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Hongrie. Musiques hongroises de Transylvanie. Spectacle

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Évènement

Titre

Hongrie. Musiques hongroises de Transylvanie. Spectacle

Sous-titre

Taraf Magyarszovat

Date

2001-03-17

Date de fin

2001-03-18

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

17-18 mars 2001
En regardant la carte de l'Europe, on remarque à l'est une longue crête montagneuse en forme de colimaçon. C'est l'arête des Carpates qui cache, dans sa partie arrondie, l'une des contrées les plus riches et les plus diversifiées du folklore européen : la Transylvanie. Ce territoire a tantôt fait partie de la Hongrie, tantôt constitué une principauté autonome. La paix de Trianon, qui suivit la première guerre mondiale, l'a attribué à la Roumanie, prenant acte du fait que la population transylvaine était désormais majoritairement roumaine. C'est pourtant dans la diversité des origines de sa population que réside l'un des secrets de la richesse musicale de la Transylvanie. Aux trois nationalités reconnues dès le Moyen-Âge (Hongrois, Sicules, Saxons) s'ajoutèrent successivement les Roumains, les Tatars, les Slovaques, les Juifs, les Tsiganes, les Arméniens. Chacun de ces peuples a, par ses apports successifs, contribué au développement de la musique transylvaine. Le style, la saveur propres à cette musique populaire ne peuvent se confondre ni avec ceux de Hongrie ni avec ceux de la Roumanie primitive.
L'usage du violon et des instruments à cordes y apparaît dès le XVIIe siècle mais ne se généralise qu'à partir de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Dès lors, les instruments à cordes évincent définitivement les instruments à vent (cornemuse, chalumeau) jusqu'alors couramment utilisés dans la musique traditionnelle transylvaine et le quatuor, composé sur le modèle occidental de deux violons, d'un alto et d'un violoncelle (ou contrebasse), se développe et se maintient jusqu'au début du XXe siècle, avec différentes variantes locales. En général, les formations dépendent fortement de la richesse de la région. Dans les campagnes aisées, la collectivité entretient un orchestre important, comprenant des instruments variés, contrairement aux autres villages moins opulents.
Le taraf de Magyarszovát vient de la partie centrale de la Transylvanie : le Mezöség (Grande Plaine). C'est un orchestre qui utilise exclusivement des instruments à cordes, deux violons, deux altos conçus spécialement pour l'ensemble, et une contrebasse. Les violons sont ici conformes à l'usage classique, et c'est surtout l'alto qui mérite notre attention, car on en a modifié le jeu harmonique en raccourcissant le cordier et en tendant trois cordes accordées de façon particulière (sol-ré1-la). Autrefois tous les instruments étaient cordés en boyau, sauf la chanterelle du violon qui était confectionnée dans du fil de téléphone, et la corde de sol qui était filetée de cuivre à l'instar des cordes de guitare. Fabriquées avec de la panse de taureau jusque dans les années soixante, les cordes artisanales ont été remplacées par des cordes industrielles, plus sonores et plus économiques. La panse de taureau n'est plus guère utilisée que pour la contrebasse. Chaque instrument de l'orchestre, placé sous la conduite du violon, joue la mélodie à sa manière : le violon dans l'aigu et dans un style richement ornementé, la contrebasse dans le grave et dans un style simple et isorythmique et, entre ces deux extrêmes, les deux altos qui accompagnent la mélodie de leurs accords majeurs et de leurs mixturae. Cette musique comprend de nombreux éléments archaïques qui laissent à penser que l'on peut apprendre la véritable ornementation baroque auprès du premier violon d'un orchestre transylvain.
La caractéristique principale de cette musique de danse est le rythme accentué sur la première pulsation, et ce pour chaque instrument. Tout y est très sonore, il n'y a pas d'hésitation dans la dynamique. Chaque pièce est construite sur une succession de mélodies librement associées, l'orchestre improvisant à l'intérieur du cadre des règles de la danse.
On notera également que le tempérament utilisé, antérieur au tempérament égal, sonne faux à une oreille occidentale moderne. Les notes, par rapport aux règles de l'acoustique, sont en permanence tirées vers le haut, contribuant ainsi à produire une musique plus 'tendue'.
La plupart des mélodies mélangent les deux styles vocaux hongrois, le plus récent et le plus ancien. Les textes sont improvisés sur de vieilles mélodies hongroises et expriment en général l'humeur du chanteur (ou de la chanteuse), ses joies ou ses peines. Le chant alterne avec la déclamation et, dans de nombreux cas, des interjections ou des cris de joie pendant les danses (csujjogatások) sont intégrés au texte de la chanson. L'origine des textes est accessoire, car à côté des 'uvres populaires, le chanteur intègre également des fragments de poésie savante ou des vers de grands poètes hongrois appris à l'école.
