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Turquie. Cordes ottomanes, avec Ihsan Özgen et Özer Özel. Spectacle

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Évènement

Titre

Turquie. Cordes ottomanes, avec Ihsan Özgen et Özer Özel. Spectacle

Date

1999-04-08

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

8 avril 1999
un concert organisé avec le concours de Kudsi Erguner
Ihsan Özgen, luth 'ûd, vièle kemençe, vièle rebab, luth tanbur à archet
Özer Özel, luth tanbur

Sublime Porte, voie d'accès privilégiée vers l'Orient, réincarnation turque et islamique de Constantinople, ville cosmopolite où se côtoyèrent les cultures d'Orient et d'Occident, capitale de l'Empire Ottoman, Istanbul s'illustre depuis six siècles par la richesse et la diversité de sa vie musicale qu'elle a su préserver, développer, en opérant une synthèse équilibrée de l'héritage gréco-byzantin, de la théorie arabo-persane et des traditions turques d'Asie centrale. Maints traités anciens rédigés en turc et en arabe attestent le goût des Ottomans pour la musique, et ce bien avant la prise de Constantinople. Par ailleurs, l'ordre soufi des Mevlevi établi à Konya depuis la fin du XIIIe siècle contribua largement au développement d'une musique liturgique originale et unique dans le monde islamique.
Pour comprendre l'attitude des Ottomans à l'égard de la musique il faut savoir que certaines conceptions arabo-islamiques tendant à voir dans la musique une activité immorale furent de tous temps étrangères aux cultures turques, et que celles-ci ont toujours affectionné la pratique instrumentale, et tout particulièrement celle des instruments à cordes, comme en témoignent les traditions toujours vivantes des Azéris, des Kazakhs, des Turkmènes et des Ouzbeks.
La structure de la musique classique ottomane a beaucoup évolué depuis le XVIe siècle ; ces changements sont en partie dûs au fait que les Ottomans furent le seul peuple islamique à avoir employé la notation musicale dans leurs compositions.
Le développement de ces formes composées entre le XVIIe et le XVIIIe siècles, ainsi que celui du système modal des makam et du système rythmique des usul dans la seconde moitié du XVIIIe, coïncidèrent avec l'essor de la musique de cour sous les règnes de Murad IV, Mehmed IV, Ahmed III, Mahmud Ier, Abdülhamid Ier et surtout Selim III (1789-1808) qui fut non seulement mécène mais également musicien et compositeur. De grands noms de la musique ottomane bénéficièrent de postes officiels au sérail : Ismail Dede Efendi, Sakir Agà, Hafiz Post, pour ne citer que les plus connus. Ce n'est qu'à la fin du XIXe siècle que le mécénat royal disparut presque totalement et que l'Empire, s'ouvrant à l'Occident, laissa péricliter son patrimoine musical. Toutefois, cette influence de l'Occident provoqua en retour une prise de conscience des Turcs à l'égard de leur propre musique et notamment des musiques populaires . Parmi les derniers représentants de la musique classique turque, on peut citer Lem'i Atl' (1869-1945) et surtout Tanburi Cemil Bey (1871-1925) dont l'oeuvre a considérablement inspiré Ihsan Özgen.

Le tanbur
Le tanbur appartient à la famille des luths à manche long utilisés dans toutes les cultures musicales turques. Instrument de référence, c'est lui dont se servit le philosophe Al-Farabi pour établir sa théorie des modes musicaux (makam). Le tanbur est équipé de quatre paires de cordes en métal qui sont pincées avec un plectre en écaille de tortue ; seule la première paire est utilisée pour jouer la mélodie. Le manche, équipé de ligatures mobiles, permet de couvrir une étendue de deux octaves.
La résonance et la finesse du tanbur, son adéquation aux intervalles du makam et de grands virtuoses en font l'équivalent, dans la musique ottomane, du cûd (luth à manche court) dans le monde arabe : « le roi de l'émotion musicale ».
L'histoire du tanbur se divise en deux périodes : avant et après Tanburi Cemil Bey (1871-1925). Ce musicien hors-pair, qui a pu être critiqué en son temps car il s'éloignait quelque peu des règles traditionnelles, a complètement renouvelé le style de jeu du tanbur en y apportant l'empreinte de sa forte personnalité et une virtuosité inconnue jusqu'alors.
Dans les années cinquante, alors que le pays s'ouvrait à la culture occidentale et subissait même une forte acculturation, toute une génération dont font partie des musiciens tels que Ihsan Özgen ou Necdet Yas¸ar se sont pénétrés du style de Tanburi Cemil grâce à ses enregistrements sur disques 78 trs. Aujourd'hui, une nouvelle génération arrive, formée par ces musiciens, mais ses références à Tanburi Cemil sont évidemment plus lointaines et de plus, du fait de la modernisation de la Turquie, elle s'ouvre à d'autres horizons. Cette jeune génération, représentée ici par Özer Özel, développe une capacité de virtuosité et une richesse mélodique incomparables. Le tanbur continue donc d'évoluer grâce à ces jeunes musiciens qui le ressourcent tout en demeurant fidèles à l'esprit de la musique ottomane.

