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Monde Arabe. Sexy souks. Un regard sur un certain imaginaire érotique - de l'art populaire à la création contemporaine. Exposition

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Évènement

Titre

Monde Arabe. Sexy souks. Un regard sur un certain imaginaire érotique - de l'art populaire à la création contemporaine. Exposition

Sous-titre

Conçue et réalisée par Arwad Esber et Cécile Pélissier

Date

2007-03-08

Date de fin

2007-04-01

Artistes principaux

Direction artistique

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Exposition

Description de la pratique

8 mars-1 avril 2007
Dans les rues de Damas
Dans les ruelles des vieux souks de Damas, la capitale syrienne, non loin de la grande mosquée des Omeyyades, mon oeil fut attiré, il y a environ une dizaine d'années par de petites échoppes qui proposaient à une clientèle féminine, voilée et issue de milieux populaires, des sous-vêtements dignes d'un sex shop parisien. J'en fus extrêmement surprise et en parlai à ma mère qui m'apprit alors l'existence de ce que j'appellerais "la coutume du déshabillé", c'est-à-dire cette tradition qui veut que la femme se prépare le soir pour le retour de son mari après sa journée de travail. Pour cela elle met des tenues affriolantes et aguichantes afin de "le mettre en appétit".
Comme beaucoup d'autres jeunes de ma génération, j'étais élevée dans un milieu "ouvert", notamment vers l'Occident, où n'existait pas une réelle séparation entre l'intérieur et l'extérieur. Nous avons grandi regardant vers l'Ouest, horizon de tous les possibles. Nous avons vécu dans la totale ignorance, sinon le mépris parfois, de la réalité qui nous entourait, de laquelle nous voulions nous démarquer absolument, sans même nous donner la peine de la connaître.
Il a fallu du temps, une distance géographique et beaucoup de nostalgie pour porter un regard, sans complaisance peut-être, mais certainement plus objectif, sur les méandres de cet Orient complexe et tout en nuances.
Aujourd'hui, ce ne sont plus quelques échoppes autour de la Mosquée des Omeyyades qui vendent cette "lingerie" comme on dit en Syrie, utilisant pour cela le terme français, mais plusieurs boutiques ayant pignon sur rue le long du Souk Al Hamidiyé menant à la Grande Mosquée.
Les clientes sont toujours aussi voilées. Beaucoup de jeunes filles viennent avec leurs mères pour choisir les ensembles qui feront partie de leurs trousseaux.
Les modèles sont moins "pornographiques" mais nettement plus délirants, révélant un imaginaire érotique, individuel et collectif à la fois.
Les créateurs de ces modèles sont des hommes issus du milieu conservateur de la bourgeoisie industrielle damascène. Ingénieux, ils renouvellent ces collections tous les trois mois et exportent dans beaucoup de pays arabes. Tout est donc fabriqué à Damas avec des éléments et des accessoires qui arrivent de Chine. À la limite, nous aurions pu intituler cette exposition ainsi : De l'expansion de l'industrie du gadget chinois et de son influence sur l'imaginaire érotique des industriels damascènes' Car les hommes conçoivent pour que les femmes achètent des modèles qui vont séduire leurs hommes'
Au-delà du discours sur la place qu'occupe la femme dans la société musulmane, ce qui est intéressant à explorer ici est l'imaginaire érotique en lien sans doute avec un aspect important de la culture arabo-musulmane, à savoir ce paradoxe ou cet aller et retour entre des notions opposées : intérieur/extérieur, dedans/dehors, caché/révélé, visible/invisible. Pensons simplement aux ruelles d'une vieille médina où les petites portes ouvrent sur de magnifiques maisons et jardins' Ce que l'on sait encore moins, ou qu'il est peut-être difficile d'imaginer pour un esprit cartésien, c'est que l'Islam n'interdit nullement les plaisirs de la chair, à condition que ce soit dans un cadre bien déterminé par la loi.
Beaucoup de questions s'imposent que nous voudrions explorer, comprendre : comment vit-on l'érotisme, la sexualité, la séduction dans un système "duel" ? Quel peut-être le regard que porte une femme voilée sur son propre corps ? Jusqu'où peuvent aller les fantasmes ? La femme ne peut-elle détenir un certain pouvoir ? Et pourquoi le terme français de "lingerie" pour ces sous-vêtements en particulier ? En quoi un Père Noël clignotant sur un string peut-il être érotique ?
Nous avons souhaité explorer cet imaginaire érotique en demandant à de jeunes artistes, des femmes originaires du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, de réfléchir et de créer à partir de ces sous-vêtements/objets délirants, de réagir à cette question et d'apporter leur vision. Ces artistes viennent d'horizons différents et ont des approches artistiques distinctes. Mais elles ont pour la plupart ceci de commun d'être "à cheval" sur deux cultures différentes, ou bien de vivre dans une certaine rupture par rapport à leur milieu d'origine.
Il n'est donc pas question ici de prétendre apporter des réponses, mais de tenter une approche, d'explorer, d'essayer de comprendre.
Arwad Esber

