destruction et reconstruction
En 1991, du 24 au 31 octobre (période correspondant à la signature du traité de paix à Paris par le Prince Sihanouk) une série de représentations de sbek tom est donnée à la Maison des Cultures du Monde.
Pour parvenir à ces représentations, un travail intense a été nécessaire de la part des Cambodgiens du Théâtre National comme de la part de l'équipe de la Maison des Cultures du Monde. An effet, après le génocide, la plupart des musiciens et des manipulateurs danseurs avaient disparu. Seuls, quelques vieillards donnent encore un enseignement essoufflé aux jeunes qui voulaient bien essayer d'apprendre tout à la fois.
En outre, il ne restait dans tout le pays qu'une centaine de figurines de sbek tom, pieusement gardés dans les Musée de Phnom Penh. Le Théâtre National, seule instance de dialogue, n'en possédait plus qu'une dizaine en fort mauvais état. Il a donc fallu encourager, de plusieurs manières, ceux qui le pouvaient encore, de refaire les figurines à l'identique des anciennes et de former des manipulateurs-danseurs capables de tenir au moins une heure. Le pari a été tenu et il semble qu'aujourd'hui, le sbek tom soit en mesure de se reconstituer.
Bibliographie
Khaznadar, Françoise et Chérif. Le théâtre d'ombres. Ed. Maison de la Culture de Rennes, 1978.
Thierry, Solange. La gloire de Rama. Ramakerti. Ramayanan cambodgien. Les belles lettres. Paris. CNRS, 1978
Lohgan, M. Les guerres d'Indrachit (texte du programme pour le théâtre du Rond Point) Ed. Maison des Cultures du Monde, Paris, 1991.
CD INEDIT/Maison des Cultures du Monde W260002
Cambodge. Musique classique khmère, théâtre d'ombres et chants de mariage. Cambodia. Classical khmer music, shadow theater, wedding songs.
Musique du ballet classique khmer
1. Apsara
2. Ream Eiso et Mekhalâ
3. Ream Lak, Chup Lak
Théâtre d'ombres sbèk thom
4. Hommage aux maîtres
5. La bataille of Indrajit
Chants de mariage
6. Hom Rong
7. Chao Préam
8. Bay Khon
Ce disque présente deux genres majeurs de la musique cambodgienne : la musique classique jouée sur l'orchestre traditionnel pinpeat, qui accompagne le ballet classique khmer et le théâtre d'ombres Sbèk thom, et les chants de mariage soutenus par le petit ensemble phleng khmer.
Patrimoine khmer, architecture grandiose, royale et sacrée, les temples d'Angkor (XIIe siècle) symbolisent l'âme et la civilisation d'un pays. Aujourd'hui encore, ils attestent la splendeur d'un art musical et chorégraphique dont le Cambodge, ruiné par la guerre et tiraillé par les idéologies politiques, a pu par bonheur préserver l'essentiel. La musique khmère vient donc témoigner non point de l'héritage d'une époque révolue mais de la persévérance et de la vitalité d'une des cultures les plus originales de l'Asie du Sud-Est. Elle accompagne les danses sacrées et participe au récit des épopées (Râmâyana, Mahâbhârata, légendes diverses
). Intermédiaire entre les mondes des vivants et des morts, elle prend part à l'hommage aux divinités et aux maîtres et anime les rites religieux. Elle évoque un état d'âme, crée une atmosphère, elle nous charme enfin par ses mélodies.
La musique khmère est construite sur un ensemble bien structuré : le jeu orchestral et hétérophonique et un répertoire mélodique constitué depuis des siècles.
Les instruments à percussion faits de bois, de bambou, de métal et de peau sont conçus de manière à produire des sonorités distinctes et vivantes, résultat d'un long apprentissage, d'une patience inouïe et d'un don inné. En l'absence de notation musicale, la transmission se perpétue par voie orale.
Le terme pinpeat (formé à partir des mots pin, hautbois, et peat, instrument de musique) désigne l'orchestre classique. Elément essentiel de la culture royale et sacrée, on le voit représenté sur les bas-reliefs des temples d'Angkor, participant au culte du Dieu-Roi Devaraja ou accompagnant le reamker version cambodgienne du Râmâyana et la danse des divines Apsaras.
L'orchestre complet, tel qu'il est conservé au Département de la musique traditionnelle du Palais Royal à Phnom-Penh, se compose des instruments suivants.
Le srâlay, hautbois à six trous et à deux anches doubles sculpté dans une pièce de bois de tamarin ou d'ébène. Tous les instruments s'accordent sur son diapason.
Le roneat ek, xylophone à lames de bois en forme de barque. Ses seize lames sont suspendues sur un socle incurvé, creux et posé sur un pied central. Un mélange compact de plomb, de cire et de résine collé sous chaque lame permet den affiner laccord.
Le roneat thung, xylophone à lames de bambou, monté sur une caisse de résonance parallépipédique à quatre pieds. Instrument d'accompagnement son jeu est mélodiquement moins développé que celui du roneat ek.
Le kong thom, carillon de seize gongs monté sur un cadre de rotin horizontal et circulaire au centre duquel s'assied le musicien.
Le kong tauch, semblable au kong thom mais plus petit et donc plus aigu.
Le samphô, tambour horizontal à deux faces recouvertes de peau de daim. Les peaux sont accordées au moyen dune pâte faite d'un mélange de riz et de cendre.
Le chhing, jeu de deux petites cymbales à mamelon liées entre elles par une cordelette.
