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Azerbaïdjan. Bardes du Shirvan, aux sources du mugham. Spectacle

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Évènement

Titre

Azerbaïdjan. Bardes du Shirvan, aux sources du mugham. Spectacle

Date

2010-03-29

Date de fin

2010-03-30

Artistes principaux

Lieu de l'évènement

Type d'évènement

Musique

Description de la pratique

Lundi 29 mars à 20h30
Mardi 30 mars à 20h30
Maison des Cultures du Monde

Aghamurad Israfilov, chant et luth saz
Vüqar Mahmudoqlu, chant et luth saz
Ali Tapdyk Oqlu Quliyev, chant, luth saz et danse
Shirzad Fataliyev, hautbois balaban
Qanimat Qadirov, hautbois balaban
Jahandar Musayev, tambour naghara
Mahir Niftaliyev, timbales qosha naghara

L'art des bardes ashiq est certainement la forme d'expression artistique la plus appréciée du peuple azerbaïdjanais, tant en Azerbaïdjan que dans les différentes communautés azerophones du sud-Caucase, de l'Iran et du Dagestan (Russie).

Le ashiq est un poète, un compositeur et un joueur de luth à manche long, le saz. Il est aussi narrateur, acteur improvisateur et parfois danseur. Certains se distinguent comme poètes populaires, d'autres combinent un talent de poète et de compositeur avec la maîtrise du jeu de saz, enfin les derniers sont de simples interprètes. On compte aujourd'hui environ 400 ashiq en République d'Azerbaïdjan mais il y en aurait près de 2.000 dans le monde pour la seule tradition azerbaïdjanaise.

Ce patrimoine musical et poétique relève exclusivement de la tradition orale mais il n'est pas pour autant anonyme : l'usage veut que le ashiq énonce son nom ou son pseudonyme dans les derniers vers du poème. Ce savoir se transmet donc de maître à élève au cours d'un long processus d'apprentissage direct. Aujourd'hui, il s'enseigne également dans les écoles de musique, au conservatoire supérieur et même à l'université. Le public des ashiq se compose surtout de villageois ou de gens qui ont quitté la campagne pour s'établir en ville. Mais entre le XVIe et le XVIIIe siècle, il était très répandu en ville et même au palais.

Cette musique prend son origine dans l'art des ozan turcs dont le chef-d'oeuvre, le Livre de Dede Qorqud, fut composé voici 1.300 ans. Les ozan, chanteurs, narrateurs, joueurs de luth qopuz, gardiens de la langue turque, de l'épopée et plus largement de la culture turque en général, disparurent au XVIIe siècle mais leur héritage constitue le socle commun de l'art bardique dans toute l'Asie centrale. La tradition des ashiq d'Azerbaïdjan naît aux XVe-XVIe siècles. Shah Ismaïl a pris le pouvoir en Iran et fondé la dynastie safavide. Il transfère sa capitale à Tabriz et impose l'azéri comme langue officielle. Poète à ses heures, il favorise le développement d'une langue littéraire azérie permettant ainsi l'éclosion de la poésie ashiq et sa prolifération en formes et genres poétiques divers. L'héritage de Dirili Qurbani (XVIe), Sari Ashiq, Abbas Tufarganli (XVIIe), Khasta Qasim, Abdalqülably Valeh (XVIIIe), Dilgam, Ali Alasgar, Hüssein Shamkirli, Hüssein Bozalqanli, Molla Djüma (XIXe) pour n'en citer que quelques uns, constitue le coeur du répertoire des ashiq modernes.

Des centaines de dastan, ces longs récits poétiques et musicaux aux thèmes héroïques ou romantiques comme Koroglu ou Abbas et Qülqaz voient le jour aux XVIIe-XVIIIe siècles.
Le XIXe représente l'apogée de cet art. Sur tout le territoire où l'on parle l'azéri, presque chaque village possède sa tradition (école) de ashiq avec un style de jeu, un mode d'accompagnement instrumental et un répertoire de pièces et de dastan.

Ces traditions locales se regroupent en écoles régionales. Le Festival de l'Imaginaire a ainsi présenté en 2009 celles de l'ouest : Ganjabasar, Göycha et Borchaly. Il existe également celles du sud : l'Azerbaïdjan iranien, avec Tabriz, Qaradag, Orumiye, Zanjan et Sava. Ce concert vous propose de découvrir celle de l'est : le Shirvan.
Malgré leurs différences, toutes ces écoles constituent une tradition unifiée par une langue commune, un répertoire poétique et musical et un instrument, le luth à manche long saz, attribut permanent du ashiq. Parfois, celui-ci est accompagné par le balaban, un hautbois au timbre velouté.

