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Chine. Le muqam des Dolan. Photos
UNE MUSIQUE DE RÉJOUISSANCE
Aux confins du désert du Taklamakan (Chine), l’étonnante tradition de la musique ouïgoure frappe par sa liberté et sa vigueur. Le Xinjiang est un immense territoire situé au nord-ouest de la Chine. Cet univers impressionnant de déserts, de rivières et de glaciers est le berceau d’une civilisation turque issue des Huns, les Ouïgours, dont l’existence est attestée sous la forme d’une confédération clanique dès le Ve siècle de notre ère. Tour à tour chamanistes, bouddhistes, manichéistes et enfin musulmans, les Ouïgours vont utiliser deux systèmes d’écriture, et à ce titre, s’affirmer dès le IXe siècle comme les civilisateurs de leurs voisins turco-mongols. À la même époque, des musiciens ouïgours jouent à la cour impériale des Tang. Mais c’est cinq siècles plus tard, sous l’influence de la culture islamique et persane, que commence à fleurir dans les cités de Kashgar, Yarkand et Tourfan un art vocal, instrumental et poétique savant, tandis que des formes rurales et populaires voient le jour à Kumul et chez les Dolan. Sous-groupe ouïgour se réclamant d’une origine mongole, les Dolan occupent les oasis bordant le sud et l’ouest du désert du Taklamakan et tirent leur subsistance de l’élevage de moutons et de l’agriculture. Leur musique, le dolan muqam, est avant tout une musique de fête et de réjouissance jouée lors des mashrap. Ces grands rassemblements festifs et ritualisés se déroulent après les récoltes, pour un mariage, une circoncision ou tout autre événement heureux, et sont l’occasion de festoyer, de faire de la musique, de danser et de jouer à divers jeux de société et d’adresse. La fête se déroule dans un grand espace carré, les musiciens occupant l’un des quatre côtés et les danseurs évoluant au centre.
L’ensemble se compose de chanteurs solistes (muqamqi) et d’instrumentistes : un rawap, luth à manche long à trois cordes mélodiques et quinze cordes sympathiques, une vièle ghijak, à une corde en crin de cheval et dix à douze cordes sympathiques en métal, une cithare qalun, à dix-huit cordes doubles pincées avec un long plectre de bois tendre. Les tambours sur cadre dap sont frappés par les chanteurs. Chaque musicien interprète à sa manière la mélodie commune. Il en résulte un effet d’hétérophonie répondant à un choix esthétique délibéré, une recherche d’épaisseur sonore qui s’est aujourd’hui perdue dans beaucoup d’autres musiques du monde islamique. Quant aux chanteurs, ils font preuve d’une telle ardeur dans le chant et d’une telle énergie dans le jeu des tambours que nombre de musicologues chinois n’ont pas hésité à qualifier cette musique de « jazz ouïgour ».
Le dolan muqam se présente sous la forme de suites vocales et instrumentales accompagnées de danse et jouées dans plusieurs modes musicaux qui leur donne leurs noms : bash, zil, chöl, ötang, hudek, dugamet, bom, sim et jula. Chaque suite dure une dizaine de minutes et se compose de quatre ou cinq parties enchaînées sans interruption et allant s’accélérant jusqu’à la frénésie : muqaddima, introduction vocale non mesurée ; chikitma, pièce en 6/4 ; sanam, pièce en 4/4 ; saliqa, pièce en 4/4 ; serilma, en 4/4 ou 5/8. Les poèmes ne sont pas fixés à l’avance, mais ils ne sont pas non plus improvisés. Puisés dans un corpus poétique, les distiques ou les quatrains sont « lancés » spontanément par le chanteur soliste et se succèdent sans vraiment de continuité thématique, si ce n’est celle de l’amour, généralement déçu ou contrarié.
Chine. Le muqam des Dolan. Spectacle
UNE MUSIQUE DE RÉJOUISSANCE
Aux confins du désert du Taklamakan (Chine), l’étonnante tradition de la musique ouïgoure frappe par sa liberté et sa vigueur.