Le chhing et le samphô sont les deux instruments rythmiques principaux : le premier marque la pulsation tandis que le second frappe les cycles rythmiques à 4, 8 et 12 temps.
Le skôr thom est un jeu de deux grands tambours à deux faces soutenus obliquement grâce à deux bâtons entrecroisés. Du fait de son timbre puissant, il est particulièrement important dans les scènes d'action.
Faute de moyens, les orchestres de pinpeat jouent souvent en formation réduite, c'est le cas notamment de l'ensemble accompagnant le sbèk thom où l'on ne compte que le srâlay, le roneat ek, le kong thom, le samphô, le chhing et le skôr thom.
RÉPERTOIRE
Les pièces musicales accompagnant la danse classique et la musique d'accompagnement du théâtre d'ombres sbèk thom sont conçues comme des suites musicales faisant alterner des pièces instrumentales, des chants et éventuellement des passages narratifs. Les pièces instrumentales et les chants sont puisés dans un répertoire de morceaux-types ou "timbres". Le nombre de ces timbres s'élevait autrefois à un millier ; depuis un siècle on n'en compte guère plus de cent à cent cinquante. Ces timbres se regroupent en genres correspondant à certaines "cadences" chorégraphiques ; c'est pourquoi on les identifie selon leur fonction dramatique, rituelle ou chorégraphique plutôt que par leur contenu musical. Certains genres peuvent enfin se voir associés à des styles : intérieur, extérieur, dansant, etc.
-Sathukar : salutation et invitation des maîtres, présentation des offrandes.
-Rour : entrée en scène.
-Chut : marche ou envol.
-Smeu : traversée de la scène.
-Sdach Yéang : marche royale ou marche ordinaire.
-Lo : actions lentes.
-Aute : pleurs (Nai, intérieurs ; Nork, extérieurs)
-Krao : vacarmes (Nai, intérieurs ; Nork, extérieurs ; Roam, dansants ; Preah, divins)
-Trak : démonstration de la force du démon.
-Tayây : accompagnement.
-Phlék : musique de Garuda, l'oiseau sacré.
-Dum chhing : répertoire dit "des cymbales" dans lequel les cymbales chhing sont associées aux tambours samphô et skôr thom.
-Banjoss (La barrière protectrice), Pathom (La marche victorieuse), Vorachet (Le maître suprême), Aiyaret (Hommage rendu aux maîtres) sont quatre morceaux spécifiques associés aux cérémonies de sacralisation, de saluta-tions aux maîtres, de présentations de vux et d'offrandes. Mais on les retrouve aussi dans les pièces de danse.
-Les répertoires môn, khmer, lao, javanais, et chinois se réfèrent aux cultures auxquelles les timbres qui les composent auraient été empruntés : Le roi môn prend son bain ; Le Chinois se tient debout devant sa barque ; Chut dass marche chinoise ; Krao khmer vacarmes khmers ; etc.
Chaque pièce est donc construite sur l'enchaînement de plusieurs timbres : ainsi par exemple, la pièce orchestrale qui accompagne la cérémonie d'hommage aux maîtres et aux divinités qui précède toute représentation chorégraphique ou théâtrale est une suite de douze morceaux obligés : Sathukar Chut chhap (chut en trois parties) Lo Aute Krao Chut Trak Tayây Rour Phlék Rour bei choan (entrée en scène en trois morceaux) Sdach yéang.
Chaque timbre peut être joué dans sa totalité ou simplement sous la forme d'une signature thématique, parfois très brève, mais suffisamment reconnaissable pour identifier l'action chorégraphique en cours. De ce fait, chaque pièce orchestrale peut être considérée comme une uvre "à géométrie variable" dépendant de la durée et du développement de chacune de ses parties.
MUSIQUE DU BALLET CLASSIQUE KHMER
1. Danse des Apsaras
La danse des apsaras, souvent figurée sur les bas-reliefs d'Angkor, est l'une des plus importantes du répertoire chorégraphique khmer. Dans le panthéon védique, les apsaras appartiennent au niveau des génies intermédiaires. Ces nymphes immortelles vivent en familiarité avec les humains ; elles sont les tentatrices par excellence, présidant aux jeux de hasard, inspirant la fureur guerrière, amantes insatiables. L'homme qui sait les satisfaire gagne parfois le statut de héros ou de demi-dieu.
La danse des apsaras est accompagnée par le pinpeat et trois chanteuses-récitantes. La pièce musicale d'accompagnement se divise en plusieurs parties entrecoupées par le chant.
-Pièce instrumentale : Por Lung Kchei (La couleur jaune pâle - chut lent [marche ou envol])
-Chant sur un morceau du Dum Chhing Pichoan (répertoire des cymbales) :
"Aujourd'hui, je suis heureuse de contempler les fleurs dans le jardin." / interlude instrumental / "Je vais en confectionner des bouquets et les placer à côté de mon siège. Si ces fleurs vous plaisent, laissez-moi vous offrir cette guirlande."
-Pièce instrumentale : Smeu (Traversée de la scène) Banjoss (La barrière protectrice) Vorachet (Le maître suprême) Tchen Tcho Mouk Touk (Le Chinois se tient debout devant sa barque - répertoire chinois).