Politique de l'intime
Les rues de Damas me sont inconnues, je n'ai donc jamais eu la chance de me perdre dans le souk Hamidiye.
Au premier regard, le sourire vient aux lèvres car ces dessous, manifestement trop volumineux et encombrants pour être portés sous des vêtements, sont kitchs à souhait. Il faut, pour croire en leur existence, avoir vu de ses propres yeux, ces pièces présentant sur de minuscules bouts de tissus des gadgets tantôt naïfs et bucoliques, tantôt symboliques, tantôt technologiques, mais toujours explicites.
Mais qui sont les industriels qui dessinent et fabriquent cette lingerie extravagante et qui sont ces femmes qui osent la porter ? Au sein d'une population à majorité musulmane et pratiquante, je pense naïvement, que ces créations, ne peuvent qu'être les produits d'un secteur en lien avec l'industrie du sexe et que les femmes qui les portent doivent sans doute être plus que libérées. Ma surprise est immense quand j'apprends que cette lingerie singulière est fabriquée par des industriels damascènes souvent conservateurs et que les femmes qui l'achètent sont, pour la plupart, voilées.
Je suis déconcertée : comment ces femmes amenées à dissimuler leurs formes et leur féminité et en apparence peu libres de leurs actes et de leurs mouvements, peuvent-elles dans le même temps porter de la lingerie aussi éminemment suggestive ? Ne parvenant pas à trouver la logique qui préside à un tel comportement, j'émets l'hypothèse suivante : les choix de ces femmes en matière de lingerie, tout comme sans doute, dans d'autres domaines, doivent être dictés par des hommes.
Qui mieux qu'un homme pourrait en effet inciter une femme à porter ces dessous, la maintenant ainsi dans sa condition de femme-objet, qui une fois le voile levé, doit de nouveau se plier aux desiderata du mâle dominant ? J'apprends aussi que très souvent les mères achètent cette lingerie pour le trousseau de leurs filles, incitant ainsi ces jeunes vierges voilées à se plier aux règles érotico-sociales édictées par leur futur époux. S'agirait-il ici de violence symbolique à l'état pur ?
Le doute s'installe dans mon esprit : ces dessous, au-delà des premières réactions qu'ils provoquent, questionnent en profondeur notre rapport au corps, à l'érotisme et à la sexualité. Ma réflexion me fait progressivement cheminer vers l'Occident et je ressens soudain une certaine affection envers cette lingerie qui encourage le décentrement de soi.
Sommes-nous aussi libres que nous le pensons ? Le regard de l'autre, notre volonté de plaire et de répondre à ses attentes n'induisent-ils pas de manière tout aussi radicale nos comportements ? La tyrannie du corps et de l'apparence ne produit-elle pas en Occident des postures tout aussi choquantes ? Le corps mis à nu par les publicitaires ne subit-il pas des affronts tout aussi humiliants ? Une logique similaire n'est-elle pas à l'oeuvre ici et là-bas, celle de la figure imposée ?
Nous nous construisons tous en regard des représentations sociales du corps qui prévalent dans nos sociétés. Les femmes qui achètent cette lingerie dans les rues de Damas ont leurs raisons, et il serait trop simpliste de croire qu'elles ne sont pas partie prenante du jeu érotique, et de sous-estimer ainsi leur capacité de transgression. Gestus d'autant plus aisé que cette lingerie nous amène sur le terrain du jeu amoureux et du plaisir. Inutile, donc, de plaquer une explication toute faite et trop hâtive sur les stratégies de séduction et les diverses parades qu'une femme peut mettre en oeuvre pour plaire. Ni même de sombrer dans un relativisme de bon aloi qu'autoriserait la vieille attirance-opposition de l'Orient et de l'Occident.
Notre sujet de départ, futile en apparence, invite à son exploration et devient dès lors fondamental : cette lingerie incarnant peut-être au final, l'interpénétration du social et de l'intime, du politique et de l'érotisme, de la règle, des codes imposés et des stratégies vestimentaires et gestuelles mises en oeuvre pour les contourner, les détourner voire les subvertir.

