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Afghanistan. Ustad Essa Kassimi, récital de luth rohbab ; Hameed Khân, tabla. Spectacle
22-23 juin 1991
L'Afghanistan se situe au carrefour de trois grandes civilisations qui ont profondément marqué sa culture, l'Inde, l'Iran, Turcs d'Asie centrale. C'est pourquoi il est plus convenable aujourd'hui de parler de cultures musicales régionales savantes et populaires que d'une musique proprement afghane. On peut actuellement distinguer 4 grandes zones :
A l'ouest dans la région de Hérat, les musiques s'apparentent à celles de l'Iran.
Au nord, on retrouve les formes propres aux Ouzbeks et aux Tadjiks (suites vocales et instrumentales savantes ou shahmaqom, et diverses formes populaires).
Au sud, se fait sentir l'influence pakistanaise.
Le centre et la région de Kaboul sont marqués par l'influence de l'Inde du nord.
C'est cette dernière région qui nous intéresse ici. Depuis le XVIIIe siècle en effet, la musique classique afghane s'est développée plus particulièrement dans le cadre de la cour de Kaboul. Malgré de nombreux emprunts à l'art musical savant de l'Inde du nord (concept de mode musical rag calqué sur celui du raga indien, utilisation des rythmes tala d'Inde du nord dont, notamment, le cycle à 16 temps tintal), les musiciens afghans ont développé un instrumentarium relativement spécifique dont le fleuron est le luth rohbab.
Ancêtre du sarod indien, le rohbab est un luth à manche court taillé dans une seule pièce de bois de mûrier (partie la plus serrée du coeur de l'arbre). Le corps se compose de deux cavités sonores reliées entre elles et dont la plus basse est recouverte de peau. Le système de cordes se répartit de la manière suivante :
-trois cordes mélodiques principales faites de boyau et accordées à la quarte.
-deux ou trois cordes de métal pour l'exécution du parand, motifs mélodiques aigus qui sont ajoutés à la mélodie principale à la fin du rag
-treize à dix-huit cordes de métal servant à l'accompagnement et accordées selon l'échelle du rag interprété.
Les cordes sont pincées au moyen d'un petit plectre de bois.
Spécifique de l'Afghanistan, cet instrument se retrouve parfois en Ouzbekistan et au Tadjikistan sous le nom de rohbab afghani pour le distinguer du rohbab d'Asie centrale ou rohbab kashgarli qui appartient à la famille des luths à manche long.
Chaque pièce est improvisée à partir d'un mode musical ou rag. Après une courte introduction qui permet d'asseoir l'échelle et l'ambiance expressive du mode choisi, la percussion entre dans le jeu soutenant une serie de variations mélodiques tissées sur un motif principal.
Ustad Essa Kassimi, chanteur classique et maître du luth à manche court rohbab est né à Kaboul en 1932 dans une famille de musiciens traditionnels célèbres. Son grand-père maternel Ustad Mohammed Kassem qui comptait autrefois parmi les musiciens les plus importants de la cour royale, est considéré comme l'un des fondateurs de l'art classique afghan. C'est lui qui enseigna à Essa Kassimi les techniques du chant, du tabla et du rohbab. De son père, Aga Mohammed, fameux chanteur classique, Essa Kassimi a appris la maîtrise de divers instruments, dilruba, sarangi et harmonium.
Il est accompagné aux tabla par Hameed Khân. Ce jeune virtuose né à Jaïpur en 1965 est originaire d'un famille de musiciens indiens du Rajastan. Depuis son installation en France, il a notamment accompagné la chanteuse Lakshmi Shankar, les sitaristes Narendra Bataju et Krishna Bhatt avec lesquels il a enregistré deux disques compacts (réf. Elicoper system 00001 et Playasound PS 65037), ainsi que nombre d'artistes indiens et afghans.
PROGRAMME
22 juin
Gujiri todi rag
Pièce populaire
Konsia rag
23 juin
Bopalik kalyan rag
Gorok kalyan rag
Berevi rag.
Asie, Sibérie. Chants et musiques des pistes sibériennes bouriates, chortzés, kalmouks. Spectacle
6-9 juin 1991. En collaboration avec le Centre de Méthodologie et des Arts Traditionnels Krupskaïa de Moscou.
Cet ensemble se compose de trois ethnies faisant partie de groupe ouralo-altaïque et dont les langues appartiennent toutes au fonds turco-mongol.
Les Bouriates.
Les bouriates sont une population mongole installée principalement dans la région du lac Baïkal au sud de la Sibérie orientale et qui fut intégrée au monde russe dans le courant du XVIIe siècle. Anciens nomades, ils vivent de la chasse et de l'élevage des chevaux. Bien que leur histoire soit mal connue, leur présence dans cette région semble attestée bien avant l'empire gengiskhanide (XIIIe siècle). Comme en Mongolie, le système religieux bouriate repose sur la juxtaposition du chamanisme primitif et du lamaïsme d'origine tibétaine qui se développa principalement dans l'est de la Bouriatie.
L'ensemble présenté ici appartient au peuple Achabagati et vient du village d'Alté, dans la région de Kiarta, le premier marché de la soie.
Les femmes (ainsi que l'homme qui les accompagne) pratiquent le chant long a cappella et le chant court, deux formes vocales qui marquent la parenté culturelle des Bouriates avec les Mongols. Le chant long est composé d'une suite de longues phrases vocalisées et richement ornementées; au contraire le chant court est un chant syllabique soumis à un cadre métrique et rythmique strict. Ce dernier est parfois accompagné par le chanza, luth d'origine chinoise à quatre cordes pincées avec un plectre et dont la caisse de résonance est recouverte d'une peau de serpent.
Les chants longs abordent des thèmes épiques ou se consacrent aux funérailles, aux mélodies de génération, du souvenir et du regret. Ils peuvent quelquefois être un hommage à la beauté ou un hymne à l'amour. Parfois les chants longs sont exécutés par un choeur de femmes. Une soliste entonne la première phrase musicale, reprise par les autres chanteuses en tuilage sur des voix très tendues.
Les chants courts sont quelquefois chantés en duo et couvrent deux octaves. Le répertoire est généralement moins grave que celui des chants longs.
Les Chortzés.
La République de Chortzé, petite enclave escarpée, située au sud-est de la chaîne de l'Altaï, jouxte la frontière de Mongolie. Habitée par des bergers semi sédentarisés, elle s'efforce de conserver des traditions liées aux rituels ruraux et au chamanisme. Comme dans les régions altaïques voisines de Mongolie et de Touva, les hommes pratiquent la diphonie, mais ce sont surtout des kaïchi, c'est-à-dire des chanteurs de chroniques calquées sur un modèle épique. Ces kaï célèbrent un bon cavalier, un instituteur de village, un chef de région, et font référence aux anciennes légendes. Mikhaïl Kauchakov, qui vient du village de Tachagor et possède encore une soixantaine d'épopées à son répertoire, accompagne ses kaï au koymuz, un luth à caisse trilobée et deux cordes. Son style vocal, kaïlapcha, se caractérise par la raucité du timbre, ainsi qu'il est généralement d'usage dans le chant épique d'Asie centrale et de Sibérie.
Les Kalmouks.
Les Kalmouks constituent avec les Ölöt (Eleuthes), Torgout et Dzoungar, l'une des multiples branches de Oïrat ou Mongols occidentaux. En 1207 Gengis khan, proclamé empereur des Mongols depuis l'année précédente, envoie son fils Jöchi à la conquête des peuples forestiers de Sibérie méridionale. C'est ainsi que les Oïrat qui nomadisaient à l'ouest de lac Baïkal entrent dans l'orbite de la confédération mongole. Profitant de la déchéance de l'empire gengiskhanide au XIVe siècle, ils s'étendent jusqu'aux steppes de l'Altaï et font trembler toute l'Asie Centrale, le Tibet et la Russie devant leurs armes. Seules les dissensions qui opposent les différentes tribus oïrat les empêchent de reconstituer un empire des steppes comparable à celui de Gengis khan.
