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Azerbaïdjan. Gandab Gulieva. Trio Jabbar Karyagdi Ogly. Le Mugam, musique classique d'Azerbaïdjan. Spectacle

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Évènement

Titre

Azerbaïdjan. Gandab Gulieva. Trio Jabbar Karyagdi Ogly. Le Mugam, musique classique d'Azerbaïdjan. Spectacle

Sous-titre

Gandab Gulieva, chant et daf. Mohled Muslimov, luth târ. Frakhreddin Dadachev, vièle kemânche

Date

1999-06-04

Date de fin

1999-06-05

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

Salle Boris Vian, 4-5 juin 1999

La découverte des musiques d'Azerbaïdjan est peut-être une des plus grandes révélations artistiques de ces dernières années et depuis 1985, la Maison des Cultures du Monde n'a de cesse d'en faire connaître les meilleurs interprètes, tant par le concert que par le disque : Alem Kassimov pour sa première tournée européenne en 1989, Hâji Bâbâ Huseynov en 1991, Zayid Gouliev en 1991 et 1994, Sakine Ismaïlova en 1992 et Aqakhân Abdullaev en 1995 et 1996, Jenali Akberov et Gandab Gulieva en 1998.
Malgré un siècle de colonisation russe et soixante-quinze années de socialisme soviétique, l'Azerbaïdjan a su préserver de manière remarquable ses traditions musicales, les considérant comme un emblème national, un élément aussi essentiel que la langue dans la constitution de la personnalité ou de l'identité culturelle et ethnique.
Fruit d'un brassage entre Turcs et Iraniens, les Azeris ont su également cohabiter avec la culture occidentale et établir une frontière assez claire entre ce qu'il convient de considérer comme la pure tradition savante du Mugam et des formes acculturées telles que l'Opéra-Mugam inventé par le compositeur Uzeyr Hâjibeyov (1885-1948). De même, la transmission du savoir musical qui s'opère aujourd'hui par le biais des écoles de musiques et des conservatoires n'a pas modifié de façon notable le contenu de ce savoir, ni freiné l'émergence de nouveaux artistes, sélectionnés de manière extrêmement stricte et dont la rigueur n'a d'égal qu'un extraordinaire potentiel créatif. C'est dire combien la tradition musicale classique d'Azerbaïdjan est vivante.
Produit de plusieurs siècles de maturation à la charnière des cultures turque et persane, la musique azeri a également bénéficié des échanges avec d'autres traditions, arménienne, centre-asiatique, voire afghane, et a trouvé son expression la plus parfaite dans le Mugam, vaste composition vocale et instrumentale qui dépeint avec ardeur et raffinement toute la gamme d'expressions du sentiment amoureux.
Depuis l'époque où les musiciens se produisaient dans les mariages et les fêtes organisées par des mécènes, la vie musicale en Azerbaïdjan s'est considérablement modifiée. Si les fêtes ont persisté pendant la période communiste, les institutions officielles ont en revanche pris la relève des mécènes, organisant concerts, festivals, tournées à l'étranger et publications de disques.

Le mugam
Comme toutes les musiques savantes du Moyen-Orient, la musique d'Azerbaïdjan est monodique et modale. De même qu'en Turquie et Irak, l'importance du mode ou mugam (de l'arabe maqâm) est telle que le terme désigne aussi les suites vocales et instrumentales et l'ensemble du répertoire canonique que ces suites constituent. La forme du mugam est fondée sur une succession de mélodies-cadres qui laissent au chanteur une relative liberté d'improvisation et d'adaptation du texte poétique. Ces mélodies alternent avec des pièces vocales rythmées de caractère plus populaire, les tesnif, et des morceaux instrumentaux. En plus du mode principal, le mugam exploite plusieurs modes secondaires selon un ordre rigoureusement déterminé et qui apportent à l'oeuvre des éclairages expressifs nouveaux.
Tel un flot musical proposant au détour de chacun de ses méandres la contemplation d'un paysage sonore et émotionnel inédit, le mugam offre une unité et une diversité exemplaires. Unité dans le sens où toutes les parties sont enchaînées les unes aux autres sans interruption, comme en fondu-enchaîné. Et diversité dans l'alternance des improvisations et des compositions, des rythmes libres et mesurés, des modes gais et mélancoliques , des couleurs sonores tantôt chatoyantes, tantôt en demi-teintes.
Les poèmes, choisis par les interprètes, et chantés sur un rythme libre sont composé sur le modèle du ghazal persan (poème composé de plusieurs distiques et soumis à un modèle métrique spécifique).
Ces poèmes sont l'oeuvre des grands poètes classiques qui vécurent en Iran, en Azerbaïdjan et en Iraq entre le XIVe et le XXe siècle : Nizâmi, Fuzûlî, Shirvâni, Tabrizi, Vahid pour n'en citer que les principaux, et parlent avec pathétisme de l'amour, de l'attrait de l'être aimé, du déchirement de la séparation ou de l'inconstance de l'amant, de la beauté d'un paysage ou encore de la splendeur de Dieu.
Ces poèmes sont totalement intégrés à la musique et éclatent littéralement dans le discours musical, du fait de l'introduction de vocalises, d'intermèdes instrumentaux et des multiples modulations qui caractérisent le parcours modal du Mugam. Les tesnif, eux, ont une forme plus condensée. Il s'agit de poèmes populaires, généralement anonymes, qui sont interprétés sous la forme d'une chanson accompagnée et rythmée par le tambour daf.
A chaque Mugam correspond un état émotionnel spécifique, ainsi pour n'en citer que quelques uns, le Mugam Rast exalte la noblesse et le courage, le Mugam Segâh exprime l'amour et la nostalgie dans un climat assez pathétique, le Mugam Chargâh, plus puissant incline à la passion, le Mugam Shur a un caractère méditatif et mélancolique, enfin le Mugam Humayun est réputé sombre et funèbre.
En plus du répertoire des Mugam proprement dit, les artistes interprètent également des Zarbi Mugamlar ou Mugam rythmés. Ces pièces, généralement brillantes, constituent tant par leur structure que par leur durée d'exécution une forme intermédiaire entre le tesnif et le Mugam.
Innombrables et spectaculaires sont les techniques vocales utilisées pour exprimer les divers états d'âme du poète : chant sotto voce, quasi murmuré, explosions vocales, vocalises et glissendi multiples, et surtout des effets de jodl, que l'on retrouve également dans les traditions persane, kurde et nord-irakienne, mais que les chanteurs azéris portent à un véritable paroxysme.