Cet ensemble d'interrogations, de sentiments mêlés et d'impressions contradictoires a motivé l'idée d'une exposition. Nous avons donc demandé à de jeunes artistes de travailler sur cette matière et de nous livrer leur point de vue. Certaines d'entre elles vivent en France, d'autres au Liban, en Syrie ou en Angleterre ; leurs nationalités et leurs origines sont mêlées et elles ont souvent été bercées par ce qu'on appelle aujourd'hui une "double culture". Qui mieux qu'elles pouvait interroger et mettre en crise les représentations sociales du corps et de l'érotisme ?
Cécile Pélissier

Ghizlane Abbadi
Née en 1973 au Maroc, elle arrive en France en 1992. Diplômée de l'Ecole des Beaux-Arts de Toulouse, elle poursuit sa formation en DEA d'arts plastiques à Bordeaux et centre alors sa recherche artistique sur les espaces verts et les jardins. Elle vit et travaille actuellement à Toulouse où elle a présenté en 1996 les expositions monographiques Outre et Outre-mer et Le plaisir de panser. Elle a également participé aux expositions collectives suivantes : Les dix jours de l'Art Contemporain au Palais des Arts de Toulouse en 1997, Cinq à l'Ecole Municipale des Beaux Arts de Châteauroux en 1999, Réalités au Centre Figure libre de Perpignan en 2002 et Voilé/Dévoilé au Château de Linardié en 2004 où elle présente le diaporama Mère dévisagée. Sur ce travail Danielle Delouche a écrit : "Ghizlane Abbadi montre, par la dramaturgie de son récit muet, combien la pudeur est à chercher entre deux violences et tente d'en développer une pensée positive, désinhibitrice, en puisant aux sources de sa double culture."

MENZAH
2007, Installation (techniques mixtes - son et gazon fleuri)
1ère pièce sonore : plusieurs témoignages de femmes avec leur appréhension de l'espace de la séduction, du jeu érotique et parfois de leur sexualité.
2ème pièce sonore : un montage sonore de youyous émis par des femmes de différents âges, confondus dans un chant coranique.
3ème pièce sonore : un témoignage croisé de plusieurs hommes sur leur propre nudité et sur la manière de rentrer en séduction avec l'autre.
Le Menzah, ou belvédère, à la manière des anciennes demeures maghrebo-hispaniques, est symbolisé par une frise à motif d'un zellige nommé charafa, très répandu dans les intérieurs marocains ; ce motif sert non seulement de frise mais aussi comme enluminure pour embellir une calligraphie arabe.
L'installation représente, en tant qu'espace, une architecture, un morceau de nature composé de sons et d'un lieu fleuri : le jardin ou Al bustãn est un mot persan composé de bu (odeur, parfum) et du suffixe de lieu. Ce lieu, le menzah, dessine une frise de trois espaces bien distincts : l'espace des hommes d'un côté et celui des femmes de l'autre, et entre les deux un espace sonore représentant la dimension mystique obtenue par la confrontation des chants coraniques et des youyous, expression intense et affirmative des désirs féminins.
Créer un espace de rencontre était indispensable pour parler de la séduction et du jeu érotique. Comment leur donner corps alors qu'ils sont imperceptibles, de l'ordre de la sensation pure et de l'indicible ? Parler de jardin, c'est évoquer des odeurs et des parfums. Au Maroc, les jardins, les vergers sont des lieux de vie à part entière, une extension du foyer. Le menzah recrée à la fois cet espace où des femmes et des hommes peuvent se croiser, se rencontrer au-delà de leurs représentations sociales. Les témoignages rendent compte de cet échange tout comme la séduction, celle-ci, anonyme et furtive, sans face à face et où le dialogue devient un espace d'écoute et d'interférence. L'espace du menzah n'est pas une représentation symbolique, ni esthétique, mais plutôt une tentative d'écriture poétique qui émerge de cette dualité.
"Ô parterre de belles-lettres que l'intelligence soigne avec tant de sollicitude et dont les fleurs sont cueillies une par une, ou deux par deux !"
"Si le vent qui fait palpiter toute chose, gémit à travers les prairies en fleurs, la tige perd sa position verticale et chancelle" (in A. Peres, Poésies à Fès sous les Almoravides)
Ghizlane Abbadi

