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Aqakhân Abdullaev . Trio Zulfi Adigözelov. Anthologie du Mugam d'Azerbaïdjan, volume 6

Collection

Titre

Aqakhân Abdullaev . Trio Zulfi Adigözelov. Anthologie du Mugam d'Azerbaïdjan, volume 6

Artistes

Type de document

Audio édité

Cote MCM

474.2 ABD

Date de parution

1994

Origine géographique

Azerbaïdjan

Description

1. Mugam Segâh Zâbol
2. Mugam Rahâb
3. Mugam Bayâti Qâjâr
4. Zarbi mugam "Ovshâri"

Les poètes
Les ghazal interprétés dans ce disque sont empruntés aux grands classiques de la littérature turco-persane ainsi qu'à des auteurs plus récents. Ces poètes cultivaient un art subtil des mots, des images, des symboles et du métalangage en général. Aussi, sous une apparence parfois anodine, leurs poèmes superposent en fait plusieurs couches sémantiques constituant ainsi un véritable casse-tête pour les traducteurs. Dans les pages qui suivent, on s'est donc limité au sens littéral, abandonnant à l'auditeur le soin de laisser vagabonder son imagination.
Nizâmî Ganjâvî (~1140 - ~1202) est l'auteur d'un recueil de poèmes comprenant plus de vingt mille distiques. Il doit aussi sa réputation à ses cinq grands poèmes romanesques, dont Layla et Majnûn, récit d'un amour impossible inspiré par une célèbre légende arabe.
Mehmet Süleyman Oghlu Fuzûlî (1495 - 1556, dans la région de Bagdad) est considéré comme l'un des plus grands poètes classiques du Moyen-Orient. D'origine turkmène-bayat, il maîtrisait aussi bien l'arabe et le persan que le turc, mais c'est dans cette dernière langue que son œuvre est la plus marquante. Outre une adaptation de Layla et Majnun on en retiendra surtout un important diwân de poèmes lyriques au contenu à la fois mystique et érotique, riches en double et triple sens.
Sayd Azim Shirvâni (1835 - 1888) et Ali Aga Vahîd (1895 - 1965) ont tous deux participé au renouveau du Mugam d'Azerbaïdjan à partir du XIXe siècle et perpétué, quoiqu'avec moins d'intensité que leurs illustres prédécesseurs, la tradition du ghazal.

Les interprètes
A cinquante ans passés, Aqakhân Abdullaev est parvenu au sommet d’une carrière couronnée de succès. Reconnu dans son pays et à l'étranger comme l'un des plus grands chanteurs azerbaïdjanais et n'ayant donc plus rien à démontrer sur le plan technique, il peut dédaigner les effets de voix spectaculaires pour se consacrer entièrement à une interprétation sobre et généreuse. Au fil des années et avec cette humilité propre aux grands artistes, il est parvenu à l’essence même du chant azéri : servir de grands textes au moyen d'une expression musicale parfaitement maîtrisée.
On l'entendra ici accompagné par Zamik Aliev au luth târ et Adalat Vezirov à la vièle kemânche, deux remarquables musiciens avec lesquels il a fondé voici plusieurs années le Trio Zulfi Adigözelov en hommage à son maître, l'un des plus grands chanteurs azéris de ce siècle.

