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2016-10-05
Origines
L’usage des marionnettes (ningyo) au Japon a une origine religieuse et l’ancêtre de la poupée est une branche d’arbre utilisée par les mediums shinto pour faire venir les divinités. Dans le nord du Japon, ces bâtons anthropomorphes servent encore pour leurs consultations oraculaires. Les apports culturels de la Chine et de la Corée ont contribué à faire évoluer ces pratiques et modifier le caractère de la représentation. À Kyushu, des poupées de bois aux jambes et bras ballants actionnés par une ficelle témoignent de ce qui devait être une attraction au viie siècle et un proto-théâtre de poupées. Des écrits de l’époque Heian (784-1185) mentionnent l’existence de marionnettistes itinérants, les kugutsu-mawashi, attestant que le contenu religieux de ces spectacles vont alors s’amenuisant. Aujourd’hui encore dans certaines régions du Japon l’on peut voir dans des fêtes saisonnières quelques familles de marionnettistes jouant et faisant la quête de maison en maison. Au XIII e siècle, des moines itinérants font oeuvre de prosélytisme en usant de petites poupées à l’effigie de la divinité de la prospérité Ebisu. Le spectacle permet de rassembler les foules et de distribuer des amulettes. À la même époque, des moines aveugles et ambulants racontent la légende dorée du bouddhisme ou l’origine des temples. Ils s’accompagnent au luth biwa. À la fin du XVIe, ces conteurs, qui ne sont plus forcément des moines, psalmodient des récits appelés heikyoku. Ces histoires retracent la grandeur et la décadence du clan guerrier des Heike au XII e siècle et remportent un grand succès auprès du peuple et des nobles car conter, c’est une façon d’exorciser la mort violente des guerriers tombés au combat. Cet art s’élargit peu à peu à d’autres genres comme les contes, les légendes, les romans. Tout comme les marionnettes, la récitation s’affranchit de plus en plus de son rôle religieux. Au même moment, le luth à manche long shamisen est importé du sud de l’archipel et s’impose comme instrument d’accompagnement à la place du biwa. Cet art du récit déclamé, dialogué, chanté et accompagné au shamisen prend le nom de jôruri en référence à un conte célèbre : La Princesse Jôruri et ses amours avec Ushiwaka-maru. L’art de la marionnette évolue, des théâtres se créent, s’installent en zones urbaines, surtout à Osaka et à Kyoto, les manipulateurs se sédentarisent et se spécialisent.
Naissance du théâtre de marionnettes ningyo jôruri
C’est à Osaka, au début du XVII e siècle que l’association du jôruri et des marionnettes donne naissance au ningyô jôruri. À cette époque, les marionnettistes se cachent derrière une haute rampe et travaillent les bras levés, ce qui limite considérablement leurs mouvements, mais bientôt la technique change : les manipulateurs viennent sur scène vêtus du kurogo, le costume noir d’invisibilité. Faisant corps avec leur poupée, ils l’animent de mouvements délicats, réalistes et précis sans se faire remarquer par le public. Le récitant (tayû), assis sur le côté, garde cependant une place prééminente dans la troupe en tant que librettiste, récitant, chanteur et musicien.
Le bunraku des villes
Un grand récitant marque l’histoire du ningyô jôruri. Il s’agit de Takemoto Gidayu (1651-1724). Il crée et impose un style de récitation original en fusionnant la récitation épique et le chant mélodieux et renouvelle le répertoire du jôruri en s’inspirant du nô et des chants populaires et en travaillant avec un dramaturge célèbre, Chikamatsu Monzaemon. Cette forme de ningyô jôruri citadine va se développer au XVIII e siècle, se classiciser puis prendre le nom de bunraku qu’on lui connaît aujourd’hui.
Les bunya ningyo des champs
Mais la ville d’Osaka abrite un autre récitant fameux : Okamoto Bunya (1633-1694). De vingt ans plus âgé, Bunya jouit d’une immense notoriété. On apprécie particulièrement son style élégiaque que les habitants d’Osaka appellent bunya nakifushi, les lamentations de Bunya. Cependant, la jeunesse et l’audace de Gidayu vont l’emporter et son style, qui fait déjà école, connaît une vogue sans précédent. Seules quelques régions reculées ne sont pas touchées par cette nouvelle vague, et permettre au style Bunya de subsister. Sur l’île de Sado, le style élégiaque de Bunya va conserver toute son aura et nombre de caractéristiques du jôruri ancien. Au milieu du XIXe siècle, il est associé aux marionnettes qui elles aussi ont perduré, c’est le bunya ningyô. Contrairement au bunraku qui subit d’importantes transformations à partir du XVIII e siècle (pièces bourgeoises, poupées plus grandes, multiplication des manipulateurs), le bunya ningyo conserve son répertoire historique et légendaire et ses marionnettes gardent une certaine rusticité. Aujourd’hui, le bunya ningyo est quasiment inconnu de la plupart des Japonais et ne subsiste plus que dans quatre localités de Kyushu et de Ishikawa ainsi que dans l’île de Sado où, jusqu’à l’ère Meiji (1868-1912) la tradition des récitants aveugles a été maintenue, permettant sans doute une transmission du chant au shamisen d’une qualité exceptionnelle.
Contrairement aux marionnettes de bunraku qui augmentent de taille au XVIII e siècle, les poupées du bunya ningyo conservent leurs dimensions d’origine : 80 cm environ. De même, la marionnette de bunraku est généralement manipulée par trois personnes, tandis que les marionnettes bunya n’en nécessitent qu’une seule. Mais dans ces deux théâtres, la marionnette n’est pas actionnée par des fils ou des tiges ; elle est por tée et le marionnettiste fait corps avec elle. Les poupées sont constituées d’une tête en bois sculptée montée sur une tige traversée par une barre horizontale servant d’épaules, un bras amovible à la main plate et de kimonos superposés parfois rembourrés de coton. Les marionnettistes sont sur scène, vêtus du costume noir qui les dissimule. Une frise d’avant-scène d’environ 80 cm de hauteur les cache partiellement. Glissant ses mains dans le kimono de la poupée, le manipulateur passe sa main gauche dans le dos de la marionnette et tient entre ses doigts à la fois la tige qui soutient sa tête et le bras gauche de la poupée, tandis que sa main droite est glissée dans la manche dr oite de la marionnette.
La manipulation est d’une extrême délicatesse et elle fait preuve d’une réelle virtuosité : pour compenser l’immobilité du visage, les marionnettistes parviennent à exprimer les sentiments et les réactions des personnages à travers les attitudes et les mouvements de la tête et du corps. Entre leurs mains, les marionnettes sont capables d’utiliser des outils, d’écrire ou de manier le sabre.
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2015-10-24
De son vrai nom piyinxi (théâtre des figurines de cuir), mais aussi surnommé pihouxi (théâtre des singes de cuir), à cause des mouvements simiesques et comiques des personnages, le théâtre d’ombres de Taïwan est originaire de Chaozhou dans le Guangdong. Cet art est malheureusement en voie de disparition, aussi bien à Taïwan qu’en Chine continentale.
Les figurines manipulées à l’aide de deux baguettes présentent aux spectateurs un simple profil. Un rétro- éclairage en découpe la silhouette
sur l’écran. Les figurines sont ciselées dans du cuir de buffle tanné jusqu’à devenir translucide puis teintées. Une fois éclairées, les ombres se parent de rouge, de jaune, de vert, créant dans les scènes à plusieurs personnages un camaïeu du plus bel effet.
Un narrateur-chanteur qui peut être le marionnettiste ou une tierce personne joue tous les rôles de la pièce, changeant de voix au gré
des personnages. Un petit ensemble composé d’instruments à cordes pincées et à archet et de percussions assure un accompagnement musical permanent et tous les bruitages. Des musicologues de Taïwan ont discerné dans cette musique des similitudes avec la musique des rites funéraires
taoïstes. Sans doute touche-t-on là au caractère sacré et magique qui s’attache aux marionnettes de Chine depuis les temps les plus reculés. Ce théâtre n’en demeure pas moins un divertissement qui réjouit les petits et les grands tout en leur transmettant les vieilles légendes bouddhiques et taoïstes.
Originaire de la ville de Kaohsiung, la compagnie Fu Hsing Ko est le dernier théâtre d’ombres en activité à Taïwan. Fondée en 1957 par Chang Ming-Shou elle demeure une affaire familiale. Nata sème le trouble dans la mer de l’Est, qui raconte les farces d’une malicieuse divinité enfantine, et Le dit de Hua Guang, sur une divinité taoïste aux multiples métamorphoses, font partie de ses plus grands succès.
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2015-10-21
Appelé zhangzhongxi (théâtre de la paume) ou budaixi (théâtre du sac de toile), ce théâtre est le plus vivant aujourd’hui à Taïwan. Les marionnettes se produisent dans un petit castelet de bois doré ou de velours rouge, trois portes permettant de comprendre, par le jeu des entrées et des sorties, si les personnages restent sur place ou se transportent d’un lieu à un autre.
Les marionnettes, de 20 à 30 centimètres, sont composées d’un sac de toile dans lequel le marionnettiste glisse la main et auquel sont fixés la tête sculptée dans du bois de camphrier, les pieds et les mains.
De riches brocards et des coiffures interchangeables complètent le costume, permettant à chaque marionnette d’incarner différents personnages. Comme dans l’opéra, ceux-ci se répartissent en personnages masculins (shen), femmes (dan), visages peints (jin) et clowns (chou). L’animation se fait avec l’index pour la tête et le pouce et le majeur pour les mains ; les jambes se meuvent grâce au mouvement général de la marionnette. Chaque geste est longuement travaillé, mille fois répété, de sorte que ces petites poupées sont capables de manier un pinceau, un éventail, des armes, de jongler, et d’exprimer par leur allure générale tous les sentiments humains.
Un petit orchestre se tient derrière le castelet. Un tambour de bois et un gong plat ponctuent l’action, soutenus par un grand tambour de bataille, des gongs et cymbales, une petite vièle et un luth en forme de lune. Les marionnettistes assurent les dialogues et le chant.
La Compagnie Jin Kwei Lo (ou Happy Puppetry Company) est une troupe familiale fondée en 1967 par madame Ko Chiang Szu-Mei. Elle est demandée dans tout le pays pour se produire dans les fêtes de temple et de villages. Elle a remporté plusieurs prix, dont le premier prix du Concours de théâtre de la Ville de Taipei en 1998. La Grotte du Nuage du Feu est un épisode du célèbre roman d’aventures du XVIe siècle, le Voyage en Occident. L’amour s’enflamme à la fête des Lanternes est une pièce romantique
(et humoristique) composée par la fondatrice de la troupe et traitée sur le mode de l’opéra classique chinois.
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2015-10-16
L’existence de marionnettes à fils remonte probablement à la dynastie des Han, il y a un peu plus de
2 000 ans. Théâtre funéraire à l’origine, il devient un divertissement sous les Song (Xe - XIIIe siècle) et se répand dans toute la Chine notamment au Fujian, d’où il gagne l’île de Taïwan sous le nom de kuileixi. Ce théâtre ne s’est jamais départi de ses fonctions rituelles et Hsueh Ying-Yuan, le directeur de la troupe Jin Fei Feng, est fréquemment appelé pour exorciser un lieu ou célébrer l’anniversaire d’une divinité.
Les marionnettes, hautes d’une cinquantaine de centimètres, sculptées dans un bois dur, peintes et vêtues
de brocarts, possèdent des bras et des mains articulés ainsi que des jambes aux pieds lestés de semelles épaisses et sonores. Une marionnette équipée de seize à vingt-deux fils peut reproduire tous les mouvements d’un acteur ; mais pour monter à cheval, il lui en faut vingt-huit. Le marionnettiste manipule les personnages, à vue ou derrière un rideau, les pieds des poupées reposant sur le sol. Les mouvements des bras, des mains et de la tête sont très gracieux, mais c’est dans la marche que l’on reconnaît
la qualité d’un marionnettiste. Entre les mains d’un virtuose, la poupée est capable de tirer une épée de
son fourreau et de l’y remettre, de s’éventer, essuyer ses larmes, se lisser la barbe, boire, écrire, faire un saut périlleux...
La troupe Jin Fei Feng a été fondée à Kaohsiung en 1920 par Hsueh Pu, le grand-père de son directeur actuel, Hsueh Ying-Yuan. Celui-ci a été formé par son père Hsueh Chung- Hsin et n’avait que 25 ans lorsqu’il dut prendre sa succession. Son style s’apparente à celui de Quanzhou, connu pour ses marionnettes aux traits arrondis et délicats et son accompagnement musical raffiné.
La pièce se passe pendant la fête des Lanternes qui clôt les festivités du Nouvel An. Elle met en scène un couple aimant, lettré et facétieux et toute une galerie de personnages qui sont autant d’occasions pour les marionnettistes de déployer leurs multiples talents.
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2013-03-20
Le théâtre d’ombres wayang kulit est une des plus anciennes formes spectaculaires de Java et certainement la plus élaborée. Ces figurines confectionnées en cuir finement ciselé et peint, maintenues par des tiges de corne et qu’une personne manipule derrière un écran éclairé par une lampe, ont permis à des générations de Javanais de représenter le monde des actions humaines et de transmettre un enseignement fondamental en psychologie, éthique, sciences politiques et militaires, mythologie, histoire et spiritualité javanaises.
Le terme wayang renvoie à bayang, ombre et moyang, ancêtre, révélant ainsi l’importance des esprits et des divinités à Java. Plus qu’un simple divertissement, le wayang kulit est un rituel propitiatoire et purificateur qui permet de maintenir l’harmonie avec le monde surnaturel. Et celui qui en est le centre, le dalang (mot que l’on peut traduire par marionnettiste mais aussi par cerveau), est autant respecté pour ses liens avec ce monde que pour ses talents d’artiste. À la fois savant et populaire, le wayang kulit intéresse toutes les couches de la société javanaise, du village au kraton princier. Pour les habitants des villes royales de Solo et Yogyakarta, dépositaires de l’ancienne culture classique de Java Centre, il est le wayang purwa, le théâtre primordial qui domine et féconde tous les autres. Sans doute est-ce la raison pour laquelle ce fut le premier élément que l’Indonésie fit inscrire par l’Unesco au patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Une représentation dure normalement une nuit. Elle est organisée par une famille riche, une entreprise ou une collectivité pour une naissance, une circoncision, un mariage, l’inauguration d’une maison, d’un magasin, d’un pont, d’une route, etc. Dans une cour ou mieux, dans un pendhopo, ce vaste pavillon sans murs de l’habitation javanaise, on dresse un grand cadre de bois (gawang) sur lequel est tendu un écran de coton blanc (kelir). Derrière, le dalang s’assied en tailleur, plantant ses figurines dans un tronc de bananier fraîchement coupé (gedebog) et couché au sol. Au-dessus de lui, une lampe (blencong) projette les ombres sur l’écran. À sa gauche, un coffre en bois (kothak) : le dalang y puise ses figurines, le frappe avec un morceau de bois pour bruiter le spectacle et transmettre ses ordres à l’orchestre, enfin il y accroche des plaques de métal (kepyak) qu’il fait résonner avec son pied.