Buthayna Ali
Artiste syrienne, née à Damas en 1974, elle est diplômée de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. En même temps, elle obtient en 2001 un DEA en Histoire de l'art islamique de la Sorbonne Paris IV. De retour à Damas en 2002 elle est nommée professeur à la Faculté des Beaux-Arts de Damas, section peinture. Elle s'intéresse aux menues choses de la vie et au quotidien plein de contradictions.
Outre les diverses expositions collectives auxquelles elle participe, elle présente entre 2002 et 2006, 3 installations dans le cadre d'expositions individuelles :
Sa 1ère installation, La Tente, est un travail sur l'intégration de la civilisation mais surtout de ses aspects matériels reliés à la consommation dans la vie des populations bédouines.
Dès son retour en Syrie, elle a été frappée, sinon choquée, par les contradictions et les paradoxes tels qu'elle les a ressentis dans les médias arabes, qui tiennent à la succession d'images de guerre et de scènes violentes de mort dans les journaux télévisés, aussitôt suivies par des émissions à tonalité gaie ou franchement comique. Elle traite de ce sujet dans sa 2ème installation Promesses (2003).
En 2006, elle travaille sur la balançoire, comme symbole de joie, de liberté, de féminité, et surtout en lien avec l'enfance et en relation avec la vie et les émotions. Nous est le titre de sa 3ème installation.

MARIONNETTE
2007, Installation (structure bois, miroirs, sous-vêtements, sons)
Pourquoi ?
Loin de l'amour' Au plus près du sexe
Un canon qui organise les relations entre les vivants'
Un canon qui siège dans l'inconscient' Il fait, à notre insu, partie de nos motivations et de nos envies
L'envie de provoquer le désir, notre désir ou le désir de l'autre, diffère d'une personne à une autre'
Qui ? Et pourquoi ?
Des questions que je me pose à chaque fois que je traverse ces souks. Je m'arrête devant des vitrines de magasins qui reflètent nos images,
Des étals submergés par des monticules de couleurs illuminées, dans lesquels on aperçoit des jouets d'enfants, ou des jouets pour les grandes personnes.
Des souks pleins de contradictions dans cette ville toute en contradictions
Économie et politique nous invitent à la tristesse et aux larmes' Et le sexe nous incite à danser de joie.
Dans cette société religieusement fermée et sexuellement noyée' des femmes ou même des hommes.
La question qui se pose est "qui ?" et "pourquoi ?" et même "comment ?".
Les réponses n'étaient pas satisfaisantes. Alors je compte sur vous, en espérant obtenir une réponse.
Pour cette oeuvre, je suis partie de la première réaction que j'ai eue' Il me semble que c'est une réaction que je partage avec nombre d'entre vous : "impossible que je mette ça !" ou bien "de quoi aurais-je l'air si je le porte ?", "comment sera-t-il sur moi ?".
J'en ai eu envie mais je n'ai pas osé.
Cela aussi je vous le laisse.
Buthayna Ali