Le Xinjiang est un immense territoire situé au nord-ouest de la Chine. Cet univers impressionnant de déserts, de rivières et de glaciers est le berceau d’une civilisation turque issue des Huns, les Ouïgours, dont l’existence est attestée sous la forme d’une confédération clanique dès le Ve siècle de notre ère. Tour à tour chamanistes, bouddhistes, manichéistes et enfin musulmans, les Ouïgours vont utiliser deux systèmes d’écriture, et à ce titre, s’affirmer dès le IXe siècle comme les civilisateurs de leurs voisins turco-mongols. À la même époque, des musiciens ouïgours jouent à la cour impériale des Tang. Mais c’est cinq siècles plus tard, sous l’influence de la culture islamique et persane, que commence à fleurir dans les cités de Kashgar, Yarkand et Tourfan un art vocal, instrumental et poétique savant, tandis que des formes rurales et populaires voient le jour à Kumul et chez les Dolan. Sous-groupe ouïgour se réclamant d’une origine mongole, les Dolan occupent les oasis bordant le sud et l’ouest du désert du Taklamakan et tirent leur subsistance de l’élevage de moutons et de l’agriculture. Leur musique, le dolan muqam, est avant tout une musique de fête et de réjouissance jouée lors des mashrap. Ces grands rassemblements festifs et ritualisés se déroulent après les récoltes, pour un mariage, une circoncision ou tout autre événement heureux, et sont l’occasion de festoyer, de faire de la musique, de danser et de jouer à divers jeux de société et d’adresse. La fête se déroule dans un grand espace carré, les musiciens occupant l’un des quatre côtés et les danseurs évoluant au centre.
L’ensemble se compose de chanteurs solistes (muqamqi) et d’instrumentistes : un rawap, luth à manche long à trois cordes mélodiques et quinze cordes sympathiques, une vièle ghijak, à une corde en crin de cheval et dix à douze cordes sympathiques en métal, une cithare qalun, à dix-huit cordes doubles pincées avec un long plectre de bois tendre. Les tambours sur cadre dap sont frappés par les chanteurs. Chaque musicien interprète à sa manière la mélodie commune. Il en résulte un effet d’hétérophonie répondant à un choix esthétique délibéré, une recherche d’épaisseur sonore qui s’est aujourd’hui perdue dans beaucoup d’autres musiques du monde islamique. Quant aux chanteurs, ils font preuve d’une telle ardeur dans le chant et d’une telle énergie dans le jeu des tambours que nombre de musicologues chinois n’ont pas hésité à qualifier cette musique de « jazz ouïgour ».
Le dolan muqam se présente sous la forme de suites vocales et instrumentales accompagnées de danse et jouées dans plusieurs modes musicaux qui leur donne leurs noms : bash, zil, chöl, ötang, hudek, dugamet, bom, sim et jula. Chaque suite dure une dizaine de minutes et se compose de quatre ou cinq parties enchaînées sans interruption et allant s’accélérant jusqu’à la frénésie : muqaddima, introduction vocale non mesurée ; chikitma, pièce en 6/4 ; sanam, pièce en 4/4 ; saliqa, pièce en 4/4 ; serilma, en 4/4 ou 5/8. Les poèmes ne sont pas fixés à l’avance, mais ils ne sont pas non plus improvisés. Puisés dans un corpus poétique, les distiques ou les quatrains sont « lancés » spontanément par le chanteur soliste et se succèdent sans vraiment de continuité thématique, si ce n’est celle de l’amour, généralement déçu ou contrarié.
Corée. Le Gagok. Photos
Le gagok est sans nul doute ce que la culture coréenne a produit de plus délicat et de plus raffiné en matière de musique vocale. Loin des formes populaires friandes d’émotions fortes et de celles de cour, hiératiques et figées, le gagok illustre l’art des lettrés, exquis et discret, imaginatif, économe et élégant, un art de salon pour un public choisi, cultivé et mélomane.
Il se caractérise par son hiératisme, une sorte de récitation modulée en voix de tête, chaque nuance étant mise en valeur par le tissu sonore de l’orchestre qui allie les sons percussifs du tambour en sablier janggu et des cithares geomungo et gayageum avec les sons fluides et continus de la flûte daegeum, de la vièle haegeum et du hautbois cylindrique piri.
Le gagok est apparu vers le xviie siècle et son répertoire fut fixé lorsqu’il fut introduit au palais pour compenser le déclin des musiques de cour, causé par les invasions japonaise et mandchoue. Le gagok est un chant lyrique accompagné par un ensemble d’instruments à vent et à cordes. Il était très apprécié des lettrés et des aristocrates au temps de la dynastie Joseon (1392-1910).