Le tanbur à archet : yayli tanbur
La pratique du tanbur avec un archet au lieu du plectre est devenue très rare aujourd'hui. On dit qu'elle existait autrefois, dans la période qui précédait Tanburi Cemil Bey, mais on n'en a pas de traces. Les instruments à archet représentés dans les miniatures anciennes ressemblent plutôt au kemânche iranien et leur facture n'a donc rien à voir avec celle du tanbur.
On sait en revanche que Tanburi Cemil utilisait le tanbur avec un archet, on l'appelait alors yayla tanbur (tanbur joué avec un archet) et non comme aujourd'hui yayl' tanbur (tanbur à archet). La transformation de l'instrument consistait à glisser sur le chevalet une petite cale de bois afin de surélever les cordes centrales de manière à pouvoir les jouer sans « accrocher » les cordes voisines. Le son était très faible, dans un ensemble il disparaissait complètement. À partir des années soixante, on a donc fabriqué un nouvel instrument beaucoup plus sonore en transformant le jumbush, adaptation orientale du banjo, auquel fut donné par habitude le nom de yayl' tanbur. L'instrument dont joue Ihsan Özgen est celui que pratiquait Tanburi Cemil Bey.

La vièle kemençe
Cet instrument, dont l'origine a suscité beaucoup de polémiques, montre bien à quel point la musique ottomane est une synthèse entre la musique de l'époque seldjoukide (ce qui la relie à la musique persane) et la musique byzantine. Ce mélange a produit ce qu'on appelle l'esthétique ottomane.
Le kemençe est une petite vièle à trois cordes en boyau ou en métal qui dérive probablement d'un instrument byzantin, la lyra politikas. Cet instrument autrefois utilisé dans la musique populaire citadine fut introduit dans l'ensemble classique au XXe siècle par Tanburi Cemil Bey afin de remplacer le violon occidental qui avait été adopté au début du XIXe siècle.

Le rebab
Cette vièle se compose d'une caisse de résonance hémisphérique recouverte d'une peau et d'un manche en forme de bâton sur lequel sont tendues trois cordes. Autrefois dévolu à la musique savante, le rebab n'est plus utilisé aujourd'hui et c'est regrettable car sa sonorité grave et mélancolique en fait un instrument certes peu adapté à la virtuosité mais d'une grande richesse expressive.

Le 'ud
On ne présente plus ce luth à manche court, le sultan at-tarab des Arabes que certains solistes du Moyen-Orient et de Turquie ont rendu célèbre dans le monde entier.

LES INTERPRÈTES

Musicien de renom, Ihsan Özgen s'est initié très jeune à la musique. Il collabore avec Necdet Yas¸ar et Kudsi Erguner et fonde en 1989 l'ensemble Bosphore, puis en 1992 l'ensemble Anatolia. Avec ces deux ensembles, il donne plusieurs concerts aux USA, aux Pays-Bas, au Danemark et en Grèce. Ihsan Özgen n'est pas seulement instrumentiste, c'est aussi un pédagogue. On lui doit d'avoir formé toute une génération de joueurs de kemençe et de tanbur. Dans les années quarante, nombre de musiciens influencés par l'Occident ont cherché à modifier la facture des instruments de musique turcs, notamment la vièle kemençe en y ajoutant une quatrième corde et en l'accordant comme le violon ; certains ont même tenté de créer une famille de kemençe (soprano, alto, ténor et basse). Ihsan Özgen est resté à l'écart de ces tentatives (qui d'ailleurs avortèrent) et dans son enseignement au conservatoire, il a transmis à ses élèves des principes plus proches de la tradition.

Özer Özel appartient à la nouvelle génération de musiciens classiques en Turquie (il est né en 1968). Il a fait partie de l'ensemble de Necdet Yas¸ar. Aujourd'hui il est membre de l'Ensemble Golden Horn qui vient d'enregistrer tout un corpus d''uvres composées par les sultans ottomans.

PROGRAMME
Makam Huzam, luths 'ud et tanbur.
Makam Huseyni, vièle kemençe et luth tanbur.
Makam Bayati, vièle rebab et luth tanbur.
Makam Hijaz Humayun, tanbur à archet et tanbur.
Makam Bülbül Ussak, vièle kemençe et luth tanbur.

Contributeurs

Origine géographique

Turquie

Mots-clés

Date (année)

1999

Cote MCM

MCM_1999_TR_S1

Ressources liées

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Titre Localisation Date Type
Turquie. Cordes ottomanes, avec Ihsan Özgen et Özer Özel. Photos Turquie 1999-04-08 Photo numérique
Titre Localisation Date Type
3e Festival de l'Imaginaire 1999