Zoulikha Bouabdellah
Jeune artiste franco-algérienne. Née à Moscou en 1977, à l'époque où les échanges étaient fréquents entre l'Algérie socialiste et l'URSS, elle a surtout grandi à Alger, dans le Musée des beaux-arts où résidait sa famille : "Ma mère était conservateur, donc, en allant à l'école, je devais traverser tout le bâtiment qui est énorme ; et deux fois par jour, j'avais l'occasion de voir les tableaux exposés"
En 1993, alors que la guerre civile éclate, la famille de l'artiste se résout à quitter l'Algérie pour venir en France. À seize ans, elle découvre la France, obtient ensuite le diplôme de l'Ecole nationale supérieure des arts de Cergy, et demande la nationalité française.
L'artiste se sert de la vidéo et de la photographie pour exprimer sa double culture : "Je me sens en totale symbiose dans les deux. Je peux être accusée de schizophrénie ! C'est pas grave car je suis bien dans ma peau."
"Mon art, c'est moi. Ça peut être de l'art plastique, de la vidéo ou de l'art contemporain. Et même s'il n'est pas exactement défini, il reflète ma sensibilité." Sa vocation l'a vite aidée à prendre conscience des contradictions de la vie et de l'interaction qui existe entre les objets et les sociétés.
Sa vidéo Dansons (Let's Dance, 2003) a fait partie des oeuvres de l'exposition Africa Remix. Elle lui a été inspirée par un match de foot entre la France et l'Algérie en 2002. La Marseillaise avait été alors sifflée, et le match arrêté. "On a dit ensuite : les Algériens ont hué la Marseillaise. J'en étais complètement affectée car ceux qui l'ont sifflée, ce sont des Français !" En réaction à ce "malaise" de la société française, l'artiste s'est filmée, trois foulards bleu, blanc, rouge noués autour du bassin, effectuant la danse du ventre orientale sur l'hymne national.
Elle a réalisé Cité Dallas à Oued Zenati (2003), Let's Dance (2003) femmes-voiles (2004), Vois-le (2004) et Petite histoire de photo à Casablanca (2005).

IN / OUT
2007, Installation (photographies, son, lingerie)
Courtesy La B.A.N.K
Les drapeaux syriens occupent l'espace public. Ils sont partout, sur les fenêtres, sur les toits, suspendus dans les grands axes comme dans les axes secondaires.
En Syrie, il semble difficile d'oublier qu'on s'y trouve et l'imaginaire dans cet espace extérieur s'y trouve limité.
Mais voilà, dans la pénombre du souk Hamidiyé, d'autres étendards prennent place. Ceux de l'intime et du privé.
Des lingeries aussi loufoques que kitschs transportant l'imaginaire au-delà des frontières de la nation.
Zoulikha Bouabdellah

Ninar Esber
Artiste plasticienne et écrivaine. Née en 1971 à Beyrouth (Liban), vit et travaille à Paris.
Après des études à l'Ecole Nationale Supérieure d'Arts de Paris-Cergy, elle s'est engagée dans une démarche impliquant son corps dans des performances ou des films vidéo jouant sur une certaine lenteur, aux limites de l'immobilité, où les idées d'attente, de suspens et de "teasing" se trouvent confrontées à l'architecture (murs, tours, promontoires), aux objets quotidiens (étagères, tables, chaises) ou aux mythologies contemporaines (Super-héros, Pin Up')
Elle a réalisé de nombreuses performances (La Chaise, Cergy 2002 ; I Wanna Be Loved By You, Paris, 2003, La Sieste, Paris 2004 ; Les Nuits d'une Demoiselle, Paris, 2005, 2 Heures, Bayonne 2006'). Elle a participé à de nombreuses expositions personnelles et collectives en France et à l'étranger (Négociations, CRAC, Sète, 2000 ; Room with a View, Silpakorn University, Bangkok, 2002 ; Korean Air France, Ssamzie Space, Séoul, Glassbox, Paris, 2002 ; Girls, girls, girls, CAN, Neuchâtel, 2005; Les ailes du Dessin, Bayonne 2006, La force de l'art, Grand Palais, Paris, 2006...).
Elle a réalisé : À mon seul désir (DV, 2000), Samaan (DV, 2000), La Estrella (16 mm, 2001), La méprise (DV, 2003), Deux fois Deux (DV, 2007)'
En 2002, elle a inauguré un journal vidéo à partir de séquences filmées de 1 mn, dont ont été tirés : 1 mn à Bangkok (DV, 2003), 1 mn à Londres (DV, 2005), 1 mn à Beyrouth (DV, 2005), 1 mn à Beaubourg (DV, 2005), 1mn en Italie (DV, 2005), 1mn à Paris (DV, 2006), 1mn à New York, (DV, 2006)'
Elle a écrit :
Leil al Awal, éd. Annahar, Beyrouth, 2001
Conversations avec Adonis, mon père, éd. du Seuil, Paris 2006