Le répertoire de gagok comprend vingt-sept chants qui se répartissent en fonction du sexe de l’interprète et de la performance : le cycle de gagok pour homme seul comprend 24 chants, celui pour femme seule, appelé yeochang, comprend 15 chants, enfin le cycle pour homme et femme alternés en comprend 27. Dans ce nombre, seul un chant, Taepyeongga, est interprété en duo mixte en clôture de cycle. Ces concerts sont consacrés au cycle pour femme seule, le yeochang.
De même, neuf chants sont composés dans le mode mélodique ujo (ou pyeongjo) bâti sur l’échelle pentatonique anhémitonique (ré-mi-sol-la-si), dix-sept dans le mode gyemyeonjo, particulièrement expressif et structuré autour du tricorde ré-sol-la auquel s’ajoutent des notes secondaires, et un chant alterne les deux modes. Les pièces sont enfin classées selon des styles définis par le registre et le mouvement général de la mélodie : isudaeyeop, junggeo, pyeonggeo, dugeo, banyeop, pyeongnon, urak, hwangyerak, gyerak, pyeonsudaeyeop, taepyeongga. Ainsi, chaque pièce de gagok est identifiée par un titre, son mode et son style.
Chaque poème comprend trois vers ou distiques, chacun se composant de quatre groupes de trois à cinq syllabes. L’exécution musicale cependant n’épouse pas la forme du poème puisqu’elle le subdivise en cinq parties mélodiques encadrées par des passages instrumentaux. Après un prélude instrumental, le premier vers ou distique forme les deux premières sections ; le second, la troisième section ; vient ensuite s’intercaler un interlude instrumental, suivi du premier groupe de syllabes du troisième vers qui forme la quatrième section, et le reste du vers, la cinquième.
Le gagok est accompagné par un petit ensemble instrumental à géométrie variable comprenant les cithares geomungo et gayageum, la flûte daegeum, le hautbois piri, la vièle haegeum et le tambour janggu. Quoique mal connu à l’étranger, le geomungo est considéré par les Coréens comme leur principal instrument de musique ; il s’agit d’une cithare à six cordes en soie et munie de frettes et de chevalets ; son origine remonte au royaume de Goguryeo à la fin du ive siècle. Beaucoup plus connu, le gayageum est une cithare à douze cordes en soie et à chevalets ; cousine du guzheng chinois, du koto japonais et du yatag mongol, elle fut inventée au vie siècle dans le royaume de Gaya sur le modèle du guzheng ; c’est sur cet instrument que fut créé à la fin du xixe sièce un genre majeur de la musique instrumentale coréenne, le sanjo. Le daegeum est une grande flûte traversière en bambou dont le timbre se cuivre parfois grâce à la vibration d’un mirliton. Le haegeum est une vièle à deux cordes en soie au timbre feutré et délicat. Le piri est un hautbois à perce cylindrique et au timbre délicat très utilisé dans la musique de cour. Le janggu, facilement reconnaissable à sa forme en sablier, est le tambour coréen le plus répandu.
Tous les instruments jouent la même mélodie mais chacun lui applique un mode de rubato différent de sorte que les notes ne tombent pas toujours ensemble. Il en résulte une impression de strates superposées, d’épaisseur hétérophonique faite de timbres mélangés et mouvants. La chanteuse oscille entre la voix de poitrine (sokcheong : voix intérieure) et la voix de tête (seseong : voix fine) et développe sa mélodie en longues notes tenues, filées ou finement ornementées. Dans cet enchaînement de mélismes d’une exquise délicatesse, le poème éclate, le sens s’abolit, ne reste que la musique.
Les quinze chants féminins yeochang qui constituent l’un des deux pans du répertoire de gagok sont présentés ici dans leur intégralité, répartis sur les deux soirées qui se terminent, comme le veut la tradition, par l’unique chant mixte du répertoire, Taepyeongga, interprété par Kim Young- gi et Kim Dae-yoon. Le gagok a été inscrit en 2010 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
Corée. Le Gagok. Spectacle
Le gagok est sans nul doute ce que la culture coréenne a produit de plus délicat et de plus raffiné en matière de musique vocale. Loin des formes populaires friandes d’émotions fortes et de celles de cour, hiératiques et figées, le gagok illustre l’art des lettrés, exquis et discret, imaginatif, économe et élégant, un art de salon pour un public choisi, cultivé et mélomane.