-Chant : Tchao Duong (La déesse du cur - chant de cour d'amour)
"Arrivée dans le jardin, la princesse convie ses suivantes à contem-pler les fleurs" / interlude instrumental / "Ces dernières cueillent des fleurs pour les lui offrir" / interlude instrumental / "La nature est resplendissante, elle semble tombée du paradis. Le cur s'emplit d'amour" / interlude instrumental / "Par sa grâce, la princesse a le pouvoir d'attirer les hommes et d'éveiller leur passion."
-Pièce instrumentale : Chut (marche ou envol).
2. Ream Eiso et Mekhalâ
Le sujet de cette danse s'inspire d'une légende cambodgienne ancienne qui relate les vaines tentatives de l'Asura, Ream Eiso pour dérober à la déesse Mekhalâ le joyau Manohara qui exauce tous les désirs. Un combat s'ensuit dont la nymphe sort victorieuse. Ream Eiso la poursuit dans le ciel et, selon la tradition populaire, la foudre et le tonnerre ne sont autres que la manifestation de ce combat céleste et éternel.
-Pièce instrumentale : Smeu (Traversée de la scène) Banjoss (La barrière protectrice).
-Chant sur la mélodie de Môn Srâng Tuk (Le roi Môn prend son bain - répertoire môn) :
"Drapée dans son costume brodé d'or et de joyaux innombrables, la déesse coiffe sa tiare qui brille des feux de mille pierres."
-Pièce instrumentale : Chut Chhing Pichoan (marche ou envol des cymbales en deux parties) Chut Chhing (marche ou envol des cymbales).
-Chant sur une mélodie de Chut Dass (marche chinoise - répertoire chinois) :
"La déesse tient dans sa main le joyau Manohara et elle quitte son palais céleste."
-Pièce instrumentale : Krao Roam (vacarmes dansants)
-Chant :
"La déesse se présente, elle s'échappe, elle tourne. Elle montre le joyau à l'Asura. Maintenant, elle l'affronte. / interlude / Elle montre le joyau à l'Asura. Maintenant elle l'affronte."
-Pièce instrumentale : Chut (marche ou envol).
3. Ream Lak, Chup Lak
extrait du Reamker.
Le Reamker cambodgien n'est pas simplement la traduction khmère du Râmâyana. Monument de la littérature cambodgienne, "sa composition est expressément adaptée à la représentation scénique. L'histoire est découpée en chants destinés à être récités et chantés par des choristes pendant que l'action est mimée par un ballet. Chaque chant porte au début une indication destinée au chur et à l'orchestre pour le choix du mode de récitation, de l'air et de la cadence. D'avance est fixé, pour chaque thème, un air conventionnel qui doit créer l'atmosphère musicale appropriée au caractère de chaque épisode."
Rama, son épouse Sita et son frère Lakshmana coulent des jours heureux dans leur royaume d'Ayudhya. Mais un stratagème perpétré par une fausse servante de Sita provoque la jalousie de Rama qui ordonne à Lakshmana de tuer son épouse. Lakshmana emmène Sita dans la forêt mais ne parvient pas à la tuer. Celle-ci, enceinte, est recueillie par l'ascète Valmiki et met au jour un fils, Ream Lak [en sanskrit : Ramalakshmana]. Peu après la naissance, Valmiki, usant de ses pouvoirs magiques, lui donne un compagnon, son sosie Chup Lak [Jappalakshmana]. Lorsque les enfants atteignent l'âge de dix ans, Valmiki leur donne à chacun un arc et ils partent s'entraîner en forêt.
-Pièce instrumentale : Smeu (Traversée de la scène) Banjoss (La barrière protectrice) Vorachet (Le maître suprême).
-Chant : Châng Kès Reav (La taille fine)
"Les deux petits princes ont vu l'arbre. Il est immense. Ses branches cachent le soleil. / interlude / Les deux petits princes l'abattent de leurs flèches magiques."
-Pièce instrumentale : Pathom (marche victorieuse) Banjoss Vorachet.
-Chant sur une mélodie lente (genre lo) :
"Le roi des singes a aperçu les deux petits princes et s'étonne de leur si grande énergie. Les deux petits princes à leur tour voient le roi des singes. Celui-ci, par jalousie, les défie dans l'espoir de les maîtriser."
-Pièce instrumentale : Chut (marche ou envol) Chut Chhing Pichoan (marche ou envol des cymbales en deux parties) Chut.
-Chant sur une mélodie de Aute (Pleur narratif) :
"Les deux petits princes s'emparent du roi des singes et lui lient les bras avec une cordelette. Puis, sur son front, ils inscrivent quelques mots avec de la résine de bois et le libèrent."
-Pièce instrumentale : Chut.
[Voici ce que les deux enfants ont inscrit sur le front de Hanuman : "Tous les êtres, même les Devata puissants (
), non plus que tous les singes célestes, n'arriveront à délivrer cet animal de ses liens (
). Seul son maître, homme ou singe pourra le délier, conformément à mon désir." F. Martini, op. cit., p. 166.]
Samphô, Soum Tath
Roneat ek, Meas Sa-em
Roneat thung, Nol Sophân
Kong thom, Sak Sothéa
Kong tauch, Ek Sonn
Srâlay, Nol Sobonn
Skôr thom, Prung Chhéang
Chhing, Loch Chhanchhai
Chant, Pheng Sophara, Nor Si Sophéap, Sin Sama Duc Thou.
