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Musiques de l'Océan Indien, Madagascar, Comores, Maurice, Réunion. Affiche

Évènement

Type de document

Affiche

Titre

Musiques de l'Océan Indien, Madagascar, Comores, Maurice, Réunion. Affiche

Date

1983-04-28

Date de fin

1983-04-30

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

fr Musique

Thème de l'évènement

fr Festival des Arts Traditionnels, Rennes

Description de la pratique

Texte au dos de l'affiche.

28-30 avril 1983
Pour la première fois en France sous le patronage du Ministère des Relations Extérieures et du Ministère de la Culture.

Introduction.
Alors que dans notre connaissance, les cultures musicales de l'Asie sont encore à leur balbutiement, alors que les cultures africaines se laissent à peine dévoiler, voici que le gouvernail change de cap et cingle vers les tropiques. N'est-il pas hasardeux de fixer son attention sur quelques îles éparses de l'Océan Indien? Après tout, elles ont été forcément peuplées de colons émigrés des continents mitoyens. On y trouve aussi bien les vestiges de l'Asie, de l'Afrique, comme de surcroit une implantation occidentale séculaire sous maints aspects. Fort d'une réaction héritée du XIXe siècle, qui appréhendait la musique rurale européenne sous l'angle d'une déformation des pratiques de la ville, on risquerait d'appliquer cette relation aux îles et y entrevoir un pâle reflet musical des continents.
Ce point de vue doit être écarté. Le brassage des cultures a suscité aussi des formes. Que Séga et Maloya soient des genres qui n'ont cessé de se modeler au goût du jour, certes, mais ce sont des genres récents, en quête de croissance qui ne demandent qu'à mûrir. A l'opposé, le répertoire du gambussi des Comores draine un patrimoine très ancien hérité du Yémen et demeure hors de tout contact extérieur. Sa découverte risque d'accélérer ce grand courant de retour aux sources arabes. Il s'avère un témoignage des plus précieux...
Mais ce qu'apporte, en revanche, cette rencontre des musiques de l'Océan Indien, par de là la découverte de musiques nouvelles, c'est la concrétisation d'un principe que l'on peut dénommer principe des périphéries. Il s'énonce ainsi : lorsqu'un foyer de diffusion culturelle s'élargit et s'éloigne du point qui l'a vu naître, il y a plus de chance de rencontrer aux extrémités des vagues plus archaïques donc plus fidèles à l'image initiale de celles renouvelées sur place par le courant qui les sécrète, plus soumis aux lois de l'évolution, donc des transformations. Tout se passe comme si, loin des ses origines, on s'y accroche avec plus d'ardeur de peur d'égarer les sources. Curieusement, les musiques des îles de l'Océan Indien illustrent sous de multiples aspects cette conception. On y devine, par exemple, une musique française à l'ancienne héritée des XVIIIe et XIXe siècles, qui a cessé de survivre dans la métropole. Les chercheurs de romances du passé feraient bien de se pencher sur tel aspect du chant des Seychelles ou de Rodrigues aux courbes mélodiques, très proches de celles consignées sur les cahiers de l'époque. Autre exemple que proposent les Comores, le répertoire dit gambussi. Il 's'exprime au moyen d'un chant dépouillé, dit syllabique, dans ornementation qui accentue la thèse d'une musique arabe archaïque dénuée de toutes fioritures, apport tardif transmis depuis par l'extention de l'Islam. Cette ligne pure reflète bien le souci de conférer au message sa clarté, sensiblement brouillé par la surcharge des arabesques. On signale également à l'île Maurice des colonies de pakistanais débarqués depuis bien longtemps qui, repliés sur eux-mêmes entretiennent un répertoire d chant mystique qawwali. Il serait, par conséquent de bon aloi de l'opposer au style qawwali très prisé à l'heure actuelle, au Pakistan, et de voir s'il ne conserve pas quelques traits à l'ancienne, un regard précieux pour l'histoire musicale de cette nation. Comment d'autre part, comprendre cette surprenante fête annuelle des Comores? Un jeune taureau est laissé en toute liberté dans les rues de la ville. Il s'élance, il gambade, renacle et encorne à tout venant; les musiques suivent sa course folle. Cette corrida évoque étrangement ce qui se passe aux antipodes, en l'occurence au pays basque. Y voir un trait culturel débarqué avec quelques marins basques ou espagnols ne peut être pris au sérieux. Il faudrait remonter cette filière jusqu'à l'arrivée des Shiraziens (iraniens) qui, les premiers, ont peuplé l'archipel, léguant ainsi à la postérité les cultes de Mithra...
A cette approche par les périphéries, les musiques de l'Océan Indien y greffent un corollaire, celui de la complémentarité. On l'énoncera ainsi : des extrémités géographiques opposées à un même foyer de diffusion peuvent acheminer des phénomènes qui ne colportent plus qu'une partie du message initial. Tout se passe comme si la sémantique du départ se divise à l'arrivée en deux. Aux Comores, survit encore une danse, le dirridji, dénomination assurément arabe qui, pour sa part n'éveille aucun écho dans ce monde actuel. Et portant, on la perçoit dans les textes de l'Espagne arabe où elle renvoie à un instrument de musique. Ainsi donc à l'origine, un seul terme suffirait à couvrir l'instrument, le répertoire ou la danse, cas du moutia des Seychelles ou du thaara des Maldives. Ultérieurement, tout s'est parcellisé. Dans l'Egypte d'aujourd'hui, et plus précisément dans la région de Suez, on rencontre la lyre simsimiyya ou sumsumiyya. Aux Comores, ce même terme ne s'attache plus à désigner un instrument particulier, mais une chorégraphie héritée de Zanzibar. Mieux encore. Des voyageurs du XIXe siècle ont rapporté que tous les boutres de la Mer Rouge étaient équipés d'un instrument de musique : la lyre tamboura, confectionnée par les matelots et à laquelle on attachait une grande attention. Les marins passaient leur temps à égrainer les cordes pour se divertir, disait-on. Toutefois, on admettait implicitement que le message transmis par la lyre semblait irrémédiablement perdu. Chose étrange, la clé du code semble provenir de Madagascar où elle est inscrite dans un conte. Les mythes malgaches racontent, en effet l'histoire de la valiha, cette cithare qui, à l'origine, a été affecté à la vie maritime. A cet exemple frappant correspond toute une vision archaïque dévolue à un instrument à cordes depuis la plus haute antiquité : lyre, harpe ou cithare avaient pour but d'apaiser - qu'on se remémore les quatre harpes de l'Apocalypse de Saint Jean qui fonctionnent dans le but de calmer la fureur de l'Agneau ou, à l'inverse d'exciter entre autres les éléments naturels. L'instrument était une connaissance en soi de l'univers, il détenait sa maîtrise.
Concluont ces exemples de complémentarité par un détail passé inaperçu jusqu'à ce jour : le miroir. Au Yémen, il orne le manche du luth qanbous, ancêtre du gambussi ou gabusi comorien, et on ne sait expliquer sa présence. Sur le manche du luth comorien, il a disparu. En revanche à Djibouti il décore la lyre tamboura et on interprète cet élément comme doté de pouvoir magique. A Madagascar, lors des danses de possession, la prêtresse qui officie tient dans la main la valiha et dans l'autre un miroir. Sans eux, le malade ne saurait être délivré du mal qui l'afflige.
Que ces îles de l'Océan Indien, par delà la musique qu'elles délivreront au cours de cette rencontre, puissent réinsérer en nous cette vision globale des choses, puisqu'elles ont été constituées de fragments venus des quatre coins de la planète. Sauront-elles prouver une conscience de l'unité retrouvée ?