Il se caractérise par son hiératisme, une sorte de récitation modulée en voix de tête, chaque nuance étant mise en valeur par le tissu sonore de l’orchestre qui allie les sons percussifs du tambour en sablier janggu et des cithares geomungo et gayageum avec les sons fluides et continus de la flûte daegeum, de la vièle haegeum et du hautbois cylindrique piri.
Le gagok est apparu vers le xviie siècle et son répertoire fut fixé lorsqu’il fut introduit au palais pour compenser le déclin des musiques de cour, causé par les invasions japonaise et mandchoue. Le gagok est un chant lyrique accompagné par un ensemble d’instruments à vent et à cordes. Il était très apprécié des lettrés et des aristocrates au temps de la dynastie Joseon (1392-1910).
Le répertoire de gagok comprend vingt-sept chants qui se répartissent en fonction du sexe de l’interprète et de la performance : le cycle de gagok pour homme seul comprend 24 chants, celui pour femme seule, appelé yeochang, comprend 15 chants, enfin le cycle pour homme et femme alternés en comprend 27. Dans ce nombre, seul un chant, Taepyeongga, est interprété en duo mixte en clôture de cycle. Ces concerts sont consacrés au cycle pour femme seule, le yeochang.
De même, neuf chants sont composés dans le mode mélodique ujo (ou pyeongjo) bâti sur l’échelle pentatonique anhémitonique (ré-mi-sol-la-si), dix-sept dans le mode gyemyeonjo, particulièrement expressif et structuré autour du tricorde ré-sol-la auquel s’ajoutent des notes secondaires, et un chant alterne les deux modes. Les pièces sont enfin classées selon des styles définis par le registre et le mouvement général de la mélodie : isudaeyeop, junggeo, pyeonggeo, dugeo, banyeop, pyeongnon, urak, hwangyerak, gyerak, pyeonsudaeyeop, taepyeongga. Ainsi, chaque pièce de gagok est identifiée par un titre, son mode et son style.
Chaque poème comprend trois vers ou distiques, chacun se composant de quatre groupes de trois à cinq syllabes. L’exécution musicale cependant n’épouse pas la forme du poème puisqu’elle le subdivise en cinq parties mélodiques encadrées par des passages instrumentaux. Après un prélude instrumental, le premier vers ou distique forme les deux premières sections ; le second, la troisième section ; vient ensuite s’intercaler un interlude instrumental, suivi du premier groupe de syllabes du troisième vers qui forme la quatrième section, et le reste du vers, la cinquième.
Le gagok est accompagné par un petit ensemble instrumental à géométrie variable comprenant les cithares geomungo et gayageum, la flûte daegeum, le hautbois piri, la vièle haegeum et le tambour janggu. Quoique mal connu à l’étranger, le geomungo est considéré par les Coréens comme leur principal instrument de musique ; il s’agit d’une cithare à six cordes en soie et munie de frettes et de chevalets ; son origine remonte au royaume de Goguryeo à la fin du ive siècle. Beaucoup plus connu, le gayageum est une cithare à douze cordes en soie et à chevalets ; cousine du guzheng chinois, du koto japonais et du yatag mongol, elle fut inventée au vie siècle dans le royaume de Gaya sur le modèle du guzheng ; c’est sur cet instrument que fut créé à la fin du xixe sièce un genre majeur de la musique instrumentale coréenne, le sanjo. Le daegeum est une grande flûte traversière en bambou dont le timbre se cuivre parfois grâce à la vibration d’un mirliton. Le haegeum est une vièle à deux cordes en soie au timbre feutré et délicat. Le piri est un hautbois à perce cylindrique et au timbre délicat très utilisé dans la musique de cour. Le janggu, facilement reconnaissable à sa forme en sablier, est le tambour coréen le plus répandu.
Tous les instruments jouent la même mélodie mais chacun lui applique un mode de rubato différent de sorte que les notes ne tombent pas toujours ensemble. Il en résulte une impression de strates superposées, d’épaisseur hétérophonique faite de timbres mélangés et mouvants. La chanteuse oscille entre la voix de poitrine (sokcheong : voix intérieure) et la voix de tête (seseong : voix fine) et développe sa mélodie en longues notes tenues, filées ou finement ornementées. Dans cet enchaînement de mélismes d’une exquise délicatesse, le poème éclate, le sens s’abolit, ne reste que la musique.