LE SBÈK THOM, THÉÂTRE D'OMBRES
Théâtre d'ombres, le Sbèk Thom ("grands cuirs") était autrefois un ri-tuel hindouiste destiné à faire tomber la pluie. L'action est centrée sur le défilé de figurines d'ombres de cuir de grandes dimensions, brandies à bout de bras par des manipulateurs-danseurs derrière et devant un écran géant. Les 154 figurines sont finement découpées dans du cuir de buffle mais ne sont point articulées. Elles dessinent des gra-phismes de cuir enduit d'un vernis végétal, insérant les personnages mythiques dans un décor de feuillages, de volutes, d'animaux et de monuments aux lignes sinueuses.
Avant le début du spectacle, manipulateurs, musiciens et narra-teur/chanteur exécutent la cérémonie Hom Rong qui rend hommage aux maîtres. Les ombres des trois personnages principaux : Preah Narei Ream [Narayana Rama, le Dieu Rama (Vishnu)], Preah Eiso (Shiva), Preah Muni Eissei (premier maître du Sbèk Thom) sont expo-sées de chaque côté d'un petit sanctuaire devant lequel sont disposées des offrandes. Ensuite commence le récit, extrait du Reamker.
4. Première partie
Prière d'invocation aux maîtres en langue pâli.
"Namo Dhassa Bhagavato Arahato Samma Sambhudhassa (
)
Ukasa, nous tous rendons hommage et saluons le Grand Maître Suprême résidant dans le Palais céleste voguant dans l'au-delà.
Nous invitons Preah Narei Reamea (Vishnu), Preah Eiso (Shiva), ainsi que Preah Vesavant qui supervise les dix-huit Maha Rusei rési-dant sur la terre, dans les montagnes, dans les contrées, dans les val-lées, dans les plaines, dans les rivières, dans les précipices et dans les cours d'eau.
Nous invitons le Roi Krung Peali, Maître de la terre et de l'eau, Preah Enn Kossei (Indra), Roi de toutes les divinités, Preah Moha Brahma, les quatre gardiens des quatre orients des seize étages du monde cosmique. Tout, tous, Svahayan.
Nous invitons les saints invisibles, les dix pouvoirs magiques, le Roi Dhassamana Kâmhêngpich.
Nous invitons les Roi Hanuman, Kamhêng Badal et le Moha Russei et Essei Akinet, Thmichnet, Phnek Ko Bhagaveng, Munidejo.
Nous invitons les saints Russei au nombre de cent-huit, le Roi Kâng Chak, le Roi Kâng Poan. Qu'ils viennent vite ! Ehima !!!
Nous invitons les maîtres dessinateurs-sculpteurs, les maîtres-danseurs de Sbèk, les maîtres-chanteurs, les maîtres-siffleurs, les maîtres-répétiteurs, les maîtres de roneat ek et de roneat thung, à venir nous aider à jouer ; les maîtres de samphô, les maîtres des gongs, les maîtres de srâlay, à se dépêcher ; les maîtres de skôr thom, les maîtres des petits et des grands gongs à se réunir, ainsi que Preah Pisnukar (Vishnu) à se présenter pour déguster nos offrandes diverses et nous souhaiter la réussite, le bonheur, la victoire."
Musique : Sathukar (invitation, salutation) - Chut Nork (marche extérieure) - Pathom (marche victorieuse) - Chut (marche ou en-vol).
5. Deuxième partie
La bataille d'Indrajit extrait du Reamker.
"Ayant réuni dans son Palais tous ses états-majors, Ravana ordonna à Bunjakay, sa nièce, de se transformer en Sita morte flottant dans le cours d'eau du royaume de Rama."
Musique : Chut (marche ou envol).
"Embrassant le corps sans âme de Sita, Rama s'effondra en larmes, sans se douter que c'était une imitation du corps de son épouse."
Musique : Aute srâlay (pleurs du hautbois).
"Entretemps, devant Rama se présentèrent Hanuman (le Roi des singes), Sugriva et Angkoat. Furieux, Rama reprocha à ces trois vaillants combattants d'avoir laissé assassiner son épouse. Instinctivement, Hanuman demanda à Rama l'autorisation de mener une expérience sur le corps de Sita en la faisant incinérer."
Musique : Vorachet (Le maître suprême) - Tineang Preah (Siège de la divinité).
"Ne pouvant résister à l'expérience de Hanuman, la jeune Bunjakay reprit sa forme et s'élança vers le ciel. Le Roi des singes la rattrapa et la présenta devant ses troupes."
Musique : Chut (marche ou envol).
"Sous l'effet de la colère, Rama harcela Hanuman de questions. Tranquille et serein, celui-ci lui répondit que le corps de Sita n'était en fait qu'une forme du corps de Bunjakay. Cette jeune asurî était en réalité la nièce de Ravana et la propre fille de Piphek, l'astrologue de Rama. Conscient de ses fautes, Rama présenta ses excuses à ses trois vaillants combattants. Sans plus tarder, il ordonna à Hanuman de ramener la belle Bunjakay au royaume de Lanka. En cours de route, celui-ci en devint amoureux."
Musique : Chao Dork (Déesse de la fleur).
Bunjakay accepta sans protestation l'amour du Roi des singes.
Musique : Chut (marche ou envol).
"Ravana, sachant que Bunjakay avait échoué dans sa mission, ordonna à Indrajit, son fils, de déployer une grande armée pour combattre celle de Lakshmana (frère de Rama)."
Musique : Krao Nai (vacarme intérieur).
"Se trouvant face [à Indrajit], Lakshmana engagea la bataille avec cou-rage."
Musique : Chut - Saloma - Chut.
