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Irak. Le maqâm irakien, tradition de Bagdad. Spectacle

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Évènement

Titre

Irak. Le maqâm irakien, tradition de Bagdad. Spectacle

Sous-titre

par Hamed al-Sa'adi et l'ensemble Tchâlghi al-Baghdâdî.

Date

1998-03-23

Date de fin

1998-03-25

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

23-25 mars 1998, MCM Paris
21 mars, Théâtre Duchamp-Villon, Rouen
27 mars, Salle Patino, Genève (Ateliers d'Ethnomusicologie)

Bagdad, coeur d'une grande tradition littéraire et musicale, a engendré au gré des influences arabe, persane et turque un style artistique incomparable. Si profondément enracinée dans cette ancestrale terre d'Orient et source inspiratrice des plus subtiles émotions des Mille et une nuits, cette cité au bord du Tigre a donné naissance à une grande tradition vocale : le maqâm.
D'abord chanté dans les cafés (réservés aux hommes), et cela jusqu'à la fin des années quarante, le maqâm a toujours été accueilli, quelles que soient les origines sociales de l'assistance, avec passion et bonheur. Depuis la disparition de ces lieux publics, le maqâm connut un éclat important dans les demeures bourgeoises. Mariage, anniversaire et autres fêtes familiales ou amicales offraient alors l'occasion d'inviter des virtuoses. Mais la crise que connaît aujourd'hui le pays met en danger cette tradition savante. La venue pour la première fois en France d'un chanteur tel que Hamed al-Saadi met en lumière un patrimoine injustement méconnu.
Le récitant et chanteur Hamed al-Saadi, disciple de l'illustre maître Yusuf Omar, jouit d'une forte renommée dans les pays arabes tant par l'excellence de son interprétation que par son infatigable recherche des maqâms oubliés ou délaissés.
Ce genre vocal - qu'il ne faut pas confondre avec le terme désignant le mode musical arabe - est à la fois un art savant aristocratique et une tradition populaire. De l'amour aux souffrances qu'il éveille, du quotidien à la mystique, le maqâm caracole sans heurt du profane au sacré. Cet art se fonde sur une alternance de chants et de passages instrumentaux, et sur l'utilisation de formes poétiques, de modes et de rythmes établis au fil du temps et de la tradition en un ensemble de règles codifiées.

C'est dans les cités antiques de l'ancien Irak, la Mésopotamie, qu'une des premières civilisations humaines voit le jour ; en émergent l'écriture, la loi et les épopées.
À maintes reprises, ce pays se trouvera pris en tenaille entre des puissances qui se disputent le pouvoir régional. Après une lutte entre Romains et Sassanides, le pouvoir arabo-islamique règne sur le pays au VIIe siècle. Sa capitale Bagdad devient le centre du caliphat du monde islamique, ville d'art, de science et de savoir dans un pays de sanctuaires religieux qui attirent les fidèles du monde islamique tout entier.
Dans ce pays de culture, de langue et de population arabes, la ville de Bagdad est le centre focal de rencontres de populations provenant de différentes régions de l'ancien monde de l'Islam ; elle développe alors une culture originale au carrefour des grandes civilisations islamiques, culture dont l'art du maqâm irakien vient porter témoignage.

