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Indonésie, Bornéo. Rites et danses des Dayak. Spectacle

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Évènement

Titre

Indonésie, Bornéo. Rites et danses des Dayak. Spectacle

Date

1993-06-22

Date de fin

1993-06-24

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Cérémonie, rituel

Description de la pratique

22-24 juin 1993

Ils rêvent de se changer en oiseaux et de poursuivre les nuages, de devenir des monstres redoutables et de chasser les démons dévoreurs de récoltes, ils rêvent enfin de faire venir dans la forêt la déesse-mère qui leur rendra la santé. Alors ces anciens chasseurs de têtes se parent de plumes, revêtent leurs masques et tourbillonnent jusqu'à la transe.
22 danseurs et musiciens présenteront des danses rituelles de trois groupes dayak: les Kenia, les Modang et les Benuak.

Les Dayak et leurs mondes, un reportage de Françoise Gründ.
La rivière Maakan est si large près de Samarinda, son embouchure, que l'autre rive disparaît sous la pluie tropicale. Des arbres descendent vers la mer, à toute vitesse, créant de mouvants récifs pour les bareaux de passagers, aux ponts à claire-voie, pour les transporteurs gainés d'acier et pour les hors-bords dont le pilote ne quitte pas le courant des yeux.
Bornéo se déboise, se dénude, se pèle. Les japonais, les Javanais, les Australiens coupent les troncs centenaires, sans regarder derrière eux. Bornéo, c'est le nom que les Hollandais ont rendu à la grande île indonésienne, au territoire des Dayak, à l'époque de la colonisation. La région de l'Est, Kalimantan, qui fait partie de l'Indonésie, ne renferme pas moins de 400 groupes et sous-groupe Dayak utilisant plus de 1000 langues. Le mot Daya en malais signifie: "l'homme sauvage". Un dayak possède des jambes incroyablement fines et striées de muscles, les épaules en pointe, une taille souple, des pommettes saillantes, une chevelure noire, parfois bouclée presque crépue. Il porte des jeans et des chemises à carreaux, s'il habite un village lacustre le long de la grande rivière et s'il est cultivateur et pêcheur. Il vit nu, avec un cache-sexe et des bijoux, les épaules, le dos et les cuisses couverts de fins tatouages bleus s'il se déplace dans la forêt ainsi que les chasseurs-ceuilleurs des peuples constituant les sociétés des Dayak. Ce qui frappe pourtant dans tous les villages Dayak, c'est la présence de la maison longue, appelée actuellement la maison des hommes. Elle est plutôt un espace commun, un lieu de rencontre et de discussion et éventuellement un tribunal. Au coeur de la forêt, loin des rives des fleuves, des groupes de population continuent à vivre dans ce type d'habitat quasiment commun pour se protéger des prédateurs et des puissances surnaturelles.
Si les missionnaires et les divers envoyés de dieu les ont christianisés, évangélisés, batisés, islamisés, les Dayak disent tout bas, que les ancêtres sont vivants et agissent dans des mondes différents. Quand parfois, ils viennent se joindre aux humains, c'est pour les avertir de dangers, les aider à guérir des plaies ou formuler des réprimandes. Les Dayak croient que l'individu possède plusieurs âmes. Elles abandonnent le corps pendant le sommeil, le rêve et le voyage chamanique. L'âme du rêve est très importante. Elle génère des visions qui éclairent la réalité. La réalité est constituée par la conscience de deux mondes empilés l'un au-dessus de l'autre. Les ancêtres, les esprits et les divinités se partagent un monde qui serait le ciel puisqu'il se situe au-dessus des humains. L'image du ciel ressemble à la vision de la terre idéalisée: la jungle pleine d'abondance et inoffensive, de grandes rivières charriant beaucoup d'eau pure, mais sans crues dévastatrices, des fruits, des fleurs, des animaux. Plus bas, les humains travaillent et souffrent dans le monde terrestre.
Chez les Dayak-Kenia et chez les Dayak-Modang, le monde des humains est celui de la musique. Issue du chaos originel, la musique ne serait que la tentative de tracé d'un chemin pour mener l'émotion jusqu'au coeur de l'homme. La musique semble aux Dayak une expression synonyme de confusion, de défaillance et quelquefois de mutilation. En revanche, la danse se place au sommet de l'échelle des expressions humaines. Elle reproduit les mouvements des créatures du monde céleste, peuplé d'êtres légers et volants, insectes, papillons, oiseaux, flèches et esprits flottants. Le monde terrestre paraissant incomplet et défaillant aux Dayak, une de leur préoccupation essentielle consiste en une tentative, sans cesse renouvelée, de représentation du monde d'en-haut. Il faudrait donc jouer en permanence à construire ici-bas, un reflet du monde aérien et supérieur.Ainsi les ancêtres divinisés, les esprits supérieurs, les divinités font l'objet de représentations symboliques ou théâtralisées.
Dans ce but, les expressions comme la danse, la musique, la parole, le jeu, les graphismes, les vêtements, les parures, véritables présents offerts aux ancêtres jouent un rôle considérable et chacun des peuples dayak s'efforce de perfectionner leur forme.