"Indrajit trouva l'astuce d'envoyer Virulmuk au combat sous ses propres traits. Quant à lui, il partit se réfugier dans les couches des nuages et observa de loin l'événement. Une bonne occasion se pré-senta, il décocha contre Lakshmana une flèche magique. Ce dernier fut sérieusement blessé et sa vie mise en danger."
Musique : Trak (musique des démons] - Rour (entrée en scène) - Tayây (accompagnement).
"Inquiet de l'état de santé de son jeune frère, Rama consulta Piphek. L'astrologue lui conseilla d'envoyer une flèche messagère à Simpily Garuda, parrain de Rama, pour que celui-ci vînt à son secours. Simpily Garuda se dépêcha de sauver Lakshmana. Hors de danger, Lakshmana retourna dans son royaume avec ses armées."
Skôr thom et narration : Ieng Sithul
Roneat ek: Ep Chea
Srâlay : Nol Mech
Kong thom : Mao Phung
Samphô : Keo Sinnareth
Chhing : Nop Sambath
directeur de la troupe : Pich Tum Kravel
CHANTS DE MARIAGE
Ces chants, accompagnés par un petit ensemble instrumental, le phleng khmer, sont exécutés au cours de la cérémonie de mariage.
L'orchestre comprend :
Un chapey, luth à deux cordes tendues sur un manche long et re-courbé. La touche est équipée de douze frettes.
Un trô khmer, vièle à pique d'origine persane. Equipée de trois cordes, elle est jouée verticalement, la pique posée à même le sol.
Un trô ou, vièle sphérique d'origine chinoise dont la caisse est taillée dans une noix de coco. Son registre est plus grave que celui du trô khmer.
Un pey âr, petit hautbois de jonc ou de bambou à une anche double.
Deux skôr arak, tambours de poterie en forme de calice.
Un chhing, paire de cymbales.
6. Hom Rong,
salutations aux divinités (chant, Chhorn Sam Ath).
7. Chao Préam,
entrée du marié (chant, Ieng Sithul).
8. Bay Khon,
ligature des fils de souhaits, fils de coton blanc disposés sur le pourtour d'une coupe emplie d'eau bénite et noués successive-ment par tous les parents des mariés (chant, Chhorn Sam Ath).
Chant et pey âr, Chhorn Sam Ath et Ieng Sithul.
Trô khmer, Touch Say.
Trô ou, Ep Chea.
Chapey, Nol Mech.
Skôr arak, Mao Phung.
Chhing, Nop Sambath.
Pierre Bois & Loch Chanchai.
Cambodge. Musique Khmère.
1. Si nuorn par l'orchestre pinn peat
2. Orchestre dit "de mariage" avec slek
3. Tayak nork par l'orchestre mohori
4. Mean rong reay par le vung phleng kar boran
5. Air de reamker par l'orchestre pinn peat
6. Som pong lom par l'orchestre vung phleng kar boran
7. Deux airs par l'orchestre pinn peat
8. Orchestre dit "de mariage" avec slek
9. Khmer dombanh et bey jorn par l'orchestre mohori
10. Musique pour le reamker
Cambodge. Musiques de l'exil. Cambodia. Music of the Exile.
L'orchestre de la Troupe de Danse Classique Khmère.
The Orchestra of the Khmer Classical Dance Troupe.
Bande originale du film "Une danse pour l'exil" de Jean-Daniel Bloesch (Apsara Productions)
Original music track of the film "Dance of Tears"
01. Trott 4:04
02. Tep Monorom 10:31
03. Reamker - Prolaom 1:07
04. Kek Mon Pi Choan / Khmer Krong Phka 9:07
05. Reamker (Last Scene) 9:36
06. Aye-Aye 7:02
07. Robam Apsara 14:46
08. Trott (Takhé Solo) 1:18
09. Preah Noriey Baeng Pheak 8:10
Cambodge. Ombres dansées sbek tom, Mission de terrain. Photos
Mission de terrain réalisée en juillet 1991.
Cambodge. Ombres dansées sbek tom. Photos
24-31 octobre 1991
Cambodge. Ombres dansées sbek tom. Spectacle
24-31 octobre 1991
Il est dit que les sbek tom ou ombres de cuir, auraient servi de modèles aux sculptures du temple d'Angkor Vat.
Les personnages découpés dans le cuir puis sculptés dans la pierre sont des Devatesi, danseurs semi-dieux servant de médiateurs entre les hommes et les dieux. Leur danse est un acte de communication magique.
Plus que des accessoires de théâtre, les sbek tom représentent des êtres vivants dont la fonction est d'enseigner les valeurs hindouistes par l'intermédiaire des épisodes du Ramayana (la Geste de Rama).
L'hindouisme pénètre d'Inde au Cambodge dans le courant du premier siècle de notre ère et parvient à se maintenir après l'essor du bouddhisme au XIe siècle. Le Ramayana s'adapte en version khmère et devient Reamker. Cette version fait intervenir les mêmes personnages que dans l'épopée originale, mais grâce au processus de transmission orale, la plupart des noms prennent une consonance khmère.
Malgré son contenu hindouiste le sbek tom est régulièrement représenté à l'occasion de cérémonies bouddhistes.