Les maqâms irakiens
Les maqâms irakiens interprétés dans ces concerts appartiennent à la grande tradition de Bagdad, appelée aussi al maqâmat al baghdâdîyya, qui se distingue des traditions de Mossoul et de Kirkouk, par ailleurs moins connues. De par son ancienneté, ce répertoire constitue l'origine des différentes expressions musicales citadines, tant instrumentales que vocales ou religieuses et touche tous les milieux urbains profanes ou sacrés.
Il ne faut pas confondre le maqâm irakien, al maqâm al 'irâqi (pl. al maqâmat al 'irâqîyya) qui est le principal genre vocal citadin du pays avec le terme maqâm qui désigne le mode musical arabe. Le répertoire des maqâms en comprend plus de cinquante dont une grande partie est encore en vogue. Chacun de ces maqâms est une "composition" indépendante avec des parties structurelles et des successions mélodiques spécifiques au genre qui se composent de passages caractéristiques, de pièces mélodiques et vocales, d'enchaînements de modes et de modulations. Le genre poétique et le type de formule rythmique sont établis par la tradition. Les éléments constitutifs de chaque maqâm doivent être respectés par l'interprète, mais celui-ci dispose d'une certaine liberté qui l'autorise à improviser et même à ajouter des passages personnels.
Traditionnellement, les maqâms sont chantés en cycles : fusul. Cependant, les cycles profanes ont été déstructurés, remplacés aujourd'hui par des cycles libres ou par de petits cycles, tandis que ceux qui sont liés à la tradition religieuse, comme le mawled, "célébration de la naissance" et le dhikr, "cérémonie des mystiques", conservent leur ordre ancien.
Le maqâm irakien s'appuie sur un ensemble de règles codifiées, une terminologie complexe et un long apprentissage qui sont les caractéristiques d'une tradition savante. Mais s'il est largement patronné par l'aristocratie, il constitue néanmoins le patrimoine de toutes les couches sociales.
Lors des soirées musicales, l'interprétation des maqâms est associée à d'autres formes musicales. En général chaque maqâm est précédé d'une introduction instrumentale indépendante, muqadimma, et de quelques improvisations instrumentales taqâsîm. Une voire plusieurs pesté, chansons à refrain puisées le plus souvent dans le répertoire des chansons citadines, sont exécutées, en général dans le mode principal du maqâm. Le répertoire peut aussi inclure des passages de chant populaire comme la 'ataba bédouine et l'ubûthîyya rurale.

Maqâm et poésie
Le chanteur, appelé traditionnellement qârî', "récitant", a toute liberté de puiser dans l'immense corpus lyrique arabe : pour chaque maqâm, poèmes en arabe littéraire et en arabe dialectal sont imposés par leurs seules formes. Il arrive, sous l'effet de la succession des différentes parties vocales et de l'insertion de passages intrumentaux entre deux parties d'un vers, que le vers poétique éclate. Ceci explique partiellement la technique d'interprétation des anciens qui consistait à chanter entre les lèvres, ce qui rendait certains passages poétiques incompréhensibles, le texte s'effaçant devant les exigences de la ligne mélodique.
On doit aux grands chanteurs Mohammad al Gubantchi (1901-1989) et Yusuf Omar (1918-1987 voir CD) d'avoir restitué l'importance de la poésie en imposant aux interprètes une rigueur dans la prononciation. Selon les connaisseurs bagdadi, une grande interprétation est celle qui réussit à lier un grand poème à la mélodie d'un maqâm qui lui correspond le mieux.Le contenu des poèmes, toujours lyrique, peut être aussi varié que la vie, mais ceux ayant trait à l'amour, la souffrance, l'éloignement et la mystique sont prédominants.

L'accompagnement instrumental
Dans un contexte profane, le maqâm est traditionnellement accompagné par l'ensemble al tchâlghî al baghdâdî comprenant un santûr, cithare sur table trapézoidale à 23 triples cordes frappées ; un djôzé, vièle à quatre cordes, un tabla, tambour à une membrane, un daff zindjârî, tambour sur cadre à cymbalettes, et parfois la timbale double naqqâra. Depuis les années trente, certains chanteurs ont opté pour l'ensemble oriental al takht al sharqî avec le qânûn, cithare à cordes pincées, le 'ûd, luth classique à manche court et le nây, flûte de roseau à six trous. Si ces deux ensembles sont aujourd'hui indifféremment utilisés, on constate dans les années soixante-dix une préférence marquée pour le tchâlghî.