Les Kalmouks parviennent dans les steppes de la basse Volga vers le milieu du XVIIe siècle et sont acceptés par les Russes sous le nom de khanat kalmouk comme état tampon entre la frontière russe méridionale et les "hordes turbulentes" de Turcs musulmans. Ce khanat se fortifie pendant plus d'un siècle grâce à l'arrivée de nombreux Mongols occidentaux fuyant les troubles de la Haute-Asie. Echanges commerciaux alternent avec de nombreuses escarmouches qui les opposent aux Kirghizes,Kazakhs et Tatars. Vers la fin du XVIIIe siècle, la pression russe menée dans le région par Catherine II devient telle qu'elle provoque une rupture des relations diplomatiques entre Russes et Kalmouks. Redoutant une sédentarisation obligatoire, ces derniers commencent à se replier de l'autre côté de l'Oural et tentent de rejoindre leur région d'origine, la Dzoungarie, se heurtant dans leur périple aux Kazakhs et aux Kirghizes qui les déciment. Aujourd'hui ils vivent de part et d'autre de l'Oural, une partie d'entre eux formant les trois quarts de quelques 200.000 habitants que compte la R.S.S. des Kalmouks fondée en 1935 sur la rive droite de la basse Volga. A la suite de la campagne de Stalingrad, les Kalmouks accusés d'avoir soutenu les armées allemandes sont déportés en Sibérie. Ce n'est qu'en 1957 qu'un territoire autonome des Kalmouks est recréé sur les rives de la Volga et accède au statut de République autonome en 1958.
Le chant kalmouk reflète encore de nos jours le vieux fond culturel mongol transparaissant à la fois dans la pratique du chant long et du chant court, et certaines techniques vocales révélant d'importants sauts mélodiques. Le chant épique consacré à la geste des grands héros notamment Jangar, est interprété en longs couplets faisant alterner un timbre rauque, la diphonie et le chant à voix ouverte.
PROGRAMME
Bouriates
-Cérémonie de purification
.Incantation extraite d'un texte épique
.Appel à la bénédiction des dieux, maîtres des montagnes sacrées
.Chant d'offrande exécuté lors des sacrifices sur la montagne
-Enkherede seti-che, "Un coeur noble", chant long extrait du cycle de l'éloge des parents (solo)
-Chant de lamentation de la veuve de Gengis khan, chant long, complément au cycle épique de Gengis khan (solo)
-Zangaraybi, chant de fidélité, un jeune homme part au loin chercher sa bien-aimée (trio vocal).
-Uyetenem negenin gou, chant de génération (trio vocal).
-Magtaal, extrait du cycle de l'éloge au pays natal (duo).
-Chant d'éloge (duo).
-Chant de salutation des Bouriates de Kiarta (trio vocal)
-Bayarte temdikh, "Dans l'attente d'une bonne nouvelle" (trio)
-Duranda, chant d'amour (trio)
-Khuktekhan, chant d'éloge à l'Altaï (choeur)
Chant épique chortzé
Trois extraits de l'épopée d'Ahltyn Zaltyn, "Vent d'or":
-"L'âme qui pleure", l'épouse du héros Vent d'or sent qu'un danger le menace.
-Deux fils de Vent d'or partis enlever leurs futures épouses appellent leur père à la rescousse.
-Combat entre Vent d'or et Fer noir, oppresseur du peuple.
Chant épique kalmouk
Deux extraits de l'épopée de Jangar:
-Description de la construction du palais de Jangar par deux millions d'ouvriers.
-Jangar organise une fête en son palais avec 6012 héros. Un jeune garçon survient qui annonce qu'un étranger a enlevé tous les chevaux en signe de défi. On part à sa poursuite, des flèches sont tirées contre lui. L'une des ces flèches en volant sonne les 108 mélodies du malheur avant de traverser l'étranger et sa monture de part en part.
Bouriates.
-Baskhane gounik, chant de tristesse d'une jeune mariée exilée (duo).
-Autacha darkhan, éloge de l'orfèvre (Cisbaïkalie) (solo).
-Serochki tukhrin, "Les boucles d'oreilles" (solo).
-Zolgoye, "Nous nous rencontrerons", chant du nouvel an (trio).
-Esegin zahtiar, recommandations d'un père (solo).
-Mini morin, chant d'éloge du cheval (quatuor)
-Altay dulghidan orji yavhar, "Lorsque j'arrive dans mon village", chant satirique (quatuor).
-Zalouda durrahan duramni, "Je me prépare à la rencontre de ma bien-aimée", improvisation satirique (solo).
-Urdu ula, "Sur une pente de la montagne du sud", chant long en solo, fragment d'épopée.
-Onone eriyedere, "Au bord du fleuve Onon", chant long (solo).
-Baïkal urgyn dalemne, "Notre large mer Baïkal" (choeur).
Asie. Aux confins de l'Asie. Spectacle
Manifestation présentée par l'AFAA Jean Digne, directeur de l'AFAA
Introduction de Chérif Khaznadar, Directeur de la Maison des Cultures du Monde
Indonésie
Jegog Bali, 27-30 septembre, MCM
Originaire de la région de Jembrana dans l'ouest de Bali, le jegog, orchestre composé pour l'essentiel d'instruments de bambou, comprend dix xylophones de tailles variées, des tambours, une flûte, des cymbales et une vièle. Sa sonorité tantôt douce, tantôt éclatante accompagne les danses de flirt joged ainsi que le pencak silat, danse inspirée des mouvements de l'art martial indonésien.
Java, Musiques et danses du pays Sunda., 1-3 octobre, MCM.
Pour la musqiue de chambre tembang sunda de java, une flûte soutenue par un ensemble de cithares, interprète des mélodies melancoliques et émouvantes. 2 gamelan présentent le répertoire classique sundanais et accompagnent les danses de cour et les danses masquées de Ciberon et Cianjur.
Viêt-Nam, marionnettes sur eau. 1-13 octobre Cirque d'Hiver Bouglione.
Théâtre millénaire, il se joue sur l'eau avec de magnifiques poupées de bois aux couleurs délicates. Les manipulateurs descendent dans la mare jusqu'à la ceinture et fixent les marionnettes au long de perches qu'ils glissent sous l'eau. A l'aide de tiges et de fils, les marionnettes prennent vie : les dragons soufflent des jets liquides, les chevaux galopent, des fusées jaillissent.
Bangladesh, Chants mystiques des Baul par Shahjahan Miah. 14-20 octobre, MCM
Shahjahan Miah appartient à l'ordre du fakir Lalân Shah, grand poète mystique du XIXe siècle dont il chante les poèmes en s'accompagnant au luth dotârâ. Il est secondé par un autre chanteur, un joueur d'ektâra et un tambourinaire. Ils interprètent avec conviction une musique plaine de ferveur et de retenue.
Cambodge, Ombres dansées Sbek Tom. 24-31 octobre, MCM
De part et d'autre d'un écran défilent des figurines de cuir tenues à bout de bras par des danseurs-manipulateurs. Finement découpées et sans articulations, elles illustrent des extraits du ramayana.
Sri Lanka, Kolam, théâtre traditionnel dansé et masqué.
Le kolam, théâtre populaire sacré de dérision typiquement cinghalais, est entièrement interprété par des hommes portant d'étonnants masques de bois sculpté et peint.
Asie. Grandes voix d'Asie. Spectacle
Mugam d'Azerbaïdjan, 8-17 mars.
Maqom du Tadjikistan, 19-24 mars .
Âsik, poètes-chanteurs populaires de Turquie, 26-29 mars.
A travers les formes vocales d'Azerbaïdjan, et du Tadjikistan, et la poésie populaire chantée des Âshik turcs, ce cycle est un hommage à la voix, modèle par excellence de la création musicale en Orient.
Fidèlement suivie par les instruments, elle révèle une liberté et un pouvoir émotionnel uniques au monde. Tantôt ténue et douloureuse, tantôt large et claire, toujours ornementée, elle est l'expression idéale de l'amour tant profane que sacré.
Musique savante d'Azerbaïdjan 8-17 mars.
Avec le trio Hâji Bâbâ Huseynov
Un flot musical d'émotions sublimées.