DE LA GUERRE
2007 / Essai / 25 minutes / Mini Dv Pal
Un face à face entre des culottes syriennes, étranges et parfois musicales, et des objets priapiques aux mouvements aléatoires '
Chaque partie expose sa stratégie et sa tactique'. S'ensuivent des frictions sur le théâtre des opérations'.
Les dialogues sont tirés de L'art de la guerre de Sun Tzu, et de De la guerre de Carl Von Clausewitz,
Ninar Esber

Iman Ibraheem
Photographe et poète syrienne née à Koweit en 1975. Elle a participé à plusieurs expositions collectives consacrées aux femmes. Son travail vient en contrepoint du travail de l'ensemble des artistes exposées ici. Elle est issue d'un milieu conservateur. Jeune femme voilée, elle a décidé de quitter sa famille et de s'installer seule, essayant de survivre avec de menus boulots. Malgré les contraintes sociales et le port du voile, elle fait des autoportraits dans l'espace de sa chambre à coucher, explorant ses émotions et ses désirs, essayant de prendre, dans l'intimité de sa chambre, conscience de son corps de femme, ce même corps qu'elle doit cacher dans la rue.

Photographies 40x50 cm
Série Souar Iman (2007), n°6, n°10, n°11
Photographies 13x18
Black and white (2006) n°3
Série Passion des draps (2006) n°3, n°4, n°30
Série Nabizia (2006) n°21, n°40, n°46, n°73, n°88

"Je suis très attentive aux petits détails, et j'aime l'ensemble de ma vie, il n'y a pas une partie que je préfère à l'autre. Les photos, les poèmes, la musique, la lecture, tout cela, en plus des grandes choses de la vie, m'aide à être moi-même. Je m'exerce à devenir un être humain.
Je suis très attentive à tout noter dans ma vie, tout documenter, les dates sont importantes. J'écris donc un journal, mes poèmes reflètent mes réactions et mes sentiments, documenter ma vie, les étapes de ma vie, mes émotions par des photos, parce que je crois que la photo capte aussi un peu de mon âme.
Pourquoi est-ce que je fais des autoportraits sans me soucier de l'esthétique de mon apparence sur ces photos et sans aucune complaisance avec mon image ? J'aime le contact avec les autres et la photo m'aide à établir ce contact, exactement comme la poésie. C'est ainsi que je me révèle, parce que je crois que dans un contexte social, on ne peut pas facilement être soi et se révéler tel que l'on est. La photo me permet de découvrir une part inconnue en moi.
La photo me permet de respirer. Elle est mon troisième poumon. J'aime me voir par le biais de mon objectif, j'ai ainsi l'impression de voir plus clair en moi, d'observer des détails qui échappent aux autres. Mes photographies, tout comme ma poésie, sont extrêmement subjectives, mais je crois que l'extrêmement particulier nous permet d'atteindre le général.
Je sais que quand je me prends en photo, c'est comme si je donnais une gifle au monde, parce que l'actualité est toujours là, omniprésente.
Je ne veux pas que ma vie passe sans moi."
Iman Ibraheem

Majida Khattari
Née au Maroc en 1966, vit et travaille à Paris. La question très large du rôle du voile islamique a été au centre de son travail. Elle tente de dépasser les controverses pour comprendre, à travers un travail sur les vêtements, la situation ambiguë de la femme musulmane placée entre sacralisation et menace. Elle a, en effet, décliné ces vêtements sur plusieurs modes, du tragique à la dérision, de l'interdit au désir ; ses défilés visent "à mettre en évidence ce quotidien dramatique".
Pour ses défilés à l'école des Beaux-Arts de Paris (juin 1996) et à la Maison des Cultures du Monde (mars 1997), elle montre des costumes comme Sésame, ouvre-toi (1996). Le mannequin est vêtu d'une robe de velours d'un orange flamboyant. Un tablier de fils tendus sur le ventre et les jambes renforce l'impression d'une toile d'araignée gardienne de la virginité et de la chasteté. Le visage et les cheveux du modèle sont entièrement recouverts d'un tchador noir. D'après Fethi Benslama (in Art Press, 1997 "Art et Mode"), "c'est le spectre d'une tête de nuit sur un corps de braise qui avance [ ... ] c'est en une robe tout le dérobement théologique de la femme en Islam, en tant que corps voyant extrait à la vue, en tant que sujet d'un regard sans visage". Depuis Majida Khattari n'a cessé de questionner la question du corps voilé de la femme en faisant des défilés, des performances ou des vidéos.

