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Russie. Voix de femmes russes de la Mer Banche à la Mer du Japon. Chants des steppes. Spectacle

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Évènement

Titre

Russie. Voix de femmes russes de la Mer Banche à la Mer du Japon. Chants des steppes. Spectacle

Date

1990-03-06

Date de fin

1990-03-15

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

6-15 mars 1990
Voix de femmes russes de la Mer Banche à la Mer du Japon. Chants des steppes
Plus sensible encore que dans d'autres régions du monde, le chant des femmes semble exprimer tout ce qu'il y a de plus fort dans les cultures de l'immense Russie grâce sans doute à sa diversité et à son amplitude.
La richesse pluri- ethnique des territoires s'étendant de la Mer Blanche glacée à la Mer du Japon, en passant par les chaînes de l'Oural et en longeant la frontière mongole, permet d'aborder des techniques vocales variées qui reflètent souvent un comportement, une manière de vivre.
Curieusement, quelles que soient les régions, la permanence de quelques sujets majeurs autour desquels se centrent les thèmes des chants, tend à révéler à la fois des préoccupations communes et la position- pivot des femmes dans les sociétés abordées.
En effectuant une synthèse de ces répertoires, nous avons choisi de grouper ces thèmes autour d'intérêts sociaux qui nous ont semblé faire ressortir des attitudes inscrites dans le patrimoine culturel et historique de ces populations.
La séparation
-Pleurs de noces : la jeune fille quitte sa famille et dit adieu à son enfance pour aller vivre dans la maison du fiancé.
-Chants de recrue : les jeunes gens s'engageant dans l'armé ou enrôlés de force devaient, jusqu'au milieu du siècle dernier, donner vingt-cinq ans de leur vie au tsar. De nos jours, les femmes chantent encore les circonstances de ces départs.
-Chants de séparation : les guerriers, les chasseurs, les voyageurs sillonnant les pistes du Grand Nord ou de l'Asie Centrale, reçoivent comme une bénédiction, les grands chants longs de leurs épouses et de leurs soeurs.
-Le deuil : dans certaines communautés, les funérailles se déroulent dans un temps sacré, ponctué uniquement par la musique vocale.

La chasse
Les peuples du cercle polaire, ceux de la steppe sibérienne ou ceux des montagnes de l'Altaï confient aux voix des femmes chamanes le soin d'attirer et de séduire le gibier ; toutefois, celles qui ne possèdent pas de pouvoir magique protègent par leurs chants les chasseurs en expédition. En outre, elles célèbrent le retour victorieux de la chasse en dénombrant les proies tuées. Certains chants constituent ainsi une sorte de comptabilité de partage. Dans cette catégorie se trouvent :
- les chants aux oiseaux,
- les imitations de chants d'oiseaux,
- les chants à l'ours, - les chants aux troupeaux de rennes,
- les chants au poisson et plus particulièrement au saumon.

Le cheval
Jusqu'à la dernière guerre mondiale, le cheval, meilleur atout des populations s'étendant du Caucase à la toundra extrême- orientale était célébré dans les chants de femmes, en raison de sa beauté, des vertus protectrices qu'il répandait sur le cavalier et parfois même comme symbole de virilité.

L'épopée
Depuis les légende des géants de l'Arctique que les femmes racontent en chantant, couchées sous leurs tentes de peau, jusqu'aux surhommes de l'Oural en passant par les héros historiques, leurs voix posent avec régularité les jalons de la mémoire. Le chant épique correspond à une période de fête ou à un temps de recueillement, mais toujours, il ressoude la communauté.

L'état intérieur
- Chants de joie pour les naissances ou les initiations.
- Chants de vexation : pour éviter les affrontements entre individus ou clans, les femmes improvisent des litanies de compensation.

La nature et le surnaturel
- Chants de louanges des plaines, des montagnes, des rivières des arbres.
- Chants pour apaiser l'orage ou pour calmer la nature, exécutés à l'occasion de cérémonies chamaniques.
- Prières pour faire tomber la fièvre
- Chants d'appel des esprits : que ce soit dans le monde chamaniste, musulman ou chrétien, les femmes invoquent les forces qui protègent ou terrifient.

La richesse des formes vocales proposée par les cultures de la R.S.F.S.R. est telle que deux programmes différents ont été jugés nécessaires pour en apprécier toute la diversité.

