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Azerbaïdjan. Alim et Fargana Qasimov. Spectacle

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Évènement

Titre

Azerbaïdjan. Alim et Fargana Qasimov. Spectacle

Sous-titre

Musique spirituelle d'Azerbaïdjan

Date

2008-04-05

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

Samedi 5 avril 2008, Auditorium du Louvre.

avec
Alim Qâsimov, chant et tambour daf
Fargana Qâsimova, chant
Ali Asgar Mammadov, luth târ
Rauf Islamov, vièle kamânche
Rafael Asgarov, hautbois balaban
Natiq Shirinov, percussions naghara

Le mugham d'Azerbaïdjan est une des facettes les plus brillantes de l'art musical classique du monde islamique (Moyen-Orient, Asie centrale). Produit de plusieurs siècles de maturation à la charnière des traditions turques et de la musique classique persane, la musique azérie a également bénéficié des échanges avec d'autres cultures, arméniènne, centre-asiatique, voire afghane, et a trouvé son expression la plus parfaite dans le mugham, vaste composition vocale et instrumentale qui dépeint avec ardeur et raffinement toute la gamme d'expressions du sentiment amoureux.
Comme toutes les musiques savantes du Moyen-Orient, la musique d'Azerbaïdjan est monodique et modale. Le terme mugham, qui dérive du mot arabe maqâm, désigne non seulement le système de gammes modales sur lequel se fonde cette musique, mais aussi les suites vocales et instrumentales qui sont interprétées dans chacun de ces modes.
Chacune de ces 'uvre est fondée sur une succession de mélodies-cadres" qui laissent au chanteur une relative liberté d'improvisation et d'adaptation du texte poétique. Ces mélodies, extrêmement chargées sur le plan émotionnel, alternent avec des pièces vocales ou instrumentales de caractère plus populaire.
Les poèmes sont l'oeuvre des grands poètes classiques qui vécurent en Iran, en Azerbaïdjan et au Moyen-Orient arabe entre le XIVe et le XXe siècle: Nizâmi, Fuzûlî, Shirvâni, Tabrizi, Vahid pour n'en citer que les principaux, et parlent avec lyrisme de l'amour, de l'attrait de l'être aimé, du déchirement de la splendeur de Dieu. Totalement intégrés à la musique, ces poèmes éclatent littéralement dans le discours musical, du fait de l'introduction de vocalises, d'intermèdes instrumentaux et des multiples modulations qui caractérisent le parcours modal du mugham.
A chaque mugham correspond un état émotionnel spécifique, ainsi pour n'en citer que quelques-uns, Rast exalte la noblesse et le courage, Segâh exprime l'amour et la nostalgie, Chargâh, plus puissant, enflamme les passions, tandis que Shur incline à la méditation et à la mélancolie.
Le chanteur est accompagné par un luth à long manche târ, une vièle à pique kamânche et il tient lui-même le tambour sur cadre daf.
Dans ce concert, Alim Qâsimov innove en adjoignant au trio traditionnel des instruments des bardes ashig, le hautbois balaban et les petites timbales naghara.
Ces emprunts illustrent les échanges qu'entretiennent depuis le XIXe siècle le mugham classique et les muqiues des ashig. En effet, à cette époque, la tradition du mugham s'est renouvelée en intégrant dans les suites des mélodies du répertoire de bardes. A l'inverse aujourd'hui, ceux-ci n'hésitent pas à introduire dans leur prestation des extraits de mugham.
Bien qu'il nous apparaisse comme un flot musical continu, et c'est su reste l'effet recherché, le mugham est très strictement structuré. Il débute généralement par une introduction instrumentale rythmée, daramad, suivie d'une introduction instrumentale non mesurée bardasht. Le chanteur entonne ensuite le premier poème, un ghazal qui le conduit au "coeur" du mode principal, le mâye, qui est en quelque sorte ma "signature" du mode principal. On peut conclure le mâye par un chant populaire tesnif, accompagné au tambour daf. Puis tout en restant dans le même mode, le chanteur interprète un second ghazal en changeant de registre, passant par exemple au registre aigu zil. Un court interlude instrumental reng, puis le ghazal se poursuit dans un mode secondaire shobe. Parfois la modulation est difficile à détecter car elle se fait comme en fondu-enchaîné en jouant sur un groupe de notes commun aux deux modes. Chacune de ces modulations apporte ainsi un éclairage expressif particulier. Enfin, on revient généralement au mode principal et le mugham se conclut brillamment ou au contraire sotto voce par un cadence ayagh.
Contrairement à d'autres traditions islamiques, comme la nûba maghrébine, cette structure n'est pas déterminée de manière irrévocable. Chaque interprète dispose en fait d'un cadre relativement élastique. Si les enchînements modaux doivent être fidèlement suivis, l'interprétation des différents passages laisse en revanche une grande liberté à l'interprète qui peut choisir de les chanter tous ou pas, ou d'en intervertir certains. Selon les interprètes, le même mugham peut donc offrir des visages bien différents. c'est sans doute à cet espace de créativité que le mugham doit d'être demeuré jusqu'à aujourd'hui une tradition si vivante et si prisée par les Azéris qu'ils en ont fait leur emblème national et ont obtenu en 2003 son classement par l'Unesco comme chef-d''uvre du pratrimoine oral et immatériel de l'humanité.