Christian POCHE
Ethnomusicologue.

Discographie:

Comores
-Music of the Comoro Islands. Disque Folkways n° 4243.
Résultat d'une enquête ethnomusicologique mené à Domoni ville principale d'Anjouan. Seule contribution récente, difficile à se procurer en France.

Madagascar
-Musique Malgache Ocora n° 24
Excellente introduction à la musique de madagascar. Disque réalisé en 1963 sur le terrain par Charles Duvelle qui demeure un point de référence unique en son genre.
Valiha Madagascar Ocora n° 18
Petite merveille qui vient d'être rééditée. Une critique à formuler, l'étroitesse des plages. On aimerait que cela dure... le concert y suppléera.

-Airs à danser pour cithare. Anthologie de la musique des peuples n° 2907
Dans la même veine que le précédent. L'instrument crépite avec beaucoup de stridence. A signaler l'intérêt du texte de Bernard Koechlin, l'auteur des enregistrements.

-Possession et Poésie à Madagascar. Ocora 83
L'accordéon diatonique a remplacé la valiha. Quelques chants (en diaphonies) évoquent le style pratiqué par Sana.

Maldives (pour information)
-Chants et percussions des Maldives Ocora 558553
Unique document donnant à ce jour une idée de la musique des atolls. Contient un extrait de Thaara, qui, par excellence est la forme musicale la plus sophistiquée.

Maurice
-Beaucoup d'enregistrements de variété de Sega s'amoncellent. Aucune référence tangible à signaler dans le lot fortement commercialisé.

Réunion
-De très nombreux "Séga", de nombreux "Maloya" égrènent les étalages des commerçants. On nous dit que Firmin VIRY a gravé un petit quarante cinq tours. Dont Acte.

Seychelles (pour information)
-Mémoire musicale des îles Seychelles. Disque Dom n° 62
merveilleux portraits des derniers musiciens conteurs, Boboï (75ans) vendeur de coquillages et l'inégalable Tonpa (74 ans), laboureur.

-Seychelles : Danses et Romances de l'ancienne France. Disque Ocora n° 558534
Quand l'Océan Indien renvoie notre héritage qui comblerait d'aise l'auteur du "Plaisir d'Amour". Pour découvrir la vieille France à la saveur des violons, guitare, banjo ou autre triangle.

-Seychelles n°2 : Musiques oubliées des îles, Ocora n° 558554
Autre portrait du one-man-show Tonpa, signé Bernard KOECHLIN.

Origine géographique

Océan Indien

Mots-clés

Cote MCM

MCM_1983_IO_S1_DN1

Date du copyright

1983

Editeur

fr Maison des Cultures du Monde

Illustration

fr Photo Noir et Blanc

Couleur

fr Couleur