Programme A : Grand Nord et Vieille Russie (Russie, Nord Sibérien)
Programme B : Chants des Steppes (Bouriatie, Touva, Bachkirie)

Ainsi, sans vouloir prétendre présenter un programme exhaustif, nous avons souhaité faire découvrir le plus large éventail possible de techniques vocales :
- Polyphonies et plurivocalités des femmes russes (programme A) ou bouriates de Sibérie (programme B).
- Homophonies des femmes des anciennes tribus sartoul, à la frontière mongole (programme B).
- Monodies pentatoniques des femmes nenetz de la région d'Arkhangelsk et des presqu'îles de l'Arctique (programme A).
- Diphonies des femmes de Touva et de Bachkirie (programme B).
- Chuintements et souffles alternés des femmes du Kamchatka ou de Sakhaline (programme A).
- Tayouk des femmes yacoutes (programme A).

La plupart du temps, l'exécution des chants de femmes reste liée à des fêtes, des célébrations, ou des rites de passage. Jeunes ou âgées, les femmes continuent de se réunir dans les villages ou dans les villes pour chanter. Elles n'appartiennent pas à des ensembles professionnels et restent conscientes de l'importance de la tradition. C'est la raison pour laquelle, dans certains villages, la grand-mère, la mère, la petite-fille se retrouvent dans le même groupe.
Grâce aux femmes de la Grande Russie, la tradition reste vivante : plus vigilantes que les hommes parce que plus proches du savoir empirique, elles persistent à faire vibrer par le chant une mémoire qui nourrit leur avenir.


Choeur des femmes russes simielski
Simielski vient du mot "famille". Ces femmes du village sibérien de Bolchoï Kunalé situé à une centaine de kilomètres à l'est du Lac Baïkal, appartiennent aux familles d'anciens exilés russes qui firent souche à partir du XVe siècle.
Elles pratiquent un chant très ancien basé sur des plurivocalités oscillant sur trois lignes principales, une des voix doublant la mélodie à l'octave supérieure. Les chants, dont chaque couplet est entonné par une soliste, peuvent être accompagnés de pas de danse.
Ces chants sont exécutés à l'occasion de réunions impromptues ou lors de fêtes et de célébrations.
Le répertoire se compose pour l'essentiel de chants de séparation, de chants d'exil, de récits historiques, de légendes et d'épopées. S'il ne comprend ni chants de funérailles ni pleurs de la mariée, il comporte en revanche des prières pour les malades et les envoûtés. Les textes utilisent une langue métaphorique proche d'un langage codé, héritage probable de l'époque où ces exilés étaient soumis à une forte répression. Ainsi, un dialogue entre le corbeau et l'aigle correspond-il en fait à un chant d'amour entre deux jeunes gens de classes sociales différentes.

Choeur des femmes bouriates debesenem de l'ancienne tribu sartoul
Ces femmes vivent en Sibérie, le long de la frontière mongole, et font partie du groupe ouralo-altaïque des Bouriates. Elles viennent du village d'Alzak.
Depuis plusieurs siècles, elles sont devenues les gardiennes de leurs terres : terres de chasse, d'élevage, d'habitations semi- saisonnières. Les hommes, rafflés dans les guerres et les invasions ou engagés comme mercenaires sous divers potentats ou chefs d'armées ont toujours laissé aux femmes la gestion de la vie et du groupe.
Elles portent sur elles toute leur fortune : colliers prolongés par des boîtes à talismans d'origine bouddhique (le bouddhisme lamaïque s'est infiltré dans ces régions à partir du XVIIe siècle), d'amulettes et de ceintures en argent massif qui se mêlent aux lourds grains d'ambre, de turquoise et de corail venus par la route du Tibet.
Elles chantent en homophonie, c'est- à- dire à l'unisson, d'une voix puissante, sur une échelle pentatonique. Parfois, l'une des voix passe à l'octave supérieure.
Le répertoirte, très varié, s'étend des chants guerriers aux chants de recrues, des chants de chasse aux chants de louange au cheval, des chants de noces aux poésies généalogiques.

Choeur des femmes bouriates makhtal
Elles vivent dans la région d'Irkoutsk, au coeur de la Sibérie et pratiquent surtout la pêche en eau douce. Leur culture, transmise oralement, repose sur deux formes de chants : des plurivocalités à trois voix principales privilégiant les accords de quarte ou de quinte, et des chants en solo dont le répertoire est issu des pratiques chamaniques.
Les plurivocalités sont liées au travail, aux noces, à la fête du Koumys (lait de jument fermenté), et à la fête des aliments blancs, tandis que les chants en solo se composent d'exhortations pour la chasse, de prières au gibier, aux poissons et aux esprits gardiens des steppes, ainsi que de louanges au cheval.