MUGAM SEGÂH ZÂBOL
Le Mugam Segâh est l'un des plus importants du répertoire azerbaïdjanais. Il compte plusieurs variantes notamment le Mugam Khârij Segâh et le Mugam Mirza Husayn Segâh.
Dans le déroulement modal du Mugam Segâh, le mode zâbol occupe une grande place ; mais ici son importance est telle que les interprètes ont jugé bon d'ajouter son nom au titre du Mugam. Les modes segâh et zâbol présentent d'ailleurs de nombreuses similitudes.
Le Mugam Segâh Zâbol se déroule comme suit :
-daramad, introduction instrumentale ( mode zâbol, rythme 3/4 ).
-ghazal, chant non mesuré explorant le maye ( cœur ) du mode zâbol.
Sans amour l'existence est une fable / [Et] celui qui en est privé est exclu de l'humanité.
L'amour, seul, est l'essence de la vie / Une âme insensible ne connaît que chagrins.
Je suis captif de cette passion pour ma patrie et pour mon peuple / Fou est celui qui ne les chérit pas.
Puisse ma patrie se dresser toujours comme la flamme d'une chandelle / Et qu'à l'entour, mon âme, telle un papillon, virevolte.
Regarde notre pays, nous voici dans un autre monde / Chaque fleur nous enchante, chaque bouton est une splendeur.
Partout, de jeunes et sveltes beautés / N'est-ce point-là le paradis ?
Mon nom est Vahîd, ô mon aimé, je ne suis pas un traître / Mais un poète et ma poésie est aussi généreuse que mon cœur.
Vahîd
-tesnif, chant mesuré en mode zâbol, rythme 4/4.
-ghazal, chant non mesuré dans le mode mânand-i mukhâlif suivi d'une modulation dans le registre supérieur du mode segâh par utilisation du ré dièse et polarisation du mi naturel
J'ai appris que tu t'étais laissé posséder par la passion. / Ô mon ange, comme moi, te voici éperdue d'amour.
Tu as livré ton cœur à un amant féroce. / En étais-tu donc lassée ?
Tu as subi la cruauté de ton bien-aimé, tu as connu les tourments de l'éloignement, / Maintenant, Dieu merci, tu comprends ce que je vis.
Tu as vu ton reflet dans son visage / Et, ta conscience perdue, tu n'es plus qu'une ombre sur un mur.
Ô ma belle, pour le seul plaisir de ses lèvres et de ses douces paroles / Tu as composé des vers, comme Sayd, le poète.
Shirvânî
-reng, interlude instrumental, rythme 6/8.
-ghazal, chant non mesuré, retour au mode zâbol mais dans le registre supérieur ( zil zâbol ).
Hier ma bien-aimée, affligée, est venue chez moi, / Son visage couvert d'une fine moiteur,
Comme la lune derrière les nuages. / Etait-elle poursuivie par un ennemi ? Car certes elle était troublée.
Je l'ai observée à la dérobée / Car l'heure de la chasse galante était arrivée.
Tous les deux, nous avons fait une sieste, en paix. / Dans le jardin de mon âme, le printemps fleurissait enfin.
Puis elle dit : "il est temps de partir, que désires-tu ?" / Alors, jugeant le moment opportun, j'ai demandé un baiser.
Elle est partie en pleurant et ses larmes me brûlaient. /Une étincelle a bouté le feu en mon cœur,
Et Nizâmî s'est soudain éveillé, debout. / Ainsi l'amour n'était qu'un songe.
Nizâmî
-reng, interlude instrumental, rythme 4/4.
-ghazal, chant non mesuré, les polarisations successives du si naturel puis du do signalent des modulations en hisâr puis en mukhâlif. Enfin, revenant dans le registre grave, les musiciens concluent par une cadence, ayaq, dans le mode segâh. Le texte est un poème d'amour de Vahîd.

MUGAM RAHÂB
Bien qu'assez peu joué, le Mugam Rahâb n'en est pas pour autant le moins intéressant. L'utilisation d'une seule échelle de degrés dans laquelle les modulations s'opèrent par le transfert des notes-pivots d'un degré à un autre, lui confère une grande unité musicale.
-daramad, introduction instrumentale, rythme 8/8.
-tesnif, chant mesuré, rythme 6/8.
-ghazal, chant non mesuré explorant le "cœur" ( maye ) du mode.
Ta chevelure est le nid de mon cœur / Où que je sois, mon âme est auprès de toi.
Mon affliction me comble. Ô médecin, laisse-moi / Il n'est point de remède à ce poison mortel.
Pense aux humbles, ne te retire pas / Que ces mains qui s'agrippent à toi ne se dressent point vers le ciel.
Fuzûlî
-tesnif, chant mesuré, rythme 6/8.
-ghazal ( début ), chant non mesuré modulant dans le mode shekaste-i fârs par polarisation du fa au lieu du sol puis en mübarriga par polarisation du la.
-reng, interlude instrumental dans le mode mübarriga.
-ghazal ( fin ), chant non mesuré dans les modes ‘irâq et qara-i par polarisation du sol avant la cadence finale ayaq.
Ne détourne point ton regard de mes larmes salines / Car ce sel est celui de tes lèvres exquises.
Toi qui sommeilles paisiblement, rassemble mon cœur éclaté / Dont tes cils ont recueilli chaque morceau.
Puisque la séparation est un renoncement à la vie / Je m'étonne que d'autres puissent vivre loin de toi.
Ô Fuzûlî, ce n'est certes pas en te consumant comme une chandelle / Que les courbures de ton âme se redresseront.
Fuzûlî