Le dalang est l’artiste principal de la représentation. Ce maître aux talents multiples déclame ou improvise ses dialogues dans le parler populaire des clowns ou la langue classique des nobles, tout en faisant évoluer ses personnages et en dirigeant l’orchestre. Et, tout en divertissant son public, il lui transmet des connaissances et des éléments de réflexion sur les valeurs culturelles et philosophiques javanaises ainsi que sur les mystères de l’univers et de la nature humaine. Cet art extrêmement complet s’appelle pedalangan, l’art du dalang.
Derrière lui se tient le gamelan, l’orchestre classique javanais. Il se compose pour l’essentiel d’instruments à percussion : métallophones à lames (saron, slenthem, gender), xylophones (gambang), jeux de gongs couchés (bonang), grands gongs suspendus, tambours (kendang), mais aussi d’une vièle (rebab), parfois d’une flûte (suling), d’une chanteuse (pesindhen) et d’un chœur d’hommes (gerong).
La direction du gamelan se partage entre le dalang qui indique de manière codée les pièces qui doivent être jouées, la vièle qui introduit la mélodie en solo et le tambour qui donne le rythme et pilote les constantes variations de tempo propres à cette musique.
Comme dans presque tous les théâtres asiatiques, la musique de scène se compose au fil de la représentation à partir d’un répertoire de morceaux-types appelés gendhing. Par exemple, les gendhing lampah ou “morceaux de marche” sont joués dans les scènes d’action, parfois précédés d’un ada-ada dans les moments de suspense ; les pathetan accompagnent le dalang lorsqu’il chante en ancien javanais pour créer une ambiance ou marquer un changement de climat ; l’exubérant titipati permet au tambour d’improviser et de s’amuser parfois à égarer ses camarades ; les dolanan et les jineman accompagnent les scènes de clowns, etc.
Quelle que soit sa durée, la pièce se divise en trois actes ou pathet. Le pathet nem plante le décor et expose la situation qui devra être résolue. Le pathet sanga commence par le tumulte de la nature et comprend une longue scène de clowns entrecoupée de chansonnettes dans laquelle le dalang rend hommage aux organisateurs de la soirée et ironise sur l’actualité du village ou sur diverses questions politiques, morales, sociales qui agitent le pays. Le pathet manyura constitue le dénouement et se compose principalement de batailles.
Les drames de wayang exposent en général un dilemme moral qui se pose à un héros au cours de sa vie, d’une histoire d’amour ou d’une guerre. Présentées comme l’éternelle lutte entre le Bien et le Mal dont aucun ne sort vraiment vainqueur, ces histoires puisées dans les épopées indiennes du Râmâyana et du Mahâbhârata ou dans des légendes javanaises s’interrogent sur ce qui est juste et ce qui ne l’est pas, sur la quête de la vertu, de la noblesse et surtout sur le sens que l’on doit donner à sa vie.
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2012-04-06
Vendredi 6 et samedi 7 avril à 20h30
Dimanche 8 et lundi 9 avril à 17h
Le yakshagana ou chant des êtres célestes est à l'origine un drame musical et dansé du Karnataka, en Inde du sud. Cette forme de théâtre traditionnel jouée par des acteurs-paysans s'est forgée vers le XVIe siècle à partir d'une double origine : le culte des bhuta, divinités agraires, dont les acteurs ritualistes revêtaient des costumes et des ornements féminins et se couvraient le visage d'un épais maquillage jaune et ocre et l'art des yakkadigaru, musiciens-conteurs itinérants.
Au XVIIIe siècle, pour permettre à ceux qui n'avaient pas les moyens d'inviter une troupe d'acteurs de présenter un spectacle de yakshagana, trois frères de la famille Kamath, installée depuis une génération dans le village d'Uppinakudru, créèrent une version pour marionnettes à fils, le yakshagana gombeyata. Au début du XXe siècle, on ne comptait pas moins d'une trentaine de troupes dans le seul district de Dakshina Kannada.
Dans les années cinquante, le yakshagana gombeyata faillit disparaître et fut revivifié par Devanna Padmanabha Kamath. Celui-ci initia son fils, Kogga Kamath, à la manipulation, la musique, la danse et la sculpture des poupées. Avant de mourir, le grand-père de Bhaskar Kamath fit venir son fils, Kogga, et ses amis et leur dit : "Donnez à votre art le meilleur de vous-même. Il vous exaltera. Il vous montrera la valeur de la vie. Ne soyez pas mesquins mais réclamez qu'il vous nourrisse et qu'il vous habille".
Pourtant en 1977, la troupe faillit de nouveau disparaître. Invités l'année suivante par le Festival des Arts Traditionnels de Rennes pour deux grandes tournées européennes, où ils eurent notamment l'occasion de jouer devant la reine des Pays-Bas, ces modestes artistes ruraux reçurent à leur retour au Karnataka les encouragements des autorités indiennes et purent ainsi continuer à faire vivre cette tradition. Quelques années avant sa mort en 2003, Kogga Kamath confia la direction de sa troupe à son fils Bhaskar. Une tâche dont il s'acquitte avec un dynamisme remarquable. Avec sagesse et pragmatisme, il concilie la préservation d'une tradition avec les contraintes économiques du monde contemporain.
La troupe est dirigée par le maître de marionnettes, le suthradhara. Au fil des générations, chacun a apporté des améliorations techniques aux poupées et à leur manipulation. Kogga Kamath, en son temps, avait affiné la sculpture des têtes, des coiffes et des visages et ajouté une articulation aux chevilles afin de rendre les mouvements de danse plus fluides. Bhaskar Kamath, quant à lui, s'est lancé dans l'animation des lèvres et des yeux pour donner plus de vie aux visages et a introduit dans la troupe un bestiaire drôlatique et virtuose.
La musique et la danse occupent une place prépondérante dans cette forme dramatique et c'est avec une grâce et une virtuosité étonnantes que les marionnettes dansent sur la scène au rythme des tambours, sautent à cheval, volent dans les airs ou combattent à l'épée ou à la lance.
Les marionnettes finement sculptées mesurent entre 40 et 80 cm de hauteur et pèsent en moyenne 7 à 8 kilos. Certaines grandes marionnettes animalières, comme l'éléphant, peuvent peser jusqu'à 30 kilos. Elles sont animées par des fils dont les extrémités sont d'un côté fixées aux articulations (chevilles, genoux, hanches, épaules, coudes, poignets, cou et tête) et de l'autre rassemblées sur deux courtes tiges de bois que le manipulateur tient dans ses mains. Les costumes, les ornements, le maquillage sont les répliques de ceux du yakshagana d'acteurs. Ces marionnettes représentent bien sûr les personnages de la pièce, mais ce peuvent être aussi des éléments de décor, des accessoires, des animaux' Elles évoluent sur une petite scène équipée d'un rideau de fond, de pendrillons et d'une frise, de manière à dissimuler les marionnettistes. Autrefois, ceux-ci récitaient ou improvisaient aussi les dialogues mais aujourd'hui la manipulation de plus en plus complexe des marionnettes requiert toute leur attention et les dialogues sont confiés à deux narrateurs.
Un chanteur, le bhagavata, plante le décor du récit et exprime poétiquement les sentiments des protagonistes. Il est soutenu par un harmonium shruti tandis que deux tambours : un chande battu avec des baguettes et reconnaissable à ses sonorités crépitantes et un maddale frappé à mains nues, rythment de bout en bout le déroulement de la représentation.
Le répertoire puise dans les épisodes picaresques des deux grandes épopées de l'hindouisme, le Râmâyana et le Mahâbhârata, ainsi que dans les Purâna, légende dorée de la mythologie hindoue.
Les marionnettes Yakshagana du Karnataka, un exemple de sauvegarde du Patrimoine Culturel Immatériel par Chérif Khaznadar.
En 1977, lors de l'un de nos voyages de prospection en Inde pour le Festival des Arts Traditionnels de Rennes, nous étions, Françoise Gründ et moi au Karnataka avec un ami journaliste passionné d'arts traditionnels, K. S. Upadhyaya. Il nous apprit qu'il y avait dans cette région une
seule troupe qui présentait des spectacles de marionnettes yakshagana gombeyata et qu'elle venait de céder l'ensemble de ses marionnettes à un fonctionnaire venu de Delhi pour récupérer ces marionnettes trop belles pour être perdues dans un petit village du Karnataka, aux fins de les mettre dans un musée. Je voulais en savoir plus et harcelais notre ami de questions. Il nous proposa alors d'aller voir le maître des marionnettes dans son village tout proche. Nous partîmes donc, en pleine nuit, vers le village de Uppinakudru dans le Kundapura Taluk du district de Dakshina Kannada, pour rendre visite à Kogga Devana Kamath.
Bien qu'il n'eût que 56 ans, Kogga Kamath paraissait beaucoup plus âgé et surtout très fatigué, l'air las. Il nous reçut, sans paraître étonné de notre arrivée aussi tardive qu'intempestive, dans son très modeste logis et K. S. Upadhyaya lui expliqua notre intérêt pour les marionnettes. Il tira alors vers lui une petite caisse de bois, le seul meuble pratiquement de la pièce, l'ouvrit et en sortit deux marionnettes, les seules qui lui restaient car, ébréchées, elles n'avaient pas été retenues pour aller au musée. Il envoya son fils chercher à travers le village ceux qu'il trouverait de sa troupe et, dans cette attente nous raconta son histoire.
Il y avait, dans la région, au début du XXe siècle plusieurs troupes de marionnettes à fils. Toutes avaient disparu, la seule qui avait survécu était celle de sa famille qui pratiquait cet art depuis le XVIIIe siècle, se transmettant les marionnettes et les techniques de jeu de père en fils ou d'oncle à neveu. La famille Kamath n'avait jamais été riche, au contraire, elle tirait le diable par la queue, les marionnettes étant plus une passion qu'un gagne-pain car, jusqu'à récemment, le public ou les "patrons" qui commandaient les spectacles ne payaient qu'en nature : des noix d'arec le plus souvent ou des tissus qui, lorsqu'ils étaient de soie ou brodés de fils d'or et d'argent servaient aussitôt à confectionner des vêtements encore plus beaux pour les marionnettes.
Passion donc, fidélité à une tradition familiale mais aussi rôle social car les marionnettes étaient demandées et redemandées par les enfants et les adultes, et la famille Kamath se devait de répondre à la demande des gens du village et depuis quelques années de ceux de la région et du district. Kogga Kamath avait appris à sculpter les marionnettes. Il en profita pour introduire quelques aménagements et améliorations à ses marionnettes. Celles qui avaient une coiffe de paille et de tissu se virent désormais sculptées dans une seule pièce de bois la coiffe faisant partie de la tête. Son père Devanna avait introduit des articulations aux genoux et aux coudes ce qui rendait les mouvements des membres plus souples et plus réalistes. Il en introduit aux chevilles. Il aménagea également le castelet en remplaçant les torches par des ampoules électriques.
Ses marionnettes étaient si belles qu'un fonctionnaire zélé voulut sauvegarder ce patrimoine et il le mit au musée. Quelques villageois nous avaient entre temps rejoints, ils s'installèrent avec leur harmonium et les percussions dans la même formation musicale que celle du yakshagana pour acteurs et Kogga Kamath nous joua avec ses deux marionnettes éclopées et rescapées une scène de quelques minutes. Quelle merveille, quel enchantement, jamais nous n'avions vu en Inde de marionnettes aussi belles, aussi bien manipulées, aussi vivantes, et pourtant elles avaient pratiquement disparu.
Je demandais à Kogga Kamath pourquoi il ne refaisait pas, une fois encore, son théâtre. Il me dit qu'il devenait vieux, fatigué et que cela lui demanderait plusieurs mois si ce n'est des années car il devait travailler pour gagner sa vie et il avait trouvé un emploi de facteur qui lui prenait tout son temps. Le coeur serré d'avoir été vraisemblablement les derniers témoins d'un jeu de marionnettes de yakshagana nous quittâmes Kogga Kamath.
Dès le lendemain, je proposais à K. S. Upadhyaya le plan suivant : je lui remettrais l'équivalent de six mois de salaire de Kogga Kamath et quelques frais en plus pour que le maître des marionnettes puisse refaire son théâtre ou tout du moins le nombre de marionnettes nécessaires à une représentation. Si le délai était tenu, j'inviterais la troupe au Festival des Arts Traditionnels de Rennes. Le 6 mars 1978 la troupe de marionnettes de yakshagana surprenait, étonnait et ravissait le public rennais. Après toute une série de représentations à Rennes, la troupe poursuivit ses représentations, entre autres à Amsterdam au Festival de Hollande et à l'Institut des Tropiques, à à Berlin à l'Institut de musicologie comparée et dans d'autres villes d'Allemagne.
Ce même réseau que nous avions créé, le Extra European Arts Committee, composé de directeurs d'institutions souhaitant promouvoir en Europe les arts traditionnels extra-européens, organisa, à l'initiative cette fois de son membre hollandais Frans de Ruyter, une nouvelle tournée en novembre 1978, tournée qui commençait à nouveau à Rennes mais qui passait par le palais royal de Hollande où les marionnettes jouèrent pour la reine. Durant ces deux tournées K. S. Upadhyaya qui en bon "patron" veillait sur ses enfants et s'était occupé de toute l'organisation et la logistique en Inde, accumulait des témoignages, des articles, il demandait aux ambassadeurs ou conseillers culturels indiens qui venaient assister aux représentations des lettres indiquant le triomphe des marionnettes partout où elles passaient.
De retour en Inde son métier de journaliste lui permettait de diffuser tout cela dans la presse locale, régionale et même nationale, et en 1980 le Prix de la Sangeet Natak Academy était décerné à la troupe de yakshagana de Kogga Kamath. Enfin reconnue, elle allait pouvoir survivre et continuer son action dans son village, dans sa région, dans son pays mais aussi dans plusieurs festivals internationaux.
Kogga Kamath nous a quitté il y a plusieurs années, mais son fils et ses disciples ont continué à faire vivre la troupe de marionnettes. D'autres troupes ont été créées et ce patrimoine exceptionnel remplit toujours sa fonction auprès des populations du Karnataka.
Cet exemple vécu nous permet de saisir toute la différence qu'il peut y avoir entre deux conceptions de la sauvegarde du patrimoine, celle qui s'applique au patrimoine matériel et qui est de conserver (en l'occurrence mettre les marionnettes à l'abri dans un musée) et celle qui s'applique au patrimoine immatériel et qui est de créer les conditions nécessaires à la survie et à l'évolution naturelle du patrimoine.