Le mugam d'Azerbaïdjan est une des traditions musicales savantes les plus émouvantes et les plus subtiles d'Orient. Elle doit sa richesse à une double origine, persane pour la musique et turque pour la poésie. De plus en plus connue et appréciée en Occident grâce à des musiciens comme Alem Kassimov invité de nombreuses fois à Paris et dont la Maison des Cultures du Monde a édité deux disques compacts, elle doit son succès à la beauté et à l'expressivité de la voix.
Un concert de musique azéri se déroule selon une longue suite ordonnée sur des parties libres et mesurées. Cette suite ou mugam offre tout à la fois une unité et une diversité exemplaires, illustrées par l'alternance des improvisations et des compositions, du rythme libre et du rythme mesuré, des modes gais et des modes tristes, des couleurs sonores tantôt chatoyantes tantôt en demi-teintes.
Hâji Bâbâ Huseynov, héritier direct des grands maîtres du XIXe siècle, appartient à la vieille génération des interprètes de mugam azéri. Né en 1919 à Bakou, il se révèle non seulement un excellent interprète mais également un fin connaisseur de la poésie orientale. De plus il a formé les jeunes espoirs d'aujourd'hui Alem Kassimov, Agakhan Abdullaev, Sakhavet Mamedov.
Son style se démarque très fortement de celui des chanteurs de la jeune génération. Peu soucieux des effets de vibrato, de falsetto de notes suraigües, il concentre toute son attention sur la subtilité du phrasé et des nuances, chaque note révélant une intention propre en étroite symbiose avec le texte du poème chanté. Puissante, timbrée et chaleureuse, sa voix passe sans effort apparent et donne une impression d'extrême richesse dans la moindre de ses modulations. A la fois viril et raffiné, généreux et sensible, l'art d'Hâji Bâbâ Huseynov témoigne d'un imaginaire hors pair.
Il est admirablement secondé depuis de nombreuses années par le luth târ de Aqasalim Abdulaev et la vièle kemantche de Nazim Asadulaev, deux musiciens qui ont su développer avec leur soliste une complicité étroite remarquablement mise en valeur dans les pièces improvisées.
A la sonorité riche et timbrée du luth târ, répond le son langoureux et subtil de la vièle à pique qui peut aussi bien produire des sons plaintifs qui remuent l'âme que scander gaiement au rythme du daf le chant du soliste.
Tournée en Hollande, Genève, Bruxelles Montpellier, Marseille.
Chant populaire et savant du Tadjikistan 19-24 mars
Avec Dowlatmand, accompagné de Abdosattar Abdollaev
Originaire de la ville de Koulab, coeur de la tradition savante Tadjik, Dowlatmand est considéré aujourd'hui comme l'un des plus grands musiciens du Tadjikistan, et sa renommée déborde largement les frontières du pays jusqu'au Pakistan, en Inde et à Paris où il a joué en mars 90 (Auditorium des Halles)
Dowlatmand exécute aussi bien des chants populaires que les grands airs du répertoire savant. Cette musique, qu'il interprète avec un constant souci du texte littéraire, laisse également une large place à l'improvisation. Les poèmes sont généralement des oeuvres des grands poètes persans classiques (Hafiz, Saadi) ou contemporains. Ils ont pour thème l'amour, le vin, le mysticisme.
Le style vocal Tadjik est riche, très ornementé, parqué par l'apport persan, notamment dans les jeux de vocalises improvisées et réputées pour leur difficulté. L'art vocal Tadjik ignore en revanche le vibrato glottal qui est l'un des apanages du chant azerbaïdjanais
Dowlatmand n'est pas seulement chanteur, il joue également des luths setâr et dutâr, ainsi que de la petite vièle à pique ghichak. Il utilise le dûtar au registre grave dans la musique populaire, et le setâr au registre moyen pour la musique savante.
Les pièces instrumentales tantôt granes, lentes et solennelles ou au contraire vives et dansantes, conservent toujours un caractère plaintif et nostalgique.
Dowlatmand est accompagné par le percussionniste Abdosattar Abdollaev, joueur de tavlak (tambour de poterie en forme de calice) et de doïra (tambourin) considéré comme l'un des meilleurs du Tadjikistan.
Tournée à Bruxelles, Lille, Marseille.
Âshik, poètes-chanteurs populaires de Turquie 26-29 mars
Turquie orientale avec Sherif Tashliova, Coban Uglu de Kars
Turquie centrale avec Sümbül Müslüm d'Ankara
Anatolie occidentale avec Denizer Mühlis de Bursa
La musique turque, héritière des traditions arabe, parsane et byzantine est sans aucun doute l'une des plus riches et des mieux préservées du Proche-Orient.
Le cycle Musiques d'Istanbuk organisé en mars 1990 à la Maison des Cultures du Monde a révélé toute la diversité des répertoires savants et religieux. Autre aspect des musiques turques, le répertoire des âshik est extrêmement prisé par les populations villageoises et citadines. Se déplaçant de village en village, leur luth saz sous le bras, ces musiciens professionnels louent leurs services à l'occasion des mariages, de soirées organisées entre amis; ils chantent également dans les cafés populaires.
Le mot âshik (prononcer âcheuk!) signifie "amoureux", "passionné". Terme justifié car c'est la passion qui les a conduits à devenir poètes-chanteurs, passion de la musique, de la poésie, ou d'un amour déçu. Pour nombre d'entre eux il s'agit aussi d'une tradition familiale, un univers dans lequel ils ont baigné depuis leur enfance.
Leurs poèmes, qu'il s'agisse des 'uvres de leurs prédécesseurs ou de textes de leur cru sont généralement des chants d'amour, des descriptions de la nature, des ballades, des éloges de leurs hôtes, ainsi que parfois de longues épopées consacrées au héros Köroghlu, troubadour errant, poète-aventurier du XIe siècle.
L'instrument de prédilection des âshik est le luth à manche long saz. Il sert essentiellement à l'accompagnement de chant dont il suit fidèlement la mélodie et auquel il répond par de petites ritournelles. L'art vocal des âshik est très ornementé, contrairement à la musique savante caractérisée par une grande sobriété, il exprime ainsi sa parenté avec les musiques d'Iran et d'Azerbaïdjan.
Tournée en Allemagne et en Hollande.
Azerbaïdjan. Mugam, Chant classique d'Azerbaïdjan. Spectacle
8-17 mars 1991.
Dans cet immense monde des musiques orientales qui s'étend du Maghreb à l'Inde, réunissant le Proche-Orient, le Moyen-Orient, le Caucase et l'Asie centrale autour des concepts de mode (maqâm), de rythme (usul) et de suite vocale et instrumentale (nûba, wasla, fasl, maqâm), la musique classique d'Azerbaïdjan occupe une place de choix, que ce soit pour sa beauté, sa puissance d'expression et son extraordinaire vitalité, mais aussi par ce qu'elle révèle sur l'histoire de ces musiques. En effet, aujourd'hui encore, elle témoigne du formidable foisonnement culturel qui anima le Moyen-Orient, le Caucase et l'Asie centrale à partir du Xe siècle, lorsqu'al-Fârâbi se livrait à une première synthèse théorique des arts arabe, persan et byzantin.
Le Mugam ' ou chant classique ' constitue un cas très représentatif de cette symbiose culturelle car, si par l'usage de la langue turque il affirme clairement son identité azérie, il manifeste à travers son expression musicale la profonde emprise du monde persan.
La turquisation de l'Azerbaïdjan, malgré quelques signes avant-coureurs lors de l'invasion des Turcs seldjoukides au Xe siècle, ne s'amorce véritablement qu'à partir du XVIe siècle.
C'est à cette époque en effet qu'arrivent dans la région des tribus nomades chi'ites chassées d'Anatolie par le pouvoir ottoman sunnite. Au même moment on assiste à la militarisation des Séfévides, une confrérie soufie de souche turque et d'obédience chi'ite, née au XIVe siècle à Ardabil (aujourd'hui dans la province azerbaïdjanaise d'Iran). En 1501, les Séfévides prennent pied à Tabriz et proclament un nouvel État fondé sur le shiisme duodécimain. Ils ne tardent pas à étendre leur autorité sur tout l'Iran ainsi que sur le Shirwân (Azerbaïdjan actuel). À la chute des Séfévides au milieu du XVIIe siècle, l'Iran connaît une période troublée où se manifestent les visées expansionnistes des Russes et des Ottomans, puis est repris en main par la dynastie des Qâjârs. Bien que d'origine turque, les Séfévides et les Qâjârs favorisent le rayonnement de la culture persane, y compris en Azerbaïdjan où la langue turque ne s'affirme définitivement qu'au XVIIe siècle. Par le traité de Golestan (1813), les Russes qui se sont rendus maîtres de la Transcaucasie, imposent à l'Iran de leur céder le Shirwân. Le 20 avril 1928 cette région devient la République Socialiste Soviétique d'Azerbaïdjan (à l'exception de la partie méridionale qui demeure iranienne) puis acquiert sa véritable indépendance lors de l'éclatement de l'URSS en 1992.