La danse céleste des Dayak-Kenia
Un homme âgé se coiffe d'une haute couronne de plumes de calao et d'une chasuble largement échancrée aux aisselles qui laisse ses bras nus. Il tient à la main un arc, des flèches et une sarbacane pour exécuter le kancet lasam ou danse du chasseur. Le chasseur est bientôt rejoint par un autre homme qui exécute avec lui un kancet papatay ou danse des oiseaux.
La dramaturgie montre deux oiseaux prédateurs tournoyant en majesté, puis fondant sur leur proie avant de devenir aux-mêmes la proie d'attaquants plus sauvages. La danse s'organise en séquences qui pourraient se comparer aux rounds des combats de boxe. Comme celle des hommes, la danse des femmes véhicule un pathos. Toutefois l'âpreté se dissimule sous la grâce. Une femme aux longs lobes d'oreilles enfile au bout de ses doigts des touffes de plumes de calao et coiffe ses chignons des mêmes ornements. Entrant à pas glissés sur le plancher de bois, elle danse le kancet tengam ou danse de la fée. Les mouvements de ses bras prolongés par les faisceaux de plumes semblent aériens et la répétition aidant, donne au bout d'un moment l'impression d'assister à une véritable envolée. Ces chorégraphies rituelles n'ont pour support qu'une musique assez rudimentaire, donnée par le jeu de deux sam-pek ou luths plats à trois cordes et à caisse décorée.

Les masques danseurs des Dayak-Modang
Chez les Dayak-modang, la danse la plus vigoureuse, moins éthérée, porte le nom de hudog et met en scène des créatures violentes en lourds costumes de fibres. Elles portent des masques en bois, peint en rouge, blanc et noir, avec de larges miroirs à la place des yeux et une bouche articulée qui sert de claquoir. Dans le village de Long Bentuk les danseurs, entièrement couverts de feuilles de bananier, sortent de la forêt et investissent la place devant la maison longue où les attendent les paysans en provoquant une sorte de surprise et d'effroi.
Le chamane va guider les masques jusqu'à l'intérieur de la batisse où resonnent déjà les deux gongs, les deux tambours ba'tak et les deux tambours à deux peaux, les jong nyefeng suspendus à un portique de bois. Groupés généralement par dix ou douze, les danseurs masqués se jettent au milieu du public, qui bien que prévenu, recule en poussant des cris.
La danse consiste en tourbillons et en sauts, d'abord lents puis de plus en plus violents, rythmés par les percussions. Le comble de l'excitation survient lorsque paraissent des personnages costumés en paysans dépenaillés et des enfants masqués. Ces derniers arrivants représentent les fermiers venant demander une bonne récolte de riz et faire un serment d'allégeance aux masques qui symbolisent les puissances de la terre de l'eau et du vent.