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2010-04-01
01-05/04/2010
Surtitré en français
Jeudi 1er avril à 20h30
Vendredi 2 avril à 20h30
Samedi 3 avril à 20h30
Lundi 5 avril à 17h
Maison des Cultures du Monde
Liao Wen-ho, conception, marionnettiste principal et voix
Liao Chen-hung, marionnettiste
Liao Chien-cheng, marionnettiste
Liao Chen-yi, marionnettiste
Liao Chu-yi, marionnettiste
Lai Yi-ting, marionnettiste
Liao Chien-shun, régisseur, marionnettiste
Liao Chiu-chu, musique
Traduction des livrets : Pierre Charau
Depuis ce jour de 1976 où il a créé sa troupe après une longue formation auprès des maîtres de marionnettes à gaine traditionnels, Liao Wen-ho ne cesse de conquérir de nouveaux publics. À chacune de ses représentations, on se presse devant le long castelet pour découvrir sa dernière trouvaille visuelle ou pyrotechnique. Car Liao Wen-ho est un maître, et peut-être plus traditionnel qu'on ne le pense, car si l'esprit de la tradition c'est aussi de savoir s'adapter à l'air de son temps et à un contexte social et culturel en perpétuel renouvellement pour garder une pratique bien vivante, c'est exactement ce qu'il fait : recevoir, créer, transmettre.
Le théâtre traditionnel chinois de marionnettes à gaine s'appelle budaixi ou « théâtre du sac de toile » en référence à la poche que forme le costume de la marionnette et à l'intérieur de laquelle le manipulateur glisse sa main pour animer les bras et la tête. Il est apparu dans les provinces du sud au XVIe siècle et a atteint un grand raffinement car sa fonction première était de divertir les divinités. Les pièces ou les saynètes suivent le modèle de l'opéra chinois, même si les marionnettes sont antérieures à ce dernier, et mettent en scène des légendes, des épisodes de romans historiques, des mélodrames. Le budaixi a aussi joué un rôle pédagogique en diffusant un savoir historique, un système de valeurs telles que la loyauté, la bonté, le respect des aînés. Les troupes, il en existe encore quelques-unes aujourd'hui, étaient familiales et itinérantes, louant leurs services ici et là au gré des demandes.
À maints égards, Liao Wen-ho s'inscrit dans la continuité du budaixi quand bien même il rompt clairement avec l'esthétique savante et figée d'un XVIIIe siècle éternel. La distribution ci-dessus nous le montre, sa troupe est bien une affaire de famille, elle sacrifie toujours aux nécessités de l'itinérance, les sujets des pièces s'inspirent toujours des légendes anciennes ou des grands romans d'aventures classiques. Certes, il ne s'adresse plus vraiment aux divinités ' même si elles sont parfois présentes parmi ses personnages ' et l'on a plus de chance de voir son castelet à proximité d'un supermarché que sur le parvis d'un temple, mais c'est toujours un spectacle de rue. De même, l'accompagnement instrumental de style beiguan a été remplacé par un boîtier électronique qui débite deux ou trois muzaks stupides et hilarantes et un florilège de bruits électroniques. Le boîtier a été bricolé dans un hangar qui lui sert tour à tour d'atelier de fabrication, de lieu de spectacle voire de studio de télévision pour ses productions de puppet soap. Les marionnettes, elles aussi, ont changé. Finies les petites figurines aux visages délicatement sculptés et aux luxueux brocards. Il faut du grand, du tapageur, du qui-se-voit-de-loin dans la lumière des lasers et des stroboscopes. Alors, l'imagination se libère et le spectacle vire au théâtre d'objets insolites dans des océans de flammes et des nuages de fumée ' au mépris souvent des règles de sécurité les plus élémentaires. Liao Wen-ho ne s'embarrasse pas de scénographies dispendieuses ou somptuaires. Cet artisan travaille avec les moyens du bord, en saltimbanque habitué à monter son castelet géant en deux temps trois mouvements pour faire revivre avec humour et truculence d'anciennes légendes, des épisodes de romans picaresques.
Alors, ne boudons pas notre plaisir, libérons notre âme d'enfant et laissons-nous emporter par les facéties du roi-singe Sun Wu-kong, la bêtise gloutonne du cochon Zhu Ba-jie ou les savantes passes d'armes du héros Da Yong-hsia.
La Maison des Cultures du Monde remercie le Conseil National des Affaires Culturelles de Taïwan et le Centre culturel de Taïwan à Paris pour leur soutien, et plus particulièrement Monsieur Chih-cheng Chen, Madame Ya-wen Tsai, Madame Margot Lin.
La Maison des Cultures du Monde remercie également l'Institut Français de Taipei et son conseiller de coopération et d'action culturelle, Monsieur Anthony Chaumuzeau.
PROGRAMME
I. La montagne de feu
un épisode du Voyage en Occident (d'après le roman de Wu Cheng'en, XVIe siècle)
Sur ordre de l'empereur, le bonze Hsuan-tsang se rend au pays de Bouddha pour en rapporter les textes sacrés. Pour affronter toutes les épreuves qu'il aura à traverser au cours de ce long périple, il doit s'adjoindre trois compagnons, tous dotés de pouvoirs surnaturels mais d'un caractère indomptable : le roi-singe Sun Wu-kong autoproclamé Grand Sage Égal du Ciel, le cochon glouton Zhu Ba-jie et l'irascible démon Sha Wu-jing. Sur leur chemin, ils doivent franchir une montagne en feu. Pour l'éteindre il leur faut se procurer l'éventail magique de la Princesse à l'éventail de fer. Mais celle-ci a une dent contre Sun Wu-Kong'
II. Da Yong-Hsia et l'Île Sans-Tuerie
Sur l'Île Sans-Tuerie, une loi interdit les combats et le meurtre. Comment le héros Da Yong-hsia poura-t-il combattre ses adversaires sans s'exposer aux foudres de l'Empereur céleste de l'Intégrité parfaite ?
Durée du spectacle : environ 1 heure et 10 minutes
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2009-04-02
02-04/04/2009
Avec le dalang Purbo Asmoro
Gamelan Garasi Seni Benawa
Direction musicale Rahayu Supanggah
Spectacle surtitré en français
Traduction surtitrée simultanée en anglais : Kathryn Emerson
Jeudi 2 avril à 20h30
Vendredi 3 avril à 10h ' spectacle éducatif pour le public scolaire
Vendredi 3 avril à 20h30
Samedi 4 avril à 20h30
Maison des Cultures du Monde
Le Wayang Kulit ou théâtre d'ombres est une des plus anciennes formes spectaculaires de Java, et sans doute une des plus élaborées. Selon certaines sources, elle se serait transmise sans interruption depuis au moins un millier d'années. À Java, les représentations durent une nuit entière et ne s'achèvent qu'au petit matin. Ce n'est pas un simple spectacle de divertissement, mais un rituel propitiatoire et purificateur à l'occasion d'une fête religieuse, d'un mariage, d'une circoncision, de l'inauguration d'un édifice'
Les histoires sont pour la plupart des épisodes des deux grands récits épiques de la littérature hindoue, le Râmâyana et le Mahâbhârâta, relus à travers le prisme de la réalité contemporaine. Le dalang se sert de ses personnages pour exprimer son opinion, et celle de ses concitoyens, sur les affaires du pays ou sur les questions qui occupent la société.
Il n'est pas donné à quiconque de devenir dalang ou manipulateur : il faut être un grand artiste comme Purbo Asmoro pour pouvoir raconter, mais aussi improviser à partir d'un canevas et relier l'histoire à l'actualité, reproduire la voix douce et timide d'une princesse, imiter le ton canaille d'un rustre, ou exprimer avec élégance toute la colère retenue d'un noble prince. Et ne parlons pas de l'endurance de celui qui doit passer une nuit entière assis en tailleur, sans fermer l'oeil, à faire rire ou pleurer son public et contrôler de manière imperceptible les musiciens du gamelan, installés autour de lui.
Purbo Asmoro est l'un de ces artistes exceptionnels. Né à Pacitan dans une famille de dalang depuis au moins six générations, et même plus selon la légende de la famille, Purbo Asmoro devient dalang professionnel en 1980, à l'âge de 19 ans. Mais ce n'est qu'en 1988, après avoir fait ses preuves, qu'il est admis dans la communauté des dalang de Solo. Purbo Asmoro est toutefois le seul dans sa famille, et aussi l'un des rares dalang indonésiens à détenir à la fois l'art et la manière traditionnels, transmis par sa famille, et des connaissances académiques acquises à la prestigieuse Académie des Beaux-Arts de Solo (ISI) où il enseigne actuellement, partageant sa vie entre ses étudiants et ses fans à travers Java.
Réputé grand connaisseur et respectueux de la tradition, Purbo Asmoro est aussi un innovateur. Le lakon qu'il jouera pour le Festival de l'Imaginaire est intitulé Sesaji Raja Suya ou La grande offrande des rois. Cet épisode du Mahâbhârâta s'inscrit, bien entendu, dans le conflit qui oppose les Pandava aux Kaurava. Mais plus que l'éternel récit d'un combat entre le bien et le mal, magie noire et magie blanche, cette histoire s'interroge sur la nature de l'homme, capable du plus grand courage comme de la pire veulerie. C'est aussi une histoire qui donne à réfléchir sur sa liberté d'adhérer ou pas à un système de croyances et de valeurs.
Rahayu Supanggah, l'une des principales figures du monde culturel indonésien, assurera la direction musicale du gamelan. Grand maître et connaisseur des musiques traditionnelles, notamment des musiques de gamelan de Java Centre, Rahayu Supanggah est aussi considéré comme un pionnier de la musique contemporaine indonésienne. Né dans une famille de dalang, il a grandi dans un milieu artistique et culturel traditionnel. Il a d'abord choisi d'être musicien, et c'est ainsi qu'il se définit en premier. Docteur en ethnomusicologie, Rahayu Suppanggah enseigne à l'Institut Seni Indonesia de Surakarta. Il a été professeur invité dans de multiples universités en France, Suisse, Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Par ailleurs, il a travaillé avec d'éminents metteurs en scène comme Peter Brook ' Mahâbârâta (1994)' ou encore Robert Wilson ' I La Galigo (2004) '.
Sa composition de la bande originale du film Opéra Jawa a reçu en 2006 le prix SACEM Meilleure création sonore et musicale lors du 28e Festival des 3 continents de Nantes. Depuis 2007, il coordonne la mise en place d'un département d'enseignement du gamelan au Southbank Centre de Londres.
Le Garage des Arts Benawa (Garasi Seni Benawa) est une association culturelle ouverte aux professionnels de la culture, amateurs d'art, artistes débutants et confirmés. Spécialisé dans le domaine des arts de la scène traditionnels et contemporains, le GSB favorise également les échanges avec de nombreuses autres formes d'expression artistique. Ses activités de formation, création et rencontres sont ouvertes à tous et se tiennent dans la maison de Rahayu Supanggah.
Arwad Esber
Les surtitres français ont été traduits par Pierre Bois et relus par Laurence Fayet à partir d'une adaptation établie en langue anglaise par Kathryn Emerson. Compte-tenu des difficultés inhérentes au surtitrage en direct d'une parole improvisée, nous sollicitons l'indulgence du public pour les erreurs ou omissions qui pourront être commises.
Programme : Sesaji Raja Suya. Le rassemblement rituel des rois.
-Prologue
-Pathet Nem
-Pathet Sanga
-Pathet Manyura
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2008-03-15
15 -17 mars 2008, Maison des Cultures du Monde
19 mars 2008, Centre Culturel Jacques Duhamel, Vitré.
En partenariat avec le CRT Artificio de Milan
Paris est menacé. De nombreux paladins de la cour de Charlemagne sont partis à la recherche de la princesse Angélique. Même Orlando, le plus valeureux des chevaliers, a quitté la cour et Charlemagne doit confier la commande de son armée à Rinaldo. Mais tous deux, épris de la belle Angélique, ont juré de se disputer son amour jusqu'à la mort. Un duel s'ensuit, mais, heureusement ! Le magicien Malagigi parvient à les séparer'
Joué par la compagnie de théâtre Bradamante de Palerme, ce duel propose une relecture moderne du gran duello, pièce du répertoire traditionnel de l'Opera dei Pupi, théâtre de marionnettes de Sicile né au cours du XIXe siècle. Les marionnettes, hautes de 60 à 70 cm, sont constituées d'armures étincelantes montées sur une tige de bois. La tête, finement sculptée, s'anime du regard transparent des yeux de verre. Jusqu'au début du siècle, les armures des princes étaient recouvertes d'écailles d'argent et les heaumes, les hauberts et les armes étaient aussi en métal précieux. Les personnages présentent des articulations au cou, aux épaules, aux coudes, aux poignets, aux genoux et aux chevilles. Plus les personnages sont importants, plus leurs articulations sont nombreuses et leur taille élevée.
La technique de manipulation requiert à la fois l'usage de tiges et de fils. La tête et le bras droit de la marionnette sont reliés à deux tiges de fer de 50 cm de longueur. Le bras gauche et parfois l'épée sont mus par un fil qui va rejoindre la poignée de la tige de fer qui commande les mouvements de la tête. Les jambes restent libres et c'est leur propre poids et leur rebondissement sur le plancher du castelet qui donnent à la marionnette un mouvement permanent de danse sautillante. Le castelet, surélevé, consiste en une boîte surmontée d'un rideau. Les montreurs manipulent les marionnettes, penchés au-dessus d'une rambarde. Le spectacle présente un aspect d'agitation furieuse, ponctuée par le bruit des armures et le cliquetis des armes et des pièces métalliques. L'Opera dei Pupi est un exemple de tradition bien vivante qui s'est transmise de manière ininterrompue jusqu'à nous.
Aujourd'hui il ne subsiste plus que trois troupes à Palerme. Le Festival de l'Imaginaire 2008 a choisi de présenter la compagnie Bradamante, emblématique de cette tradition reconnue chef-d'oeuvre du patrimoine culturel immatériel.
Dirigée par Nino Cuticchio, la compagnie Bradamante s'inscrit dans la tradition familiale. Fils et élève du grand puparo (poupier) Giacomo Cuticchio, Nino reçoit la tradition de son père et la transmet à son tour à sa famille. Nino Cuticchio est né en 1952 à San Cipirello (Palermo) dans le théâtre de son père, précisément sur la scène. En effet le théâtre est aussi la maison de la famille Cuticchio qui se déplace à travers toute la Sicile pour jouer ses spectacles. Dès son plus jeune âge, Nino suit son père dans les villes siciliennes et commence à jouer du pianino a cilindro (orgue de Barbarie), première étape de l'apprentissage du métier de poupier. À l'age de treize ans, Nino devient un des marionnettistes du théâtre de son père situé au centre de Palerme, puis le suit dans toutes ses tournées tant en Italie qu'à l'étranger. Suite à la crise du théâtre des pupi, son père choisit d'inscrire Nino dans une école de lithographie afin qu'il apprenne un métier. Nino commence à dessiner et se découvre un goût particulier pour la peinture. Il demande alors à son père de le conduire dans l'atelier d'un peintre. Nino passe son temps à peindre et durant cette période il produit soixante nouvelles toiles de fond, copiant les anciennes toiles tout en aidant son père le soir dans son nouveau théâtre, Ippogrifo, situé dans la ruelle Ragusi à Palerme. Grâce à son père, Nino rencontre le poupier et peintre Gaspare Canino di Alcamo. Canino devient un maître pour le garçon. Il lui apprend à dessiner les pupi, les chevaux et corrige les défauts des toiles de fond réalisées par Nino.