Les quinze chants féminins yeochang qui constituent l’un des deux pans du répertoire de gagok sont présentés ici dans leur intégralité, répartis sur les deux soirées qui se terminent, comme le veut la tradition, par l’unique chant mixte du répertoire, Taepyeongga, interprété par Kim Young- gi et Kim Dae-yoon. Le gagok a été inscrit en 2010 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
Esthétique, corporéité des croyances et identité. Colloque
Nombre de pratiques profanes ou non qui constituent le champ de recherche en ethnoscénologie s'inscrivent dans un système de croyances. Dans la perspective retenue, celles-ci se définissent pour les individus et les communautés moins par rapport à une doxa, qu'à un habitus spirituel, éthique et esthétique où se retrouvent les constituants de l'expérience sensible : textualité et transtextualité (Genette), oralité – verbal art (Bauman) –, techniques du corps, danse, musicalité, ornementation, polysensorialité, états émotionnels. Institutionnalisées, les croyances composent des synesthétiques codifiées aussi pressantes sinon plus que les doctrines dont la connaissance est souvent approximative. Les arts – au sens large du terme – paraissent être intimement associés à l’expression primordiale des croyances qui, en retour, nourrissent les imaginaires qui les fécondent. La perception attentatoire de certaines formes artistiques par le croyant ne serait-elle pas le contrecoup de cette symbiose des éléments sensibles de la conviction ?
Jean-Marie Pradier
France, Bretagne. Fest-noz. Photos
Le fest-noz, mot breton signifiant «fête de nuit», a pour origine une pratique rurale ancestrale consistant à se rassembler après des travaux collectifs pour des soirées de danse accompagnées de chants ou de musiques instrumentales.
Tombé en désuétude après la seconde guerre mondiale, le fest-noz devra attendre quelques décennies avant de connaître une renaissance, profitant du succès de la musique celtique portée par Alan Stivell. Beaucoup de jeunes découvrent la musique et la danse bretonnes et s’en emparent : le fest-noz devient une manifestation urbaine. De nombreuses associations en organisent parfois dans un but militant ou même lucratif.
Ce premier effet de mode passé, ces rassemblements se raréfient à la fin des années 1970. Toutefois, au cours des années 1980 et 1990, musiciens et danseurs bretons se réapproprient leur culture en l’approfondissant et en la consolidant, et le fest- noz retrouve une grande popularité à la fin des années 1990. Ce fort mouvement culturel breton préservera la vitalité de cette pratique et assurera le renouvellement de ses répertoires de musique et de danses qui comptent plusieurs centaines de variantes et des milliers d’airs.
En effet, si la transmission traditionnelle s’effectuait par immersion, observation et imitation, le travail de collectage réalisé par des centaines de passionnés a permis de recueillir de nombreux répertoires et de jeter les bases de nouveaux modes de transmission. Environ un millier de fest-noz ont lieu tous les ans, certains pouvant attirer jusqu’à plusieurs milliers de musiciens, chanteurs et danseurs.
Aujourd’hui, le fest-noz est au centre d’un intense bouillonnement d’expériences musicales et a généré une véritable économie culturelle. De nombreuses rencontres ont lieu entre chanteurs, musiciens et danseurs de Bretagne et d’autres cultures, et l’essor du fest-noz est devenu dans de nombreux villages un moyen d’intégration efficace.
Ce fest-noz au Théâtre équestre Zingaro rassemble les acteurs les plus reconnus en Bretagne et témoigne de la diversité des expressions que l’on peut y entendre. De la formule orchestrale récente, représentée ici par le groupe Loened Fall – centré autour de la voix de Marthe Vassallo et de Ronan Guéblez – aux formes plus anciennes, qui rappellent tous les week-ends leur modernité, à savoir les couples de chanteurs Erik Marchand / Ifig Troadeg pour la Basse Bretagne et Mathieu Hamon / Charles Quimbert pour la Haute Bretagne, sans oublier les sonneurs du pays vannetais Hervieux père et fils, le joueur de vielle Michel Colleu et l’accordéoniste Pierrick Cordonnier.