Lieux et circonstances de représentation
Jusqu'à la fin des années quarante, le seul lieu public où l'on peut écouter les chanteurs de maqâm est le café, réservé aux hommes. Celui-ci joue le rôle d'école permettant aux grands maîtres, à leurs disciples masculins et à un auditoire d'amateurs passionnés et, socialement hétérogène, d'écouter le chant du maqâm.
Après la disparition des cafés musicaux, la tradition du maqâm se poursuit dans les soirées privées, sahrat maqâm ou tchâlghî, organisées dans les demeures de la bourgeoisie riche et moyenne et y connaît son plus grand éclat. Diverses circonstances offrent l'occasion d'inviter chanteurs et ensemble instrumental devant une audience généralement mixte : mariage, anniversaire, circoncision, fête de calendrier, visite d'un invité d'honneur ou tout simplement pour se retrouver entre amis. Le peu de contraintes de temps et de tenue, la consommation de l'alcool (interdit dans les cafés) favorisent une interprétation libre et généralement très intense sur le plan émotionnel. Les auditeurs participent souvent au chant et dansent sur les chansons rythmées pestés. Ces réunions informelles vont survivre à tous les changements socio-économiques précédant la guerre de 1991. Mais depuis, la profonde crise économique que connaît le pays a largement retiré aux mélomanes les moyens de s'offrir de telles soirées.

Hamed al Sa'adi, récitant (chanteur)
Né à Bagdad en 1956. Dès son plus jeune âge, Hamed al Sa'adi se découvre une vocation pour l'art du maqâm. Il s'en imprègne en écoutant attentivement les diverses manières de l'interpréter, accordant une attention particulière aux deux grands chanteurs du siècle, Mohammed al Gubantchi et Yusuf Omar. Et ce dernier sent que le jeune Hamed al Sa'adi porte en lui le talent nécessaire pour devenir son héritier. En effet, al Sa'adi est non seulement le seul représentant de la tendance traditionnelle et authentique du chant du maqâm mais il est aussi le seul à pouvoir interpréter la totalité du répertoire, chose rare qui, de tout temps, a distingué les chanteurs de premier rang. S'appuyant sur de vieux enregistrements, il s'est employé à sortir de l'oubli nombre de maqâms tombés en désuétude.
Aujourd'hui encore, al Sa'adi continue d'approfondir ses recherches dans le domaine de l'interprétation et celui de la poésie arabe classique. Par ailleurs, il enseigne le maqâm et est expert à la Maison du maqâm fréquentée par les amateurs. Hamed al Sa'adi jouit d'une grande renommée dans les pays arabes. Ses concerts parisiens sont une première en Europe.

Mohammed Zaki, cithare-sur-table santûr
Né à Bagdad en 1955. Il étudie le santûr à l'Institut d'études mélodiques de Bagdad. Pendant de très longues années il accompagnera le grand Yusuf Omar. Actuellement il enseigne le santûr et joue régulièrement dans les différents ensembles de tchâlghî baghdâdî à Bagdad et à l'étranger. Il est aujourd'hui l'un des meilleurs joueurs de santûr en Irak.

Soheib Hashem al Ridjab, vièle à quatre cordes djôzé
Né à Bagdad en 1950 . Il a hérité l'art du maqâm de son père, le renommé Hadj Hashem al Ridjab, interprète, auteur et grand spécialiste de cet art. Soheib est des rares joueurs de djôzé maîtrisant l'art du jeu traditionnel. Il participe activement à plusieurs ensembles de tchâlghî baghdâdî et accompagne le maqâm dans le monde entier.

Fadel al Sa'adi, tambour à une membrane tabla
Né à Bagdad en 1964. Ce jeune percussioniste est le frère cadet de Hamed al Sa'adi. Il s'est familiarisé avec toutes les formules rythmiques irakiennes et a repris l'usage des formules anciennes qui avaient été délaissées par ses contemporains. Il participe également au chant des pestés. Il joue régulièrement à Bagdad dans divers ensembles de tchâlghî baghdâdî.

Schéhérazade Qassim Hassan

à écouter
Le Maqâm irakien, hommage à Yusuf Omar (1918-1987) coffret de 2 CD INÉDIT W260063

Contributeurs

Origine géographique

Irak

Mots-clés

Date (année)

1998

Cote MCM

MCM_1998_IQ_S1

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Titre Localisation Date Type
Irak. Maqâm de Bagdad par Hamed al-Sa'adi et l'ensemble Tchâlghi al-Baghdâdî. Photos Irak 1998-03-23 Photo numérique