Tous les Cambodgiens connaissent le récit du Reamker et lui attribuent une réalité historique, renforcée par sa fréquente mise en scène sous forme de théâtre dansé ou de théâtre d'ombres. Le public baigne dans une atmosphère d'antagonisme entre le Bien représenté par Preah Ream (Rama), Preah Leaks (Laksmana) et Hanuman et le Mal incarné par Reap (Ravana) et Indrachit (Indrajit). C'est de cette manière que le sbek tom, art traditionnel et sacré, demeure très populaire au Cambodge.
De nombreuses techniques artistiques interviennent dans la préparation et la réalisation du sbek tom: le dessin, le découpage, la teinture, la danse, le mine, la musique, la narration et la manipulation.
Les gestes et les costumes des personnages ressemblent à ceux de la danse classique khmère, lakon khoul.
Les motifs décoratifs des ombres représentent des fleurs, des feuilles, des bourgeons, des vignes grimpantes, des massifs ou des phgni (flammes), des trabak chhouk (pétales de fleurs de lotus).
Les costumes se composent de deux parties: le sampot (pièce d'étoffe qui couvre le bas du corps) et le saosbay (écharpe entourant les épaules). Ils peuvent être agrémentés d'une grande couronne, d'ornements de tête, de bracelets et d'anneaux de chevilles.
Les 154 figurines qui existent encore sont conservées au Département des Arts du Ministère de la Culture de Phnom-Penh et sont exclusivement consacrées aux personnages du Reamker.
Les récits racontés et joués sont toujours des fragments contant le déroulement des combats entre Rama et Ravana. Spécialement appréciées sont les batailles entre Indrajit (fils de Ravana) et Preah Laksh (Lakshamana, jeune frère de Rama). Ces batailles appelées sar neak bas, font référence à la flèche d'Indrajit qui se transforme en mille Naga (serpents).
Fabrication des figurines.
La peau d'une vache fraîchement abattue est mise à sécher au soleil. Puis l'artiste commence par tracer les contours avec des instruments spéciaux et une encre végétale. Tous les personnages, Yakshar (homme), Devata (esprit célèbre), Swar (singe), ou Preah Indra (roi du paradis hindouiste), sont représentés en mouvement et dans leurs différents rôles: marchant, volant, conduisant leur char, chevauchant des coursiers, des éléphants ou des oiseaux.
Les décorations qui les entourent sont chaque fois différentes. Elles dépendent de la situation dépeinte et expriment de manière codifiée le sentiment qui anime le personnage.
Lorsque les dessins sont tracés sur la peau, celle-ci subit un bain traitant qui l'opacifie légèrement. Le procédé donne une graduation de couleurs brunes qui prend toute une gamme de profondeurs lorsque la lumière joue sur la peau. La peau n'est jamais peinte et les aplats colorés sont en fait obtenus par trempages successifs. Une fois que les zones colorées sont réparties, le facteur procède au découpage, avant un nouveau séchage.
La peau devenue rigide est pincée entre deux tiges de bambou fendu. Ainsi le manipulateur peut brandir l'ombre au-dessus de sa tête, en saisissant les deux tiges, sans toucher à la peau. Ces poignées sont d'une grande aide pour le manipulateur qui danse en même temps.
La représentation
Le sbek tom est représenté de part et d'autre d'un long écran de tissu blanc. Le bas de l'écran doit arriver à la ceinture des manipulateurs. Entre le bas de l'écran et le sol une étoffe noire est tendue. L'écran est éclairé par derrière grâce à un brasier où brûlent des résines. Aujourd'hui au lieu du brasier, il est plus courant d'utiliser une lampe électrique.
L'ombre est manipulée contre l'écran et de part et d'autre, c'est à dire en transparence ou en vision directe par rapport aux spectateurs. Plus la peau est près de l'écran, plus les contours sont précis.
Avant le début du spectacle, les manipulateurs, les musiciens et les danseurs célèbrent le rite du hom rong par lequel ils sacralisent l'aire de jeu du spectacle. La cérémonie de hom rong renforce l'efficacité du spectacle et fixe l'attention des spectateurs avant le début. Le manipulateur se concentre, par la méditation, sur le rôle du personnage représenté par l'ombre ou les ombres qu'il va manipuler. Le guru des sbek reçoit l'invocation à trois reprises. Après quoi, l'homme responsable des torches, fait trois fois le tour de la table avant de les allumer.
Le narrateur ou nak bhol commence alors le chant de Yakor et le répète trois fois jusqu'à ce que tous les manipulateurs-danseurs se soient placés derrière l'écran et répondent par le même mot. Pour prononcer ce mot, ils utilisent un ton de voix tout à fait particulier, dont on dit qu'il est la voix des morts dans la forêt.
Après la cérémonie d'ouverture, mais avant le début de la narration, les manipulateurs- danseurs exécutent une danse spéciale figurant la bataille de deux singes: Swar Sau, le Singe Blanc et Swar Kmau le Singe Noir. Cette danse appelée Sva Prachap est un combat entre le Bien et le Mal s'achevant par le triomphe du Bien. A la fin, le Singe Blanc, vainqueur traîne le Singe Noir aux pieds de Preah Moni Eisey, le juge suprême.
Lorsque ces cérémonies sont terminées, alors seulement le spectacle peut commencer.
Le narrateur, généralement le guru ou le chef du groupe de sbek tom entame le dialogue. Celui-ci consiste soit en poèmes, soit en prose fixe. Le commentaire de l'histoire contée utilise de nombreux poèmes. A la fin de chaque récit, Bhol, le narrateur, donne le nom du morceau de musique qui va être joué. Pendant la musique, les manipulateurs dansent.