Le XIXe siècle représente pour la partie de l'Azerbaïdjan appartenant à l'empire russe une grande période d'essor musical. Les villes de Tiflis (aujourd'hui Tbilissi en Géorgie), Shusha, Bakou voient se fonder des associations d'amateurs, des conservatoires et des théâtres, se développer le mécénat et apparaître de grandes figures du monde artistique.
Mais la musique d'Azerbaïdjan se joue aussi à l'occasion des fêtes de mariage, les toy, et bien que savante, elle puise dans cette pratique une esthétique populaire qu'elle conservera jusqu'à aujourd'hui. C'est à cette époque que les Azéris fixent leur système modal et établissent le répertoire des Mugam dans ses limites actuelles.
Les Azéris vivant dans la partie méridionale (Iran) ne connaîtront pas ce développement du fait de l'emprise extrêmement autoritaire de la culture persane dans toutes les provinces de l'Iran.
Le Mugam
Comme toutes les musiques savantes du Moyen-Orient, la musique d'Azerbaïdjan est monodique et modale. Il serait plus correct de dire qu'elle est hétérophonique, puisque chaque musicien, qu'il soit chanteur, joueur de târ (luth) ou de kemânche (vièle) bénéficie d'une relative autonomie dans l'interprétation de la mélodie (ornements, décalages, chevauchements, notes additionnelles'). Toutes les mélodies, composées ou semi-improvisées, de rythme libre ou mesuré, se déroulent dans le cadre d'un ou plusieurs modes (mugam).
Chaque mode se caractérise par une échelle, une hiérarchie interne de ses degrés et une expressivité (sentiment modal) spécifiques.
Les mugam sont classés en onze modes principaux ou dastiagi et plusieurs modes secondaires. Chaque dastiag suppose un développement mélodique et modal et sert donc de base à un cycle de pièces vocales et instrumentales également appelé Mugam. Afin d'être identifié, le Mugam reçoit donc le nom de son mode principal, par exemple le Mugam Segâh, basé sur le mode segâh et dont on peut aussi trouver des variantes : Mugam Segâh Zâbol, Mugam Khârej Segâh, Mugam Mirza Husayn Segâh, etc.
Le Mugam est formé d'une suite de séquences mélodiques de rythme libre. Ces séquences exploitent le mode principal, modulent dans des modes secondaires (shobe) aisément identifiables grâce à leurs clichés mélodiques, et peuvent être aussi des mélodies-types (gushe). Elles alternent avec des pièces mesurées vocales (tesnif) et instrumentales (daramad, reng, diringa).
Ainsi, outre le mode de base, le cycle du Mugam passe en revue plusieurs modes secondaires dont la succession est prédéterminée et qui apportent à l'oeuvre des éclairages expressifs nouveaux. Si cet ordre est relativement fixe, il varie cependant en fonction des écoles et des maîtres qui les interprètent. D'une version à une autre, on peut observer des différences notables, tant dans la durée que dans l'organisation interne du Mugam. C'est pourquoi on peut considérer ce dernier comme une musique à «géométrie variable».
Le répertoire des Mugam ne s'appuie pas seulement sur les dastiagi. Certains modes secondaires se voient promus au rang de mode principal et permettent de développer leurs propres Mugam, généralement moins longs et de structure moins complexe que ceux qui sont fondés sur les dastiagi : c'est le cas par exemple du mode shekaste-i-fars qui apparaît en tant que mode secondaire dans les Mugam Rast, Mâhur, Bayâti Qâjâr, Segâh et Shur mais sert également de base au Mugam Shekaste-i-fars.
Tel un flot musical proposant au détour de chaque méandre la contemplation d'un paysage inédit, le Mugam offre tout à la fois une unité et une diversité exemplaires.
Cette diversité est illustrée par l'alternance des compositions et des semi-improvisations, des rythmes libres et mesurés, des mesures binaires et ternaires, des modes gais et tristes, des couleurs sonores tantôt chatoyantes tantôt en demi-teintes.
Inversement, l'unité du Mugam résulte de la manière dont tous ces éléments sont articulés enchaînés sans interruption. Chaque Mugam se déroule selon un parcours progressif dans lequel les modulations sont souvent préparées par un subtil jeu d'altérations ou une modification de la hiérarchie des degrés. Cela conduit graduellement à une transformation du mode sans qu'il soit toujours possible de déterminer à quel moment précis s'opère la modulation. Ce processus, fonctionne comme en "fondu-enchaîné", s'appuie sur un principe quasi-universel en musique : l'ambiguïté. Ce principe que l'on voit appliqué ici à la modalité ne se limite à des considérations formelles, mais contribue pour une large part à la richesse esthétique de la musique azérie et au renforcement de l'expression poétique.
Les poèmes, librement choisis par les interprètes, sont pour la plupart des ghazal, un genre né vers le XIIIe siècle et dont les premiers grands maîtres persans furent Sa'adi et Hâfiz. Fondé sur la métrique arabe classique, le ghazal se compose de plusieurs distiques de même rime mais se distinguant les uns des autres par une relative autonomie thématique.
Ainsi, si chaque strophe entretient des relations sémantiques avec celles qui la précèdent et la suivent, elle fonctionne également de manière indépendante. Ceci a une incidence remarquable au plan musical : le poème pouvant alors se plier à un éclatement dans le temps, il autorise les mélismes, les vocalises, les intermèdes instrumentaux et les modulations qui, loin de le diluer, viennent au contraire l'enrichir.
Essentiellement lyrique, le ghazal chante l'amour, l'amitié, la foi et sert parfois de support à une réflexion morale. Il est encore considéré aujourd'hui, de la Méditerranée à l'Inde, comme l'un des genres majeurs de la poésie orientale.
L'interprétation et les instruments
L'exécution du Mugam nécessite un chanteur (khânande), qui joue aussi du tambour sur cadre daf, et deux musiciens (sâzande) jouant du luth târ et de la vièle kemânche. Le târ répond directement aux phrases chantées, tandis que la kemânche soutient tantôt le chanteur tantôt le târ.
Si le cadre du Mugam demeure assez souple et offre dont une certaine liberté au chanteur, ce dernier se doit néanmoins d'en avoir assimilé intimement les règles formelles. C'est à ce prix seulement qu'il peut mesurer son espace de liberté et se renouveler sans pour autant dénaturer l'esprit de l'oeuvre.
Le style vocal se caractérise par sa flexibilité, une ornementation riche et un vibrato glottalisé (yodel ou jodl) qui est utilisé dans les points culminants de la mélodie. Le poème, énoncé vers par vers est entrecoupé de vocalises ponctuées sur leurs notes finales par d'impressionnants glissandi yodlés.
Le târ est un luth à manche long. Il connut sous le règne des Qâjârs une vogue qui ne s'est pas démentie depuis. Le musicologue et organologue Curt Sachs lui donne le nom de luth étranglé en raison du double renflement de sa caisse. Taillée dans du bois de mûrier ou plus souvent aujourd'hui en noyer, celle-ci est recouverte de peau d'agneau ou de péricarde de b'uf. Le târ azéri, plus petit que le târ généralement utilisé en Iran, comporte trois rangs de doubles-cordes en métal, plus deux doubles-cordes aiguës et une corde grave qui sont pincées à vide et servent de bourdon. L'accord varie selon les modes interprétés. Le musicien le tient très haut en travers de la poitrine («sur le coeur ») et pince les cordes au moyen d'un onglet métallique, créant des effets de vibrato en secouant sèchement l'instrument.