En 1984 son père lui prête vingt pupi et des castelets grâce auxquels Nino commence à réaliser des spectacles dans les écoles de Palerme et de la province. Au cours de ces mêmes années, Nino collabore avec le Musée International des Marionnettes pour lequel il réalise à la fois spectacles traditionnels et nouveaux spectacles commandés par le Musée.
Après la mort de son père en 1985, Nino poursuit son activité de poupier, continuant à faire vivre, avec ses filles Tiziana, Barbara, Alessandra et sa mère Pina Patti Cuticchio, le théâtre Ippogrifo de son père.
Florabelle Spielmann
Le Festival de l'Imaginaire tient à remercier Monsieur Franco Laera.
Diapos-textes :
Les marionnettes de Sicile
Le duel d'Orlando et Rinaldo pour l'amour d'Angelica
Par la Compagnie Bradamante sous la direction de Nino Cuticchio
Les personnages principaux :
' CHARLEMAGNE, l'empereur
' ORLANDO (Roland), un paladin
' RINALDO (Renaud), un paladin
' ANGELICA, la princesse de Catai
' RODOMONT, le roi d'Alger
' MALAGIGI, le magicien
' NACALONE, un démon
1e scène: Palais royal de Paris
Charlemagne a réuni le conseil des paladins pour lui faire savoir que le neveu d'Orlando et d'autres cavaliers ont manqué à leur devoir :
ils sont partis à la recherche d'Angélique, la belle princesse orientale. Un soldat vient annoncer le siège du royaume de Rodomont, roi d'Alger. Charlemagne envoie les paladins combattre sous le Commandement du prince Rinaldo.
2e scène: Camp païen
Rodomont dit à ses hommes, géants et chevaliers, qu'ils vont bientôt conquérir Paris. On entend crier 'aux armes'. Tous partent combattre.
3e scène: Murs de Paris
Païens et chrétiens s'affrontent. Rodomont fait preuve de courage en les combattant, mais il est mis en fuite par Rinaldo qui le poursuit pour le tuer.
4e scène: Campagne
Orlando, à la recherche d'Angélique, tue un serpent. Il entend alors crier au secours et se hâte d'aller secourir celui qui est dans le besoin.
5e scène: Une plage
Un géant, voleur, a enlevé Angélique et veut l'amener à la foire de Salonique pour la vendre comme esclave. Orlando arrive et la délivre.
Alors que tous deux parlent d'amour, Rinaldo, à la recherche de Rodomont, arrive. Il voit Angélique et tombe encore une fois amoureux d'elle. Orlando ne lui permet pas de s'approcher.
Un combat s'ensuit.
6e scène: Porte de l 'enfer
Le magicien Malagigi apprend de Nacalone, un de ses démons, qu'Orlando et Rinaldo se battent depuis trois jours et deux nuits pour l'amour d'Angélique.
Or une prophétie dit que Rinaldo peut mourir d'un moment à l'autre.
Malagigi se souvient du conseil que son maître, l'enchanteur Merlin, lui a donné: combattre les Magiciens opposés à la foi chrétienne et veiller sur la vie des paladins.
Malagigi sait que les deux cousins ne l'écouteront pas. Il ordonne donc à Nacalone de se transformer en Duc Namo de Bavière, pendant que lui-même se transformera en Charlemagne. Il lui ordonne de prendre la princesse du Catai, de la mettre sur un cheval rapide et de la conduire à Marseille où elle trouvera un bateau qui la conduira dans ses terres des Indes. Dans le même temps, il ira convaincre les deux paladins de combattre, non plus entre eux, mais de nouveau contre les païens.
7e scène: Une plage
Orlando et Rinaldo sont toujours en train de se battre. Le duel est interrompu et le plan de Malagigi, déguisé en Charlemagne, marche à la perfection.
8e scène: Murs de Paris
Les soldats qui montent la garde voient arriver Orlando et Rinaldo : ils donnent l'alarme. Les deux armées s'affrontent, cette fois il n'y a que des morts. Tout devient calme quand Orlando fait battre la retraite. Orlando :
"et maintenant paladins de France, soldats, rentrons dans Paris, allons consoler le coeur de notre empereur Charlemagne, allons dire à tout le monde merci et bonsoir".
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2007-03-06
6-8 mars 2007 à 20h30 ' Maison des Cultures du Monde
Che Md Saupi bin Isa, Tok Dalang, montreur
Abdul Rahman bin Dollah, gendang anak
Che Wil bin Noh, serunai
Fauzi bin Jusoh, gong
Nik Par Nik Jid, geduk
Mohd Azizul bin Che Wil, kesi
Zarwi bin Mat Husain, canang
Muhammad bin Abdullah, gendang ibu, gedumbak
Le Wayang Kulit Siam
Le théâtre d'ombres du Kelantan, Wayang Kulit Siam, est l'une des formes théâtrales les plus anciennes de la Malaisie. On ne dispose pas de dates précises sur son introduction dans la péninsule malaise, encore moins de détails quant à ses origines exactes. Mais les influences des théâtres d'ombres thai et javanais semblent évidentes. Le Wayang Kulit Siam s'est imprégné d'influences religieuses, culturelles et artistiques diverses, il a pu évoluer localement pour devenir une forme spectaculaire reflétant une esthétique typiquement malaise. Bien qu'il soit destiné au divertissement, il joue néanmoins un rôle important dans les rituels, notamment pendant les cérémonies d'hommage aux maîtres. L'apprentissage assez complexe ne requiert pas moins de cinq ans de dévouement total. L'apprenti doit non seulement apprendre l'art de la manipulation, mais il doit aussi maîtriser le répertoire et la musique, être capable de fabriquer lui-même des ombres en peau, un cuir de chèvre très fin. Enfin, il doit pouvoir diriger des cérémonies de guérison ou d'exorcisme tout en assumant sa position comme un des membres importants de sa communauté.
Dans les villages du Kelantan, le castelet du théâtre d'ombres est une structure toute simple en forme de boîte construite sur pilotis à une hauteur du sol d'un mètre environ. Ce théâtre ou panggung représente l'univers. L'écran, ou kelir, souvent un simple drap blanc, est le symbole du monde avec les images des êtres qui le traversent d'un côté vers l'autre. La lampe (lampu, maintenant une ampoule électrique), est le symbole du soleil. Elle donne vie aux figurines. Traditionnellement, seul le dalang ou manipulateur peut allumer ou éteindre la lampe. Le pohon beringin est l'arbre de vie et représente les éléments, eau, terre, air, feu. C'est toujours cette ombre que le dalang manipule en premier, en ouverture de tout spectacle, comme le début de la vie dans l'univers. C'est cette même figurine qui clôt toute représentation. Le dalang raconte l'histoire tout en manipulant ses figurines contre l'écran et conduit l'orchestre généralement installé derrière lui.
Les histoires sont racontées en Pattani, un dialecte malais propre au Kelantan. L'art du montreur ne tient pas seulement à la finesse de la manipulation des figurines, mais aussi à sa capacité à improviser à partir du canevas des épisodes de la version malaise du Ramayana, Hikayat Maharaja Wana.
Les figurines sont montées sur une tige en bois. Pour les faire tenir alors qu'elles ne sont pas manipulées, cette tige est plantée dans un tronc de bananier, le batang pisang qui représente la terre. La musique est interprétée par un ensemble dans lequel les percussions dominent. Outre le hautbois serunai, les instruments sont le gendang, tambour biface frappé à mains nues, le gedumbak, tambour à une peau frappé à mains nues, le geduk, tambour frappé avec des baguettes, le canang, petit gong posé sur un cadre de bois ainsi que des kesi ou cymbales.
Le Kumpulan Wayang Kulit Anak Sri Baju Merah du village de Machang au Kelantan
Fondé par le Dalang Abdullah Ibrahim (plus connu sous le nom de Dollah Baju Merah), qui était reconnu pour la finesse et la subtilité de sa manipulation, ainsi que pour ses spectacles de Wayang provocants et « irrévérencieux », le Kumpulan Wayang Kulit Anak Sri Baju Merah est une des troupes les plus célèbres et les plus accomplies de la Malaisie. Elle est dirigée actuellement par deux des principaux disciples de Dollah Baju Merah, le dalang (montreur) Saupi bin Isa, ainsi que par le maître et musicien Abdul Rahman bin Dollah.
La troupe a donné des représentations toujours très acclamées dans tout le Kelantan devant un public varié, aux origines sociales diverses. La troupe est aussi impliquée dans le travail de Pusaka notamment en matière de transmission des savoirs aux nouvelles générations.
L'Enlèvement de Sita
Il s'agit de l'un des principaux épisodes du Ramayana dans sa version malaisekelantanaise, plus connue ici sous le titre Hikayat Maharaja Wana, ou l'Histoire du roi Wana. Cet épisode raconte l'enlèvement de la belle Sita Dewi (la Sita de l'épopée indienne) par le Maharaja Wana (ou Ravana) et les efforts de Seri Rama (Rama), de son frère Laksmana (Lakshmana) et de l'armée des singes conduite par Hanuman afin de la libérer des griffes du Roi démon Maharaja Wana et de son armée d'ogres sur l'île de Langkapuri. Cet épisode est l'un des plus traditionnels parmi les nombreux épisodes, généralement improvisés, du Wayang Kulit Siam du Kelantan. Il présente l'ensemble des principaux personnages classiques du Wayang Kulit et comprend des scènes de combats et des duels, des déclamations très stylisées et des chants traditionnels.
Durée de la représentation : 50 minutes
La Maison des Cultures du Monde remercie :
L'Ambassade de Malaisie en France et tout particulièrement Monsieur l'Ambassadeur Dato' S. Thanarajasingam
The Ministry of Culture, Arts and Heritage, Malaysia
Malaysia Airlines System
The Office of the Member of Parliament of Kota Bharu, Malaysia,
Datuk Mohd. Zaid Ibrahim
M. Eddin Khoo, directeur de Pusaka
Mme Pauline Fan, Pusaka
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2006-04-02
Cirque d'Hiver-Bouglione
dimanche 2 avril à 17h00
dimanche 2 avril à 20h30
lundi 3 avril à 20h30
mardi 4 avril à 20h30
mercredi 5 avril à 15h00
mercredi 5 avril à 20h30
jeudi 6 avril à 20h30
vendredi 7 avril à 20h30
samedi 8 avril à 17h00
samedi 8 avril à 20h30
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durée : 1 heure
Découvert par la Maison des Cultures du Monde qui lui faisait quitter pour la première fois le Viêt-nam en 1984, le mua roi nûoc est une forme d'expression millénaire, attestée dès l'an 1121 sur une stèle qui précise que ce spectacle avait atteint une telle perfection qu'il avait été jugé digne d'être présenté devant le roi. Né au cours de fêtes saisonnières ponctuant les cycles agricoles des paysans et des pêcheurs du Nord du Viêt-nam (région où l'eau, omniprésente, joue un rôle essentiel), ce spectacle populaire représente les travaux et les jeux de la vie villagoise.
Les marionnettes sur eau ne peuvent être classées dans aucune des catégories classiques (marionnettes à fils, à gaine ou à tige). Elles sont fixées sur des perches, qui peuvent être simples ou complexes. Les premières, destinées à déplacer les marionnettes, sont munies d'un gouvernail. Les deuxièmes sont reliées aux marionnettes par des tiges et des fils qui traversent le corps des poupées et qui sont actionnés par les doigts des manipulateurs. Manipulées à l'origine exclusivement par les paysans eux-mêmes qui, jalousement, gardaient leurs secrets en ne les transmettant qu'aux membres de leurs seules familles, les marionnettes ont failli disparaître. On raconte même que deux jeunes gens n'ont pas pu se marier parce que le garçon était le fils aîné du trùm (chef) de la troupe A, alors que la fille était membre de la troupe rivale B. En général, les poupées mesurent environ 40 centimètres, mais les grands poissons par exemple peuvent mesurer jusqu'à 1,15 mètres de long.
Ce n'est qu'il y a une trentaine d'années que les paysans ont accepté de former de jeunes artistes envoyés par le ministère de la culture. Il faut environ trois années de formation pour devenir un bon marionnettiste. Aujourd'hui, cet art continue d'être pratiqué, d'un côté, par des corporations de paysans dans les villages lors de divertissements populaires, et de l'autre, par des troupes professionnelles dans des théâtres en ville.
PROGRAMME
Introduction musicale
Beaucoup d'animation autour de l'étang du village qui se trouve sous vos yeux... Cet endroit d'habitude très calme est aujourd'hui rempli de sons de tambours, de gongs, de vièles à deux cordes, de flûtes traversières en bambou...
1. L'apparition des drapeaux
Quatre rangées de drapeaux jaillissent, tout secs, de l'eau et indiquent le début des festivités.
2. Chu Têu, le bouffon narrateur
Chu Têu, meneur de jeu et personnage indispensable au déroulement de la fête, prononce le discours d'ouverture.
3. Danse des dragons
Les dragons symbolisent le pouvoir, la force souveraine. Ils sortent de l'eau en crachant de l'eau et du feu.
4. Mener le buffle au pâturage
Un enfant jouant de la flûte sur le dos d'un buffle qu'il mène au pâturage est une image typique de la campagne vietnamienne ancienne.
5. Travaux des champs
Le labourage, les semailles, le repiquage des plants de riz, l'irrigation manuelle des rizières...
6. La pêche aux grenouilles
Un divertissement apprécié des paysans.
7. Pour élever les canards, il faut chasser le renard
Les canards sont élevés dans les étangs à la campagne. Lorsqu'un renard attaque l'élevage, celui-ci doit être chassé.
8. La pêche aux poissons
En attendant que le poisson morde à l'hameçon, le pêcheur fume sa pipe à eau. Soudain, un gros poisson s'agite au bout de la ligne et entraîne le pêcheur avec sa barque.
9. Retour triomphant
Un fils de paysan peut être admis à la Cour et traiter des affaires d'Etat après avoir passé de sévères concours nationaux. Le nouveau lauréat escorté d'un cortège revient triomphalement à son village natal, faisant honneur à sa famille et surtout à son épouse qui a travaillé patiemment pour lui permettre de poursuivre ses études.