Notes Biographiques
Alim Qâsimov est aujourd'hui l'interprète de mugham le plus célèbre,et le plus créatif. Le jeune chanteur de 32 ans qui, en 1989, donna à la Maison des Cultures du Monde ses premiers concerts en Occident et y enregistra ses deux premiers disques, est devenu un maître et son empreinte sera à n'en pas douter comparable à celles d'autres figures marquantes de l'histoire du mugham : Khân Shushinski, Jabbar Qaryagdi Oghlu ou Zulfi Adigözelov.
Issu d'une famille modeste, Alim Qâsimov est un musicien complet, imprégné aussi bien par les répertoires religieux et populaires ' il doit ses premières émotions à son grand-père, barde de village ' que par une musique savante qu'il découvre à la fin de son adolescence.
Alim Qâsimov, c'est aussi une voix dont l'inspiration ' il parle volontiers de flamme intérieure ' anime la moindre inflexion, aussi bien dans les passages délicats, douloureux, chantés sotto voce, que dans ses vocalises spectaculaires et pathétiques.
Musicien atypique, réfractaire à l'académisme, Alim Qâsimov propose une relecture novatrice du mugham, le rebaignant dans son essence, une poésie romantique qui mêle le profane et le sacré et une forme musicale ouverte, de tous temps rebelle à la sclérose.

Pour sa fille Fargana, Alim est à la fois un père et un maître de musique à l'ancienne. Cette jeune chanteuse a grandi dans l'univers musical de son père, en dehors de tout conservatoire, comme cela se faisait autrefois. Elle excelle tout particulièrement dans le répertoire religieux qu'Alim fut un des premiers à réinvestir après la disparition de l'Union soviétique.

Leur duo vocal ne brise donc pas la tradition, il la prolonge. Pour Alim, son travail d'innovation ou de création à l'intérieur du mugham repose sur la formation en trio classique. De cette association où la voix commande, suivie pas à pas, avec de légers décalages, par le luth târ et la vièle kamânche, il se dégage une atmosphère de complicité, de spontanéité, propice à l'improvisation. Pour lui, chaque concert de mugham est une expérience méditative, voire mystique, dont il ne peut prévoir à l'avance le cheminement, même s'il s'appuie sur une trame fixée par la tradition. Rien n'empêche dès lors d'enrichir la palette sonore avec d'autres instruments, comme le hautbois des bardes, qui viennent nous rappeler que le mugham, pour classique qu'il soit, s'est aussi nourri d'apports populaires.

Ces musiciens hors-pair interprètent deux grandes suites vocales et instrumentales du répertoire : les mugham Chargâh et Bayâti-Shirâz.

Pierre Bois

A écouter :
Azerbaïdjan / Alim Qasimov
Anthologie du Mugham, vol. 1 & 2
CDs INÉDIT : W 260012 et W 260015

Contributeurs

Origine géographique

Azerbaïdjan

Mots-clés

Date (année)

2008

Cote MCM

MCM_2008_AZ_S1

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