La kemânche qui prit son essor sous les Séfévides est une petite vièle à pique posée sur le genou. La caisse en bois de mûrier, de forme sphérique, est recouverte d'une peau de poisson.
Les quatre cordes en acier jouées tantôt avec l'archet, tantôt en pizzicato, peuvent aussi bien produire des sons plaintifs que scander gaiement le chant du khânande.
Le daf est un tambour sur cadre dont la membrane, très fine, presque transparente, est généralement faite de peau de silure ou de péricarde de b'uf. Le pourtour intérieur du cadre est semé d'anneaux métalliques qui résonnent à chaque coup porté sur la peau ou le bord de l'instrument.
Interprètes :
Hâji Bâbâ Huseynov représente à l'heure actuelle la plus vieille génération vivante des interprètes de mugam azéri. Né en 1919 à Bakou, il suit l'enseignement traditionnel des grands maîtres : Meshedi Malik Mansûr, Aga Sayyid, Sayyid Mirbabayev. Depuis ses débuts en 1945, il se révèle comme un excellent interprète mais également comme un fin connaisseur de la poésie orientale. On lui doit notamment d'avoir sauvé de l'oubli de nombreux tesnif, devenus depuis des classiques du genre et d'avoir écrit quelque 300 ghazal. Parallèlement à sa carrière artistique, Hâji Bâbâ Huseynov joue depuis 1962 un rôle pédagogique éminent dans le cadre de l'Académie de Musique de Bakou où il a formé des jeunes espoirs d'aujourd'hui : Alem Kassimov, Agakhan Abdullaev, Sakhavet Mamedov. Il est enfin régulièrement appelé comme conseiller auprès des comités d'organisation des festivals de mugam.
Puissante, timbrée et chaleureuse, sa voix passe sans effort apparent et donne une impression d'extrême richesse dans la moindre de ses modulations. A la fois viril et raffiné, généreux et sensible, l'art d'Hâji Bâbâ Huseynov, tout en subtilité, témoigne d'un imaginaire hors pair. Il est admirablement secondé depuis de nombreuses années par le târ de Aqasalim Abdullaev et le kemanche de Nazim Asadullaev, deux musiciens qui ont su développer avec leur soliste une complicité étroite remarquablement mise en valeur dans les pièces improvisées.
Un programme différent chaque soir
Azerbaïdjan. Trio Jabbâr Garyaghdu Oghlu. Spectacle
30-31 mai 1991
Dans cet immense monde des musiques orientales qui s'étend du Maghreb à l'Inde, réunissant le Proche-Orient, le Moyen-Orient, le Caucase et l'Asie centrale autour des concepts de mode (maqâm), de rythme (usul) et de suite vocale et instrumentale (nûba, wasla, fasl, maqâm), la musique classique d'Azerbaïdjan occupe une place de choix, que ce soit pour sa beauté, sa puissance d'expression et son extraordinaire vitalité, mais aussi par ce qu'elle révèle sur l'histoire de ces musiques. En effet, aujourd'hui encore, elle témoigne du formidable foisonnement culturel qui anima le Moyen-Orient, le Caucase et l'Asie centrale à partir du Xe siècle, lorsqu'al-Fârâbi se livrait à une première synthèse théorique des arts arabe, persan et byzantin.
Le Mugam ' ou chant classique ' constitue un cas très représentatif de cette symbiose culturelle car, si par l'usage de la langue turque il affirme clairement son identité azérie, il manifeste à travers son expression musicale la profonde emprise du monde persan.
La turquisation de l'Azerbaïdjan, malgré quelques signes avant-coureurs lors de l'invasion des Turcs seldjoukides au Xe siècle, ne s'amorce véritablement qu'à partir du XVIe siècle.
C'est à cette époque en effet qu'arrivent dans la région des tribus nomades shi'ites chassées d'Anatolie par le pouvoir ottoman sunnite. Au même moment on assiste à la militarisation des Séfévides, une confrérie soufie de souche turque et d'obédience shi'ite, née au XIVe siècle à Ardabil (aujourd'hui dans la province azerbaïdjanaise d'Iran). En 1501, les Séfévides prennent pied à Tabriz et proclament un nouvel État fondé sur le shi'isme duodécimain. Ils ne tardent pas à étendre leur autorité sur tout l'Iran ainsi que sur le Shirwân (Azerbaïdjan actuel). À la chute des Séfévides au milieu du XVIIe siècle, l'Iran connaît une période troublée où se manifestent les visées expansionnistes des Russes et des Ottomans, puis est repris en main par la dynastie des
Qâjârs. Bien que d'origine turque, les Séfévides et les Qâjârs favorisent le rayonnement de la culture persane, y compris en Azerbaïdjan où la langue turque ne s'affirme définitivement
qu'au XVIIe siècle. Par le traité de Golestan (1813), les Russes qui se sont rendus maîtres de la Transcaucasie, imposent à l'Iran de leur céder le Shirwân. Le 20 avril 1928 cette région devient la République Socialiste Soviétique d'Azerbaïdjan (à l'exception de la partie méridionale
qui demeure iranienne) puis acquiert sa véritable indépendance lors de l'éclatement de l'URSS en 1992.
Le XIXe siècle représente pour la partie de l'Azerbaïdjan appartenant à l'empire russe une grande période d'essor musical. Les villes de Tiflis (aujourd'hui Tbilissi en Géorgie), Shusha, Bakou voient se fonder des associations d'amateurs, des conservatoires et des théâtres, se développer le mécénat et apparaître de grandes figures du monde artistique.
Mais la musique d'Azerbaïdjan se joue aussi à l'occasion des fêtes de mariage, les toy, et bien que savante, elle puise dans cette pratique une esthétique populaire qu'elle conservera jusqu'à aujourd'hui. C'est à cette époque que les Azéris fixent leur système modal et établissent le répertoire des Mugam dans ses limites actuelles.
Les Azéris vivant dans la partie méridionale (Iran) ne connaîtront pas ce développement du fait de l'emprise extrêmement autoritaire de la culture persane dans toutes les provinces de l'Iran.
Le Mugam
Comme toutes les musiques savantes du Moyen-Orient, la musique d'Azerbaïdjan est monodique et modale. Il serait plus correct de dire qu'elle est hétérophonique, puisque chaque musicien, qu'il soit chanteur, joueur de târ (luth) ou de kemânche (vièle) bénéficie d'une relative autonomie dans l'interprétation de la mélodie (ornements, décalages, chevauchements, notes additionnelles'). Toutes les mélodies, composées ou semi-improvisées, de rythme libre ou mesuré, se déroulent dans le cadre d'un ou plusieurs modes (mug'am).
Chaque mode se caractérise par une échelle, une hiérarchie interne de ses degrés et une expressivité (sentiment modal) spécifiques.
Les mugam sont classés en onze modes principaux ou dastiagi et plusieurs modes secondaires. Chaque dastiag suppose un développement mélodique et modal et sert donc de base à un cycle de pièces vocales et instrumentales également appelé Mugam. Afin d'être identifié, le Mugam reçoit donc le nom de son mode principal, par exemple le Mugam Segâh, basé sur le mode segâh et dont on peut aussi trouver des variantes : Mugam Segâh Zâbol, Mugam Khârej Segâh, Mugam Mirza Husayn Segâh, etc.
Le Mugam est formé d'une suite de séquences mélodiques de rythme libre. Ces séquences exploitent le mode principal, modulent dans des modes secondaires (shobe) aisément identifiables grâce à leurs clichés mélodiques, et peuvent être aussi des mélodies-types (gushe). Elles alternent avec des pièces mesurées vocales (tesnif) et instrumentales (daramad, reng, diringa).
Ainsi, outre le mode de base, le cycle du Mugam passe en revue plusieurs modes secondaires dont la succession est prédéterminée et qui apportent à l'oeuvre des éclairages expressifs nouveaux. Si cet ordre est relativement fixe, il varie cependant en fonction des écoles et des maîtres qui les interprètent. D'une version à une autre, on peut observer des différences notables, tant dans la durée que dans l'organisation interne du Mugam. C'est pourquoi on peut considérer ce dernier comme une musique à «géométrie variable».