10. Danse des lions
Cette danse traditionnelle est de toutes les fêtes villageoises.
11. Danse des phénix
Le phénix symbolise la fierté et la noblesse.
12. La légende de l'épée restituée
Un héros national a chassé les envahisseurs grâce à son épée magique qui lui avait été donnée par le génie Tortue, Roi des Eaux. Après la victoire, il se promène en barque et aperçoit le génie Tortue qui lui demande de lui restituer son épée. La tortue symbolise la longévité.
13. Jeux aquatiques d'enfants
Les enfants se livrent à leurs jeux aquatiques avec rires de joie et de naïveté.
14. La course des barques
Pendant la fête, on organise une course de pirogues. Les équipes des différents villages s'affrontent pour remporter la victoire.
15. Les licornes se disputent un ballon de soie
Jeu traditionnel. La licorne représente la force.
16. Danse des immortelles
17. Danse des quatre animaux divins
Long, Ly, Quy et Huong (dragon, licorne, tortue et phénix) représentent les quatre composantes fabuleuses de toute vie réussie.
Fin
Le Festival de l'Imaginaire tient à remercier l'Organisation Internationale de la Francophonie pour son soutien.
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2005-03-09
9-17 mars 2005
Dans le cadre du neuvième Festival de l'Imaginaire et sur l'initiative de Monsieur Chérif Khaznadar, directeur de la Maison des Cultures du Monde, trois troupes des arts vivants de Taïwan présenteront leurs meilleurs spectacles en ce printemps 2005 au public parisien, apportant ainsi leur contribution à l'enrichissement de notre imaginaire collectif.
En France, la Maison des Cultures du Monde a été la première institution, depuis sa création en 1982, à avoir remarqué la particularité de la multiple culture taïwanaise et à la présenter à son public. Taïwan est en effet une terre de métissage : à la culture des aborigènes, premiers habitants de l'île de Formose, s'est mêlée celle de l'immigration chinoise du XVIIe siècle qui a progressivement acquis sa spécificité taïwanaise et, enfin, celle des Hakka qui s'y installèrent également au XVIIe siècle mais qui ont préservé leurs propres traditions.
Les 3 troupes présentées reflètent parfaitement cette diversité.
La troupe de marionnettes de Liao Wen-Ho est non seulement représentative d'un art très populaire à Taïwan mais est aussi unique en son genre, avec ses marionnettes géantes et des effets spéciaux obtenus grâce aux nouvelles technologies.
Dans un tout autre registre, l'Ensemble Han Tang Yuefu, fleuron de la musique Nanguan et du Théâtre du Jardin des Poiriers, apporte une interprétation toute en finesse et en précision d'une célèbre pièce du répertoire classique.
La troupe de Bayin de Chung Yun-Hui, quant à elle, clame haut et fort l'authenticité de la musique Hakka.
La diversité culturelle est une notion, chère à la France, que nous partageons pleinement. Nous la défendons par des mesures concrètes en faveur des arts traditionnels ou des peuples minoritaires menacés d'extinction. Conscients qu'il y va de l'identité d'un peuple et des individus qui le composent, nous veillons constamment à ce que ces traditions puissent être perpétuées par des actions de recherche, de diffusion et de formation.
A ce titre, nous tenons à saluer la Maison des Cultures du Monde pour le travail exemplaire qu'elle a accompli dans ce domaine. Nous saluons également l'Académie des Sciences morales et politiques de l'Institut de France, avec laquelle nous travaillons au sein de la fondation culturelle franco-taïwanaise que nous avons fondé ensemble, afin de jeter des ponts entre nos cultures et de mieux préparer l'avenir de nos sociétés.
CHEN Chi-Nan, Ministre du Conseil National des Affaires Culturelles de Taïwan.
L'année 2005 marque le dixième anniversaire des relations culturelles et d'amitié entre le Conseil National des Affaires Culturelles de Taïwan et l'Académie des Sciences morales et politiques. C'est en effet en 1995 qu'ont été pris, entre nos deux institutions, les premiers contacts qui allaient conduire à la création, un an plus tard, de la Fondation culturelle franco-chinoise, devenue Fondation culturelle franco-taïwanaise en 2002.
La disponibilité de nos partenaires taïwanais pour faire mieux connaître les nombreuses facettes de leur riche culture, alliée à la curiosité intellectuelle qui anime les Académiciens, a trouvé, depuis lors, sa pleine expression dans l'attribution annuelle du Prix culturel franco-taïwanais.
Il nous est en effet apparu utile, voire indispensable, d'encourager et de récompenser ceux qui, individuellement ou collectivement, par leurs recherches et leur action, contribuent à faciliter et à intensifier les échanges intellectuels et artistiques entre Taïwan et la France, tant il est vrai que l'on ne peut estimer que ce que l'on connaît bien.
La moisson de lauréats, récoltée dans des champs variés - lexicologie, éducation, arts vivants, ethnosociologie, traduction - est de qualité. Sans doute apparaîtra-t-il judicieux dans un proche avenir d'étendre les compétences territoriales du jury de la Fondation culturelle franco-taïwanaise à d'autres pays européens, car la vitalité de la société et de la culture taïwanaise suscitent et méritent de susciter une curiosité qui dépasse les frontières françaises.
Respect de la tradition, audace innovatrice, syncrétisme culturel contemporain nourri d'une histoire culturellement stratifiée et recherche identitaire, tels sont à nos yeux les éléments qui, ensemble, donnent sa forme incomparable à la réalité taïwanaise. Puissent-ils inciter, par le truchement de la Fondation culturelle franco-taïwanaise, nombre de chercheurs et d'artistes à les explorer et à les faire connaître !
Pierre Messmer, Chancelier de l'Institut de France, de l'Académie française, membre de l'Académie des Sciences morales et politiques, ancien Premier Ministre.
Depuis sa création en 1982, la Maison des Cultures du Monde s'est attachée à faire connaître au public français l'immense diversité des formes culturelles de notre planète, et ce n'est pas par hasard si, dès cette année-là, Taïwan fut plus d'une fois à l'affiche de cette institution.
En effet, l'île de Taïwan est un de ces espaces où se trouvent concentrées, comme en un conservatoire, des cultures de diverses origines qui s'y sont rencontrées, mêlées, enrichies de leurs différences.
Aujourd'hui on peut y trouver - à côté des expressions culturelles des peuples aborigènes et de celles venues du continent - cette culture de la rencontre et du métissage qui devient l'une des composantes importantes de la diversité des cultures de Taïwan.
Le cycle spécial consacré à Taïwan que présente cette année la Maison des Cultures du Monde dans le cadre du neuvième Festival de l'Imaginaire ne dérogera pas à la règle puisqu'il pourra permettre au public de découvrir deux troupes qui ne s'étaient jamais présentées en France et une nouvelle création d'une troupe internationalement célèbre.
Depuis 1982, la très grande majorité des formes culturelles traditionnelles de Taïwan a été présentée à Paris. Le temps est venu d'explorer toutes les expressions qui naissent de la prodigieuse créativité de ses artistes.
Chérif Khaznadar, Directeur de la Maison des Cultures du Monde
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2005-03-09
9-13 mars 2005
A propos des marionnettes à gaine
A Taïwan, le théâtre de marionnettes à gaine est appelé "Théâtre de poche de toile". Plusieurs hypothèses ont été émises sur l'origine de cette dénomination. L'une d'elle serait que les premiers marionnettistes portaient l'intégralité de leur théâtre, marionnettes, accessoires et décors dans un grand sac de toile lors de leurs déplacements. Selon une autre version, cette origine serait métonymique, les marionnettes elles-mêmes étant constituées d'une poche de toile surmontée d'une tête. Une troisième hypothèse, enfin, y voit une référence au drap que le marionnettiste tendait jadis autour de lui pour se dérober aux regards du public. Quoiqu'il en soit réellement, ces trois hypothèses ont le mérite de nous éclairer sur le passé du théâtre de marionnettes à gaine.
A l'origine, le spectacle était une offrande aux dieux, raison pour laquelle il se déroulait le plus souvent sur le parvis d'un temple. Chaque spectacle était précédé d'un "prélude des dieux" mettant en scène une ou plusieurs divinités. Ce n'est qu'après que les divinités avaient chassé les mauvais esprits et apporté leur caution au spectacle que celui-ci pouvait commencer. L'histoire mise en scène évoquait soit un épisode de la vie des divinités du temple, soit un épisode tiré d'un grand roman historique. En des temps où l'éducation était encore un privilège réservé à l'élite de la société, le théâtre de marionnettes jouait un rôle pédagogique indéniable en diffusant un savoir historique, aussi sommaire soit-il et en prônant des valeurs "positives" telles que la loyauté, la bonté et le respect des aînés.
Le maniement des marionnettes est délicat et requiert une grande dextérité. Les dialogues en taïwanais constituent une mémoire vivante des modes de pensée, proverbes, dictons et expressions populaires propres à ce dialecte. La musique d'accompagnement est du style Beiguan, dont l'instrumentarium de base est constitué de percussions et d'un hautbois particulier appelé suona.
Plébiscitée par le public taïwanais, la troupe de marionnettes à gaine Liao Wen-Ho s'est produite dans toute l'île de Formose sur l'invitation du Conseil National des Affaires Culturelles, des centres ou services culturels de différentes municipalités, ainsi que de la Maison de l'éducation populaire. Ses spectacles mobilisent à chaque fois un nombre impressionnant de spectateurs, rappelant le succès remporté par les marionnettes à gaine pendant l'âge d'or des années 1950-70.
Liao Wen-Ho, fondateur et directeur de la troupe, produit au moins une nouvelle création par an et prête une attention particulière à la qualité artistique de ses spectacles. Ses efforts ont été récompensés par le prix international de la Transmission du patrimoine culturel et artistique en 1999, le prix du développement culturel du Conseil National des Affaires Culturelles en 2000 et le prix de la Culture de la ville de Yunlin en 2003. Il a également rçu un prix pour la qualité de ses actions en 2000.
En 2000, la troupe de marionnettes à gaine Liao Wen-Ho a représenté Taïwan au Festival international de marionnettes de Séoul en Corée du Sud. Son spectacle fut l'un des plus applaudis par le public, qui se pressat autour de Liao Wen-Ho après chaque représentation pour obtenir des autographes. A la suite de ce succès retentissant en Corée du Sud, la troupe a enchaîné des tournées aux Etats-Unis, au Canada et à Macao, soulevant une vague d'enthousiasme à chaque passage.
Par sa virtuosité et son souci du détail, Liao Wen-Ho a conquis un large public allant de 7 à 77 ans. Il est en effet, capable d'imiter à lui seul la voix d'une vingtaine de personnages, tout en maîtrisant à la perfection le maniement des marionnettes. Inventif, il a créé le décor le plus long et la marionnette la plus grande de Taïwan, afin d'offrir une meilleure vue aux spectateurs éloignés de la scène, attention très appréciable quand on sait que les spectacles de plein air attirent souvent des milliers de spectateurs.
Le programme.
I. Le singe Sun Wu-Kong et la Grotte de Feu - un épisode du roman Voyage vers l'Occident.
Sur ordre de l'empereur, le bonze Hsuan-Tsang se rend au pays de Bouddha pour en rapporter les textes sacrés. Pour affronter toutes les épreuves qu'il aura à traverser au cours de ce long périple, il doit d'abord s'adjoindre quatre compagnons, tous dotés de pouvoirs surnaturels mais d'un caractère indomptable. Il y a parmi eux le singe malicieux Sun Wu-Kong, le cochon glouton Zhu Ba-Jie, l'irascible démon Sha Wu-Jing, et le cheval né de la dépouille d'un monstrueux dragon blanc que Sun Wu-Kong a vaincu.
Sur la Grotte de Feu règne un démon appelé l'Enfant Rouge, fils du Roi Tauricéphale et de la Princesse à l'Eventail de fer. Par une ruse très habile, il réussit à enlever le bonze Hsuan-Tsang, que l'on ne parvient à libérer que grâce à l'intervention de la déesse Guanyin et avec beaucoup de peine.
II. Le Héros vaillant
L'histoire commence avec un voyou dénommé Panthère noire. Un jour, alors que panthère noire fait la manche dans un jardin, il croise le riche Monsieur Fang qui pris de pitié l'accueille chez lui. Or, Panthère noire était d'une nature dépravée: Après avoir violé une servante, il s'enfuit chez un brigand appelé Tigre de tonnerre. Il aide ensuite ce dernier à monter un trafic de drogues tout en terrorisant les paysans.
Excédé par ces méfaits un héros répondant au nom de Nuage blanc décide de libérer les paysans de ce fléau. Il se bat d'abord avec un aigle puissant, puis avec la soeur de Tigre de tonnerre, qui avait en vain tenté de le séduire, et enfin, avec six monstres férus d'arts martiaux. Il sort heureusement victorieux de tous ces combats.
C'est alors que Tigre de tonnerre engage un tueur pour assassiner Nuage blanc. Intervenant à la dernière minute, le Héros vaillant le sauve et tue l'assaillant et le neveu de ce dernier. Refusant l'offre alléchante de Tigre de tonnerre qui tente de la soudoyer, le Héros vaillant décime toute la bande de brigands et rend enfin la paix aux paysans.
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2003-03-14
14-16 mars 2003
L'île de Sado, au nord du Japon a, au cours des siècles, accueilli les nobles, les intellectuels et les artistes exilés de la cour et des autres îles du Japon (dont Zeami, le créateur du nô). Ceci explique l'incroyable foisonnement de formes artistiques différentes qui coexistent à Sado. Les marionnettes bunya ningyo en sont un exemple. Il y a actuellement onze troupes de bunya ningyo sur l'île de Sado.
Les bunya ningyo, premières marionnettes "portées", remontent au XVIe siècle. Ce sont les descendantes des boules de chiffons emmanchées ou de têtes que le moine frappait sur le sol en scandant les versets sacrés du bouddhisme. Ces moines itinérants, souvent aveugles, chantaient et étaient accompagnés d'un musicien. Cette expression originelle se nommait samgaku. Les marionnettes se répandant dans diverses provinces prirent une forme très raffinée dans la région de Kyoto et devinrent au XVIIe siècle le bunraku.
Les marionnettes, hautes de 80 cm, possèdent une tête finement sculptée et peinte, et portent une robe. Sous le costume, les deux bras amovibles aux mains plates s'enfilent dans les manches des divers kimonos superposés. La tête est montée sur une tige tenue par la main gauche du manipulateur, qui saisit aussi le bras gauche de la marionnette. La main droite du manipulateur est glissée dans la manche droite de la marionnette et exécute les différents mouvements. Le répertoire est tiré des épopées japonaises. Il met en scène des aventures de bandits au grand coeur ou de criminels qui se transforment en saints au contact d'un moine ou d'une femme pieuse, ou comme ici des histoires d'amour contrariées par le sort.