MUGAM BAYÂTI QÂJÂR
On retrouve ici l'échelle utilisée dans le Mugam précédent, mais organisée comme suit
-daramad, introduction instrumentale, rythme 6/8
-ghazal, chant non mesuré dans le "cœur" ( maye ) du mode avec exploitation intensive de la tierce si bémol — ré ( un motif mélodique appelé : ‘ushshâq, "les amants").
Ô houri , [je vois] ton reflet dans mon vin. / Dans mon vin coule le fleuve du paradis.
Suis-je Alexandre pour me diriger ainsi vers les ténèbres ? / L'eau de vie coule des lèvres de mon aimée.
La blessure causée par le yatagan de tes sourcils / Marque mon aile comme celle de Gabriel.
Depuis ce soir où ta beauté m'a enflammé / Les papillons tombent dans mes cendres.
Impossible d'extirper l'amour de mon cœur / Ô Sayd, il est [désormais] un des attributs de ma nature.
Shirvânî
-reng, interlude instrumental, rythme 6/8.
-ghazal, chant non mesuré en shekaste-i fârs ( exploration du pentacorde si bémol — fa ).
Tu connais la malignité de Satan / Que dire alors de celle de cette femme « angélique » ?
L'arc de tes sourcils m'a frappé de ses flèches / Panse ma blessure avec tes cheveux car je saigne.
L'amour déracine la foi et la religion / […]
Lorsque Zahid contempla ton visage enluminé par ta chevelure , il s'écria : / « Voyez cette gazelle qui apporte le Coran à la medersa ! »
Celui qui cède à l'amour sans son linceul / Se retrouvera nu le jour du jugement dernier.
Ne conduisez pas Sayd l'athée à la taverne / Car quel musulman [oserait] mener un infidèle à la Mecque ?
Shirvânî
-reng, interlude instrumental, rythme 6/8.
-ghazal, chant non mesuré en zil bayâti qâjâr, c'est-à-dire le registre supérieur de ce mode.
Ô fleur à la chevelure musquée ! / Ô cyprès, ta coquetterie est mortelle.
Tes paroles amères et tes regards impitoyables m'ont troublé / Ô cyprès, tes fruits sont acides.
Des flèches ont frappé mes yeux en pleurs / Ô océan, tu ne fais que compter tes joyaux.
Mon âme, ne dis pas que l'amour est vain / Car, insouciante, tu fais preuve d'égoïsme.
Fuzûlî, la lune nous éveille à l'amour / Si tu possèdes quelque talent, montre-toi aussi.
Fuzûlî
-tesnif, chant mesuré, rythme 3/4, suivi de la cadence ayaq dans le mode principal.

ZARBI MUGAM "OVSHÂRI"
Ovshâri appartient au répertoire des Zarbi Mugamlar ou Mugam "mesurés". Ces pièces, assez courtes et dans lesquelles la voix se développe librement sur un accompagnement musical bien rythmé, connaissent une très grande faveur auprès du public azerbaïdjanais.
Mon amour, promène-toi doucement.
Dans la plaine, on chasse la gazelle.
Que cette chasse fût vaine et le chasseur bredouille,
Tel était mon désir en venant parmi vous.
La parole est cause du tourment de l'amant,
Le chant est cause des souffrances du rossignol,
Ses yeux mettent la gazelle en danger.
Tu es source d'amour et de vie.
Bien souvent nous avons affronté la tempête et le feu,
[Mais] cette eau jamais ne pourra nous sauver du brasier,
Même si nous vivons cent ans.
Anonyme

Pierre Bois

Éditeur

Maison des Cultures du Monde

Collection

Inédit

numéro

W260052

Durée

69'51"

Support physique

Audio - CD

Type d'évènement

Musique

Type de captation

Enregistrement Studio

Mots-clés

nombre de pages

18

liste des contributeurs