Le répertoire des Mugam ne s'appuie pas seulement sur les dastiagi. Certains modes secondaires se voient promus au rang de mode principal et permettent de développer leurs propres Mugam, généralement moins longs et de structure moins complexe que ceux qui sont fondés sur les dastiagi : c'est le cas par exemple du mode shekaste-i-fars qui apparaît en tant que mode secondaire dans les Mugam Rast, Mâhur, Bayâti Qâjâr, Segâh et Shur mais sert également de base au Mugam Shekaste-i-fars.
Tel un flot musical proposant au détour de chaque méandre la contemplation d'un paysage inédit, le Mugam offre tout à la fois une unité et une diversité exemplaires.
Cette diversité est illustrée par l'alternance des compositions et des semi-improvisations, des rythmes libres et mesurés, des mesures binaires et ternaires, des modes gais et tristes, des couleurs sonores tantôt chatoyantes tantôt en demi-teintes.
Inversement, l'unité du Mugam résulte de la manière dont tous ces éléments sont articulés enchaînés sans interruption. Chaque Mugam se déroule selon un parcours progressif dans lequel les modulations sont souvent préparées par un subtil jeu d'altérations ou une modification de la hiérarchie des degrés. Cela conduit graduellement à une transformation du mode sans qu'il soit toujours possible de déterminer à quel moment précis s'opère la modulation. Ce processus, fonctionne comme en «fondu-enchaîné», s'appuie sur un principe quasi-universel en musique : l'ambiguïté. Ce principe que l'on voit appliqué ici à la modalité ne se limite à des considérations formelles, mais contribue pour une large part à la richesse esthétique de la musique azérie et au renforcement de l'expression poétique.
Les poèmes, librement choisis par les interprètes, sont pour la plupart des ghazal, un genre né vers le XIIIe siècle et dont les premiers grands maîtres persans furent Sa'adi et Hâfiz. Fondé sur la métrique arabe classique, le ghazal se compose de plusieurs distiques de même rime mais se distinguant les uns des autres par une relative autonomie thématique.
Ainsi, si chaque strophe entretient des relations sémantiques avec celles qui la précèdent et la suivent, elle fonctionne également de manière indépendante. Ceci a une incidence remarquable au plan musical : le poème pouvant alors se plier à un éclatement dans le temps, il autorise les mélismes, les vocalises, les intermèdes instrumentaux et les modulations qui, loin de le diluer, viennent au contraire l'enrichir.
Essentiellement lyrique, le ghazal chante l'amour, l'amitié, la foi et sert parfois de support à une réflexion morale. Il est encore considéré aujourd'hui, de la Méditerranée à l'Inde, comme l'un des genres majeurs de la poésie orientale.
L'interprétation et les instruments
L'exécution du Mugam nécessite un chanteur (khânande), qui joue aussi du tambour sur cadre daf, et deux musiciens (sâzande) jouant du luth târ et de la vièle kemânche. Le târ répond directement aux phrases chantées, tandis que la kemânche soutient tantôt le chanteur tantôt le târ.
Si le cadre du Mugam demeure assez souple et offre dont une certaine liberté au chanteur, ce
dernier se doit néanmoins d'en avoir assimilé intimement les règles formelles. C'est à ce prix seulement qu'il peut mesurer son espace de liberté et se renouveler sans pour autant dénaturer l'esprit de l'oeuvre.
Le style vocal se caractérise par sa flexibilité, une ornementation riche et un vibrato glottalisé
(yodel) qui est utilisé dans les points culminants de la mélodie. Le poème, énoncé vers par vers est entrecoupé de vocalises ponctuées sur leurs notes finales par d'impressionnants glissandi yodlés.
Le târ est un luth à manche long. Il connut sous le règne des Qâjârs une vogue qui ne s'est pas démentie depuis. Le musicologue et organologue Curt Sachs lui donne le nom de luth étranglé en raison du double renflement de sa caisse. Taillée dans du bois de mûrier ou plus souvent aujourd'hui en noyer, celle-ci est recouverte de peau d'agneau ou de péricarde de b'uf. Le târazéri, plus petit que le târ généralement utilisé en Iran, comporte trois rangs de doubles-cordes en métal, plus deux doubles-cordes aiguës et une corde grave qui sont pincées à vide et servent de bourdon. L'accord varie selon les modes interprétés. Le musicien le tient très haut en travers de la poitrine («sur le coeur ») et pince les cordes au moyen d'un onglet métallique, créant des effets de vibrato en secouant sèchement l'instrument.
La kemânche qui prit son essor sous les Séfévides est une petite vièle à pique posée sur le genou. La caisse en bois de mûrier, de forme sphérique, est recouverte d'une peau de poisson.
Les quatre cordes en acier jouées tantôt avec l'archet, tantôt en pizzicato, peuvent
aussi bien produire des sons plaintifs que scander gaiement le chant du khânande.
Le daf est un tambour sur cadre dont la membrane, très fine, presque transparente, est généralement faite de peau de silure ou de péricarde de b'uf. Le pourtour intérieur du cadre est semé d'anneaux métalliques qui résonnent à chaque coup porté sur la peau ou le bord de l'instrument.
Les interprètes :
Zayid Gouliev et ses deux musiciens qui se sont déjà largement fait connaître en Azerbaïdjan, dans les autres républiques caucasiennes et à l'étranger sous le nom de Trio Jabbâr Garyaghdu Oghlu (un des plus grand maîtres du tournant de ce siècle), représentent, comme le chanteur déjà célèbre Alem Kassimov, la jeune génération montante des mugamistes azeris. Zayed Gouliev se distingue de ses pairs par une voix à la fois souple et puissante dont il tire des effets spectaculaires. Ses accompagnateurs avec lesquels il travaille depuis de nombreuses années et réputés comme des virtuoses de târ et du kemânche, ont su développer une qualité essentielle dans l'art du mugam : la complicité.
Bangladesh. Chant mystique Baul. Shahjahan Miah. Affiche
14-20 octobre 1991
Bangladesh. Chants mystiques Bauls, dans la tradition de la confrérie Lâlan Shâhî par Muhammad Shahjahan Miah. Spectacle
14-20 octobre 1991
Baul est un terme bengali signifiant illuminé, cinglé par le vent au point d'en perdre la santé, et donc par extension fou de Dieu, détaché du monde, chercheur de vérité. Ce mot désigne des mystiques consacrant leur vie à la méditation, au chant, à la musique et à l'errance.
Les Bauls sont généralement considérés comme des bardes illettrés allant de village en village en mendiant leur nourriture, personnages sympathiques qui, en dépit de leurs origines sociales jugées incertaines, mettent en lumière à travers leur recherche de l'Homme de Coeur, maints secrets concernant la finalité de l'existence humaine.
Le baulisme a ceci de particulier qu'il clame son universalisme en rejetant le sectarisme, le système des castes et les barrières religieuses.
Historiquement, il prend sa source vers le XVIIe siècle dans le mouvement vaïshnava qui s'est épanoui assez brièvement autour du sage et savant Chaytanya. Bien qu'appartenant à la caste des brahmanes c'est-à-dire des garants de l'orthodoxie théologique et rituelle hindoue, Chaitanya ne reconnaissait ni les castes ni les croyances liées au système traditionnel. Il prônait une religion d'amour, s'appuyant sur le texte de la Gita Govinda composé au XIIe siècle par le poète Jayadeva. Cette oeuvre célèbre décrit l'amour de Krishna (avatar de Vishnû) et de Râdhâ (celle qui médite), amour symbolisant l'union entre le divin et l'humain. Cet amour-fusion trouve sa représentation en la personne de Chaytanya lui-même puisqu'il incarne à la fois un avatar de Krishna et la languissante Râdhâ, niant ainsi jusqu'à la différence entre l'homme et la femme. La pensée vaïshnave s'exprime dans un discours poétique et musical, riche en images, notamment érotiques, qui célèbrent tout ensemble Amour spirituel et Amour charnel.
Après le XVIIe siècle le mouvement vaïshnave entre en décadence et tombe par souci de prosélytisme dans l'artifice et le conventionnel. Dans une certaine mesure les Bauls aux manières moins raffinées et au style plus rural vont reprendre le flambeau de cette ferveur universaliste, se réclamant de Jayadeva, de Chaytanya et de la célèbre poétesse Mira Bai.