Quelquefois, au cours de l'histoire, lorsque que se déroule une bataille entre les démons et les singes, les manipulateurs posent les ombres à terre et simulent le combat direct.
La narration
Généralement, chaque troupe de sbek tom emploie deux narrateurs qui ont pour fonction de dire le récit l'un après l'autre, qu'il s'agisse de vers ou de prose. A la fin de chaque strophe ou de chaque vers mesuré, deux tambours de taille différente, le sampho et le skoor tom battent deux fois pour souligner l'emphase ou la cadence du drame. Lorsque les narrateurs parlent en prose, ils ne sont pas accompagnés par la musique. Chacun des narrateurs conserve les mêmes personnages tout au long du récit. Le dialogue s'appuie parfois sur des mots satiriques et des situations comiques.
Le récit du sbek tom a deux formes. La première s'appuie sur la prose et utilise les sons étirés à la fin de chaque phrase. Elle ressemble en cela aux poèmes sans en avoir les règles rigides appliquées au nombre de pieds par vers. Le narrateur se sert de la prose pour les scènes d'action ou les dialogues basés sur la discussion. La seconde est la narration basée sur les poèmes. Le narrateur utilise la technique spéciale appelée bhat punm nhol, servant à décrire les sentiments ou bien la peur.
Les poèmes des dialogues de colère sont appelés bat pumnul. Il s'agit d'un style très ancien qui fait alterner les vers de 6 pieds et les vers de 4 pieds. Les poèmes pour la maladie ou les larmes, appelés bhrumakiti, sont formés par des vers de 5 pieds et de 6 pieds. Pour les sentiments de séparation, de solitude ou les atmosphères tragiques, les narrateurs utilisent le baht phnom nhol et le bhrumakiti.
La musique
L'orchestre qui accompagne le sbek tom est le pinpeat, c'est ce même orchestre qui accompagne la danse classique et qui est représenté sur les bas-reliefs du temple d'Angkor Vat.
Les instruments de l'orchestre sont:
Roneat ek (petit xylophone)
Roneat thong (xylophone grave)
Kong vong tauch (clavier de gongs bulbés disposés en demi-cercle)
Sralay tauch (hautbois)
Somphor (tambour à deux peaux, pour marquer les cadences)
Skor thom (tambour cintré à une peau)
Chhing (cymbales)
La musique de sbek tom comporte de nombreuses mélodies et il est exceptionnel que l'orchestre joue des mélodies empruntées aux autres ensembles.
La diversité aide à créer une ambiance soit comique, soit satirique, soit lyrique, soit dramatique soit tragique et aide le public à trouver des références immédiates. Il existe une vingtaine de mélodies différentes appelées bat. Chaque mélodie souligne la signification d'une action: par exemple la marche d'un roi, par opposition à la marche d'un homme du peuple. Egalement, les différents sentiments sont exprimés par des musiques adaptées.
D'après M. Lohgan
PROGRAMME
"Les guerres d'Indrachit" sous-titres français.
Le Reamker "Ramayana"
La cérémonie de salutations aux Krous "Maître Suprême"
Le Sampeas Krous : "Commémoration aux maîtres défunts".
Etant donné que presque toutes les formes d'arts ont pour origine la religion, selon la tradition de la race khmère, avant de commencer une représentation artistique, les danseurs et les danseuses organisent la cérémonie de Sampeas Krous ; il s'agit d'une commémoration aux maîtres de théâtre, de danse, de sculpture, de chant, et de musique qui ont quitté le monde ; cette cérémonie permet également d'inviter l'âme des choses sacrées à se placer dans l'esprit de tous les artistes, de présenter des voeux de bonne santé et, en particulier, de souhaiter le succès pour tous les divertissements artistiques.
Le Combat des deux singes
Cette scène montre le combat des deux singes : le Blanc représente le Bien et le Noir le Mal. Le noir est vaincu. Le blanc lui met les mains derrière le dos, et l'emmène à Preah Moni Eisci "l'ermite = Le Grand maître".
En voyant le noir avec les mains attachés derrière le dos, le Grand maître donne ses recommandations et de bons conseils pour que le noir cesse les maladresses et devienne juste et aimable. Puis, il ordonne au songe Blanc de remettre de singe Noir en liberté : les deux singes repartent ensemble, s'aiment, se respectent comme deux propres frères. Cette scène symbolise l'abolition des malheurs, des actes nuisibles et la présentation de souhaits de bonne santé, de bonheur et de prospérité à tous les artistes et spectateurs de la soirée.
Le Reamker :
Reap "Ravana" ordonne que sa nièce Ponhakay se transforme en cadavre de Seda "Sita". Suivant le courant d'eau, ce cadavre flotte devant l'habitation de Preah Ream "Rama" située au bord de la mer. Cette ruse doit tromper Rama en lui faisant croire à la mort de Sita ; ainsi Rama devra retirer sa troupe de Langka.
A la vue de ce cadavre, Preah Ream croit reconnaître Sita, sa femme bien aimée. Preah Ream pleure ; en même temps il se met très en colère contre son entourage, Hanuman, Angkut et Sokrip. Preah Ream admet que la mort de Sita est causée par Hanuman "Le singe blanc" qui avait mis en feu la ville de Langka "pays de Ravana" ; et à cause de cela, Reap, mécontent aurait tué Sita, femme de Rama.