Le syguyt de Touva
Le syguyt ou diphonie est l'émission par un seul organe vocal de deux sons simultanés. Cette technique résulte d'un important travail du larynx qui émet le son fondamental ou bourdon et de la division par la langue de la cavité buccale en deux sous- cavités de volume variable permettant ainsi la libération et la modulation des sons harmoniques ("voix flûtée") sous la forme d'une mélodie. Cette technique de base, qui donne naissance à des variantes nombreuses, notamment chez les Mongols (khöömii), a la particularité chez les chanteurs de Touva de s'appuyer sur un texte chanté. Le chant commence par des mots lancés sur une voix de gorge profonde et rauque et dont la dernière syllabe sert d'appui au syguyt.
Dans la République de Touva, le syguyt est essentiellement pratiqué par les hommes ; Valentina Tchuldun a appris cette technique de son père et de ses frères et est devenue à son tour une spécialiste du chant diphonique.

Françoise Gründ



Programme
Bouriates makhtal

Danse de Yokh
exécutée à l'occasion des fête saisonnières.

Extrait du cycle chanté Elierbas
Choeur en quintes parallèles
Si le soleil brille, l'homme doit travailler
Si les doigts sont souples, ils doivent porter des bagues
Et les sons de ces bagues doivent charmer nos oreilles

Chant de travail Yajesh solobe
Choeur en quartes parallèles
Complainte évoquant manque de temps de loisirs.

Chant de travail Yasan khee
Choeur en tierces parallèles
Quand les bottes sont neuves il faut les porter jusqu'au bout
Quand on est jeune on doit consacrer toutes ses forces au travail
Quand la santé est bonne il faut travailler dur.

Chant long
Le thème de ce chant, hérité des Bouriates du sud, est consacré à un jeune chameau orphelin.
Soliste : Nina Bairova

Chant long extrait de l'épopée d'Abaï Geser
Comparaison entre l'apport du soleil à la nature, et le courage que Geser a transmis à tous ses descendants.
Solistes : Maria Danilova et Nina Motonkuyeva

Chant épique extrait de l'épopée de Shonor Bator
Trahi par son propre frère Shonor Bator a été fait prisonnier. Sa femme, qui a été offerte à un domestique noir coud une coiffure de loutre et chante son espoir de revoir un jour son époux.
Soliste : Yekaterina Khaltanova

Mon beau visage clair
Chant de lamentation de la malmariée
Soliste : Maria Diunova

Chants à danser de Yokh
Touva

Siguyt
Mélodie diphonique

Chant de nature
accompagné au luth à deux doubles cordes tashpughur

Jeu de la guimbarde khomous

Siguyt
Mélodie diphonique

Bouriates debesenem de l'ancienne tribu sartoul.

Chant de séparation "Sur le sommet de la grande montagne"
Cette ancienne chanson d'hommes des Bouriates du Sud a été reprise dans le répertoire féminin au début du XIXe siècle.

Chant long de séparation Baïre demdik
Une jeune fille se remémore les souvenirs du bonheur passé avec son bien- aimé

Chant long "Sur une pente de la montagne du sud"
Ce chant long ancien compare l'homme et la nature.
Soliste : Pylrna Dorjieva

Chant long des Bouriates de l'est
Louange au cheval, aux parents, la terre natale.
Soliste : Vera Ilina

Chant de louange à la nature
Evocation des montagnes, fleuves et forêt de la région d'Aratori.

Entracte

Chant chamanique d'une femme bouriate makhtal

Choeur des Simielski du village de Bolchoï Kounale

Chant sur les partisans
Datant des année vingt, ce chant évoque le sacrifice des combattants partisans privés de toute aide militaire.

Chant d'amour "Derrière la rivière"
Evocation de l'amour et de la fidélité d'une jeune mariée envers son mari.

Chant d'amour "Les beaux yeux bruns qui m'ont tuée"

Chant satirique
Un chasseur rentre bredouille après avoir rencontré une jeune fille dont il est tombé amoureux.

Chant de lamentation
exécuté à l'occasion des noces.

Chant à danser satirique
Mon corps est pareil d celui d'une vache. Qui acceptera ma chair ?

Chant de séparation "Le corbeau noir"
Louange à l'oiseau qui doit porter des nouvelles au bien- aimé sur le champ de bataille.

Chant d'amour à trois voix
Evocation du bonheur d'un jeune homme amoureux.

Chant d'orphelin

Chant à danser
Ne te promène pas dans mon jardin,
Ne piétine pas mon herbe,
Ce n'est pas pour toi que je la cultive,
Ce n'est pas avec toi que je veux vivre.

Origine géographique

Russie

Mots-clés

Date (année)

1990

Cote MCM

MCM_1990_RU_S2

Auteur val

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Titre Localisation Date Type
Russie. Le Syguyt de Touva. Photos Russie 1990-03-06 Photo numérique
Russie. Choeur des femmes bouriates debesenem de l'ancienne tribu sartoul. Choeur des femmes bouriates makhtal. Photos Russie 1990-03-06 Photo numérique
Russie. Choeur des femmes russes simielski. Photos Russie 1990-03-06 Photo numérique
Titre Localisation Date Type
Saison 1990 1990