Si les Bauls sont très présents dans le Bengale occidental majoritairement hindouiste, ils sont également nombreux au Bengale oriental (Bangladesh) où l'islam s'est implanté à partir du XIIIe siècle et dont l'essor doit beaucoup aux mouvements soufis et plus particulièrement à l'ordre indo-musulman de la Chistiya. Au contenu hérité du vaïshnavisme vient donc se superposer dans la poésie baul un discours éminemment spirituel propre au soufisme.
Au XIXe siècle, le baulisme connaît dans le Bengale oriental un essor remarquable. On dénombre cinq ordres principaux ; Kartâbhajâ, Sâhebdhanî, Khushi Bishvâsî, Balarâmî, et Lâlan Shâhî.
Lâlan Shâh
Jusqu'à son installation à Siuriya près de Kushtia où il fonde un akhra (centre religieux), on connaît très peu de chose des origines et de la vie de Lâlan Shâh, si ce n'est qu'il en consacra la plus grande partie en pélerinages. Etait-il hindou ou musulman ? Lui-même semble avoir attaché peu d'intérêt à cette question tant il lui importait d'élever la quête du divin au-delà des frontières religieuses.
Poésie dans le programme'.
Une fois retiré dans l'akhra de Siuriya, Lâlan Shâh se consacre à la méditation et à la poésie chantée; les chercheurs lui attribuent environ 600 chants métaphysiques ou bhavgân et la tradition populaire de 2000 à 90000. Selon les chercheurs bangladeshi, l'usage même du terme baul semble indifférent aux adeptes de cette confrérie. Et dans les villages où l'on compte de nombreux disciples de Lâlan Shâh, ceux-ci sont couramment appelés nadar fakir (fakirs à la tête rasée) ou besharâ fakir (fakir irréligieux). Actuellement on évalue les adeptes de l'ordre Lâlan Shâhî à environ 10000 personnes.
Sur le plan musical les bauls pratiquent deux styles différents selon qu'ils vivent en akhra ou sont itinérants. Dans le premier cas, celui de Shahjahan Miah, les musiciens jouent assis, leur mélodie est douce, calme, intime. Dans le second, ils jouent debout et dansent dans un lieu en plein air, leurs voix sont fortes et leur style brutal et extraverti.
Deux exemples de poèmes attribués à Lâlan Shâh (cf. programme)
Les instruments.
Dotara, luth à quatre cordes dont la caisse en bois est recouverte de peau. Cet instrument se retrouve dans toutes les traditions musicales populaires du Bangladesh. Il est ici tenu par le chanteur Shahjahan Miah.
Ektara, instrument emblématique des bauls, probablement parce qu'il tire son origine de gopîyantra, l'instrument des bergères de Krishna. Unique en son genre dans le monde, il se compose d'un petit cylindre de bois recouvert à son extrémité inférieure d'une peau à laquelle est attachée une corde. Cette corde traverse le cylindre et vient se fixer de l'autre côté à une tige de bambou fendue en deux. Le musicien pince la corde tout en pesant sur cette tige faisant ainsi varier la hauteur du son.
Un percussionniste accompagne l'ensemble sur un tambour à deux peaux mridangam ou sur des tabla et un second chanteur marque le tempo sur deux petites clochettes jhuri.
Muhammad Shahjahan Miah vit dans le village de Taota, sur la rivière Padma, au nord de Dacca. Il chante et joue du dotara depuis son enfance. Frappé de cécité à l'âge de 14 ans à la suite d'une typhoïde, il s'est depuis consacré entièrement à la méditation et au chant. C'est son guru, Muhammad Danej Munshi, qui lui transmit le superbe répertoire des poèmes chantés de Lâlan Shâh. Si de nos jours, ces chants sont désormais inclus dans les programmes de concerts classiques des chanteurs professionnels de Dacca, Muhammad Shahjahan Miah fait encore partie de ceux qui, par leur choix religieux, en restituent toute la ferveur émotionnelle.
Bangladesh. Photographes. La peinture bengalaise contemporaine. Affiche
29 octobre - 15 novembre 1991 (photographies) Maison des Sciences de l'Homme
18 octobre - 16 novembre 1991 (peintures) Espace Art et Patrimoine
Brésil. Le Drame des Camélias. Opéra feuilleton. Affiche
4-28 avril 1991
Paillettes, sang et rire.
Brésil. Opéras feuilletons : Le drame des Camélias, La folle du jardin. D'Américo Barreto et Fabio Costa, mise en scène d'Américo Barreto. Mission de terrain. Photos
Mission de terrain réalisée en mars 1991, par Françoise Gründ.
Distribution
-Comédiens :
Maria Rossiter
Gladis Farah
Gilza Melo
Marcia Renata
Jaime Berenguer
Renato Farias
Marcus Suiciniv
Bernardo Lucena
Henrique Celibi
Tony Mendes
Tony Vieira
Américo Barreto
Robson Pinto
Ricardo Pinto
Tony Oliveira.
Mise en scène : Américo Barreto
Décors et lumières : Fabio Costa
Son : Helio Oliveira
Technique : Ricardo Pinto, Tony Oliveira.
Programme.
O Drama das Camelias. Le drame des camélias (durée 55 min)
Un naufrage déverse sur une côte brésilienne un flot de rescapés. Parmi eux, les Camélias, deux soeurs siamoises attachées par le buste. Comme tous les naufragés, elles se retrouvent livrées à la montée de leurs instincts. Instincts contraires, l'une est assoiffée de sexe, l'autre de religion. La violence de leurs passions, la peur de la douleur et de la mort, l'excitation du sang, s'expriment par des airs d'opéras distordus, malmenés, entrechoqués. Il faut les séparer.
A l'aide d'une scie égoïne des infirmiers de fortune tentent de désunir les deux corps. Une charge de dynamite aura raison de cette entreprise. Une Camélia se voue à la vierge (perruque de boa bleue, ceinture de strass, large poitrine velue), qui la sauve des verges gloutonnes d'une bande de diables priapiques.
Après avoir quitté leur grande robe lacée, les deux Camélias embarquent dans un bateau providentiel vers une destination inconnue.
A Louca do Jardim. La folle du jardin (durée 20 min)
Dans un XVIIIe siècle tropical de pacotille, le seigneur Alberto découvre qu'il est cocu. Il bat sa femme comme plâtre.
Les esclaves, totalement dévoués à leur maîtresse, tentent par le poison de la débarrasser de l'époux importun. Mais c'est l'amant qui boit la coupe fatale.
Alberto décide alors de chasser l'infidèle, mais apprenant qu'elle est enceinte, il lui arrache l'enfant du ventre, une petite fille. Mise à la porte, la dame erre en proie à la folie du désespoir, et prie la Vierge de lui rendre son enfant.
Les années passent. La jeune fille entre dans sa seizième année. Pour son anniversaire, une grande fête est organisée dans le jardin. Une mendiante apparaît qui demande l'aumône. Prise de pitié, la jeune fille l'interroge sur l'histoire de sa vie et découvre qu'elle est sa mère; elles tombent dans les bras l'une de l'autre.
Ce récit édifiant se conclue par le meurtre du seigneur Alberto.
Brésil. Opéras feuilletons : Le drame des Camélias, La folle du jardin. D'Américo Barreto et Fabio Costa, mise en scène d'Américo Barreto. Photos
Distribution
-Comédiens :
Maria Rossiter
Gladis Farah
Gilza Melo
Marcia Renata
Jaime Berenguer
Renato Farias
Marcus Suiciniv
Bernardo Lucena
Henrique Celibi
Tony Mendes
Tony Vieira
Américo Barreto
Robson Pinto
Ricardo Pinto
Tony Oliveira.
Mise en scène : Américo Barreto
Décors et lumières : Fabio Costa
Son : Helio Oliveira
Technique : Ricardo Pinto, Tony Oliveira.
Programme.