Hanuman s'incline devant Preah Ream pour s'excuser et vient lui apprendre que ce n'est pas le cadavre de Sita mais une ruse ; le cadavre est l'illusion d'un Géant transformé. Hanuman demande à Preah Ream la permission de faire un test. Hanuman organise alors les funérailles de la supposée Sita. Au cours des funérailles Hanuman reste sur ses gardes ; il demande à Sokrip de surveiller la cérémonie, Angkut se place au fond de la terre, lui-même se cache dans les nuages pour empêcher le géant transformé en cadavre de Sita de prendre la fuite.
Finalement Hanuman réussit à arrêter Ponhakay "fausse Sita" qui se sauve à cause de la chaleur.
Après avoir arrêté Ponhakay, les militaires la torturent pour l'interroger.; alors Ponhakay avoue qu'elle est la nièce de Reap "Ravana" et fille de Piphek Hora "le devin", qui travaille actuellement avec Preah Ream. A cette information, Hanuman suivant l'ordre de Preah Ream ramène Ponhakay à Langka.
Chemin faisant Hanuman fait des avances à Ponhakay ; et finalement Ponhakay les accepte.
Dès que Reap apprend que le stratagème de Ponhakay n'a pas réussi à tromper Preah Ream et ses militaires, il ordonne à son fils Indrachit de mener une offensive afin de détruire l'armée de Preah Ream.
Preah Ream envoie son frère Preah Laksm "Laksmana" pour combattre Indrachit. Indrachit ordonne à Virulmuk Koma de se transformer en faux Indrachit pour faire la guerre contre Preah Laksm. Tandis que le vrai Indrachit lui-même se cache dans le ciel et lance des flèches sacrées sur Preah Laksm et l'armée des singes. Indrachit blesse Preah Laksm et l'armée des singes avec les flèches de Naga. Quand Preah Ream est informé des évènements, il envoie un message à son parrain Simpili Krut "Garuda" pour lui demander secours. Simpili Krut enlève les flèches du corps de Preah Laksm et de l'armée des singes.
Quand Indrachit sait que Preah Ream et l'armée des singes sont encore en vie, il envoie ses soldats chercher Sokacha emprisonné depuis assez longtemps et le fait transformer en fausse Sita ; ensuite Indrachit conduit la fausse Sita et ses soldats sur le champ de bataille.
A la rencontre de Preah Laksm, Indrachit montre la "fausse Sita" bell-soeur de Preah Laksm.
Preah Laksm en colère dénonce les maladresses sauvages de Krong Reap, père de Indrachit, qui ose garder Sita prisonnière dans son château de Langka.
Comme Preah Laksm ne se retire pas, Indrachit se servant de son épée, coupe tout d'un coup la tête de Sita "fausse sita ou Sokacha transformée".
Preah Laksm rend compte à son frère Preah Ream de la mort de Sita. Désespéré Preah Ream pleure beaucoup.
Un instant plus tard, Piphek Hora "le Devin" lui apprend la vérité ; la Sita tuée par Indrachit n'est pas la vraie, mais la transformation de Sokacha.
Indrachit va méditer dans son palais sur la montagne Kouchakot. Il se demande comment renforcer son pouvoir.
A cette information, Preah Ream envoie son frère cadet Preah Laksm pour rompre la prière d'Indrachit. Indrachit surpris se sauve dans le ciel ; mais Preah Laksm lui tire une flèche magique qui se transforme en mille flèches. Souffrant, Indrachit se rend à Langka où il demande à sa mère Neang Mondokari de lui donner du lait pour apaiser sa douleur.
Indrachit rétabli, Neang Mondokiri lui demande de ne plus faire la guerre contre Preah Ream ; mais Indrachit, têtu, ne veut pas écouter les conseils de sa mère et lui répond que s'il ne fait pas la guerre contre Preah Ream ce sera son père Krong Reap qui la fera ; il ne peut supporter l'idée de son père sur le champ de bataille.
Lorsque Preah Ream sait que Indrachit reste encore vivant, il repart avec une grande armée pour le tuer.
Piphek Hora " le Devin" lui prédit la mort d'Indrachit au bout de la flèche magique. Preah Ream envoie Angkut au pays du Bhrama chercher un plateau sur lequel il déposera la tête d'Indrachit dès qu'elle aura été coupée (cette mauvaise tête enflammerait l'eau et la terre et causerait aussi de grands malheurs si elle tombait).
Au cours de cette dernière guerre Indrachit est tué par la flèche magique "Sar Bhrameas" de Preah Ream ; conformément à la proposition de Piphek Hora "le Devin", sa tête est envoyé à Than Doset "Le monde des Dieux".
Après avoir remporté cette grande victoire et tué Indrachit, Preah Ream se rend au pavillon d'or en compagnie de son armée et de son entourage.
Jean-Marc Padovani. Jazz Angkor.
1. Solo de flûte
2. La longue nuit
3. Au bord du Tonlé Sap
4. L'écho de la forêt
5. L'eau dans la mare
6. La danse des Lumas
7. Samara
8. Moï Pi Bei Boun
9. Bay Khon Tchang Day
10. L'image du pays Khmer
11. Hom Rong
12. Soam Poong
Kong Nay. Un barde cambodgien. Chant et luth chapey
1.Prawat poaun Kong Lene
2. Thkol loan nauv khet Svay Rieng
3. Kroeun satreil
4. Bom Pet
5. Khmeng chamnoan doeum khmeng ay leuv
6. Lam Liv
7. Bankoung kaek
8. Roap phum srok & Roap somphireak