Le Bunya Ningyo a été classé patrimoine culturel immatériel par le gouvernement japonais.
LES ARTISTES
Takeshi Nishihashi est le fondateur et chef de la troupe Saruhachi-za. Il est le manipulateur des deux personnages principaux. Né en 1948, il fait des études théâtrales à l'Université de Waseda et devient en 1970, un marionnettiste de bunraku sous la direction de Minosuke Yoshida et prend pour nom de scène Minoshi Yoshida. Il passe régulièrement au Théâtre National de Tokyo, au Asahiza d'Osaka, dans de nombreuses villes de provinces du Japon et entre p rend deux t o u rnées à travers l'Europe. Mais en 1979, il quitte le Théâtre National de Bunraku, qui présente, aux yeux de tout marionnettiste japonais, la plus belle consécration professionnelle. Il s'éloigne donc de la voie royale afin de se lancer pleinement dans une dimension artistique en concordance avec ses véritables aspirations et déménage dans l'île de Sado où il devient membre d'Osaki-za, une troupe de bunya. Il partage son temps entre le théâtre et la fabrication de figurines en argile dans le seul but de faire vivre son art. En 1995, il monte sa propre troupe, la Saruhachi-za (Saruhachi est le nom du petit hameau niché sur les hauteurs d'une montagne de l'île où il s'est installé) avec comme objectifs de transmettre la tradition du bunya, mais aussi d'explorer, avec des conteurs, des musiciens et d'autres artistes, les moyens d'enrichissement de cette tradition. En 1998, la Saruhachi-za est invitée par la Fondation culturelle Kodo pour accompagner les percussionnistes de Kodo durant leur tournée au Royaume Uni et ils donnent une représentation au Festival d'Edimbourg et à Londres.
Le Canadien Johnny Wales est l'un des rares marionnettistes occidentaux à faire partie d'une troupe japonaise. Il apprit la manipulation des bunya et la fabrication des marionnettes à Sado dans les années 70 auprès du maître Moritaro Hamada que la Maison des Cultures du Monde avait accueilli en 1983. Depuis, il défend cet art en le pratiquant à Sado et en animant des ateliers à l'éranger.
Chieko Wales, l'épouse de Johnny Wales, est manipulatrice et habilleuse de marionnettes. Née à Tokyo, elle y fait des études d'histoire. Après avoir travaillé pendant quatre ans pour une grande société, elle s'installe avec son mari à Sado où pendant deux ans elle apprend, en plus de l'art de la manipulation, la technique du tissage traditionnel.
Ai Hirasawa est née à Tokyo en 1978. Enfant, elle visitait souvent sa grandmère à Sado. Après avoir terminé ses études de stylisme à Tokyo, son intérêt grandissant pour la culture et les traditions de Sado la poussent à s'y installer. Sa rencontre avec les marionnettes bunya et Takeshi Nishihashi l'incitent à rejoindre la Saruhachi-za. Ai Hirasawa qui étudie toujours l'art de la manipulation rêve de pouvoir combiner son amour de la vie à l'ancienne sur l'île de Sado avec ses études de stylisme et d'autres centres d'intérêts plus contemporains.
Bunsei Shirai est né à Sado en 1938. Son oncle était le célèbre marionnettiste Gohei Kuzuhara (1894-1984) directeur d'une troupe de bunya à Sado, Osakiza. Bunsei Shirai a commencé comme marionnettiste en 1971, puis a décidé en 1974 de devenir tayu ou chanteur-narrateur. Depuis 1992, Bunsei Shirai accompagne régulièrement trois troupes de bunya ningyo de l'île de Sado : Osaki-za, Yamato-za et Saruhachi-za.
LA PIÈCE, SHINODA-ZUMA
Il y a environ mille ans vivait à Kyoto un homme appelé Abe no Seimei. C'était un célèbre astrologue auprès de la cour impériale. Il avait de tels dons de prescience et de voyance que plusieurs histoires circulaient sur son compte, tentant d'expliquer les causes de son pouvoir extraordinaire.
Cette version de la pièce écrite en 1674 décrit comment Abe no Semei était en fait l'enfant d'un homme et d'une renarde. Quelques années avant le début de l'histoire, Abe no Yasuna sauve la vie d'une renarde blanche poursuivie par des chasseurs. Blessé, Yasuna est ramené chez lui et soigné par une superbe jeune fille, Kuzunoha, qui devient son épouse. Mais Kuzunoha n'est autre que la renarde métamorphosée en femme.
Shinoda-zuma
Acte 1 La pièce commence avec l'apparition de Yasuna et de Kuzunoha, de Doji, leur fils âgé de cinq ans, et de sa gouvernante. Ils vivent heureux, retirés dans une maison en pleine campagne. Un jour d'automne, Yasuna va comme de coutume travailler dans ses champs. Pendant que l'enfant dort, sa mère travaille à son métier à tisser. Elle jette un regard sur les chrysanthèmes, et s'oublie à tel point dans ce magnifique spectacle qu'elle reprend sa forme originelle, celle de la renarde sauvée jadis par Yasuna.
Doji s'éveille alors et, horrifié, pousse des cris. Avant que la gouvernante n'accourre, Kuzunoha a repris sa forme humaine et elle lui demande de calmer l'enfant.
Maintenant que son secret a été révélé, elle doit reprendre sa forme animale et retourner vivre en forêt. Après avoir allaité l'enfant une dernière fois, elle écrit une lettre à son mari dans laquelle elle dit sa souffrance d'avoir à les quitter. Puis elle calligraphie un poème sur un paravent : «Si vous pensez à moi avec tendresse, venez me voir. Je serai dans la forêt de Shinoda, sous les feuilles amères de la vigne de kudzu.» Enfin, elle s'en va.
Doji se réveille et cherche frénétiquement sa mère. La gouvernante entre, rejointe par Yasuna qui revient des champs et trouve la maisonnée en proie à la désolation. Il lit le poème et la lettre et découvre la terrible vérité sur la nature de son épouse. Il décide de partir en forêt pour ramener Kuzunoha. Et comme l'enfant insiste pour l'accompagner, il l'emmène avec lui.
Acte 2
Dans la forêt, le Chasseur a tendu un piège et la renarde manque de justesse d'être attrapée. Elle parvient cependant à le leurrer et à s'échapper. Yasuna et Doji s'enfoncent dans la forêt à sa recherche, mais en vain. De désespoir, Yasuna veut se suicider et Doji manifeste le désir de mourir avec lui. Au moment où Yasuna brandit son épée pour tuer l'enfant, la renarde intervient et se change une dernière fois en femme. Pour assurer à Doji l'avenir glorieux de voyant qui sera le sien, elle lui fait deux cadeaux précieux et convainct Yasuna de se résigner à l'inévitable séparation. Yasuna part donc, emmenant avec lui un Doji inconsolable. Kuzunoha, en pleurs, les regarde s'éloigner avant de disparaître pour toujours, redevenue renarde, dans la forêt de Shinoda.
Remerciements à Madame Anne Appathurai et à Madame Claire de Bréban.
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2001-02-27
27-28 février, Vitré
2-3 mars, Paris
Le Kwagh Hir des Tiv du Nigéria, où les choses ne sont pas ce qu'elles sont'
Marionnettes de bois peintes de couleurs vives et jaillies d'une caisse qui court toute seule sur la place du village, masques effrayants entourés de gueules de serpents, de crocs de monstres, aux sons d'un ensemble de tambours, de grandes cloches de fer battues avec énergie et de chants à pleine gorge, les éléments qui constituent le Kwagh Hir stupéfient chaque fois les spectateurs nigérians par leur force et leur qualité d'invention qui, à la fois, les terrifient et les font rire.
Le Kwagh Hir ou Kwagh Alom ("la chose du lièvre", le lièvre en Afrique comme ailleurs devient le substitut de l'homme), forme dramatique du peuple Tiv, reste encore très vivant dans l'Etat de Benue, au sud de la rivière Benue qui établit une ligne de partage entre le nord (sahélien) et le sud (forestier) du Nigéria.
Les Tiv, au nombre approximatif de deux millions de locuteurs, forment la plus importante des minorités du Nigéria, (les peuples majoritaires étant les Hausa, les Yoruba, les Ibo, les Calabar, etc.).
Autrefois chasseurs, ils seraient venus du Nord et auraient été poussés par d'autres peuples vers le centre du pays. Actuellement agriculteurs, ils se regroupent dans des villages isolés autour de Makurdi et de Gboko. Voici une dizaine d'années encore, chaque village possédait sa troupe de Kwagh Hir. Maintenant, seulement un village sur quatre pratique cette forme d'expression spectaculaire.
Le Kwagh Hir évolue en permanence et certains villages distants de cinquante kilomètres pratiquent des Kwagh Hir à l'aspect extérieur différent. Le Kwagh Hir, lié à la vie sociale, possède encore un fort signifiant symbolique.
Constitué par une succession de petites scènes dansées, masquées, ou interprétées grâce à des marionnettes sur caisse (uniques au monde), le Kwagh Hir joue sur l'effet de surprise des villageois, sur la virulence de la satire sociale mais aussi sur la nécessité d'informer, d'éduquer et sur la mise en garde des apparences.
Chaque chose quotidienne, chaque élément de la réalité, chaque animal et chaque être humain cache un esprit qui peut se révéler bienfaiteur ou destructeur selon la situation ou le jugement qu'il va établir à propos d'une créature vivante. Ainsi, selon son bon plaisir, il peut transformer un rat en marmite, un serpent en puits, un chasseur en singe. Toutes les visions sont trompeuses : les oiseaux deviennent des sorcières, les babouins des paysans mal dégrossis et le lièvre ' alom ' l'homme qui triomphe du mauvais sort parce qu'il se montre rusé.
Ainsi un cortège important de personnages divers va danser sur la place des villages en présentant au cours d'un curieux "défilé de mannequins de la métamorphose" des figures à l'aspect extravagant. Taillées dans le bois, peintes aux pigments industriels, vêtues de matériaux de récupération ' sac d'ignames en plastique, effilochage de bandes-audio, filaments de câbles pour engins de levage ' ces figures montrent à la fois la qualité d'invention des Tiv qui, dans leurs villages aux cases rondes et aux toits de paille, fabriquent des démons, des clowns et des fétiches, mais aussi la richesse de la création de ces sculpteurs-forgerons et tisserands de rien qui sont de véritables artistes.
Les danseurs ' tous des hommes, même lorsqu'ils interprètent des rôles féminins ' se livrent à une danse aux pas préstructurés, guidés par un groupe de musiciens. Celui-ci se compose d'un ensemble de percussions (tambours mâles à deux peaux nom baude, tambours femelles ngo baude, cloche de fer kwin, tambour à lèvres iliré), d'un hautbois guida et d'un choeur qui, sous la direction d'un maître de chant agitant avec énergie un gros hochet, exécute des chants responsoriaux.
Les musiciens se placent sur un côté de la place du village et s'asseyent sur des pierres ou prennent place sur une petite estrade rudimentaire. L'aire de jeu utilisée par les danseurs et les marionnettistes doit être vaste et dégagée car des improvisations ainsi que des interactions avec les spectateurs peuvent avoir lieu.
En seize ans le Kwagh Hir, (invité à la Maison des Cultures du Monde en 1984) a modifié considérablement sa forme et son contenu. La version des années 80, orientée à la fois vers l'apologie de la fertilité (importance accordée à la danse ondulante des femmes du choeur) était aussi un avertissement de la sévérité des actes de jugements officiels (scène d'exécution capitale par fusillade d'un condamné à l'aide de marionnettes). Le spectacle actuel s'oriente beaucoup plus vers le substrat surnaturel (monstres, sorcières, animaux mythiques) bien que les éléments de constat social restent encore apparents grâce à la présence des marionnettes.
Dans les villages Tiv, privés pour la plupart d'électricité et donc de télévision, le Kwagh Hir reste le moyen de communication privilégié et constitue encore une sorte de sauvegarde de l'identité Tiv. Les sculpteurs, les peintres, les manipulateurs, les danseurs et les musiciens font partie d'un groupe de plusieurs classes d'âge en perpétuelle formation. Sans constituer véritablement des confréries (j'ignore encore s'il existait à l'origine un processus d'initiation), les différents membres du groupe développent entre eux des systèmes de solidarité.
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2000-09-27
27-29 septembre 2000.
Avec le Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes de Charleville Mézières et le Théâtre de la Marionnette à Paris.
Le théâtre de marionnettes birman ou yok taï thabin naquit au XVe siècle et atteignit son apogée au XVIIIe siècle. La célébrité des marionnettistes était alors plus grande que celle des acteurs de théâtre et il y eut même des ministres nommés pour veiller sur le théâtre de marionnettes. De nos jours, le théâtre traditionnel de marionnettes est en train de disparaître. Toutefois, de récentes représentations données pour les touristes ont ressuscité l'intérêt des Birmans pour cette forme artistique. Une compagnie est traditionnellement composée de marionnettistes de chanteurs et de musiciens. Les artistes font le tour du pays avec leurs marionnettes à fils et un simple castelet de bambou. Les manipulateurs se tiennent debout derrière un rideau, seule la partie supérieure de leur corps est visible. Deux chanteurs se tiennent près des manipulateurs, ils chantent ou déclament les textes des personnages les plus complexes, car le marionnettiste doit se concentrer sur la manipulation. Les chanteurs sont aussi importants que les marionnettistes. Ils doivent être capables de chanter dans les différents styles, déclamer les dialogues avec fluidité et faire partager leur connaissance de la poésie et de la littérature. Ainsi, marionnettiste, marionnette et chanteur ne font qu'un. Moraliste, le théâtre de marionnettes birman exalte les vertus telles que l'honnêteté et la sagesse.
Les marionnettes sont sculptées dans le bois et mesurent de 45 à 70 cm de hauteur; La plupart sont commandées par 11 fils reliés à une petite croix en bois. Certaines ont en plus des fils qui articulent les yeux, les paupières et la bouche.
La troupe a recours à certains éléments de décors, tels qu'un trône ou une pagode. Des toiles de fond peintes représentent la scène où se déroule l'action: un bois ou un palais. Les personnages sont des êtres mythiques (le Médium et Zawgyi l'alchimiste), des animaux (le Cheval blanc, le serpent Naga et l'oiseau Garuda) et des humains (le roi et ses ministres, le prince et la princesse avec leurs pages et leurs bouffons).
La représentation nécessite au moins 28 marionnettes: la première partie traite des origines du monde, de la création des hommes et des animaux; et de la fondation du royaume. Elle est suivie par une des jataka, les histoires des vies antérieures de Bouddha.
Première partie. Le spectacle commence avec l'apparition de Thagyarmin, le roi des esprits nat, et le medium qui paie tribut aux esprits, en offrant une noix de coco et des bananes. Ensuite plusieurs personnages entrent en scène pour représenter la création du monde: le Cheval blanc, le Singe et les deux Démons, Zawgyi le magicien et Garuda (le mythique Aigle-Soleil) qui se bat contre Naga (le serpent mythique).
