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Philippines. Brenda Fajardo. Exposition

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Évènement

Titre

Philippines. Brenda Fajardo. Exposition

Date

1994-04-26

Date de fin

1994-04-29

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Exposition

Description de la pratique

26 avril-29 mai 1994.
Brenda Fajardo ici-bas et au-delà. Michel Nuridsany, commissaire.

Brenda Fajardo est, plus que nul autre peintre aux Philippines, emblématique de son pays. Mais c'est d'abord une artiste singulière, inventive, qui, en tant que telle, échappe aux définitions, aux théories, creuse son territoire comme un animal fouisseur et qui invente, s'aventure sur des territoires inconnus, sans repères. La biographie dira-t-elle quoi que ce soit de l'aventure formelle? Ce qu'on sait d'un artiste -ses dates, des moments, un changement visible d'orientation que les historiens d'art appellent période, ses amours, ses exils, sa statégie- nous permettent-ils, même superficiellement d'accéder à une meilleure connaissance de l'oeuvre? Saurons-nous plus que l'anecdote ou l'écume des jours? Un homme est ce qu'il cache, disait Malraux. La biographie est comme une partition musicale qu'il faut savoir interpréter. '
On retiendra que la jeune fille Fajardo, née en 1940 à Manille, après un baccalauréat en agriculture obtenu en 1959, termine sa maîtrise en éducation artistique aux Etats-Unis, à l'université du Wisconsin en 1967, et que déjà le trait la fascine. Elle s'essaie à la gravure'.

Abattre les cartes d'un changement de mémoire historique.
Patrick Florès.