Les instruments
Le chanteur est accompagné par le luth târ, la vièle kemânche et il tient lui-même le tambour sur cadre daf.
Le târ est un luth à manche long. Curt Sachs lui donne le nom de luth étranglé en raison du double renflement de sa caisse. Cet instrument diffère légèrement tant par sa facture que par son jeu du târ persan. Plus petit, il comporte un plus grand nombre de cordes (11 en tout) accordées à la quinte et à la quatre et qui sont pincées avec un petit plectre. Le manche comporte des ligatures mobiles servant de frettes.La caisse est en bois de mûrier et la table d'harmonie est composée de deux membranes de péricarde de boeuf.Au lieu d'être tenu sur la cuisse, la târ azeri est tenu très haut contre la poitrine («sur le coeur » disent les Azéris), le musicien lui imprimant parfois de brusques mouvements qui renforcent les effets de vibrato.

La kemânche est une petite vièle à pique posée sur le genou. La caisse en bois de mûrier, de forme sphérique, est recouverte d'une peau de poisson.
Les quatre cordes en acier sont jouées tantôt à l'archet, tantôt en pizzicato. Cet instrument peut aussi bien produire des sons plaintifs que scander gaiement le chant du soliste.
Ces deux instruments sont indispensables à toute exécution de Mugam. Ils peuvent aussi jouer en solo des petites pièces semi-improvisées, reprenant les étapes essentielles de tel ou tel Mugam.
Le daf est un tambour sur cadre d'une trentaine de centimètres de diamètre. La membrane, très fine, presque transparente, est généralement faite de peau de silure ou de péricarde de boeuf. Le pourtour intérieur du cadre est semé d'anneaux métalliques qui vibrent à chaque coup porté sur la peau ou sur le bord de l'instrument.

Les interprètes
Formée à l'école de musique Zeynali, Gandab Gulieva est aujourd'hui soliste à l'Opéra de Bakou et donne des concerts de Mugam traditionnel dans tout le pays et à l'étranger. Sa voix chaude et sensuelle, sait aussi lorsque l'interprétation l'exige faire passer des accents de douleur d'une grande intensité, démontrant ainsi que l'art du Mugam n'est pas le fief des hommes. Gandab Gulieva est accompagnée par la fine fleur des instrumentistes azéris, deux musiciens qui savent non seulement se mettre au service du chanteur, mais excellent également dans l'improvisation instrumentale. Voici une vingtaine d'années que Mohled Muslimov et Fakhreddin Dadachev ont fondé le trio Jabbar Karyagdi Ogly en hommage à l'un des plus grands artistes azéris de la première moitié du XXe siècle. Ils en constituent le coeur, le chanteur ou la chanteuse pouvant changer. Le public de la Maison des Cultures du Monde a pu découvrir ce trio en 1992 avec le chanteur Zayid Gouliev, concerts qui ont fait l'objet d'un CD dans la collection INEDIT. Depuis, ces deux musiciens hors pair et éminemment complices mettent leur talent au service des plus grands solistes vocaux du pays.

Pierre Bois

Contributeurs

Origine géographique

Azerbaïdjan

Mots-clés

Date (année)

1999

Cote MCM

MCM_1999_AZ_S1

Ressources liées

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Titre Localisation Date Type
Azerbaïdjan. Mugam. Photos Azerbaïdjan 1999-06-04 Photo numérique
Azerbaïdjan. Mugam. Photos Azerbaïdjan 1999-06-04 Photo numérique
Titre Localisation Date Type
Saison 1999 1999