L'alchimiste Zawgyi a une barbe qui rappelle celle d'un nain de jardin; vêtu d'une veste marron-rougeâtre et d'un chapeau, il tient une baguette magique. Ainsi affublé, il vagabonde à travers bois et montagnes, faisant des cabrioles et chantant, tout en recherchant des plantes médicinales et les fruits de l'arbre à souhaits qu'il transforme magiquement en belles filles. Pendant ses pérégrinations la recherche de la pierre philosophale, il chante la beauté de la nature. Il brasse des potions magiques et mène des rituels secrets dans les bois. Au-dessus de tout, il s'efforce de parvenir à un état dans lequel son corps n'étant plus sujet aux lois de la nature, il sera capable de s'élancer au travers des quatre éléments et de vivre un million d'années. Zwagyi le magicien réalise sur scène les rêves de son public.
Après le chaos de la création, l'ordre est représenté par la fondation du royaume avec des personnages comme le roi et sa femme, les ministres, un page et deux bouffons. Finalement, le prince et la princesse se déclarent un amour éternel. Ils sont joliment habillés et ces deux marionnettes sculptées appartiennent souvent au manipulateur. Leur danse est l'apogée de la représentation.
Seconde partie. Une jataka est jouée : une des 547 histoires des vies antérieures de Bouddha. La dernière dizaine de jataka est la plus populaire; chacune symbolise une vertu spécifique telle que l'honnêteté, la sagesse, l'amour filial, etc. Ces histoires ont pour vedettes des rois, des ermites et des hommes sages qui passent par toutes sortes d'aventures. La fin est toujours heureuse: la vertu est récompensée et le mal est puni. Si les gens meurent, ils doivent être ressuscités par les dieux..
L'orchestre renforce les moments dramatiques de la représentation. Il est constitué de sept musiciens installés à l'avant-scène. Ils entament la représentation par une sorte d'ouverture. Les coups de gong, les claquements de cymbales et le rythme rapide des tambours offrent une interprétation musicale de la destruction et de la re-création de la terre par les trois éléments: le feu, le vent et l'eau. L'instrument conducteur est un jeu de tambours accordés, accrochés sur un cadre circulaire. Un gong, suspendu dans un trou du cadre circulaire des tambours marque les temps principaux. Un ou deux hautbois et deux petits gongs jouent la mélodie. La percussion est assurée par un grand tambour fixé sur un cadre représentant un animal mythique, un grand tambour horizontal, un jeu de tambours accordés plus petits, des cymbales, de grandes claquettes de bambou et un tambour à fente.
Elisabeth den Otter
PROGRAMME
a. Prélude à l'orchestre zabu nyunt pendant l'entrée du public
b. Pièce pour harpe saung
c. Danse des bougies en offrande à Bouddha.
Première partie: la création du monde
1. Hommage aux esprits nat. La représentation proprement dite commence par trois coups de gong et de cymbales et la danse de la medium nat-ka-daw qui rend hommage aux esprits-gardiens du lieu, les nat, et leur fait une offrande de noix de coco et de bananes.
2. Scène himalayenne. Selon la cosmogonie bouddhique, la première constellation apparue dans le ciel est une galaxie en forme de tête de cheval. Le cheval est donc le premier personnage à apparaître sur la scène. Vient ensuite le singe qui, après avoir dansé, est mis en fuite par des ogres.
3. L'alchimiste Zawgyi. Selon une croyance populaire, Zawgyi est un demi-dieu qui erre à travers forêts et montagnes en quête de plantes médicinales. IL porte une baguette magique dont il se sert pour broyer les plantes sur une pierre. Apparaissent ensuite l'oiseau mythique Garuda et le serpent Naga qui se mettent à combattre.
4. Interlude.
-Les pages royaux tha-nge-daw et la danse des villageois. Les pages assuraient le service dans le palais, portaient les messages et marchaient en tête des processions royales. Leur danse est suivie d'une danse comique des villageois U Shwe Yoe et Daw Moe
-Danse du cheval, porteur des messages royaux
-Joute chorégraphique entre une poupée et une danseuse. Selon la tradition birmane, l'invention du théâtre de marionnettes a précédé celle de la danse et cette dernière se serait largement inspirée du premier dans ses mouvements.
5. La fondation du royaume: duo du prince et de la princesse. Cette scène est précédée par un dialogue entre deux ministres qui introduisent la jataka qui sera jouée plus tard. Le duo du prince et de la princesse, considéré comme un des grands classiques du théâtre de marionnettes birman, est généralement exécuté par les maîtres-marionnettistes en raison de sa grande difficulté technique. Le prince danse, cherchant à impressionner sa bien-aimée, tandis que deux clowns les accompagnent en faisant des plaisanteries.
Deuxième partie: jataka "Widura-pannita".
Cette jataka consacrée à l'une des dernières réincarnations de Bouddha sous les traits du sage Widura-Pannita est l'une des plus célèbres.
La reine du Naga désirait écouter l'enseignement de Widura.Se faisant passer pour malade, elle déclara à son époux qu'elle avait besoin du coeur de Widura. Choqué, le roi accéda néanmoins à sa demande. Il envoie sa fille, la princesse à la recherche d'un mari qui pourrait venir en aide à ses parents.
Tableau 1: la princesse, assise sur une balancelle, chante un chant de séduction. Passant par là, l'ogre Punnaka voit la princesse et la demande en mariage. En échange, la princesse exige qu'il lui apporte le coeur de Widura.
Tableau 2: Dans le royaume où Widura exerce ses fonctions de ministre, le roi tient audience. Transformé en jeune homme, Punnaka entre et propose au roi une partie de dés. Usant de ses pouvoirs magiques, il le bat et exige que celui-ci lui remette Widura. Entrée de Widura auquel le roi lui apprend la nouvelle. Widura et Punnaka sortent
Tableau 3: Punnaka emporte Widura attaché à la queue de son cheval. Il espère ainsi le faire mourir, mais Widura résiste. Punnaka se prépare alors à la tuer et lui arracher le coeur. Mais dans sa sagesse, Widura lui révèle que les véritables intentions de la reine du Naga étaient de recevoir son enseignement et non son coeur. Punnaka se laisse convaincre. (Et en effet, Widura sera conduit auprès de la reine à laquelle il délivrera son enseignement, mais cette scène n'est pas représentée).
Tableau 4: Le souverain de Widura raconte qu'il a vu en songe Widura revenir. Et effectivement, Widura revient. Danse finale.
La troupe de marionnettes de Mandalay fondée par Naing Yee Mar comprend quatorze artistes: manipulateurs, chanteurs et musiciens placés sous la conduite du maître marionnettiste U Pan Aye qui en 1995, se vit décerner le premier prix au Concours National des Arts de la Scène du Myanmar
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2000-06-07
7-11 juin 2000
L'histoire
Le dit du Genji, dont le thème reste d'actualité aujourd'hui et qui a été lu dans le monde entier, a été écrit il y a plus de mille ans par une veuve, mère de famille, qui travaillait au palais. C'est une très longue histoire dans laquelle interviennent plus de mille personnages.
Les premiers lecteurs passionnés de ce livre étaient les autorités de l'époque, notamment 1'Empereur Ichijo. Shikibu Murasaki, l'auteur de ce livre qui ne compte pas moins de 54 livres différents, nous laisse une oeuvre mystérieuse. L'un des livres intitulé Kumogakure n'a pas été écrit. Shikibu Murasaki laisse volontairement quelques pages blanches. Le livre précédent se termine simplement par une confession de Hikaru Genji, le héros de l'histoire, à Akashi no Kimi (Dame d'Akashi). Hikaru Genji ferme les yeux de sa femme, Murasaki no Ue (Dame Murasaki), et avoue son pressentiment à Akashi no Kimi: "Ma vie sera bientôt terminée". Nous ne trouvons pas facilement des mots présentés ainsi avec tant de résonances et le lecteur peut laisser libre cours à son imagination.
Dans Le dit du Genji Kumogakure, Hiroshi Hori remplit les pages laissées blanches et décrit les sentiments de Dame d'Akashi.
Dame d'Akashi est la fille d'un gouverneur, d'une classe sociale assez basse. Elle habite au bord de la mer d'Akashi que l'on trouve en descendant loin au sud de Kyoto. Elle est discrète et modeste, mais son père nourrit l'espoir de la marier à un homme riche de la ville.
A cette époque-là, Genji avait été envoyé à Akashi dans la région de Suma parce qu'on avait découvert qu'il avait une liaison adultère avec Oborozukiyo no Kimi (Dame Oborozukiyo), femme destinée à l'Empereur. Là, Genji rencontre Dame d'Akashi. Après son séjour à Suma, Hikaru Genji rentre chez lui et Dame d'Akashi, restée seule, met au monde une fille.
Genji appelle Dame d'Akashi et sa fille auprès de lui. A peine arrivée, la jeune femme rencontre Dame Murasaki, la femme de Genji, et ses nombreuses maîtresses. Toutes ces femmes sont des princesses de toute beauté. Souhaitant que sa fille devienne un jour la femme de l'Empereur et craignant que la classe sociale de la dame d'Akashi ne soit un obstacle à ce mariage, Genji confie sa fille à Dame Murasaki et lui demande de l'élever. Dame d'Akashi souffre donc longtemps. En compensation de tous ces sacrifices, elle reçoit l'assurance qu'elle passera le reste de sa vie dans le luxe, ce qui est inimaginable pour son propre niveau social.
Stricte et raisonnable, Dame d'Akashi vit modestement, comptant seulement sur Genji.
Dame Murasaki est morte. "A l'avenir, il n'y aura que des jours tranquilles, mais satisfaisants'" Mais ce rêve est éphémère. Genji meurt, lui aussi, en laissant son kimono comme souvenir et ses poèmes d'adieu.
Le rideau du spectacle se lève à ce moment-là.
Au printemps, sous les cerisiers en fleurs, en regardant le cortège funèbre de Genji, Dame d'Akashi se souvient de sa rencontre avec Genji, de la séparation de sa fille et de la présence des femmes de Genji. Une branche de cerisier lui rappelle celle que Genji lui avait envoyée, ornée de poèmes d'amour. Les beaux jours d'Akashi, de son pays natal avec Genji lui reviennent à la mémoire. A ce moment-là, pour la première fois, elle découvre l'amour qu'elle éprouvait pour Genji, elle ne l'avait jamais senti si fort, - Je voudrais le voir encore une fois -
Il existe un arc que l'on appelle l'arc d'Azusa. Il peut faire apparaître les âmes des morts.
Dame d'Akashi décide d'appeler l'âme de Genji. Mais il y a une règle à respecter. Il ne faut pas lâcher la flèche quand le mort apparaît et il faut la casser avec lui. Mais au moment où l'âme de Genji apparaît devant les yeux de Dame d'Akashi, celle-ci, effrayée, laisse tomber la flèche. Les fleurs de cerisier se dispersent brutalement comme si elles étaient des fleurs de l'enfer. Dame d'Akashi comprend finalement quelle était la règle d'or que l'on ne doit jamais violer. La réponse était dans les poèmes d'adieu de Genji.
Pleurant et pleurant
l'oie pourtant est repartie
ce monde éphémère
n'est immuable en effet
en nul lieu ni éterne1
Comme l'oie qui rentre dans son pays au nord,
je suis partie de chez toi hier soir.
Ephémère et bref, ce monde n'est pas éternel.
Un poème de Dame d'Akashi va vers le ciel, lui faisant écho.
Depuis que les eaux
sont taries de la rizière
où l'oie se posa
des fleurs qui s'y miraient
le reflet même a disparu
Comme l'on ne voit plus les ombres de
fleurs, reflétées dans l'eau de la rizière
où l'oie se posa, depuis que les eaux sont
taries, je ne vous vois plus du tout.
Le dit du Genji est, en général, perçue par le lecteur comme un grand roman d'amour. Mais l'auteur, Shikibu Murasaki, introduit dans l'histoire, un grand thème qui est "sauvetage d'âme et renaissance". Pour créer ce spectacle j'ai pensé à ce thème fondamental et j'y ai pensé aussi pour choisir la musique.
Maiko Hori
*Les poèmes originaux de Shikibu Murasaki ont été traduits du japonais par René Sieffert dans sa traduction complète du Dit du Genji.
PROFIL - Hiroshi Hori -
Créateur de poupées, marionnettiste, dessinateur de kimonos (costumes traditionnels japonais) et de costumes de théâtre.
Né le 1er janvier 1958, Hiroshi Hori a obtenu un diplôme en économie à l'université d'Aoyama Gakuin.
Lauréat du concours national de la création de poupées, il a aussi reçu, en 1987, le prix de la culture des kimonos de l'association du costume national et le prix de la culture de la ville de Tokyo en 1991.
Passionné dès son enfance par la création de poupées, Hori s'est consacré à cette activité après avoir remporté un prix pour la poupée qu'il avait créée pendant ses études à 1'université, époque au cours de laquelle il a également étudié la peinture japonaise.
Les poupées de Hori sont de deux sortes. Les premières sont des objets artisanaux et traditionnels, les secondes sont des marionnettes de la taille d'un homme, et que l'on manipule sur la scène. Hori a notamment créé sa propre "danse des marionnettes", à laquelle il participe lui-même comme manipulateur. Le mouvement des marionnettes qui dansent tendrement et avec naturel diffère de la façon ordinaire d'utiliser n'importe quelle autre poupée.
Pour trouver la possibilité de nouvelles expressions scéniques des marionnettes, Hori développe ses activités théâtrales collaborant avec les genres les plus divers: Shingeki (le Nouveau Théâtre), Nô, Kabuki, Opéra. Créateur de poupées, il organise des expositions de ses oeuvres à différents endroits. Hori a été invité au Centre Lincoln à New York, en Europe, en Chine et en Australie, non seulement pour ses activités scéniques mais aussi pour ses expositions.
A partir de 1982 il s'est lancé dans la création de nouveaux kimonos "Hana-Usagi" (F1eur-Rapin).
Dessinateur de costumes scéniques, il crée de nombreux costumes de théâtre et aussi de cinéma.
Hori est également un spécialiste de la danse traditionnelle japonaise. Son maître, Tokuho Azuma, membre de l'Académie au Japon, l'a nommé maître de danse et lui a donné son nom "Gyokuho Azuma".
Le film de Masahiro Shinoda, Le dit du Genji-Ukifune, sorti en 1998 et dans lequel évoluent 47 marionnettes créées par Hiroshi Hori, est présenté comme un chef-d'oeuvre au musée Genji de la ville d'Uji à Kyoto.