LES TROIS GARCES
2007, tryptique, 270 cm (3x90) x 170 cm
(Peinture, collage, sous-vêtements)

Reine Mahfouz
Photographe libanaise. Vit et travaille à Beyrouth. Elle a réalisé, pour l'UNESCO, un travail documentaire sur les camps palestiniens au Liban. Parmi les différents projets photographiques qu'elle a réalisés, nous citerons notamment Beyrouth Voilée (1998), où elle suit l'évolution constante de la ville avec ses différents chantiers. La série de portraits Nomadic Studio (2001) a été exposée dans le cadre du symposium Ashkal Alwan à Beyrouth. En 2005, elle a photographié les graffitis, notamment ceux des différentes milices libanaises. Reine Mahfouz a accompagné Rana Salam et la journaliste Malu Halassa lors de leur enquête à Damas et Alep sur la fabrication et la vente de la lingerie syrienne, réalisant à cette occasion une série de photographies des ateliers, des boutiques de vente et des clientes dans le souk.

ANGEL LADY
15 photographies 30x45 cm, 7 photographies 20x30 cm
Au cours de mon enfance, le terme "Moyen-Orient" me suggérait uniquement ce grand conflit dont tout le monde parlait. Lorsqu'une personne mettait beaucoup de temps à effectuer une besogne quelconque, on lui lançait ironiquement un : "es-tu en train de résoudre le conflit du Moyen-Orient ?".
Un Moyen-Orient qui cache, derrière de grands titres et une quantité de points d'interrogations, des aspects très complexes, souvent contradictoires, sur lesquels se base et évolue la société arabe.
Dans le vacarme de la ville je cherche à comprendre la structure de l'espace où nous vivons, je cherche à sonder l'épaisseur et la profondeur des couches sur lesquelles est bâti cet espace.
Dénicher, dépoussiérer et faire réapparaître les formes authentiques de notre histoire afin de saisir sa prolongation actuelle. Participer à la transcription de notre mémoire. Une mémoire ayant à peine le temps de capter et de stocker les changements continuels que nous subissons.
Je tente "d'enregistrer" les gens qui font que notre société existe, afin de créer une mémoire du présent.
Notre société est une composition complexe et compliquée, fondée sur une combinaison d'éléments antithétiques.
Il est insuffisant de l'aborder par ses extrémités. C'est dans la perception des nuances reliant ses contradictions que subsiste son équilibre.
"Angel Lady*" est une observation de l'un des aspects de cette société moyen-orientale.
Dans ce monde de création et d'imaginaire érotique, une ouverture émane de chaque rencontre et de chaque découverte. La société syrienne se permet d'exposer sa lingerie dans les vitrines, les rues, et même tout près des mosquées. Malgré la nature conservatrice et religieuse de cette société, elle n'en soutient pas moins une production de "lingerie" délirante et populaire, destinée aux femmes et créée en majorité par des hommes.
On assiste aujourd'hui à l'évolution d'un design "made in Syria", nourrissant les fantasmes les plus extravagants dignes d'une sexualité intense.
J'aborde ce sujet avec humour, ironie et même avec provocation quelques fois. Je choisis, j'associe, je dissocie. Je cadre des détails faisant allusion à la vie int

Présentation des artistes

Contributeurs

Origine géographique

Monde Arabe

Mots-clés

Date (année)

2007

Cote MCM

MCM_2007_ARA_E1

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Titre Localisation Date Type
11e Festival de l'Imaginaire 2007