Une des particularités de cette musique réside dans le fait que la mélodie et le poème sont indissociables. Le poème est conçu pour être chanté et accompagné au saz et, à l'inverse, la mélodie se fonde toujours sur une matrice poétique. Ces matrices sont apparues successivement au fil des siècles mais elles sont toujours strophiques. Chaque strophe peut contenir quatre, cinq ou plus rarement six vers. Les formes utilisant des quatrains sont les plus courantes : bayati, geraily, goshma, tejnis, divani et leurs variantes. Le bayati se compose d'heptasyllabes, le geraily d'octosyllabes, le goshma d'hendécasyllabes, le divani d'hexamètres. Les mükhammas (quintils) et les müseddes (sizains) ont été empruntés à la poésie classique. À chaque mélodie est donc attachée une forme poétique. Ensuite, le ashiq est libre de choisir le texte qu'il veut dès lors qu'il respecte cette forme. C'est pourquoi nombre de mélodies portent le nom de formes ou de genres poétiques. Mais ce peut être aussi des toponymes, des ethnonymes, des noms de personnages historiques ou de ashiq célèbres. Il est difficile d'évaluer l'importance du répertoire car, avec le temps, les mélodies changent de nom, peuvent avoir plusieurs titres ou se décliner en diverses versions selon les régions. On peut cependant estimer ce corpus à environ 150 dastan et plus de 200 mélodies.

La tradition ashiq du Shirvan se distingue des autres par son style extraverti et l'entrelacement très particulier des strophes poétiques avec des passages de mugham classique. Au reste, il est souvent difficile de déterminer l'origine exacte de ces "emprunts", tant il y a eu d'aller-retour entre ces deux traditions.

Si dans l'ouest de l'Azerbaïdjan, les ashiq misent sur l'économie de moyens, souvent un seul chanteur qui s'accompagne lui-même au saz, la tradition du Shirvan exige un groupe plus important : le chanteur-joueur de saz, un hautbois balaban qui introduit généralement le morceau puis dialogue étroitement avec le chanteur, un second balaban (ou un accordéon) qui tient la tonique en bourdon selon le principe de la respiration continue, et enfin deux percussions, un grand tambour à deux peaux dont une face est frappée à mains nues, le naghara, et deux petites timbales en poterie, ou plus souvent aujourd'hui en métal, frappées avec des baguettes.

Vüqar Mahmudoqlu est né en 1970 dans le district de Shamakha, ancienne capitale du Shirvan. De son père, le fameux Ustad Mahmud Alasgaroqlu, il a hérité une voix magnifique et maints secrets de la profession. Il interprète une cinquantaine de poèmes et plusieurs dastan, ces longs récits épiques ou romantiques en prose et poésie chantée qui font aussi partie du répertoire ashiq.

Aqamurad Israfilov, né en 1964 à Marzanqi, district de Shamakha, est à la fois poète et interprète. Il fut le disciple de Ashiq Reza Gobustanli et l'élève d'autres grands ashiq du Shirvan. On lui doit aussi une centaine de poèmes composés dans les anciennes formes traditionnelles et plusieurs de ses enregistrements sont conservés dans les Archives d'Or de la Radio d'État.

Ali Tapdyk Oglu, né en 1988, est l'un des plus jeunes ashiq du Shirvan et le plus brillant de sa génération. Il est notamment l'un des seuls à renouer avec une ancienne pratique de danse souvent abandonnée par ses aînés. Plus qu'un talent prometteur, c'est déjà un ashiq confirmé, invité dans plusieurs festivals nationaux et internationaux, ainsi qu'à la télévision et à la radio.

Ce concert sera aussi l'occasion d'écouter un des grands maîtres du balaban, Shirzad Fataliyev.
Sanubar Baghirova


La Maison des Cultures du Monde remercie Madame Sevda Mamadaliyeva, vice-ministre de la culture et du tourisme de la République d'Azerbaïdjan, Madame Sanubar Baghirova, Monsieur Nazim Samadov et Madame Khumar Ibrahimova.