L'appel des chamanes des Dayak-Benuak
La maison longue entièrement décorée de feuillages et de fleurs, recèle de nombreux éléments magiques construits ou sortis de l'ombre pour la circonstance. Une grappe de tissus et de vêtements multicolores représentent Sangyang, la divinité. Au pied, s'accumulent des offrandes de riz, des sucreries colorées, des noix de coco, des graines, des cigarettes et des cigares et des motifs de bambou travaillé. Trois vieillards chantent des incantations depuis le coucher du soleil. Leur voix éteinte égrène la même plainte. Les musiciens viennent, un à un, s'installer derrière les instruments déposés à une extrémité de la longue pièce rectangulaire. L'ensemble instrumental se compose de deux gongs kelentangan, de quatre gendang-tubang ou tambours à deux peaux et d'un jeu de gongs. Les femmes dans un lent balancement rythmique, longent la paroi intérieure de la maison. Après s'être inclinées devant l'ancêtre-mère, elles forment des lignes mouvantes et se mettent à chanter sans cesser leurs mouvements de déhanchement et de rotation des épaules. Avant même que les chants de femmes ne se taisent, un homme est entré. Enlevant sa chemise, il s'est assis torse nu, au pied de la divinité. Un à un, cinq autres hommes viennent le rejoindre et prennent place dans les mêmes positions. Les femmes se sont éclipsées. Le premier homme, le chamane, entonne un chant d'une voix très nasale. Un grand silence se fait dans la maison longue, pendant que s'établit un chant responsoriel, les cinq hommes assis commençant une polyvocalité riche de dissonances, en chevauchant la voix du chamane par un tuilage brutal.
Au bout d'un long moment, le chamane se lève et la femme affectée au service de la cérémonie, lui tend une large jupe blanche ornée d'éléments cosmogoniques colorés appliqués sur le tissu. Le chamane enfile la jupe et la maintien à la taille par une longue bande de coton rouge. Il place sur sa tête une couronne de feuilles fraîches. Les autres se lèvent et s'habillent à leur tour. Ils commencent une sorte de danse tourbillonnante sur la base de trois mouvements. Un déplacement circulaire autour du pilier représentant la mère, un tournoiement sur soi-même et enfin une sorte de rupture avec le mouvement cosmique reproduisant une ronde de planètes autour du soleil, puis les ritualistes, l'un après l'autre, se précipitent vers le centre du cercle, empoignent le corps de la divinité et se laissent choir qu sol, ou bien sont emportés par un tremblement frénétique. Le maître des chamanes ne cesse de contrôler l'extase et la canalise jusqu'à ce que dans les voix et la danse, l'ancêtre-mère parle et réconforte la communauté.

PROGRAMME.
Dayak Benuak
Upacara adat "Belian", cérémonie de guérison. Ensemble instrumental: jeu de six gongs kalintangan, 2 tambours gimar, 1 gong vertical geniging.
-Bememang, invocation aux esprits, chant assis.
-Tari Belian, danse d'offrande en cercle autour du mayan, symbolisant l'axe du monde.
-Bekanjar, incantation chamanique destinée à guérir les malades et à écarter les mauvaises influences.
-Bekanjar Balal, Danse d'appel aux esprits guérisseurs.
-Tepung Tawar, jet de farine symbolisant la purification de l'esprit des malades et leur guérison.

Dayak Kenia
-Datun julut, cortège dansé (Kenia), danse mixte accompagnée de deux luths sampeh.
-Kendau, poésie chantée (Suku Kenia), chant de femme retraçant l'émigration des Suku Kenia, suivi d'un chant d'homme accompagné par un choeur mixte décrivant les méfaits d'un incendie de forêt.
-Kancet tengam, danse de purification et Kancet papatay, danse des oiseaux et joute guerrière.
-Datun julut, cortège dansé.

Dayak Modang
Hudog, danse masquée
-Action de grâce après une bonne récolte de riz, sous forme de dialogue entre le chamane et les "cinq Hudog", esprits protecteurs de la forêt.
-Le chamane offre aux Hudog de la nourriture destinée aux âmes des morts.
-Danse de purification des quatre directions de l'espace
-Danse des Hudog destinée à chasser les mauvais esprits et les animaux prédateurs des rizières, accompagnée au gong geniging.

Contributeurs

Origine géographique

Indonésie

Mots-clés

Date (année)

1993

Cote MCM

MCM_1993_ID_S6

Ressources liées

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Titre Localisation Date Type
Indonésie, Bornéo. Musique et danse rituelle chamanique des Dayak Benuak. Photos Indonésie 1993-06-22 Photo numérique
Indonésie, Bornéo. Musique et danse de masques hudog des Dayak Modang. Photos Indonésie 1993-06-22 Photo numérique
Indonésie, Bornéo. Musique et danse des Dayak Kenia accompagnée au luth sampeh. Photos Indonésie 1993-06-22 Photo numérique
Titre Localisation Date Type
Saison 1993 1993