Brenda Fajardo raconte que son véritable centre d'intérêt était plutôt la danse et l'expression corporelle. Ce qui l'amena aux arts plastiques, et en particulier, à la gravure fut sa fascination pour les lignes. Alors qu'elle faisait un mastère en éducation des arts à l'Université du Wisconsin, elle remarqua que la gravure permettait d'obtenir les effets picturaux des dessins fixes. En fait, beaucoup de ses dessins étaient conçus pour être des gravures jusqu'à ce qu'elle réalise qu'ils constituaient un ensemble indépendant. Elle fut, en outre, intéressée par les mouvements des lignes, qu'elle allait développer plus tard dans son travail théâtral, mais aussi dans ses tons.
A son retour aux Philippines, elle étudia avec le célèbre graveur philippin, Manuel Rodriguez Sr, et à partir de là, cultiva une carrière d'artiste graphique. Ses premiers travaux étaient d'intéressantes explorations de grande intensité dans les labyrinthes de l'inconscient et les perturbations d'une identité à la recherche d'une définition. C'étaient des études hautement métaphysiques qui plongeaient dans les profondeurs de l'imagination et affrontaient les forces concurrentes et la complexité d'un univers contesté par les énergies surnaturelles, des mortels passionnés et des esprits de la nature. Ils reflétaient aussi les tentatives de l'artiste pour maîtriser la dialectique des formes et du contenu: la forme, ici, se réfère à la gravure à l'eau-forte à l'acide, au collage et à la gravure sur bois, qu'elle appelle "verdoyages" et "animages".
Ces travaux étaient d'habitude montés dans des espaces abstraits habités par des sihouettes s'efforçant de se rejoindre, de se connaître, de connaître la société, de penser à ce qui se trouve dessous. La célèbre critique d'art Alice Guillermo écrit que dans Sarili Kahon (autoconfinement) "un demi-visage est en flammes, le feu jaillissant de ses cheveux, la face jumelle étant un demi-crâne sinistre et sombre' Ou encore dans Sumilip ang Buwan, Pumasok ang Dilim (La Lune Regarda, les Ténèbres se Répandirent) des êtres emplumés bougent, emportés par le vent, alors que des visages regardent autour d'eux des orbites sombres d'un crâne". Avec ces deux importantes pièces de ses débuts, Fajardo révèle un esprit très vivant, une sensibilité aigue, délicieusement capable de jongler avec une imagerie comme "une tête d'homme, symbole du soleil' Le crâne d'une bête cornue des orbites de laquelle sort et se déverse une multitude de personnages nus qui cherche à se libérer de la menaçante tête de Chèvre' dans la tête femelle, symbole de la lune, les silhouettes nues s'échappent des yeux et de la bouche comme après une nuit de sommeil en pleine lumière, alors que d'étranges formes osseuses surgissent tout autour du visage et des plantes se dressent en une dense poussée bleue-verte sur le haut de la tête".
Progressant d'un cadre aussi classique, Fajardo construit ses formes au travers des figurations prudente, des contrapposto dramatiques et des arrangements stables. Sa série babayl, où des anges-femmes nues, agiles, souples et lestes conquièrent l'espace en se déplaçant avec vivacité témoigne de cette prédisposition, spécialement avec l'emploi de hachures qui apportent le volume. Elle prétend cependant que tout en ayant toujours admiré la discipline du dessin, elle ne lui permet pas de casser les possibilités d'envahir ses formes avec des qualités spontanées.
Ce défi subtil contre les normes classiques rigides se développe de façon encore plus évidente dans sa série de cartes de tarot où elle opte ouvertement pour un style populaire décoratif qui favorise des mouvements plus libres et des contours et des positions moins méticuleusement délimités. Elle a joué avec son sens des couleurs de la même manière dans cette série. Différents des contrastes soigneusement calibrés et modulés de ses travaux classiques, ses cartes sont maintenant saturées de couleurs généreuses et vives, rouges, bleus, jaunes, verts, bruns et violets. Elle utilise également la détrempe dorée pour rendre une feuille d'or plus évocatrice des enluminures médiévales. Fajardo laisse entendre que le sentiment carnavalesque, décoratif, gothique-populaire et l'effet esthétique produit par le papier et l'encre rendent son art accessible au goût visuel des Philippins.
Fajardo fait remarquer que lorsqu'elle essayait de se familiariser avec le tarot, elle envisagea simplement les nombreuses façons de l'adapter à son pays. Elle procéda de façon purement intuitive. Mais quand elle commença à tourner le tarot dans les thèmes sociaux ou tourner les thèmes sociaux dans un tarot indigénisé, une philosophie plus consciente et plus délibérée guida ses choix pour déterminer quelles cartes mettre en rapport avec certains thèmes sociaux. Elle pense que son approche de certains thèmes sociaux est principalement nourrie par ses réflexions et ses perceptions sur le sujet. Avec le tarot, cependant, elle est capable de projeter une sorte d'avenir pour ces réalités, d'amener à la prise de conscience que l'histoire n'est pas purement faite d'un destin ou d'un karma immuable mais qu'elle se transformerait si les hommes intervenaient dans le processus de transformation. Cette transformation dans les mains de Fajardo revêt des formes idéologiques et spirituelles: la purification de soi-même, l'engagement dans des idéaux progressistes et l'approfondissement du don de voir à travers la réalité et les changements en marche dessous. Plus encore, c'est cohérent avec la conviction de l'artiste que les cartes de tarot sont des guides spirituels qui protègent ou réorganisent les relations d'âme à âme aussi bien que les chances sociales: en d'autres mots, elle réinscrit les prédictions et les prémonitions dans les impératifs des problèmes sociaux, infusant ainsi l'élan du changement dans le moi archétype et le système, pour disséminer finalement la transformation dans tous les domaines de la vie, qui cesse alors d'être simplement un jeu de hasard.
Ainsi, dans certains travaux, Fajardo tend à philosopher sur le sens de la vie et médite sur les possibilités pour l'être humain de se cuirasser de vertus idéales. Dans d'autres, cependant, elle met au premier plan l'urgence de la pratique, d'une participation stratégique et tactique aux mouvements de masse. Son iconographie et sa symbolique prennent leur force non seulement parce qu'elles évoquent une sorcellerie enchanteresse mais plutôt parce qu'elles ont le pouvoir de déplacer le lieu et centre de signification, de redéfinir le sens divinatoire dans le contexte des vérités historiques. Son Magicien, par exemple, ne se rattache pas seulement à des caractéristiques universelles de la ruse mais à des formes spécifiques de la ruse à laquelle les Philippins ont été soumis au cours des années. C'est ainsi que le Magicien peut être l'Oncle Sam ou le Général fasciste. Son Hiérophante peut être une femme. Sa Tour peut-être soit l'Eglise en crise ou la Tour de Babel. En bref, il n'y a pas de hasard dans la façon dont Fajardo situe ses réalités, parce qu'il y a un dessin ou, mieux même, un programme ou un paradigme qu'elle adopte quand elle parle de folie, délire, tromperie, sagacité, compassion, justice, prudence, combat et perversion. Pour elle, les cartes de tarot n'ont pas pour signification de prévoir la mort, l'amour, la vengeance, la tristesse et le triomphe, les mauvaises affaires, les querelles, le deuil, l'héritage, la grossesse, l'arrivée d'un visiteur, une prise de bec avec une prostituée calomnieuse, ou la trahison d'un faux amant, mais pour énumérer les possibilités de leur avènement comme ils le croient, les vraies qualités élémentaires de l'air, l'eau, le feu et la terre.
Fajardo, aussi, considère que les cartes de tarot ne sont pas supposées se limiter aux appréciations positives ou négatives. Leur utilisation doit être plutôt gouverné par les interactions dialectiques de textes au sein de textes, ou de textes avec des textes pour que le Fou, par exemple, soit soudain induit en erreur ou courageux ou que une prêtresse puisse diriger un régime. La vision de Fajardo du battage des cartes est centrée sur les flux et les différences relationnelles et non sur des destins absolus jusqu'aux prémisses que "la présence d'une carte près d'une autre fortifie ou diminue la signification des cartes combinées" ou que "si une carte est la tête en bas ou inversée, la signification de la carte est affaiblie, retardée ou même contraire"
Récemment, Fajardo s'est préoccupée de retrouver la connaissance vernaculaire et la philosophie indigène à son pays inspirée des mythes et légendes populaires. Elle a entrepris cette tâche dans le but de comprendre les réalités des Philippines du point de vue des perspectives post-coloniales. Dans ses premières manifestations, la série des mythes affiche une certaine bravoure et une perspicacité symptomatiques des découvertes que l'artiste a récolté dans sa quête d'une plus grande signification.

Barahang Tarot
Ng Philipino
Arcane Majeure
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Biographie de Brenda Fajardo

Présentation des artistes

Contributeurs

Origine géographique

Philippines

Mots-clés

Date (année)

1994

Cote MCM

MCM_1994_PH_E1