O Drama das Camelias. Le drame des camélias (durée 55 min)
Un naufrage déverse sur une côte brésilienne un flot de rescapés. Parmi eux, les Camélias, deux soeurs siamoises attachées par le buste. Comme tous les naufragés, elles se retrouvent livrées à la montée de leurs instincts. Instincts contraires, l'une est assoiffée de sexe, l'autre de religion. La violence de leurs passions, la peur de la douleur et de la mort, l'excitation du sang, s'expriment par des airs d'opéras distordus, malmenés, entrechoqués. Il faut les séparer.
A l'aide d'une scie égoïne des infirmiers de fortune tentent de désunir les deux corps. Une charge de dynamite aura raison de cette entreprise. Une Camélia se voue à la vierge (perruque de boa bleue, ceinture de strass, large poitrine velue), qui la sauve des verges gloutonnes d'une bande de diables priapiques.
Après avoir quitté leur grande robe lacée, les deux Camélias embarquent dans un bateau providentiel vers une destination inconnue.
A Louca do Jardim. La folle du jardin (durée 20 min)
Dans un XVIIIe siècle tropical de pacotille, le seigneur Alberto découvre qu'il est cocu. Il bat sa femme comme plâtre.
Les esclaves, totalement dévoués à leur maîtresse, tentent par le poison de la débarrasser de l'époux importun. Mais c'est l'amant qui boit la coupe fatale.
Alberto décide alors de chasser l'infidèle, mais apprenant qu'elle est enceinte, il lui arrache l'enfant du ventre, une petite fille. Mise à la porte, la dame erre en proie à la folie du désespoir, et prie la Vierge de lui rendre son enfant.
Les années passent. La jeune fille entre dans sa seizième année. Pour son anniversaire, une grande fête est organisée dans le jardin. Une mendiante apparaît qui demande l'aumône. Prise de pitié, la jeune fille l'interroge sur l'histoire de sa vie et découvre qu'elle est sa mère; elles tombent dans les bras l'une de l'autre.
Ce récit édifiant se conclue par le meurtre du seigneur Alberto.
Brésil. Opéras-feuilletons du Brésil. Le drame des Camélias, La folle du jardin. Spectacle
4-28 avril 1991
Un théâtre de dérision issu du Carnaval avec ses paillettes, ses plumes, mais aussi de toute cette culture brésilienne empreinte de cruauté et d'érotisme. L'intrigue de ces deux pièces, inspirée du style des séries télévisées, est traitée par l'irrespect et le rire dans une esthétique visuelle contemporaine.
Dramaturges et metteurs en scène, Américo Barreto et Fabio Costa nous proposent une esthétique nouvelle. Leur vision, proche du spectacle de rue par l'emploi de décors et d'accessoires légers et éphémères, est aussi celle de l'imagerie populaire brésilienne : esclaves noires aux seins nus couronnées de fruits en plastique, robe à panier aux couleurs de confiseur, processions religieuses parodiques...
Nourrissant leur force créatrice de matériaux typiquement brésiliens, le Carnaval et ses paillettes, les télé-novellas (soap operas et sit-coms), mais aussi de l'amour du bel canto (qui ne se rappelle l'opéra de Manaus en pleine Amazonie ?), Américo Barreto et Fabio Costa les mettent au service de la dérision. Leur point de départ est triple : les parades de rues du Carnaval, le théâtre bourgeois, et la Vivencia, expression théâtrale briseuse de tabous, née en 1970 dans les favelas de Recife.
En moins de deux ans ils forgent un théâtre bouffe explosif et hilarant où intervient une nouvelle conscience du temps : accélération des musiques de scènes, effets de ralentis visuels, normalisation des durées des pièces sur celle des feuilletons TV.
Leurs spectacles comprennent très peu de dialogues et se présentent comme une pantomime exacerbée, jouée sur un fond d'airs d'opéras accélérés que les comédiens chantent en play-back, avec un art consommé digne des premiers Chaplin.
La bande sonore, comme les costumes et les accessoires, témoigne d'une même volonté de suggestion, collage de matériaux de récupération puisés dans une discothèque aussi vétuste qu'improbable.
Tout dans la simplicité des arguments dramaturgiques et le jeu outré des acteurs, révèle une parodie de ces feuilletons indigents, mélodrames compensatoires de la misère dans laquelle vit une grande part de la population brésilienne.
Distribution
-Comédiens :
Maria Rossiter
Gladis Farah
Gilza Melo
Marcia Renata
Jaime Berenguer
Renato Farias
Marcus Suiciniv
Bernardo Lucena
Henrique Celibi
Tony Mendes
Tony Vieira
Américo Barreto
Robson Pinto
Ricardo Pinto
Tony Oliveira.
Mise en scène : Américo Barreto
Décors et lumières : Fabio Costa
Son : Helio Oliveira
Technique : Ricardo Pinto, Tony Oliveira.
Programme.
O Drama das Camelias. Le drame des camélias (durée 55 min)
Un naufrage déverse sur une côte brésilienne un flot de rescapés. Parmi eux, les Camélias, deux soeurs siamoises attachées par le buste. Comme tous les naufragés, elles se retrouvent livrées à la montée de leurs instincts. Instincts contraires, l'une est assoiffée de sexe, l'autre de religion. La violence de leurs passions, la peur de la douleur et de la mort, l'excitation du sang, s'expriment par des airs d'opéras distordus, malmenés, entrechoqués. Il faut les séparer.
A l'aide d'une scie égoïne des infirmiers de fortune tentent de désunir les deux corps. Une charge de dynamite aura raison de cette entreprise. Une Camélia se voue à la vierge (perruque de boa bleue, ceinture de strass, large poitrine velue), qui la sauve des verges gloutonnes d'une bande de diables priapiques.
Après avoir quitté leur grande robe lacée, les deux Camélias embarquent dans un bateau providentiel vers une destination inconnue.
A Louca do Jardim. La folle du jardin (durée 20 min)
Dans un XVIIIe siècle tropical de pacotille, le seigneur Alberto découvre qu'il est cocu. Il bat sa femme comme plâtre.
Les esclaves, totalement dévoués à leur maîtresse, tentent par le poison de la débarrasser de l'époux importun. Mais c'est l'amant qui boit la coupe fatale.
Alberto décide alors de chasser l'infidèle, mais apprenant qu'elle est enceinte, il lui arrache l'enfant du ventre, une petite fille. Mise à la porte, la dame erre en proie à la folie du désespoir, et prie la Vierge de lui rendre son enfant.
Les années passent. La jeune fille entre dans sa seizième année. Pour son anniversaire, une grande fête est organisée dans le jardin. Une mendiante apparaît qui demande l'aumône. Prise de pitié, la jeune fille l'interroge sur l'histoire de sa vie et découvre qu'elle est sa mère; elles tombent dans les bras l'une de l'autre.
Ce récit édifiant se conclue par le meurtre du seigneur Alberto.
Bulgarie. Théâtre des voix magiques. Affiche
8-20 janvier 1991
Bulgarie. Voix magiques de Roumen Tzonev, par Magic Voices Theater, Sofia. Direction Damian Popchristov. Photos
Première partie:
Évocation de la naissance. Naissance de l'individu, naissance de la société. Attirance et antagonisme des sexes.
Deuxième partie.
Rituel du mariage
- Préparation des fiancés. L'écharpe symbolise l'union spirituelle du couple.
- Danses de mariages et rondes.
- Cérémonie
- Rites orgiaque
- Pénitence
Troisième partie
Évocation de la quête d'harmonie avec la Nature
- Danse de joie. L'écharpe rouge symbolise la prospérité
- Rite de fertilité
- Chasse aux démons. Combat des forces fastes et néfastes.
- Floraison de la nature.
- Rite de sagesse.
Quatrième partie.
Évocation de l'hiver
- Rite du feu
- Fête de Saint Constantin et de Sainte Hélène. Dans ce rite encore préservé dans le sud-est du pays, les femmes dansent sur des braises en brandissant des icônes.
- Mort et renaissance
- Psaume
Chanteuse "narratrice": Yaldaz Ibrahimova
Comédiens-chanteurs: Antonia Malinova, Bilyana Stoïcheva, Evgueny Gospodinov, Daniel Tzochev, Andrei Batachov
Direction musicale: Roumen Tzonev
Chorégraphie: Margarita Gradechlieva
Décor: Boriana Jeleva
Costumes: Magdelena Angelova
Ethnographie: Nadejda Sarafova