HORI HIROSHI COMPANY
Le Dit du Genji - Kumogakure
Texte original: Shikibu Murasaki
Traduction des poèmes: Jakucho Setouchi
Adaptation, décors, chorégraphie et mise en scène: Maiko Hori
Création des marionnettes, costumes: Hiroshi Hori
Sélection de musique: Maiko Hori et Katsuo Seki
Art directeur: Norio Ishiguro
Lumière: Jun Ogasawara
Son: Katsuo Seki
Assistant du metteur en scène: Keiji Manako et Kumiko Ohashi
Chef des conservateurs de marionnettes: Katsue Iwamatsu
Maquilleuse: Naoko Hayano
Remerciement à monsieur: Kazumi Sakabe
Production: R.U.P. Takako Iwama et Hiroshi Hori compagnie
Avec:
Hiroshi Hori dans le rôle de Hikaru Genji et les marionnettes avec leurs Manipulateurs
Akashi no Kimi: Hiroshi Hori ("omozukai" premier manipulateur)
Toyotaka Azuma("wakizukai" deuxième manipulateur)
La fille d'Akashi no Kimi: Takafumi Satou
Murasaki no Ue: Keiji Manako
Les moines, les fraîcheurs de la nuit: Toyotaka Azuma, Keiji Manako, Takafumi Satou, Kumiko Ohashi, Takako Iwama
Supported by :
Tokyo Metropolitan Foundation for History and Culture
The Japan Foundation
Kyoto Yoshizen
Kyoto International Culture and Friendship Association
Sous les lumières de la scène, les yeux des poupées s'illuminent d'un éclat doré. Le monde flottant des rêves apparaît comme par enchantement. Une certaine transparence orientée vers le ciel transfigure les personnages du Dit du Genji. Inspiré par la peinture classique, le maître de cérémonie Hori Hiroshi transmet une énergie intense et délicate.
Comme l'eau épouse le lit de la rivière, le manipulateur ne faisant qu'un avec sa marionnette cherche à créer une chorégraphie unique, à la fois théâtrale et stylisée.
Ce spectacle aborde les rives d'une oeuvre classique japonaise dans un traitement contemporain. Cette adaptation libre de Hori Hiroshi et de son épouse Hori Maiko cristallise l'intemporalité et la modernité de cette incroyable histoire d'amour.
Jean-Luc Toula-Breysse
En écoutant les fleurs.
Les événements se déroulent pendant l'époque Heian. II y avait une femme qui aimait un homme et qui était aimée en retour. L'homme n'est plus de ce monde, il est parti laissant la femme aimée.
Comme souvenir de l'homme qui fut son amant, il ne reste à la femme qu'un vêtement - un kimono. L'homme est Hikaru Genji et la femme est Dame Akashi, plus tard connue sous le nom de Akashi-no-Ue que le Genji a rencontré pendant ses jours d'exil désespéré.
On ne sait pas combien de temps s'est écoulé depuis que l'homme est mort. Toujours attachée à sa mémoire, la femme remplit ses jours de souvenirs des moments passés avec son amant sous un cerisier. Cet arbre où les deux amants ont volé plusieurs moments n'existe plus, il n'est plus qu'une illusion dans l'esprit de la femme.
Il fut un temps où l'homme a exprimé ses sentiments à l'aide des branches fleuries. Comme si elle voulait écouter à nouveaux ses déclarations d'amour, la femme s'enroule jour après jour dans le kimono de son amant parmi les fleurs' et attend. C'était peut-être la seule manière qu'elle connaissait pour arrêter le temps et s'échapper de la réalité.
Peut-être que le souvenir des fleurs et de son amant qu'elle gardait vivant dans son coeur était le fil ténu qui la reliait encore à la vie.
Dans cette mise en scène, les poupées jouent le rô1e de Dame Akashi, Hikaru Genji est interprété par Hiroshi Hori lui-même. En tant que marionnettiste et acteur, Hori, tout de noir vêtu, manipule non seulement les poupées mais il joue aussi le rôle du fantôme du Genji qui est rappelé du royaume des morts pour passer de fugaces moments de félicité auprès de Dame Akashi sous le cerisier. Cette mise en scène est un moment de rare subtilité et d'élégance.
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1999-03-26
26-28 mars 1999
Yakshagana bombeyaata, marionnettes
Rangoli, Kolam, invocation graphique.
marionnettistes
Bhasker Kogga Kamath
Vishwanath Shanbhogue
Hemmady Dinaker Bhat
Mypadi Manjunath
narrateurs-dialoguistes
Narayana Billava
Rama Balegar
chanteur et musiciens
Shankar Narayana Shanbhogue
Nagoor Mahabaleshwar Shet
Halldy Mogera Shankara
tracé du kolam
Hemalatha Rao
coordination
Leela Upadhyaya
le yakshagana bombeyaata
Née au XVIIIe siècle dans le village du Kundapura, cette forme particulière de « chant des êtres célestes » s'appuie sur le même répertoire que celui des autres yakshagana ainsi que sur la musique et la danse, celle-ci étant exécutée par de grandes marionnettes de bois à fils, au lieu d'acteurs en chair et en os.
Cet art devenu presque moribond dans les années cinquante est revivifié par un homme, Devanna Padmanabha Kamath. Il initie son fils, Kogga Kamath (âgé aujourd'hui de soixante-et-onze ans), à la manipulation, la musique, la danse et la sculpture des poupées.
Grâce au Festival des Arts Traditionnels de Rennes qui, en 1978, invite la troupe de marionnettes et organise une tournée européenne, les modestes artistes ruraux reçoivent à leur retour dans le sud du Karnataka, des marques d'encouragement des autorités indiennes. Ils peuvent ainsi continuer à faire vivre cette tradition.
Les marionnettes sculptées dans deux bois de densités différentes mesurent entre quarante et soixante centimètres de hauteur. Leurs costumes, leurs ornements, leur maquillage sont les répliques de ceux du yakshagana bayalaata. Celui qui donne la vie aux poupées, le maître-marionnettiste (sutradhara) conte le récit par la parole et le mouvement. Un ensemble de musiciens l'aide à donner vie aux marionnettes qui dansent. Comme dans le yakshagana bayalaata, le baghavata dirige les joueurs de chande et de madale.
Les marionnettes se présentent sur une scène (rangasthala) encastrée dans des rideaux masquant les manipulateurs qui restent invisibles pendant toute la durée du spectacle. Celui-ci se déroule après le coucher du soleil, à proximité des temples ou bien dans les maisons de familles aisées qui contribuent ainsi à subvenir aux besoins des marionnettistes. Pendant la mousson, les marionnettistes travaillent dans les champs. Certains sculptent ou habillent des marionnettes. Avant de mourir, le père de Kogga Kamath fit venir son fils et ses amis villageois et leur dit : « Donnez à votre art le meilleur de vous-même. Il vous exaltera. Il vous montrera la valeur de la vie. Ne soyez pas mesquins et réclamez qu'il vous nourrisse et qu'il vous habille. »
La pièce, extraite du Mahabharata, s'intitule Narakasura (Histoire du démon Naraka).
Le Rangoli ou Kolam
Le terme rangoli ou kolam signifie "manifestation". Celle-ci peut-être gestuelle, musicale ou simplement visuelle. Dans l'État du Karnataka, le rangoli ou dessin symbolique tracé par une femme à l'aube, apporte à la famille et à l'entourage une bénédiction dont l'effet durera toute la journée. Equivalente à une prière, l'invocation graphique émanant à l'origine des entités féminines ambiguës (à la fois terrifiantes et apaisantes) des régions du sud de l'Inde possède la privilège de chasser les mauvais esprits hors de la demeure, où la femme rurale s'enfermera jusqu'au coucher du soleil. Sur le seuil de la maison, ou bien à l'intérieur, dans la pièce-sanctuaire où veillent les petites divinités de bois, d'argile ou de métal, la mère ou la grand-mère vont tracer avec patience, une série de motifs et d'entrelacs qui évoqueront pour tous ceux qui franchiront le seuil, le monde créé. Elles prennent un mélange de poudre de riz séché et pilé et de poussière de marbre blanc et entre le pouce et l'index, comme pour saler un met, elles laissent glisser une ligne fine et régulière qui se change en losanges imbriqués, en cercles concentriques, en pétales de fleurs étranges, en lune et en étoiles, en 'il de divinité, en chariot céleste, en serpent noués en seize, en huit ou en quatre etc' Le dessin blanc apparaît nettement sur la terre battue recouverte de la bouse de vache purificatrice.
La créatrice qui possède des schémas enseignés par les femmes de la famille, se recueille un moment puis, lorsque le jour est celui d'une cérémonie ou d'un fête de famille, elle ajoute des couleurs. Celles-ci, peu nombreuses (jaune, rouge et noir surtout) sont chargés de sens. Au cours de la journée, chaque adulte veille à contourner le dessin mais si les pieds nus d'enfants, les sabots ou les pattes d'animaux effacent les lignes savantes et brouillent les aplats de poudre, la bénédiction se trouve renforcée car le dessin se purifie et en outre, il danse.
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1998-11-25
25-29 novembre 1998
(Spectacle en français)
Maison des Cultures du Monde et le Théâtre de la Marionnette à Paris.
La compagnie
Yael Inbar et Revital Ariely ont fondé leur compagnie en 1994 et l'Histoire de Gertrude est leur première production. Par ses qualités et son originalité, ce spectacle a su s'imposer sur la scène locale, en Israël, où il n'existe pas de tradition de spectacles de marionnettes pour adultes. Par la suite, ses succès remportés à l'étranger ont confirmé l'internationalité de ce spectacle.
Revital Ariely a étudié la peinture et la sculpture à l'école Nationale des Beaux-Arts de Jérusalem, puis à l'Ecole de Théâtre Visuel. Elle a également passé un diplôme de scénographie, de manipulation et de mise en scène à Jérusalem.
Yael Inbar a commencé par la danse et a suivi les cours de la Bat Dor Dance Company. Puis, elle a obtenu un diplôme de manipulation, chorégraphie, jeu et mise en scène de l'Ecole de Théâtre Visuel.
HISTOIRE DE GERTRUDE
Quatre actes pour une marionnette qui s'empare de sa marionnettiste.
Premier acte
Une vieille dame et son gramophone
C'est l'histoire d'une vieille dame marionnette qui veut manger son unique 'uf en écoutant son seul disque sur un gramophone. Tout à coup, au lieu de la musique habituelle, le gramophone raconte une histoire de princesse qui veut l''uf.
Tout le corps de Yael Inbar, la marionnettiste, est réquisitionné par l'animation de la vieille dame. Les pieds manipulent la tête, les mains donnent vie à de minuscules personnages'
Deuxième acte
Dépossession
Une pièce chorégraphique pour une marionnette et une femme.
Troisième acte
Ishfaryunga
Tragédie en miniature où un personnage minuscule animé par les mains de la marionnettiste, recouvertes d'un gant et surmontées d'une petite tête fixée sur le poignet se bat contre des puissances qui le dépassent. Ce personnage ne se rend pas compte que les obstacles qu'il rencontre sont les membres du corps de la marionnettiste.
Quatrième acte
Le show de Gertrude
Il s'agit de la rencontre d'une marionnette cul-de-jatte, d'un certain âge, qui s'approprie les jambes de sa marionnettiste ; La fusion va très loin et la question d'identité se pose de façon troublante : est-ce une marionnette ou une femme ? Chef d''uvre de dextérité, cette dernière partie est le point culminant d'un spectacle qui a déjà une belle carrière internationale et qui a été la révélation du Festival de Charleville Mézière 97.
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1997-11-21
21-24 novembre 1997
par Gopalan Nair Venu
Gopalan Nair Ravi
Kavuthiyam Parambu Chamu Ramakrishnan, marionnettistes
Manipra Ramakrishnan, chanteur
Velayudhan Thankappan, tambourinaire
LE PAVA KATHAKALI DU KERALA
En langue malayalam, celle de l'État du Kerala dans le sud-ouest de l'Inde, katha signifie histoire, kali, jeu et pava, marionnettes ou poupées.
Lorsque les acteurs du fameux drame dansé du kathakali, créé au xviie siècle, vinrent se produire dans la région de Palghat cent ans plus tard, ils trouvèrent une forme de marionnettes à gaine, établie depuis plus de quatre siècles. Ces spectacles accompagnaient les cantillations bouddhiques et édifiaient les villageois en leur contant les vies de Bouddha. Plusieurs familles séduites par le kathakali s'emparèrent de cette forme, ainsi que de la musique et des costumes, et composèrent un spectacle de marionnettes interprété en malayalam et en tamil, ce qui le rendit rapidement plus populaire que le kathakali qui était joué en sanskrit, la langue des lettrés.
Comme toutes les formes spectaculaires du Kerala, le pava-kathakali se déroule pendant la saison sèche, de décembre à mars, entre les deux récoltes de riz. Aujourd'hui il ne subsiste plus qu'une seule troupe, celle de Irinjalakuda, dans les environs de Trichur, dirigée par Gopalan Nair Venu.
les marionnettes
La taille des poupées varie entre quarante et soixante centimètres. La tête et les bras sont sculptés par des artistes locaux dans du bois dur, puis peints et patinés. Ces trois parties de la marionnette sont réunies par de petits sacs de tissu. Les marionnettes ne possèdent pas de jambes, mais une grande crinoline de coton. Le marionnettiste assis sur le sol, manipule à vue, semblant suivre les mouvements et la respiration de la marionnette. Celle-ci, selon le caractère qu'elle représente, porte des bijoux, des perles, des boules de corail ou des plumes de paon.
les conditions du spectacle
Bien que le pava-kathakali ne possède aucun aspect sacré proprement dit, les artistes sont parfois invités à présenter le spectacle dans un village ou dans une maison familiale à l'occasion d'une puja ou action de grâce. En échange de sa prestation chaque artiste est nourri, reçoit un dhoti neuf et un peu d'argent.
Aucun dispositif scénique n'est nécessaire. Les manipulateurs prennent place sur le sol devant les musiciens. Ceux-ci jouent des mêmes instruments que dans le kathakali : le tambour à deux peaux chenda, frappé avec des baguettes, le gong chengila, les cymbales de cuivre ilatalam et, pour ouvrir le spectacle, l'un d'eux souffle dans une conque de nacre appelée shankh. Une lampe à huile est allumée, ainsi qu'il est d'usage dans tous les spectacles au Kerala, et le spectacle débute par une incantation à Ganapathi, le dieu à tête d'éléphant qui détient le pouvoir d'abolir les obstacles, et des remerciements au guru.
le répertoire
Comme dans le kathakali, les épisodes représentés sont puisés dans les deux grandes épopées de l'hindouisme : le Râmâyana et le Mahâbhârata. Mais ce sont surtout des fragments de cette dernière qui sont le plus souvent joués. Dès 1981, Gopalan Nair Venu se met en devoir de collecter les textes malayalam d'une tradition orale alors en plein déclin. Aujourd'hui sa troupe peut jouer une quinzaine d'épisodes.