À écouter :
ANTHOLOGIE DES ASHIQ
Bardes d'Azerbaïdjan
un double album INEDIT/Maison des Cultures du Monde

Programme

Vüqar Mahmudoqlu Niftaliyev, chant et saz ; Shirzad Fataliyev au hautbois balaban
1. Qadim Peshro (Peshro ancien)
Il est de tradition dans le Shirvan que chaque séance de musique commence par un genre appelé peshro (ouverture).

2. Ayaq Shashanqi

3. Shashanqi
sur un poème de Ashiq Mirza Bilal, l'un des plus grands ashiq shirvani du XXe siècle.

Je m'étais épris d'une beauté aux manières charmantes.
Sa chevelure châtain et ses yeux me tuaient.

Ses blanches mains étaient teintes au henné, elle avait un éclat unique,
Elle me jeta un coup d'oeil et ce regard m'anéantit.

J'avais beau souffrir, les conseils étaient inutiles,
Cet amour à lui seul tua Bilal, tua Bilal.

Ali Quliyev, chant et saz ; Shirzad Fataliyev au hautbois balaban
4. Qobustani, Shirvan gözallamasi.
Qobustani est une pièce ancienne interprétée sur un poème d'Abbas Tufarqanli, célèbre ashiq du XVIIe siècle.

Celui dont le jardin a été massacré,
Qui fut délaissé par son aimée, va-t-il pleurer ?
Celui dont le coeur fut brisé
Et qui souffre, va-t-il pleurer ?

Ceci est notre destin,
Maintenant, mes larmes coulent en un flot sanglant,
La coupe une fois vidée, Abbas est devenu muet,
Celui qui fut délaissé par son aimée, va-t-il pleurer ?

5. Qiz Qalasi.
Cette pièce intitulée La tour de la Vierge et composée par Ashiq Hajiali s'inspire d'une légende attachée à un célèbre monument de Bakou. Un shah voulait épouser sa fille. Celle-ci fixa comme condition qu'il fît d'abord bâtir une tour, espérant qu'entretemps son père renoncerait à cette funeste décision. Mais comme il demeurait résolu, la tour terminée elle monta au sommet et se jeta dans le vide.

Pièce instrumentale
6. Mirza-e, Mugham Segah, Reng.
Shirzad Fataliyev et Qanimat Qadirov, hautbois balaban
Danse de mariage lente, suivie d'un passage dans le style savant, extrait du Mugham Segah, conclu par une composition instrumentale reng.

Aqamurad Israfilov, chant et saz ; Qanimat Qadirov au hautbois balaban
7. Ustadname Keremi

8. Ordubadi, Zil mükhammas
Ordubadi est une ancienne pièce interprétée sur un poème extrait du dastan Abbas et Gülqez dont Ashiq Abbas Tufarqanli est à la fois l'auteur et le héros.

La caravane arrive de Ganja,
Avec du chagrin pour seul bagage,
Je me détourne de la belle à la taille élancée
Mais point mon coeur.

Celle aux mains décorées au henné,
À la chevelure châtain,
Au regard exquis,
Je m'en détourne, mais point mon coeur�

9. Shirvan shikestesi
Cette mélodie attribuée à Ashiq Mirza Bilal est une des plus connues du répertoire du Shirvan. Elle est non seulement interprétée par les ashiq mais aussi par les chanteurs de mugham.

Mes cheveux ont grisonné de bonne heure,
Eh, l'homme, de belles filles m'appellent.
Bien que la vieillesse m'ait frappé tôt,
Mes exploits me gardent en vie.

Qui peut guérir une maladie incurable ?
Vers qui me tourner, pauvre de moi ?
Il me faut un double six et c'est le double deux qui sort,
Ces dés me fatiguent.

Mon coeur est transporté par le chant et la poésie,
Écoute-moi et rappelle-toi,
Bilal est le maître des mots, leur gardien,
Un jour on me cherchera partout.

Pièce instrumentale
10. Koroqlu naqarasi
Shirzad Fataliyev et Qanimat Qadirov, hautbois zurna
Duo instrumental inspiré par des thèmes du dastan Koroqlu, célèbre épopée héroïque dont le récit s'est répandue dans toute l'Asie centrale.

Avec tous les artistes
11. Bash Mükhammas
Chaque rencontre de ashiq au Shirvan se termine par un mükhammas, poème en strophes de cinq vers interprétées tour à tour par chacun des ashiq.

Durée du concert : environ 1 heure et 20 minutes.

Contributeurs

Origine géographique

Azerbaïdjan

Mots-clés

Date (année)

2010

Cote MCM

MCM_2010_AZ_S1

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