Les musiques présentées dans ce concert sont radicalement différentes de celles qu'évoque le terme 'musique populaire hongroise' pour l'auditeur moyen d'Europe occidentale et malheureusement pour beaucoup de Hongrois. En effet, ceux-ci se réfèrent généralement à la musique interprétée par les Tsiganes et qui comprend aussi bien des musiques de restaurant ou les musiques instrumentales villageoises que les musiciens tsiganes perpétuent depuis des générations. Ces derniers possèdent enfin ' trésor jalousement gardé ' leur propre musique traditionnelle qu'ils réservent à l'intimité de leur communauté. Comment ces musiques ont-elles été ainsi confondues ? La musique populaire hongroise primitive que tant de personnes ont recherchée au XIXe siècle mais que seul Bartók a retrouvée au début du XXe siècle, était une musique vocale à une voix qui, avant l'arrivée des instruments à cordes, pouvait être interprétée sur des instruments à vent (flûte, cornemuse, chalumeau) ou à la vielle à roue. Vers la fin du XVIIIe siècle, certains premiers violons commencent à jouer leurs propres compositions et même à les noter ou à les faire transcrire (Bihari, Lavotta). Parallèlement au réveil national hongrois se développe une mode tsigane. On assiste alors au sein de la communauté tsigane à la naissance d'une caste privilégiée qui perd peu à peu le contact avec sa propre musique populaire, ces orchestres tsiganes étant fréquemment engagés au service des aristocrates. En 1715, les Habsbourg créent une armée régulière et se servent de la musique comme tactique de recrutement. Ils contribuent ainsi à la naissance d'un nouveau genre fondé sur les musiques de danse masculine : le verbunkos, qui inspire nombre de musiciens, dont des Tsiganes. Le verbunkos devient le socle d'une nouvelle musique tsigane qui se répand en Hongrie et en Occident sous le nom de musique populaire hongroise et aura l'influence que l'on sait sur des compositeurs tels que Liszt ou Brahms. Après la découverte de la véritable musique populaire hongroise, les disciples de Béla Bartók vont s'acharner dans de nombreux articles à expliquer avec patience ' et non sans exaspération ' la différence entre ces deux musiques. Mais les folkloristes et les musiciens, étrangers et hongrois, opposent à ces thèses incompréhension voire hostilité, les considérant comme une mise en cause de leurs pro p res travaux, tandis que les spécialistes roumains ou slovaques n'y voient que nationalisme et révisionnisme. Et force nous est donc de constater que cette musique populaire n'est toujours pas reconnue par le grand public.
Bartók et Kodály se laissent parfois aller à l'exagération. Aujourd'hui, avec le recul, exclure du corpus populaire hongrois, dans la recherche de la pure source ancestrale, les danses instrumentales jouées par les Tsiganes apparaît comme une erreur de compréhension et d'idéologie. Ces travaux ont cependant une valeur inestimable car ils s'appuient sur le collectage et l'étude systématique du chant populaire hongrois et sur sa comparaison avec les chants populaires des pays voisins avant leur disparition. Bartók et Kodály se sont donc peu intéressés à la musique populaire à cordes dans leurs travaux. Leurs successeurs, réunis autour de László Lajtha, y ont en revanche remédié à partir des années quarante grâce à un important travail de collectage. La danse et la musique populaire instrumentale, qui est par essence une musique de danse, a toujours été influencée par les modes. L'engouement pour le csárdás, par exemple, gagne les villages et les ensembles tsiganes locaux soucieux d'être à la page, ce qui lui vaut d'être appelé 'danse tsigane' par les bergers qui en soulignent ainsi le caractère étranger. Vers la fin du XIXe siècle, nombre de chants populaires assez médiocres, de csárdás, de complaintes et de rengaines composés dans ce style nouveau par des musiciens plus ou moins professionnels, sont reproduits à peu de frais par de petits éditeurs et diffusés dans tout le pays. Cet engouement se propage dans toutes les couches de la population et atteint les villages au début du XXe siècle. D'ailleurs dès 1907, dans sa collection Le pays des Sicules, Bartók se plaint que les thèmes d'opérettes à la mode évincent peu à peu les chants traditionnels. Les musiciens de villages, imitant leurs collègues tsiganes de la ville, intègrent aussi de nombreux csárdás dans leur répertoire, les adaptant à leur goût comme ils l'avaient fait auparavant avec les autres danses à la mode. De nos jours, lors de noces villageoises, ce sont ces mélanges de musiques folklorisées que l'on entend le plus fréquemment. Mais il n'est pas rare que vers la fin de la fête, telle une pépite, on entende un air différent, lié à d'autres rites. 'Maintenant on joue en hongrois' s'écrient les musiciens. Cela fait bien sûr référence au csárdás mais aussi à ces danses beaucoup plus anciennes, également appelées 'hongroises' pour les différencier dans cette Transylvanie plurinationale des danses étrangères apportées par la mode.
Les interprètes
Le taraf de Magyarszovát (ou Szovát, appelé Suatu en roumain) est un ensemble villageois composé de musiciens tsiganes qui ont consacré toute leur vie à accompagner les événements importants de la vie du village : mariages, bals, funérailles, etc. Leur formation correspond au double ensemble classique : deux violons, deux altos à trois cordes, une contrebasse. Ils interprètent dans un style très archaïque la musique de la plaine transylvaine composée principalement de musiques de danse. Il arrive également qu'ils se produisent pour les communautés roumaine et tsigane. Mária Maneszes 'Láli', née Mária Tóth, est une paysanne de Szovát ; elle chante dans un style ancien, très ornementé, qui rappelle les origines asiatiques du peuple hongrois.
LÁSZLÓ KELEMEN
Le Festival de l'Imaginaire remercie M. Sandor László, M. László Kelemen, M. Robert Lacombe et le Centre Culturel Français de Budapest.

MUSIQUES HONGROISES DE TRANSYLVANIE
Traditions du Gyimes et de la Grande Plaine
Duo Zerkula ' Taraf Magyarszovát
COMPACT DISC INEDIT W 260098
disponible à la sortie du concert.

Contributeurs

Origine géographique

Hongrie

Mots-clés

Date (année)

2001

Cote MCM

MCM_2001_HU_S1

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Hongrie. Musiques hongroises de Transylvanie. Vidéos Hongrie 2001-03-17 Vidéo numérique
Hongrie. Musiques hongroises de Transylvanie. Photos Hongrie 2001-03-17 Photo numérique
Hongrie. Musiques hongroises de Transylvanie. Photos Hongrie 2001-03-17 Photo numérique
Titre Localisation Date Type
5e Festival de l'Imaginaire 2001